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Fin XIXe, Etats-Unis, Jack London a 18 ans et n'est pas à proprement parler un débutant en matière d'aventures et autres péripéties: il n'a jamais connu son père, est placé en nourrice, ne suscite pas l'intérêt démesuré du nouveau compagnon de sa mère, choisit la rue, y fait sa place à coups (400 au bas mot) de frasques et délits. Comme il l'explique dans un autre ouvrage (John Barleycorn), il est quasiment impossible de tisser des liens dans ces groupes de garçons et de jeunes hommes sans passer par le comptoir d'un bar ou d'un bordel. Et c'est ainsi que, sans jamais avoir aimé le goût du whiskey, il est alcoolique dès l'âge de 14 ans. Plus ou moins par hasard, il embarque, d'abord avec des pêcheurs d'huîtres puis vers le Grand Nord ou le Japon. Il commence à écrire, gagne un prix, travaille à l'usine - où il remplace deux hommes et expérimente les limites de son corps...
Mais en cette fin XIX, les crises économiques débutent, et avec elle, un chômage de masse, sans protection sociale pour amortir les chocs. Patrons de grandes industries et gouvernement se mettent d'accord: les chômeurs seront employés à construire des routes à travers le pays. Jack London en sera, avec son ami Franck.
Ils voyagent en "hobboes", c'est à dire en vagabonds du train - pas DANS les trains mais entre les wagons, parfois sur les toits, où ils risquent la mort à chaque coup de frein. Franck abandonne, mais avant de partir offre à Jack un carnet vierge, qui sera le support de ce journal où il note son quotidien avec une précision impressionnante. Alors oui, sa vie est répétitive - j'ai lu des critiques qui reprochaient à ce livre d'être moins passionnant que d'autres, d'offrir moins de rebondissements. Certes, mais le simple témoignage des conditions de vie et de travail sur un chantier qui a participé à la construction de cet immense pays est passionnant en lui-même. C'est aussi le début de l'oeuvre de London - bien que le style soit concret et prosaïque - et qui inspire aujourd'hui des livres comme Into The Wild, une expérience de la route plus authentique à mon sens que celle de Kerouac par exemple (je vais me faire taper, je le sais).
Un seul hic peut-être: la traduction parfois un brin ampoulée de Tournier: il s'agit du journal intime d'un travailleur, certes écrivain en puissance, mais qui, à ce moment là, ne cherche pas à faire du style. Vouloir en ajouter tient du contre-sens.
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J'ai été bluffée par ce petit livre, format exact du carnet noir que Jack London a rempli en 1894.
Mort à 40 ans en laissant une oeuvre déjà considérable, il fut un voyageur hyperactif, prêt à découvrir et à embrasser le monde.
Ce carnet de notes, retrouvé récemment, permet de découvrir les premières lignes d'un garçon de 18 ans qui a les yeux grands ouverts sur l'aventure.
J'ai été bluffée car bien que s'agissant de quelques lignes écrites quotidiennement pendant 2 mois, on est rapidement plongé dans d'incroyables aventures. La descente en bateau du fleuve Des Moines et du Mississipi est particulièrement jouissive!
Voilà qui préfigure tout le talent du futur écrivain!
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Étonnant récit de jeunesse, se rapprochant des reportages sociaux de London, tel que le peuple des abysses. L'humour, la désinvolture et l'empathie pour les figures croisées, dressent un tableau vivant de la fin du XIXe siècle aux États-Unis. On y découvre les duretés du vagabondages, les petites joies aussi, la misère sociale. Sans doute que London exagère, enjolive par endroits, portés par des élans lyriques, mais sa sincérité emporte et désarme le lecteur. On assiste peut-être à la naissance d'un écrivain charmeur et profondément ancré dans son époque.
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LA LONGUE ROUTE

Nous sommes en 1894.
La jeune nation américaine connait la première vraie crise économique de son histoire, parfaitement comparable, en terme de dégâts financiers et surtout sociaux, à celle de 29. On compta alors jusqu'à trois millions de sans-emplois, paysans ruinés, artisans et entrepreneurs ayant tout perdu, vagabondant sur les routes américaines, trimardant, pour reprendre le terme de cet ouvrage -pour une population d'alors à peine supérieure à celle de la France d'aujourd'hui...! -, à la recherche du moindre petit boulot, survivant d'expédients et d'espoirs souvent déçus.

A l'époque, Jack London n'a encore que 18 ans mais il a déjà vu, expérimenté plus de choses que beaucoup n'en vivent en une vie entière ! Il a vécu dans plusieurs ranchs en compagnie de son beau-père qui y travaille et dont il tient le nom l'ayant adopté, ainsi que de sa mère qui le délaisse, ne l'ayant jamais vraiment aimé. Il n'a jamais connu son père biologique...

A 14 ans, il obtient son certificat d'étude mais la famille étant trop désargenté, il lui est non seulement impossible de poursuivre ses études mais il lui faudra commencer à travailler pour bouillir la marmite. Ce sera d'abord dans une conserverie ou il s'abrutit douze heures par jours pour un salaire de misère. Ayant pu s'acheter une petite embarcation grâce à sa chère nourrice noire, il quitte cet enfer pour devenir pilleur d'huîtres, ce qui lui permet à la fois de gagner beaucoup plus d'argent et de découvrir l'alcool. Il n'a que 16 ans. Et cet autre enfer, il le racontera dans son étdifiante biograhie "John Barleycorn". Après que son sloop eut totalement brûlé, il s'engage dans "La patrouille de pêche" (autre ouvrage né de ses souvenir). Puis s'engage sur un navire partant vers la mer du Japon pour a chasse aux phoques, publie sa première nouvelle à son retour, se retrouve de nouveau à trimer pour des salaires de misères dans une fabrique de toile de jute, dans une usine électrique, ou il accomplit la tâche de deux ouvriers licenciés. Abandonnant ce poste le jour où il apprend qu'un des deux ouvriers s'est suicidé suite à son licenciement, London ne retrouve pas de travail. Il a donc 18 ans, et déjà une vie derrière lui.

Nous sommes alors en plein dans cette crise d'une ampleur sans précédent durant laquelle un travailleur sur quatre perdra son boulot !

Le 6 avril de cette année 1894, Il rejoint le détachement de San Francisco d'une "armée industrielle", pacifiste, constituée de cent mille chômeurs (lancée par Jacob Coxley et commandée par le « général » Kelly) qui marchent sur Washington pour contraindre le Président à financer un vaste programme de travaux publics. La marche se fait à pied, puis en radeaux improvisés pour la descente du Missouri. le trajet s'effectue aussi souvent en chemin de fer, sur des trains « empruntés » par les marcheurs... ou loués à leur intention par des villes pressées de les éloigner. Au cours de cette aventure, le jeune individualiste débrouillard se convertit au socialisme.

C'est donc cette marche pour le travail que nous pouvons découvrir, presque pas à pas, tandis que Jack London griffonne ses notes sur le carnet que lui a offert Frank, le camarade qui l'a accompagné au début de cette aventure, mais qui a perdu la foi dans cette vie de "brûleur de dur".

Nous sommes encore bien loin de la littérature à laquelle Jack London va s'adonner -pour notre plus grand émerveillement- durant les quelques vingt-deux années qu'il lui reste à vivre. Mais quelle émotion cependant de respirer, de rire, de souffrir, de se fâcher parfois, de s'émouvoir souvent en compagnie de ce jeune homme, génie en herbe, découvrant tout à trac les souffrances humaines et son immense générosité lorsque l'existence ne laisse aucune autre échappatoire que la survie ou la mort.

De ce carnet de souvenirs rédigés à chaud, il fera un texte fort, intitulé La route" et dont un autre Jack -Jack Kerouac- se serait inspiré pour son roman de toute une génération "Sur la route".

Au bout de cette errance d'environ six mois, ce sera d'abord une belle rencontre, sa tante, Mme Mary Everhard de Chicago, dont il donnera le nom au "héros" de son grand roman dystopique et politique, "Le talon de fer" ; ce sera ensuite un mois d'enfer passé dans les geôles du comté d'Erié, souvenir doublement cruel car il y fut enfermé pour simple vagabondage au cours d'un procès sans défense possible. En sortira l'un de ses plus beaux textes (l'un des plus fantastiques aussi) :"Le vagabond des étoiles".

Ainsi, la boucle sera bouclée avant que puisse prendre enfin la légende, avec son grand voyage au Klondike et la célébrité chèrement acquise.

Il n'empêche que ces carnets, très récemment redécouverts et traduits en français pour la première fois ici sont, rétrospectivement, extrêmement émouvant pour tout lecteur passionné de l'oeuvre et de l'existence tumultueuse du californien dont on vient de commémorer le premier centenaire de la disparition.

En revanche, on peut, ainsi que le fait EffeLou dans sa critique, s'énerver du caractère souvent ampoulé de la traduction qui, tour à tour, respecte convenablement le texte dans ce qu'il a de cru pour, à d'autres moments, quasiment réinventer les notes de London dans un style très "écrit" qui n'est pas du tout le sien à cette époque. Par chance, ce très joli petit livre (malheureusement épuisé à cette heure) édité chez Tallandier sous la forme d'un carnet de notes, est en édition bilingue et d'un niveau d'anglais relativement lisible, en dehors de quelques mots et expressions techniques.

PS : L'inconditionnel de London qu'est votre lecteur ne peut mettre autre chose que 5/5 à ce texte... Qui a, cependant plus, à voir et à comprendre comme un document rare, quasi ethnologique, touchant et éloquent d'un écrivain en herbe. Il ne pourra, très probablement, qu'ennuyer ou décevoir le lecteur cherchant à retrouver le London de "L'appel de la Forêt", de "Croc-blanc" ou de "Martin Eden".

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Jack London, auteur le plus lu en France. Je peux vous l'avouer, je découvre sa plume avec ce texte 🙈. Et pourtant, en librairie je les zieutais, sans pour autant sauter le pas. Quand Libretto m'a proposé ce Carnet du Trimard j'y ai vu l'occasion d'enfin le découvrir.

J'ai particulièrement apprécié la préface de Jennifer Lesieur, à l'origine de la première biographie française de l'auteur, qui nous explique comment elle a exhumé ce texte, tout en nous délivrant quelques éléments biographiques sur London. Si vous êtes comme moi , et que nous ne connaissez absolument rien sur l'auteur vous allez apprécier. Cela permet de contextualiser la période du texte.

Alors que raconte-t-il ce Carnet du Timard ? Nous sommes en 1894, Jack London a dix-huit ans. La crise économique touche le pays et des millions d'Américains se retrouvent au chômage. le gouvernement de l'époque botte en touche, et ce sont les industriels qui proposent des solutions avec notamment la construction de routes à travers tout le pays, de quoi fournir du travail pour tous. Des « armées » de chômeurs se forment alors, des marches de protestation qui se dirigent vers Washington pour demander au gouvernement d'agir. Jack London intègre l'armée de l'Est, celle du « général » Kelly, qui part de San Francisco. Ce texte raconte alors son voyage d'Ouest en Est, en tant que vagabond des trains, souvent au péril de sa vie. En effet, il saute dans les trains en marche, voyage au-dessus des wagons ou même entre les wagons. Plus loin qu'un carnet de voyage, c'est une radiographie de la société de l'époque.

Il faut savoir que ses écrits n'étaient pas destinés à être lus.Nous sommes sur du reporting et des pensées sur l'instant. Des textes courts, factuels et prosaïques, écrits quasiment chaque jour depuis ce départ de la gare d'Oakland le 6 Avril 1894 avec son ami Frank. Ce n'est pas tant le côté politique qui intéresse le jeune Jack, mais plus l'aventure, cette occasion de voir du pays et de rencontrer de nouvelles personnes.

Le plus de cet ouvrage : la version originale proposée en parallèle de la traduction de Jacques Tournier ( la team VO du café du classique appréciera)
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En 1894, Jack London n'a que 18 ans lorsqu'il rejoint l'armée de Kelly. Un rassemblement de chômeurs et de vagabonds, que la précarité provoquée par une violente crise économique - préfigurant la future crise de 1929 - a poussé sur les routes. Cette longue marche partant de Californie, et visant à aller demander des comptes à Washington, va être formatrice pour le futur écrivain et militant socialiste.

Autant le poser d'entrée : ce court texte ne s'apprécie pas pour ses qualités littéraires. À aucun moment, il peut servir de porte d'entrée pour apprécier la plume de l'écrivain. On orientera plutôt les nouveaux lecteurs vers les ouvrages emblématiques de l'auteur (romans, recueils de nouvelles), mais c'est un document fantastique pour quiconque connaît et s'intéresse aux engagements politiques de Jack London. Ils s'incarneront plus tard dans des ouvrages tels que « le Talon de Fer » ou « le peuple d'en bas ».

Un objet limité dans sa portée littéraire, mais qui souligne déjà une habitude chez l'écrivain, d'annoter avec l'oeil du sociologue ou du journaliste, les événements et pensées du moment. Les prises de notes quotidiennes ne peuvent éviter certaines redondances (la fatigue, la faim) mais révèlent chez ce jeune homme, déjà, un sens inné de la débrouille ainsi qu'une conscience aiguë des rapports de classes.
Par ailleurs, c'est un format qu'il utilisera durant toute sa vie d'écrivain/journaliste, et qu'il préconisera aux jeunes écrivains en devenir.

Enfin, il est intéressant de se pencher sur le contexte de la découverte de ce carnet par Jennifer Lesieur - auteure d'une biographie de Jack London aux éditions Libretto. L'intérêt et l'engouement, que nous portons dans l'hexagone pour l'auteur américain, ne sont semble-t-il pas les mêmes outre-Atlantique et dans les pays anglo-saxons. Ce qui rend la recherche d'inédits exploitables plus difficile, et donne par conséquent à cette nouvelle publication une aura d'exclusivité.
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C'est donc un périple incroyable auquel nous sommes conviés avec ce livre, resté longtemps inédit en France et découvert en 2012 par Jennifer Lesieur, qui prépare alors une biographie de l'auteur. Jack London, qui n'a alors que 18 ans, et qui n'a pas encore découvert lui-même sa vocation de romancier. Il écrit quelques articles et des nouvelles entre 1896 et 1897, mais ses oeuvres majeures ne seront publiées qu'au début du XXe siècle, à commencer par L'Appel de la forêt, paru en 1903.

C'est donc à la suite d'un Jack London « aventurier de la liberté » que l'on s'embarque en ouvrant cet ouvrage, qui saute dans les trains en marche, se cache sur les toits des wagons pour échapper aux équipes des compagnies ferroviaires, qui voit veste et manteau s'enflammer quand des escarbilles lui tombent dessus à l'occasion d'un de ces périples. Et toujours, la mort peut être au bout du chemin, mais également la bonne surprise d'un moment partagé avec un Suédois, un Allemand, un autre Jack, compagnons de route, de galère, d'aventure.

Écrit comme une suite de notes, le style tendu donne un sentiment d'urgence, de plongeon dans le temps présent. Mais, il faut bien le dire, la traduction de Jacques Tournier n'est pas sans me poser quelques questions. J'ai vu, de ci, de là, que certains reprochent à ce dernier un style trop emphatique. Ce n'est pas tant cela qui m'interpelle, que le choix – visiblement assumé, et, après tout, « traduire, c'est trahir » (traduttore, traditore) a dit Joachim du Bellay -, de modifier le temps du récit.

En effet, les Éditions Libretto donnent en parallèle le texte d'origine en anglais, plutôt accessible, et cette version traduite, donnant l'occasion de comparer. Et là où Jack London déploie son récit en anglais, relatant les événements qui se sont déroulés les jours précédant, la traduction est faite en passant l'essentiel du récit au présent. Mais l'effet produit n'est pas le même, amenant le traducteur à certains moments à présentés des faits qui, dans le texte de Jack London, se sont effectivement produits, comme des possibilités encore hypothétiques. Ainsi, page 97, il me semble que le texte est relativement différent entre « Je vais aller sonner chez ma tante Mary, qui habite à un mile et demi de la ville, et j'y serai bientôt reçu à bras ouverts » et l'original, qui dit « I found Aunt Mary lived a mile & a half from town, but I was soon there receiving a hearty welcome » (proposition maison qui ne vaut que ce qu'elle vaut : Ayant découvert que tante Mary vivait à un mile et demi de la ville, j'y parvenais rapidement et recevais un accueil chaleureux).

De la même façon, certaines énumérations sont modifiées, et dans leur ordre, et dans le nombre d'objets. Là aussi, un exemple, la phrase originale est « The saloons were all full, & poker, stud horse, faro, craps & roulette were all in full blast », devenue « Les saloons étaient archicombles. On y jouait au poker, au pharaon, à la roulette, aux dés et la fête battait son plein » (page 44). Passons sur le découpage en deux phrases. Mais pourquoi rassembler, même si ce sont deux variantes de poker, poker et stud horse ? Pourquoi la roulette précède-t-elle le craps, devenu juste « on jouait aux dés » ? Et pourquoi ajouter cette idée de fête alors que, de ce que je comprends de cette phrase, ce n'est pas tant la fête, mais les jeux, qui avaient la faveur des participants ?

Bon, ce n'est pas l'essentiel, mais c'est tout de même assez marquant. Même si cela ne change rien à l'intérêt de ce livre ! Alors, prêts à essayer d'échapper à la surveillance des équipes pour vous faufiler sur le tender, le chasse-pierres ou le toit d'un wagon d'un express qui s'élance pour traverser les États-Unis ?

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