Au sujet de ce livre, j'hésite entre une chronique "5 étoiles" et une chronique "1 étoile"... d'où mon choix du chiffre moyen de 3 étoiles, avec deux chroniques. C'est parti pour le match !
Cinq étoiles : mais quelle idée magnifique ! Faire connaître les légendes de nos régions sans les raconter une n-ième fois, mais en demandant à de jeunes auteurs de s'appuyer sur elles pour produire un texte original, bien sûr, c'est "la" bonne idée qu'il faut développer. Ainsi, elles restent vivantes.
De fait, quand j'ai repéré ce livre dans le flot de la Masse critique "mauvais genres" (au passage, je remercie Babelio et les éditions Luciférines pour leur envoi), j'ai été attirée par le parfum d'enfance qu'a pour moi tout ce qui touche à ma Lorraine natale. Et, au fil des quatre nouvelles qui composent le recueil, c'est encore plus que d'un parfum d'enfance qu'il s'agit, finalement : c'est successivement de la convocation d'une légende qui est à la fois au fond de mon inconscient et de mes souvenirs (Saint-Nicolas et le père Fouettard) ; de l'histoire de la bête des Vosges, qui a sévi à peu près quand j'ai atteint l'âge de raison, dont je ne savais pas quel degré de réalité elle avait ; de la redécouverte d'un monument incontournable de Nancy, l'église Saint-Epvre, mi-effrayante avec sa couleur très noire quand j'étais enfant, mi-magnifique avec son style très gothique ; et d'une légende du fond des âges, celle de la Mesnie Hellequin, qui était peut-être dans la strate collective de mon inconscient et dont je n'ai découvert l'importance qu'en lisant
L'armée furieuse de
Fred Vargas, à l'âge adulte.
Et puis les nuits lorraines, cela évoque les veillées qui, paraît-il, étaient les soirées télé de nos ancêtres mais en mieux, en groupe, dans la chaleur humaine et celle de l'âtre. Toutes les conditions étaient réunies pour que je savoure ce très court livre, et je me demandais à quelle surprise je m'exposais... cela a été celle du choix du fantastique : chaque histoire a un ressort fantastique, suffisamment léger pour qu'on puisse se demander quelle est la part de la réalité et quelle est celle du fantasme. Quelle est celle de la folie, aussi. Je vous recommande tout particulièrement d'attendre la dernière phrase de "Bête", qui fait chuter l'histoire d'une manière particulièrement réussie. Alors pour tout cela, oui, je recommande vraiment la découverte de ces "contes et légendes" revisités.
Une étoile : quel dommage, l'idée était excellente et la réalisation passe à côté du sujet... D'abord, les livres dûment édités à compte d'éditeur avec de nombreuses fautes d'orthographes, de conjugaison (vous saviez, vous, que les verbes rejoindre ou vendre étaient du premier groupe ?), de concordance des temps, sont forcément suspects, hélas. On est obligé de se dire que l'étape de la relecture éditoriale a été supprimée pour quelque mystérieuse raison, et on se demande fatalement quelle autre étape a bien pu être court-circuitée avec elle... Ensuite, les histoires et légendes sont revisitées, c'est vrai, mais avec des méchants bien méchants, du sang bien sanglant, des irruptions bien éruptives, et bien peu de nuances, finalement.
Alors on refait le match ? Une, ou cinq ? J'ai bien envie de me laisser séduire par les arguments 5 étoiles, et de rétorquer à la voix qui me souffle des bémols que le public visé par l'ouvrage est peut-être plutôt celui des jeunes adultes, que je ne suis pas une amatrice de fantastique et ne suis pas à même de comprendre les subtilités de ce genre, que les contes et légendes sont justement faits pour planter des archétypes et que ces derniers ne sont ambigus que s'il s'agit de l'archétype de l'ambiguïté. D'accord, d'accord... restons sur l'impression "5 étoiles", alors. Mais sans garantie que d'autres lecteurs ne soient pas aussi perplexes que moi (même une fois que les fautes d'orthographe auront été corrigées).
Bilan : franchement, si je conclus cette chronique en appelant à d'autres avis, c'est vraiment parce que j'aimerais en lire, et, de préférence, qui soient différents du mien. 80 pages, une demi-heure de lecture, quelques euros (même une fois que le black friday sera passé) : qui se lance ?