Paul Max est l'auteur de la série « Billy Mac Tiddle », un détective écossais surnommé, « le Roi de la chaussette » car il est, à la base, vendeur de chaussettes.
«
L'assassinat du torero » est la troisième enquête du jeune homme, après celle du roman «
Début dans la police » et celle de «
le meurtre d'Hilldrop Crescent ».
À l'origine, «
L'assassinat du torero » a été publiée dans la collection « le Jury » créée par
Stanislas-André Steeman dont j'ai déjà parlé.
Pour information, ce court roman sera remanié quelques années plus tard pour le développer et en faire un roman de taille plus classique afin de le publier à part. Malheureusement, cette édition sera posthume, l'auteur ayant eut la mauvaise idée de mourir entre temps.
Cette troisième enquête de Billy Mac Tiddle se déroule au mexique. Durant ses vacances, le jeune homme surprend une conversation entre un homme et une femme et comprend une phrase : « le torero mourra ».
Assistant à une corrida quelques heures plus tard, il assiste à une scène étrange, un homme qui interpelle violemment le torero, l'exortant à tenter une manoeuvre dangereuse... le torero ne recule pas devant le défi... et il meurt embroché.
Le sixième sens de Billy Mac Tiddle lui indique que tout a été mis en place pour pousser le torero à prendre le risque qui lui a été fatal. Il ne s'agit donc plus d'un accident, mais d'un meurtre...
Je suis anti-corrida, mais, étant pro Mac Tiddle, j'ai suivi avec un grand intérêt son enquête, bien que celle-ci soit quasiment dénuée de l'humour habituel que l'auteur insufflait dans les aventures de son personnage.
Mais, outre la qualité de narration et bien que le sujet n'aurait pas dû m'intéresser outre mesure, j'ai pourtant été captivé.
Captivé car une chose m'a grandement surpris : la grande proximité entre l'histoire du torero du roman, Curo
Goyen et celle de la fin de la véritable star des arènes :
Manuel Laureano Rodriguez Sanchez, alias Manolete, est né le 4 juillet 1917 à Cordoue en Espagne. Je ne vais pas faire une agiographie de l'homme, sa vie ne m'intéressant pas. Aussi, j'en viens directement ou presque à sa mort.
Pour m'en faire une idée, j'ai lu un article de Libération :
Dans les derniers mois de sa vie, Manolete n'était plus que l'ombre de lui-même. Les femmes, l'alcool, la drogue, l'injection de fortifiants, l'ont lentement détruits. Depuis plusieurs mois, il n'est plus le grand Manolete. le public devient hostile à son égard. Les sifflets fusent lors de ses prestations.
Le 28 août 1947 il doit toréer à Linares, en Espagne. le 16 juillet, lors d'une prestation précédente, un spectateur l'insulte. Manolete se retourne et prend un coup de corne au mollet. le 4 août, son incapacité à se concentrer le fait déjà passer proche de la catastrophe, non pas grâce à ses réflexes, mais juste parce que le taureau, au dernier moment, tourna la tête. Un journaliste dira que Manolete était mort, ce jour-là, tel un suicidaire.
Le 28 août 1947, Manolete tente une manoeuvre risquée, trop risquée, et se fait embrocher à l'aine en même temps qu'il plante son épée dans le taureau... Manolete mourra quelques heures plus tard...
Ces coïncidences pourraient être surprenant, le roman de
Paul Max ayant été écrit en 1941, la version augmentée ayant été publiée en 1945, soit deux ans avant la mort de Manolete.
Pourtant, les coïncidences n'en sont pas quand l'on sait que ce qui s'est produit en 1947 est le lot des toreros. À tel point que si l'on recule dans le temps de plus de 100 ans, en 1820, on peut retrouver les traces d'un torero nommé Curro Guillen. le 21 mai 1820, alors que Curro Guillen (le torero du roman s'appelle Curro
Goyen) s'apprête à l'estocade, un certain Manfredi (comme dans le roman), interpelle le torero puis, avant d'être évacué, lui demande s'il va oser « recevoir » le taureau (comme dans le roman). Pris au vif, le torero rata sa manoeuvre et fût encorné à la cuisse (comme dans le roman). le rival de Curro
Goyen,
Juan Léon (comme dans le roman), se précipita à son secours et fût encorné à son tour, le taureau ayant un torero sur chaque corne (comme dans la roman). Curro Guillen mourru quelques heures plus tard (comme dans le roman) et
Juan Léon ne fût que légèrement blessé (comme dans le roman)...
Bref, vous aurez bien compris que
Paul Max s'est très largement inspiré de la mort de Curro Guillen pour écrire son histoire. Ce devait être un fan de tauromachie.
Mais revenons-en au roman. Si celui-ci est moins drôle que les autres de la série, il n'en est pas moins rondement mené.
On suit avec bonheur l'enquête de Mac Tiddle, une enquête jalonnée d'indices. L'auteur parsème également son texte de moments didactiques expliquant certains termes et certaines pratiques de la tauromachie et, même si ce milieu ne plait pas au lecteur, cela ne retire rien au plaisir de lecture.
Comme à son habitude, l'enquêteur suit son sixième sens et avance aussi bien grâce à son flair qu'à sa propension à être toujours au bon endroit et au bon moment.
Bien sûr, il manque ici la saveur des dialogues des deux précédents romans (même si la présence du gardien de l'hôtel apporte un brin de fantaisie), mais, vu la courte taille du roman et la volonté de l'auteur de se concentrer sur le milieu tauromachique, il faut bien avouer qu'il y avait moins de possibilités de mettre en place l'ambiance usuelle aux enquêtes de son personnage (peut-être est-ce le cas dans la version remaniée titrée : « Mexico » ? Je ne sais pas !).
Au final, une lecture agréable, bien que le sujet central me déplaise, grâce au plaisir de retrouver le personnage de Billy Mac Tiddle et au style de l'auteur. le sentiment est probablement encore amplifié par le parallèle que l'on peut faire entre l'histoire et
L Histoire.