Nature aquatique

Guillaume Néry n'est pas un inconnu pour moi.
J'aime l'eau. Elle est mon élément essentiel, j'en ai besoin. J'aime m'y plonger, surtout quand elle est fraîche !
Alors suivre le parcours de Guillaume Néry, célèbre apnéiste français, à travers ce récit, a été un petit moment de symbiose avec cet athlète de haut niveau.

Depuis un lointain documentaire que j'avais visionné sur Jacques Mayol, la plongée en apnée m'avait immédiatement intriguée et passionnée. Ensuite, le film de Luc Besson avait renforcé cette attirance, même si dans le Grand bleu, les plongeurs utilisaient une gueuse (appareil lesté qui permet de descendre rapidement), appareil qui pour moi enlève à la beauté du sport mais rien à la performance des sportifs.
Aussi quand Babelio et les éditions Arthaud ont proposé ce livre à la lecture, je n'ai pas hésité, j'ai plongé dans le grand bain avec Guillaume Néry, mais moi sans risque aucun, sinon le plaisir de la lecture. Un grand merci donc à eux tous.

C'est à partir d'un petit concours de fierté avec un copain, que Guillaume (14 ans) a découvert l'apnée : celui qui retient le plus longtemps sa respiration a gagné. Ce jour-là il a perdu. Mais ne voulant pas rester sur cet échec, il a commencé son entraînement qui tout naturellement l'a conduit vers ce sport, très encadré et à la discipline de fer. C'est toute une communauté qui travaille ensemble pour améliorer le confort et la sécurité du plongeur. Même si plonger reste un acte individuel, il faut bien comprendre l'importance de l'équipe autour. Et ça, Guillaume le fait bien ressentir dans ses propos. L'entraînement (physique, mental, respiratoire, yoga) est également un long processus qui demande des années : on ne descend pas en-dessous des 100m du jour au lendemain. le record personnel de Guillaume Néry est de 129m. le monde du silence est un graal, mais un graal qui peut facilement tourner au drame si toutes les conditions ne sont pas respectées, ce qui a failli se produire une fois quand Guillaume est descendu à 139m, suite à une erreur de jalon !
Mais je ne veux effrayer personne, les accidents dans ce sport de haut niveau demeurent rares. Comme toutes disciplines, si l'athlète respecte les codes et se respecte lui-même, le plaisir est bien présent. Pour s'en convaincre encore plus, il n'est qu'à regarder les petits films qu'a réalisés Guillaume pour être ébloui(e) par ses performances, comme dans « One breath around the world ».

Je ne sais pas si Guillaume possède des branchies, mais il est devenu homme-poisson. Et son regard sur l'eau, la mer, est celui d'un homme qui a aussi compris l'importance du respect de la nature. Il a dansé avec les cachalots, il a nagé avec les requins, il a exploré mers, rivières, eaux salées et eaux douces, eaux chaudes et eaux froides. La plongée en apnée est plus qu'un sport pour lui, elle est sa seconde nature.
« Etre dans l'eau comme un art de vivre. »

J'ai été extrêmement heureuse de recevoir ce second livre de Guillaume Néry, ayant déjà lu celui qu'il avait co-écrit en 2014 avec Luc Vaillant : "Profondeurs".
Je suis passionnée par ces aventuriers, ces humains hors-norme qui se confrontent à la nature, à ses dangers ainsi qu'à leurs propres limites. J'aime découvrir leur philosophie de vie.
Par ailleurs, l'eau étant mon élément favori, j'ai plongé avec enthousiasme au coeur de "Nature aquatique".
Depuis 2014, la vie de l'apnéiste a été bouleversée par un accident de plongé qui s'est produit en 2015 à Chypre alors qu'il faisait une tentative de records du monde à 129 m et où la jauge sur le câble a été accidentellement réglée 10m plus bas. Il s'en est sorti mais sur le coup, il décide de tout arrêter. "C'est un tournant. Je me retrouve précipité dans une nouvelle vie, où la poursuite du record ne rythmera plus mon quotidien, où la performance ne sera plus un but. Mais j'ai la certitude que la profondeur restera au coeur de ma vie, et que cette prise de recul est une chance d'enrichir mon lien avec la mer".
Guillaume Néry revient sur son enfance, ses débuts, sur ce qui l'a amené à choisir l'apnée en poids constant, sur les rencontres faites autour de ce sport. Il insiste sur le fait qu'il n'y a pas de champion ni de hiérarchie et que la communauté très soudée et le lien de confiance existant entre les membres de l'équipe sont primordiaux.
Le livre évoque merveilleusement ce besoin omniprésent de se rapprocher de l'élément aquatique, de la relation essentielle et primordiale de l'auteur avec l'eau, relation qui a été mise à mal lors du premier confinement.
"Nature aquatique" amène une belle réflexion sur la nécessité de ralentir, d'éprouver pleinement et en conscience la vie et les choses simples et nous rappelle notre appartenance à la grande valse du vivant.
Une belle lecture et une magnifique ode à la mer et aux océans.

En 2015, en raison d'une erreur humaine, Guillaume Néry frôle la mort en mer de Chypre, à plus de 120 mètres de profondeur. Après cet accident, il met fin à sa carrière d'apnéiste. « Je découvre ma vulnérabilité : je peux mourir en plongeant. » (p. 14) Minutieusement, l'auteur passe en revue les jours qui ont précédé sa plongée quasi fatale. Une fois pesés le risque, la peur et l'audace, le danger subsiste toujours, jamais complètement maîtrisé, impossible à circonscrire. « Quand la sécurité devient la source du danger, c'est qu'il faut changer de système. » (p. 81 & 82) le plongeur détaille les réactions physiologiques d'un corps qui s'enfonce, mètre par mètre, à coup de palmes, sous l'eau. Dans l'eau. Dans les profondeurs salées, là où la pression est à la limite du supportable, Guillaume Néry se sentait chez lui, mais sans oublier que cet environnement ne l'accueillait que momentanément. « Je ne suis pas chez moi ici. Je reste un simple visiteur. Il est temps de repartir. » (p. 114)

L'alerte écologique lancée par l'auteur résonne clairement : le temps n'est plus à l'attente, il faut agir. Mais à l'inverse de l'immédiateté tyrannique des réseaux sociaux et du monde contemporain, il faut prendre le temps : celui de la préparation, celui de la réflexion, celui de la prudence, comme pour une apnée périlleuse. L'action est nécessaire, mais elle s'anticipe. « Quand l'impatience a eu raison de moi, elle m'a invariablement condamné à l'échec. » (p. 134) J'ai beaucoup apprécié les pages où Guillaume Néry raconte sa communion quotidienne avec la mer, abolie pendant le confinement, avec la longue attente des retrouvailles.

Pour moi qui nage au mieux comme un petit chien et qui suis incapable de réguler mon souffle, ce récit est fascinant. Effrayant également. J'admire les silencieux athlètes des profondeurs, les corps qui se rêvent un instant cétacés ou dauphins.

Acheté en août 2022 lu dans la foulée en une semaine.
Plusieurs raisons à l'achat de ce livre : j'aime la natation et le monde aquatique en général, j'aime nager avec une mono palme et l'apnée me tente parfois, je connais Guillaume Nery par ses films que j'ai beaucoup aimés depuis 2012, l'interview de l'auteur dans l'émission 28 minutes d'Arte m'avait convaincue.
Je ne suis pas déçue.
Guillaume Nery revient ici sur l'accident de plongée lors d'une tentative de record, accident du à une faute d'inattention de l'organisation, mais si cet évènement constitue le point de départ d'un nouveau rapport à l'eau de l'auteur, il ne reste pas longtemps le sujet principal du livre.
Nature aquatique est une belle réflexion sur nos origines aquatiques justement et sur le lien puissant qui unit le champion au milieu de sa pratique. Finalement, Guillaume Nery se rend compte que les records et la compétition importent peu, même s'il les a aimé durant de longues années, par contre il ne parvient pas à vivre entièrement sans s'immerger au coeur de l'eau, qu'il s'agisse de la Méditerranée, d'un océan au bout du monde, d'un lac ou d'un bassin chloré.
Ce livre fait l'éloge de l'apnée au sens de la communion avec l'élément aquatique.
Il s'agit aussi d'un plaidoyer en faveur de la mer à une époque où son intégrité est menacée.
Un beau moment qui donne envie d'inspirer, profondément, expirer, inspirer de nouveau et plonger.

Une immersion en eaux profondes, portée par une plume délicate, et grâce à laquelle j'ai découvert le monde de la plongée en apnée, qui loin d'être solitaire, se construit autour de l'esprit d'équipe. On suit Guillaume Néry dans le développement de son sport et même de son art. On partage sa progression, ses petits bonheurs et ses victoires tout comme ses doutes ou ses difficultés. L'apnéiste se livre avec pudeur et sincérité et nous offre un regard sensible sur la mer. Plus qu'un ouvrage autobiographique, c'est aussi un véritable plaidoyer en faveur de la Nature et une invitation à prendre le temps. Guillaume Néry se fait le porte parole de l'océan autant que de la terre. Ainsi, de sa rencontre avec les cachalots ou avec les requins naît une urgence de dire les changements qui les bouleversent, une urgence de repenser nos sociétés modernes. Les mots de l'apnéiste sont un savant mélange de rêverie et de pragmatisme, qui offrent une ode à la mer, au dépassement de soi et à la solidarité.
Je remercie chaleureusement Babelio et les éditions Arthaud pour cette belle découverte.