L'histoire débute à la sortie du Palais de justice de Bazas, de nuit. Une jeune femme,
Thérèse Desqueyroux, sort du bâtiment, fraîchement innocentée d'une tentative d'empoisonnement commise sur son mari Bernard. Prononciation d'un non-lieu qui a pu se faire grâce au témoignage de son mari qui a déposé en sa faveur, une « belle » intention motivée plus par la peur du scandale que par l'affection portée à sa femme…
Mais que s'est-il passé dans la propriété familiale d'Argelouse ? Thérèse elle-même est bien à mal d'expliquer son geste. Elle profite du chemin du retour pour élaborer en pensée la confession qu'elle compte fournir à son époux, occasion pour elle de tenter d'établir la genèse de son agissement. Plus loin que le motif même, elle part à la recherche de la compréhension et connaissance d'elle-même, se remémore son parcours jusqu'à l'acte fatal. Cette jeune femme, qui a grandi sans sa mère morte en couches, mais également sans la présence de son père, souvent absent, se révèle être en apparence une personne peu expansive et épanouie. Elle ne l'est certainement pas dans sa vie de couple, vécue comme un carcan, sous le joug des diktats familiaux.
Femme paradoxale, elle se conforme tout aussi fort aux clauses sociétales et familiales qu'elle cherche à s'en émanciper. le changement s'est peut-être opéré lors de sa rencontre avec Jean Azévédo, le soupirant d'Anne, la soeur de Bernard. Insidieusement sans doute, le discours de ce dernier, empli des notions de liberté et d'indépendance, distille en elle l'envie larvée d'une autre vie, mais aussi et surtout la révélation de son vécu présent, comme dominé par le silence, l'étouffement. Sa réflexion n'est à aucun moment conduite par le remords, la culpabilité, mais plutôt par une souffrance intenable, qui la mènera aux portes de la folie ; une forme de lucidité froide et dénuée de compassion.
Que cherche-t-elle au final ? La liberté, la liberté d'être...ou la recherche du pardon ?
Qui est coupable, qui est victime ?
C'est un roman passionnant, le portrait d'une femme qui tente de se démarquer d'une condition féminine assujettissante imposée par une société des années 30. une femme forte et cultivée, une anti héroïne, mais aussi une femme qui reste obscure à elle-même, qui reste dans la méconnaissance de ses besoins et de ses désirs.
Une femme moderne, troublante et dangereuse.