AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,73

sur 2855 notes
Ayant vu la version cinématographique de Claude Miller il y a quelques mois, il était bien temps de découvrir l'oeuvre originale de François Mauriac, publié dans les années 20. Malheureusement le problème est que j'ai été influencée par le jeu des acteurs incarnant les personnages, en particulier Audrey Tautou en Thérèse Desqueyroux. J'avoue qu'après avoir vu le film, je trouve que le choix de ce personnage essentiel fut particulièrement bien fait, Audrey Tautou incarnant bien toute la fragilité, les démons intérieurs de Thérèse.

Mais qui est donc cette Thérèse qui a donné son nom au roman ? Projetons dans le Bordelais au début du XXe siècle. Nous voilà dans le fief des Desqueyroux. La libre Thérèse a épousé l'ennuyeux Bernard Desqueyroux, voisin de l'immense domaine familial. Deux familles de la bourgeoisie bordelaise, destinées à s'unir pour agrandir leurs domaines : « Tout le pays les mariait parce que leurs propriétés semblaient faites pour se confondre. »

Malheureusement pour le pauvre Bernard, Thérèse est une femme résolument moderne, née trop précocement alors que la société qui l'entourait n'était pas prête à accorder la liberté à laquelle elle aspire. C'est une femme d'une dureté terrible à l'extérieur, mais d'une fragilité intérieure extrême. C'est une femme qui sait ce qu'elle veut – garder ses pins, vivre sa vie – et ce qu'elle ne veut pas – être assujettie à un mari, et pire, à la famille de son mari : « le lycée, au-delà de mon temps d'épouse et de mère, m'apparaît comme un paradis. Alors je n'en avais pas conscience. Comment aurais-je pu savoir que dans ces années d'avant la vie, je vivais ma vraie vie ? »

Femme lettrée, sans cesse plongée dans ses livres, elle s'opposera à cette même famille et à ce mari ne peuvent – et ne veulent pas la comprendre. Nouvelle Madame Bovary, elle souffre du gouffre entre réalité et littérature : « Elle exécrait dans les romans la peinture d'êtres extraordinaires et tels qu'on n'en rencontre jamais dans la vie. » Elle doit donc se cacher derrière un masque de froideur, de mensonges, y compris envers sa belle-soeur qui est celle dont elle est la plus proche, et en même temps la plus éloignée. Lumière et obscurité. Pusillanimité et réflexion. Voilà le vrai drame de Thérèse : être étrangère auprès même de ceux qui lui sont chers. Et qui la jugent, par exemple sur ses sentiments maternels : « Une mère qui ne s'intéresse pas à son enfant, vous pouvez inventer toutes les excuses que vous voudrez, je trouve ça ignoble. »

Petit à petit elle va donc gagner sa liberté, fut-ce au prix d'un geste terrible envers son mari. La chute sera fatale.

Mauriac s'inspira pour l'histoire de Thérèse Desqueyroux de celle d'Henriette Canaby qui fut accusée en 1905 d'avoir voulu empoisonner son mari Émile Canaby, courtier en vins bordelais alors endetté. Mauriac assista à son procès en Cour d'assises au cours duquel elle fut condamnée pour faux et usage de faux (fausses ordonnances). L'accusation de tentative d'empoisonnement fut rejetée, son mari témoignant en sa faveur pour sauver les apparences.

Mais Mauriac en a fait plus qu'un fait divers, mettant en scène une femme extraordinaire, représentant le désir de liberté féminine de l'époque, mais un désir de liberté poussé jusqu'à son extrême.

Un roman qui m'a intéressé, avec sa figure de femme forte, mais sans être une lecture exceptionnelle …
Lien : http://missbouquinaix.wordpr..
Commenter  J’apprécie          230
Relu la nuit dernière après avoir vu l'adaptation de C.Miller. A ma grande surprise, le roman n'a pas pris une ride! La famille bourgeoise est toujours antipathique, personne n'inspire la moindre compassion, et pourtant le récit coule d'un trait. Sauver les apparences, voilà la seule morale de l'histoire, mais à quel prix? La somme de rancoeurs, de frustrations, de jalousies ne peut se terminer autrement que dans le sang. Eteignons ce feu qui dévore les pins et menace la fortune, éteignons aussi tout sentiment qui puisse embraser un coeur! A lire absolument si vous n'avez jamais plongé dans un roman de François Mauriac.
Commenter  J’apprécie          230
Les Pins...

Ce fut une lecture difficile, obligatoire au collège...

Quel ennui...

Je me rappelle surtout des descriptions de la forêt landaise sombre, sinistre, les troncs noirs des pins... je venais d'arriver dans la région et je n'aimais pas cette enfilade d'arbres toujours revêtus de leur parure verte, sans aucun automne...!

Heureusement que je lisais Jules Verne et Pearl Buck ! Grâce à ces deux auteurs, je suis devenue une accro aux livres ... pas grâce à Mauriac !

Commenter  J’apprécie          220
Avec Thérèse, ce sont toutes les femmes enfermées dans des mariages ennuyeux, des familles oppressantes, des vies étriquées, des destins non choisis que Mauriac met au-devant de la scène.
Et finalement, si le verbe est d'époque, le propos reste assez contemporain.

La plume de Mauriac n'est plus à encenser, elle fait chanter le français tout simplement. Plusieurs notes en bas de page de l'édition livre de poche 2017 nous apprendront que même Grévisse y a trouvé là des tournures de langue inédites suffisamment intéressantes pour paraître dans ses publications comme Mauriacisme. C'était mon premier roman de l'auteur, assez charmée par sa prose, je vais me pencher sur le reste de son oeuvre.

Du côté de l'histoire en tant que telle, je ne suis jamais entrée ni en empathie, ni en compassion avec Thérèse. Question d'époque et de génération sans doute...
Commenter  J’apprécie          220
De Thérèse Desqueyroux, les gens disent : "On se demande pas si elle est jolie ou laide on subit son charme". Qui est donc, au fond, cette femme étrange jugée pour avoir tenté d'empoisonner son mari?
Thérèse est un mélange d'Emma Bovary et d'Anna Karénine, mariée à un homme qui lui fait horreur dès la première nuit. le drame est qu'elle a conscience qu'une autre vie serait possible que cette existence de renoncement, de soumission, que l'on attend de toute femme respectable dans la campagne landaise. Comment arrive-t-elle à l'idée de l'empoisonnement? Elle reconstruit elle-même le raisonnement après le non-lieu, espérant avoir l'occasion de l'expliquer à Bernard. Implacable dans sa faiblesse, ledit mari ne lui laissera pas cette chance, ayant déjà élaboré avec la famille tout un plan pour sauver les apparences. Y a-t-il autre chose qui compte vraiment que les apparences, au fond?
Thérèse Desqueyroux est un roman très court, qui met profondément mal à l'aise de la première à la dernière page. Et pourquoi? Parce qu'on devrait, raisonnablement, détester cette femme mais que je n'y suis pas parvenue une seule seconde. Bien au contraire. Thérèse s'inscrit dans la lignée de toutes ces héroïnes de la littérature qui ont voulu changer leur destinée mais n'ont fait que se condamner davantage. Ou peut-être pas. Car ce qu'il adviendra d'elle dans le Paris ou son mari la dépose pour l'éloigner, c'est à nous de l'imaginer.
Ce roman était le premier que je lisais de François Mauriac et j'en reste abasourdie.

Challenge XXème siècle 2020
Commenter  J’apprécie          221
Quelle puissance dans l'écriture pour écouter cette femme se raconter. Nous entrons dans le psychique de cette femme malheureuse d'avoir une vie si commune. Il ne se passe pas grand chose mais le style est sublime, et ça suffit.
On me l'avais conseillé, je n'ai pas été déçue. Fort.
Commenter  J’apprécie          220
Thérèse Desqueyroux a tenté d'empoisonner son mari. Pour éviter le scandale, son mari fait des déclarations permettant d'obtenir un non-lieu.
Ainsi affranchie de la justice officielle, Thérèse Desqueyroux se retrouve confrontée à celle voulue par son mari qui devient ainsi juge, partie et exécuteur de sa peine.
C'est ainsi qu'elle se retrouve enfermée chez elle et tombe dans un prostration profonde.
François Mauriac nous fait vivre ici un angoissant huis-clos. Et même si le geste commis par Thérèse est bien là, le récit de cette captivité privée est difficile.
Mauriac a écrit, à cette occasion, certaines de ses plus belles pages.
Ce roman est angoissant, mais il est difficile d'en décrocher tant que l'on a pas atteint la fin.
Commenter  J’apprécie          220
Thérèse Desqueyroux, quelle femme! Celle dont le mari et la belle-famille ont fini par traiter de monstre pour avoir laissé, peut-être par ennui, son mari s'empoisonner, pourtant, par ses émotions aussi fades, ses sensibilités aussi fastidieuses, on vaudrait quand même croire qu'elle ne l'est pas, ou plutôt on voudrait mieux la comprendre. Mais elle est comme une statue de marbre, endurcie avec le temps alors qu'elle est vouée à une vie de confort...
Une belle plume, un style assez particulier, un personnage féminin atypique, celle qui subit le confort que lui offre la société, curieusement pour elle, ce qui n'est qu'un leurre, alors, qu'elle s'est sentie pousser des ailes et qu'elle voudrait prendre son envol peut-être autrement, peut-être ailleurs....sortir de ce confort quelque peu empoisonneur...
Commenter  J’apprécie          210
D'habitude j'ai du mal à lire les classiques, les trouvant souvent difficiles à lire et à comprendre. Mais il s'avère que le roman de Mauriac m'a bcp plu.
J'ai trouvé que ce roman était facile à lire, ayant une syntaxe légère et un vocabulaire accessible.

J'ai particulièrement aimé le fait que l'auteur aborde la condition de la femme dans les années 1900, et son rôle en tant qu'épouse, de bourgeoise provinciale.
Je trouve que l'auteur est audacieux d'avoir eu le courage d'exposer une femme singulière, qui remet en cause l'existence individuelle à cette époque et la place des femmes.

En somme cefût une lecture agréable et enrichissante car j'ai découvert que la femme n'avait pas beaucoup de droits à cette époque et une liberté d'expression quasi nulle.
Le statut de la femme fut et reste toujours difficile dans nos sociétés, car on se bat encore aujourd'hui pour se faire respecter auprès des hommes.
Commenter  J’apprécie          211
Vu le nombre de babeliots qui ont lu ce livre, je ne vais pas encore décrire l'histoire mais je donne quelques informations complémentaires.

François Mauriac s'inspira pour l'histoire de Thérèse Desqueyroux de l'affaire Canaby, appelée aussi affaire des Chartrons.
Henriette-Blanche Canaby fut accusée en 1905 d'avoir voulu empoisonner son mari, Émile Canaby, courtier en vins bordelais alors endetté.
François Mauriac assista au procès en cour d'assises de la Gironde le 25 mai 1906, au cours duquel elle fut condamnée pour faux et usage de faux (fausses ordonnances pour se procurer auprès de pharmaciens de l'aconitine et de la digitaline, sans compter l'arsenic qui entrait dans la composition de la liqueur de Fowler qu'elle donnait à son mari en grande quantité).
Son époux témoigna en sa faveur pour sauver les apparences de ce couple de la bourgeoisie bordelaise qui faisait ménage à trois avec Pierre Rabot, un riche rentier. Ainsi, malgré le mobile possible d'Henriette-Blanche Canaby (toucher une forte indemnité au titre de l'assurance-vie souscrite par son mari et refaire sa vie avec son amant) et sa culpabilité criminelle assez évidente, l'accusation de tentative d'empoisonnement fût rejetée et l'épouse fut condamnée à 100 francs d'amende et 15 mois de prison, peine qu'elle n'effectuera pas en totalité.

Voilà, nous sommes dans la bourgeoisie, dans les mariages arrangés pour augmenter les terrains, les maisons, les bourses. Il faut respecter coûte que coûte les conventions, le protocole, faire bonne mine et laver son linge sale en famille. Thérèse rêvant d'une autre vie est bel et bien coincée dans la sienne. Lors de ma lecture, j'ai pensé à Madame Bovary car il y a ce côté femme qui aime la vie, qui a soif de l'embrasser avec passion avec son amant et qui est prête à tout faire voler en éclat pour déchirer ce corsetage de l'époque.

Lecture terminée en juin 2019 / le Livre de Poche - Prix : 5,10 €.
Commenter  J’apprécie          215




Lecteurs (14238) Voir plus



Quiz Voir plus

Thérèse Desqueyroux - François Mauriac

En quelle année a été publié le roman ?

1907
1917
1927
1937

10 questions
135 lecteurs ont répondu
Thème : Thérèse Desqueyroux de François MauriacCréer un quiz sur ce livre

{* *}