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Critiques filtrées sur 3 étoiles  
Je ne sais pas trop quoi penser de ce roman. Ca ne ressemble pas aux nouvelles de Mahfouz que j'avais pu lire auparavant, et qui, si elles concernaient l'histoire contemporaine de l'Égypte, racontaient l'évolution de sa société par petites touches. Ici, Mahfouz s'est attaqué à dénoncer les dérives de la révolution de 1952, et plus précisément les atrocités commises par la police politique de Nasser, et il a choisi une narration plus frontale que dans Matin de roses, par exemple.


En 1966 (d'après mes calculs), une ancienne danseuse très populaire tient le Karnak Café, où se retrouvent des habitués de tous âges, dont trois étudiants. le narrateur, un homme qu'on imagine de l'âge de Naguib Mahfouz (disons la cinquantaine), fréquente ce café et nous raconte une petite partie de son histoire, qui se concentre sur quelques mois, jusqu'à la fin de la guerre des Six-Jours. Les habitués du Karnak Café vont voir les trois étudiants mentionnés plus haut disparaître et réapparaître - ou pas - plusieurs fois après avoir été arrêtés et relâchés - ou pas - par la police politique. le narrateur donne la parole à la patronne du café puis aux deux étudiants survivants (vu qu'ils ne sont plus que ça, des survivants, après leur passage en prison).


On pourrait dire que c'est l'histoire d'une génération qui a grandi avec la révolution, en a épousé l'idéologie et en a payé le prix fort. Ou on pourrait dire - ce qui me paraît plus juste - que c'est la constatation d'un échec, d'une impasse de laquelle la société égyptienne ne sait pas comment sortir.


Il m'a semblé que Mahfouz s'était demandé comment parler des tortures et autres violences subies par ses personnages sans que le roman ne vire complètement dans le glauque. D'où, peut-être, ce sentiment que les conversations rapportées du narrateur avec les trois personnages principaux avaient quelque chose d'un peu artificiel. Et surtout, le choix de faire intervenir un dernier personnage sur la fin me laisse songeuse. Je n'ai pas très bien compris que ça apportait au roman. Sans compter une conclusion bien optimiste après la description de l'horreur de la prison et des questionnements qui agitent sans relâche les habitués du Karnak Café.


Ca reste un témoignage assez poignant sur ce moment de l'histoire contemporaine de l'Égypte, que personnellement - je m'en rends compte davantage à chaque fois que je lis Mahfouz - je connaissais très mal avant de découvrir cet auteur.
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Je suis arrive a la conclusion qu'il faut avoir une grande PAL. C'est signe d'un certain optimisme. Et si la Grande Faucheuse vient visiter on peut toujours lui proposer et lui preter un livre depaysant et demoniaque qui l'entretiendra pour un certain temps. Je connais beaucoup de gens qui se sont laisses prendre a une lecture conseillee. Pourquoi pas elle?

Tout ca c'etait pour dire que j'ai mis Naguib Mahfouz dans ma PAL. Comme a mon (a ma mauvaise?) habitude j'ai commence par quelque chose de court et pas tres contraignant, histoire de voir s'il m'appate vraiement, le café karnak.

Ce livre ne m'a pas enthousiasme. Ce n'est pas a mon avis de la grande literature. C'est nonobstant une preuve de courage. Courage civique et politique. Mahfouz y denonce les derives du regime (socialiste?) Nasserien, fruit de la revolution, en fait du coup d'etat militaire de 1952. Mahfouz a ecrit ca fin des annees 60 et le livre a ete publie en Egypte dans les premieres 70. le regime a eu le temps d'assoir son pouvoir et de s'y complaire, jusqu'a justifier (comme partout ailleurs?) des moyens coercitifs (c'est un mot tendre) par une fin personnelle affichee comme ideologique.

Mahfouz nous entraine dans un café du Caire, tenu par une ancienne danseuse encore bien de sa personne. Pas un grand café. Mais un cafe par ou passe l'amitie, l'amour, la vie, la moralite, la societe et l'histoire d'un pays en temps de changements, de crise. Peu de clients, mais assidus, aiment s'y retrouver. Quelques vieux qui jouent au tric-trac en sirotant un narguile, quelques soupirants, amoureux de la tenanciere, un petit groupe de jeunes etudiants. Et Mahfouz ou son alter ego, qui sert a nous transmettre les pensees et les confessions de ces habitués. Pour les vieux, le passé, du temps des anglais et du roi Farouk, n'etait pas si mauvais que ca. Les jeunes, eux, s'affirment des "enfants de la revolution". Quand ceux-ci disparaissent pour des periodes plus ou moins longues, on commence a entrevoir le dur visage de cette revolution. L'inquietude, la peur, prennent place au café. On apprendra plus tard qu'accuses a tort et sans raison de faire partie de cellules contre-revolutionnaires ou d'accointances avec les "frères musulmans", ils ont ete arretes, emprisonnes, tortures. Un d'eux y trouvera la mort, assassine en torture.

L'auteur ne juge pas ses personnages ni leurs dires ni leurs actions. En fin de livre il donne la parole a un des sbires, peut-etre repenti, qui a lui meme ete en fin de compte arrete et emprisonne, et qui developpe une vision de la societe legerement fataliste. En fait chaque personnage developpe sa propre vision, ce qui donne quelque chose de caleidoscopique. Mais cette oeuvre reste un acte d'accusation clair et fort. Mahfouz n'en a pas pati. Il etait deja la figure qui dominait le paysage litteraire egyptien. Encense par tous, il etait pratiquement intouchable. Ce seront justement les Freres Musulmans qui le poursuivront plus tard, forcant le regime (ce sera deja l'ere Moubarak) a lui coller des gardes du corps.

Tout ca dit, j'ai pris ce livre en mains en tant qu'oeuvre litteraire, comme un roman et pas comme un ouvrage d'histoire ou de sociologie. de ce point de vue je n'ai pas ete transporte. Legere deception. Il faudra que je m'attaque a sa trilogie du Caire, qui de l'avis de tous est d'une autre qualite. Trois etoiles quand meme.
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J'ai eu plus de mal à franchir le seuil du Karnak café que de pénétrer dans l'immeuble Yacoubian (Alaa El Aswany) bien que ces deux sites ont été, par la force de ces écrivains, les creusets de la vie sociale, économique et politique de l'Egypte post-révolutionnaire.

L'hospitalité égyptienne légendaire n'en est pas la cause, plutôt la teneur du propos axé principalement sur la politique et la répression du récent régime socialiste Nassérien.

Au travers d'une ancienne gloire de la danse toujours séduisante, propriétaire du Karnak café, Naguib Mahfouz nous entraîne dans les tourments des habitués de l'établissement allant des vieux amoureux transis de la Qurunfala aux jeunes étudiants « enfants de la révolution ».

L'atmosphère s'assombrit et devient dramatique lorsque ce microcosme est chamboulé par les multiples arrestations des universitaires.
S'ensuivent questions et supplices qui contraignent à la délation et à la corruption.
Certains se feront indicateurs pour éviter à d'autres, par amour ou amitié, d'atroces tortures.

Cette critique acerbe sur le régime en place est ma première découverte de cet écrivain, prix Nobel de littérature. Je m'attendais à une écriture plus prenante, plus attachante.
Est-ce dû au sujet aride et sévère qui défend toute fantaisie, toute poésie?

J'imagine que ce roman ne doit pas être une oeuvre majeure de Mahfouz, sûrement écrit pour dénoncer les déficiences d'un régime balbutiant qui devait avoir peur de lui-même.

Extrait :
- le véritable ennemi des Arabes ce sont les Arabes eux-mêmes.
- Leurs dirigeants, tu veux dire ?
- Ou plutôt, leurs gouvernements !
- Tout repose sur l'union des peuples arabes et leurs efforts conjugués.
- Il faut tout reprendre de l'intérieur, c'est la seule issue.
- Parfait ! Revenons à la religion ! la religion, c'est tout !
- Revenons plutôt au communisme.
- Non ! A la démocratie.
- Pour que les Arabes ne soient plus sous tutelle.
- Liberté ! Liberté !
- Revenons au socialisme.
- Commençons par la guerre, les réformes suivront.
- Non, commençons par les réformes. Les solutions viendront d'elles-mêmes.
- Les deux doivent aller de pair…Et ainsi de suite…A l'infini.

Infiniment édifiant.
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J' ai été un peu décontenancée par ce livre qui s'achève au moment où il commençait à me passionner vraiment, d'autant qu'il m' a fallu me replonger dans l'histoire de l'Egypte moderne pour en comprendre vraiment toutes les implications. L'auteur, qui fut par ailleurs victime d'un attentat au moment de son engagement en faveur de la paix egypto-israélienne, dénonce avec acuité les méfaits du gouvernement Nasser ; sa plume acérée et sa capacité à cibler de façon assez foudroyante ce qu'il met en cause, les sources de la révolution et ses excès, (mais comme dirait Jean d'Ormesson on ne fait pas d'omelette sans casser les oeufs...), font de ce court texte un manifeste assez virulent contre toute forme de violence et un témoignage des difficultés de l'Egypte à s'adapter au monde moderne. J'ai beaucoup aimé l'idée aussi de situer l'action dans un café, lieu public par excellence et donc témoin de toutes sortes d'existences, qui donne à la violence politique une sorte d'anonymat qui la rend universelle.
J'ai regretté toutefois au niveau de la forme que les idées énoncées et les différents récits ne s'imbriquent pas toujours très bien les unes aux autres donnant par moments une impression d'incohérence.
Cela dit je lirai certainement d'autres livres de Mahfouz, que j'ai découvert avec beaucoup d'intérêt.
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Je suis entrée très facilement dans ce court roman : Naguib Mahfouz a le don de nous transporter en quelques mots dans la vie du Caire et, ici, d'un de ses cafés. Tenu par une ancienne gloire de la danse orientale, c'est le repaire de quelques retraités et d'un groupe d'étudiants notamment. Connaître un minimum le contexte historique peut ici faciliter la lecture, mais on peut aussi s'en passer, les lendemains de révolution et les exactions qu'ils entraînent étant malheureusement intemporels et universels. Si la langue est superbe, les dialogues manquent de naturel, et la relation entre Qurufuna et Hilmi m'a parue superflue. Je me suis donc laissée bercer par la beauté des phrases, sans être touchée par le triste sort de ces jeunes gens. S'il n'avait pas été aussi court, j'aurais sans doute abandonné cette lecture en demi-teinte.
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Naguib Mahfouz (1911-2006) est un écrivain égyptien de langue arabe et un intellectuel réputé, couronné du prix Nobel de littérature en 1988. Né dans une famille de la petite bourgeoisie cairote, il fait des études de philosophie à l'université, commence à écrire à l'âge de 17 ans et publie ses premiers essais d'écriture dans les revues littéraires des années 1930 avant que ne paraisse sa première nouvelle en 1939. Karnak Café date de 1974 pour la traduction.
Au Caire dans le milieu des années 1960, dans le café Karnak que gère Qurunfula, une ancienne vedette de la danse du ventre, le narrateur fait la connaissance de trois étudiants : Hilmi, Ismaïl et Zaynab. le premier est l'amant de la gérante, et les deux autres, amis d'enfance, s'aiment tendrement. Tous les trois se considèrent comme des enfants de la révolution de 1952 (Rappel : La Révolution égyptienne de 1952 a commencé le 23 juillet 1952 avec le coup d'Etat du Mouvement des officiers libres dirigé par Mohammed Naguib et Gamal Abdel Nasser, pour renverser Farouk Ier, et en finir avec l'occupation par le Royaume-Uni) et défendent ardemment ses principes et ses réalisations. Mais un jour ils sont arrêtés par la police politique qui les suspecte d'appartenir au mouvement des Frères musulmans…
Roman très court et huis-clos, découpé en quatre chapitres mais pour moi il y a deux parties. La première nous présente ce petit café de quartier où il fait bon boire et discuter, « Nous fuyions notre solitude en nous retrouvant au Karnak, comme si nous esquivions les coups du sort en nous serrant les coudes, et échappions au vertige des hypothèses en échangeant nos opinions », fréquenté par des retraités, des commerçants et quelques étudiants. Nous découvrons les personnalités des uns et des autres, fruit des observations du narrateur – jamais nommé et dont nous ne saurons jamais rien, un avatar de Naguib Mahfouz peut-être ? Puis il y a la guerre (perdue) avec Israël (juin 1967, la Guerre des Six-Jours « qui n'opposerait pas seulement les Arabes à Israël, mais aussi les Arabes à eux-mêmes ») et les premières disparitions des étudiants durant plusieurs semaines, répétées plusieurs fois sans que l'on sache vraiment ce qui se passe. La seconde partie nous en révèle les causes et les conséquences dramatiques par les témoignages d'Ismaïl et Zaynab, emprisonnés par le pouvoir et torturés, vivants mais à quel prix ? Ou bien assassiné dans le cas d'Hilmi.
le texte s'achève sur une sorte de coup de théâtre avec l'improbable entrée dans le café, de Khalid Safwan, le geôlier et bourreau des étudiants, devenu à son tour l'opprimé et qui s'en explique, comme pour boucler temporairement la boucle d'une époque, celle de l'Egypte de Nasser. On devine l'écrivain pessimiste et amer et son roman, écrit en 1971, considéré comme un pamphlet, aura un retentissement conséquent dans son pays.
Roman historique et politique qui d'un côté reste un témoignage fort et puissant sur une époque mais qui, à être lu aujourd'hui, oblige à un effort de mémoire (ou de recherches) pour se remettre les faits en tête. Pourtant, si l'on se détache du contexte historique et factuel précis relaté ici, les faits et les gestes des personnages restent reproductibles à l'infini et peuvent s'appliquer encore et toujours à l'Egypte ou à ses voisins plus ou moins lointains…

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Relecture récente de ce court roman qui brosse le portait de jeunes étudiants confrontés aux bouleversements politiques en Égypte apres la révolution de 1952.
L'univers est restreint au Karnac café où l'histoire est vue par le narrateur qui sans le savoir/vouloir va decouvrir ce petit monde où le passé, présent et futur s'entremêlent pendant cette periode trouble.
Malheureusement, je n'ai pas trouvé de souffle à ce roman qui reste très froid malgré le sujet plutôt brulant...
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