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EAN : 978B002JP6E2W
IDEES / PUF (01/01/1963)
3.5/5   9 notes
Résumé :
Le roman français contemporain est en pleine évolution. Certains écrivains ont accompli une véritable révolution et leurs théories exercent une influence profonde dans le monde entier.
Maurice Nadeau donne une vue d'ensemble complète de la situation actuelle du roman français, analyse les œuvres et en expose les tendances majeures.
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Bon panorama d'ensemble de la littérature en France.
Révision pour les uns, découvertes pour les autres.
Nécéssaire pour tous.
On y pioche suivant les envies et les curiosités.
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des références un peu datées mais une analyse éblouissante
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Citations et extraits (8) Voir plus Ajouter une citation
ALBERT CAMUS ROMANCIER

[...] La leçon [de La Peste] n'est plus celle de l'Étranger. L'accent est toujours mis sur l'absurdité du monde et de la condition humaine, sur le déni de justice de tout temps fait à l'homme. Il n'y répond plus par l'indifférence de Meursault. Il croit à la possibilité de solutions d'ensemble, et particulières. La vie continue à être dépourvue de sens; l'homme acquiert noblesse et dignité à la vivre. Au stoïcisme solitaire s'ajoute l'altruisme.
Les admirateurs de l'Étranger s'étonnèrent de ce qu'ils prirent pour un renversement de positions philosophiques. De nouveaux accoururent en masse, que satisfaisait cette "sainteté laïque" ou, comme il fut dit méchamment, cette "morale de boy-scout". Il semblait que l'auteur mettait en gage la révolte qu'il avait prêchée, se rangeait un peu rapidement dans le camp des "belles âmes", torturées mais inefficaces.
Les uns et les autres s'étaient fait un Camus à leur convenance, l'avaient tiré à eux pour les besoins de leur cause. En fait, Camus, dès ses premiers écrits, dès l'Envers et l'Endroit auquel il faut toujours revenir pour mieux le comprendre, s'efforçait à concilier des tendances contradictoires, également vivantes en lui: l'amour de la vie et la recherche du bonheur, l'absurdité de la condition humaine et l'impossibilité du bonheur.
Il s'expliqua ouvertement dans l'Homme Révolté (1951), essai dont nous n'aurions pas à parler [car le livre de Maurice Nadeau est consacré au roman] s'il n'éclairait les intentions du romancier.
C'est un long réquisitoire contre l'Histoire. Dans la mesure où les hommes ont fait d'elle une maîtresse exigeante, dont ils interprètent d'ailleurs à volonté les caprices. Dans la mesure où ils entendent trouver en elle la raison nécessaire et suffisante à leurs comportements. C'est aussi un réquisitoire, plus ou moins fondé (et parfois sur des documents qu'on sent de seconde main), contre les puissantes individualités qui, au cours de l'Histoire, dans leur œuvre littéraire, philosophique ou politique, ont pris pour point de départ ce sentiment foncier de "révolte" que l'auteur voit en tout homme. Ils s'en sont de plus en plus écartés au profit de leur œuvre, égoïste, orgueilleuse. Qu'il s'agisse de Sade, Lautréamont et Rimbaud, qu'il s'agisse de Marx et de Lénine, ils ont perverti et corrompu la "révolte" pour aboutir à des systèmes monstrueux; ils ont rendu l'humanité, au cours des siècles, un peu plus prisonnière. Alors qu'ils voulaient des hommes plus lucides, plus libres, plus heureux, ils ont ajouté à la confusion et au malheur. Camus se détourne de ces génies tombés dans l'ivresse de la démesure. Il leur oppose le génie grec et méditerranéen, fait de confiance en l'homme, en la raison, en la vie, et qui se propose de résoudre les seuls problèmes à sa portée. Le soleil du "grand midi" doit chasser les miasmes brumeux des imaginations délirantes.
L'ouvrage déçut. Par ses analyses. Davantage par ses conclusions. En mettant fin à une équivoque, l'auteur choisissait un public n'attendant que cette caution d'envergure pour se confirmer dans son immobilisme conservateur, son refus de tout changement. Camus donnait bonne conscience, fournissait des arguments, se "rangeait", fût-ce à son corps défendant et en prêchant une leçon d'application difficile. La sagesse méditerranéenne semblait hors de proportion avec les problèmes que l'humanité doit résoudre pour franchir sans trop de heurts le seuil de l'âge nucléaire. Cette insurrection contre l'Histoire, ce fougueux retour à des valeurs raisonnables mais quelque peu exténuées, sonnaient plus comme une démission que comme un appel pour une marche en avant.
L'Homme Révolté brouilla Camus avec Breton, avec l'avant-garde littéraire (dont Camus n'avait cure), plus gravement avec Sartre. Dans sa "Lettre à Albert Camus", celui-ci somme l'auteur de L'Homme Révolté de prendre ses responsabilités, de choisir ouvertement son camp. Il le lui assigne, sans grand souci de nuances: penseur "libéral" au sein d'une bourgeoisie moribonde, accrochée à ses privilèges. La réponse de Camus est tout empreinte de dignité: celle de l'artiste, celle de l'homme déchiré qui s'abstient de conclure, par peur d'ajouter à la "tyrannie des idéologies". Les arguments qu'elle met en avant ne sont pas de nature à convaincre Sartre, pas plus que les admirateurs de l'Étranger. En fait, Sartre et Camus n'ont plus de langage commun, et il n'est pas facile de dire qui est le plus resté fidèle à lui-même.

PP. 105-107
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Comme celle de 1914-18, la Guerre mondiale de 1939-45 a profondément ébranlé la société occidentale.
Ce que l'événement et ses suites ont manifesté correspondait à des changements moins visibles qui s'étaient depuis longtemps opérés dans les structures économiques et sociales autant que dans les esprits.
La montée des fascismes européens, le sursaut, en France, d'un libéralisme faiblement teinté de socialisme, l'écrasement de la révolution espagnole — aspects divers d'une même crise — avaient réuni les conditions de l'énorme affrontement sanglant qui mit aux prises, presque partout à la surface du globe, des millions de combattants dont tous n'étaient pas volontaires.
L'événement devait outrepasser les limites qui lui avaient été tacitement reconnues et dérouler, à son tour, une série de conséquences imprévues. Quand on sortit du cauchemar, on s'aperçut que des valeurs depuis longtemps mises en doute étaient bien mortes. Le temps du nihilisme, dont on attendait et redoutait la venue, cette fois nous le vivions. La faim, les ruines, les exactions, les tortures, les millions de cadavres, l'assassinat délibérément perpétré de masses humaines dans les camps de concentration ou les grandes cités urbaines et qui devait culminer dans l'anéantissement instantané des habitants d'Hiroshima, tendaient à l'homme européen une image de lui-même qu'il ne reconnaissait pas. Les croyances, morales, philosophies, métaphysiques qui représentaient la conquête dure et patiente des meilleurs esprits de tous les siècles avaient été consumées dans l'événement. On avait vu fleurir l'exaltation des instincts biologiques et raciaux, les fanatismes religieux et nationaux, la confiance aveugle en Dieu ou dans le Destin. L'homme d'Occident reprenait pied, hagard, dans un univers saccagé.
Les plaies furent assez rapidement pansées, les ruines relevées. La Science et la Technique, démobilisées, prenaient un nouveau départ qui menait à une restauration des richesses, à leur augmentation dans des proportions considérables. Avec la domestication de l'énergie atomique, de nouveaux horizons s'ouvraient, prometteurs de merveilles. L'homme, aujourd'hui en passe de voyager dans le Cosmos, jouit sur sa planète de conditions de vie qu'il n'a pas encore connues. Aux nations rivales, dont les antagonismes avaient conduit en moins de cinquante ans à des incendies gigantesques, se substituaient de grands empires continentaux qui maintiennent "l'ordre" et "la paix" dans leurs sphères d'influence respectives.
Pourtant, la confiance n'est pas revenue. Le nouvel équilibre mondial, précaire, est sans cesse à la merci d'une pesée un peu plus forte sur l'un des plateaux de la balance. Les conquêtes de la Science et de la Technique effraient plus qu'elles n'enthousiasment: au terme d'une série de causes et d'effets qui n'obéissent pas tous à la volonté des hommes, elles peuvent immédiatement mettre en question l'humanité toute entière, cette humanité qui comprend encore un milliard d'hommes sous-alimentés. Tout se passe comme si le mal dont souffrait l'Europe et qui l'a menée au bord du suicide, au lieu de se résorber, avait fait tache d'huile. Après les nations d'autrefois, ce sont maintenant les empires dont dépend le sort du monde qui s'abandonnent aux fanatismes conquérants, aux patriotismes bornés, aux menaces d'anéantissement réciproque. Un "équilibre de la peur" s'est instauré, dans la perspective redoutée d'un suicide généralisé qui agit en même temps comme une terrible tentation.

(Introduction : L'artiste et son temps)
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Quand la France sort de l'occupation étrangère et de la guerre, elle s'aperçoit qu'elle est passée au rang de nation de second ordre. Réveil brutal, qui la pousse dans un délire compensatoire de grandeur sont elle n'est pas encore sortie. Perturbée dans ses structures intimes, divisée, du fait de l'événement, en camps rivaux dont chacun figurait aux yeux de l'autre la "trahison", elle n'a cependant point voulu envisager d'autre avenir que celui du retour impossible au rang de puissance dirigeante. Le rêve de rénovation nourri dans la Résistance, et qui paraissait prendre corps à la Libération, s'évanouissait cinq ou six ans plus tard. Avec le consentement des nouvelles équipes dirigeantes les hommes d'autrefois reprenaient leur place, tandis qu'était replâtré l'ordre ancien. Le temps jouait en faveur de la "conservation".

(Introduction : L'artiste et son temps)
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Le Céline d'après la guerre n'est plus celui du Voyage ou de Mort à crédit. Son invention est devenue laborieuse, ses trouvailles sont attendues, ses procédés se sont transformés en tics. Pour quelques pages prodigieuses qui émergent de D'un château l'autre (1957), et surtout de Nord (1960), combien de pages mortes, gorgées d'éloquence (fût-elle célinienne), de naïvetés voulues, de futilités peintes en noir! L'écrivain qui avait du génie laisse parfois douter dans ses dernières œuvres qu'il ait seulement du talent. Cette perte elle-même est émouvante: elle résulte d'un long phénomène d'autodestruction. A la différence de beaucoup de littérateurs, celui-ci croyait à ce qu'il disait.

P. 50
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Pieyre de Mandiargues est amoureux de l'insolite sous toutes ses formes : celui qui se manifeste dans les créations de la nature et des hommes, celui qu'on rencontre dans la vie quotidienne. Il est ennemi du banal, du coutumier, de l'habituel, de tout ce qui se manifeste à un nombre trop grand d'exemplaires. Esthète (à la façon dont on dirait décadent à la fin du XIXe siècle), il s'enflamme pour le détail d'un tableau, pour le motif ornemental d'un meuble, pour la forme bizarre d'un rocher. L'insolite n'est pas pour lui le signe d'une présence mystérieuse et ne renvoie à aucun au-delà. Il existe par lui-même et pour lui-même ; la joie qu'il communique est purement esthétique. Comme toute apparition de "baroquisme" en notre civilisation industrielle et utilitaire, il témoigne des mille possibilités de l'homme livré à lui-même, hors des contingences, des mille formes que peut revêtir son désir d'évasion.
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Videos de Maurice Nadeau (17) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Maurice Nadeau
Louis Monier - Ecrivains, de Paul Eluard à Marguerite Duras .Louis Monier vous présente "Ecrivains, de Paul Eluard à Marguerite Duras" qu'il a écrit avec Joseph Vebret aux éditions Eyrolles. Sous la direction de Marc Dambre. Préface Maurice Nadeau. http://www.mollat.com/livres/monier-louis-ecrivains-paul-eluard-marguerite-duras-9782212553727.html Notes de Musique : 1-01 String Quintet in C major, KV 515_ I Allegro
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