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EAN : 9782130593188
256 pages
Presses Universitaires de France (04/07/2012)
3/5   1 notes
Résumé :
Les questions dont traite la sociologie de la déviance touchent tout à la fois à la nature du changement social, à l'évolution des moeurs et à la multiplication des ordres normatifs légitimes (avec la reconnaissance des droits fondamentaux de la personne). Ces questions ont pris une place de plus en plus importante dans le débat public, suscitant des interrogations sur la nécessité de fixer de nouvelles règles prescriptives dans un monde en plein bouleversement ou s... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Lire des essais ne me suffit pas. Il faut en plus que je me coltine des manuels. Je fais ça par intérêt et même par plaisir, ce qui devrait nous amener à convenir que j'ai des goûts discutables. Grand sociologue français, Albert Ogien a beaucoup étudié et écrit sur les différentes formes que peut prendre la déviance, notamment les troubles psychiatriques ou la toxicomanie. Plus récemment, ses ouvrages sur l'activisme politique et la désobéissance civile (la plupart en collaboration avec la philosophe Sandra Laugier) illustrent encore son attrait pour ce qui sort (et celles et ceux qui sortent) des sentiers battus.
Dans ce manuel donc, le tour de l'ensemble des grandes théories sociologique explicatives de la déviance est effectué. Ogien présente les différents travaux significatifs en y ajoutant des observations qui pointent les limites de ceux-ci. C'est appréciable et cela limite l'effet « catalogue » de l'ouvrage. En creux, cela montre bien aussi la difficulté de la sociologie de la déviance à produire des résultats qui font l'unanimité au sein de la communauté scientifique. Ogien le reconnaît d'ailleurs explicitement lorsqu'il fait le bilan de ce tour d'horizon : « aucun argument décisif ne se dégage en faveur de l'une ou l'autre des théories exposées [dans cet ouvrage]. (...) On peut [toutefois] porter au crédit du travail sociologique la formulation de deux propositions. La première pose que l'organisation même de la vie sociale engendre et appelle la déviance ; la seconde affirme que définir de façon scientifique les caractéristiques universelles et invariantes de la criminalité et de la délinquance est une tâche à laquelle il faut renoncer. »
L'ouvrage est organisé autour de la distinction entre théories « causales » de la déviance et théories « compréhensives ». Là où les premières, envisageant une infraction comme un fait juridique, cherchent à déterminer « qui commet tel type d'infraction et pourquoi ? », les secondes y voient aussi un phénomène social, « un acte faisant l'objet d'un jugement qui met en lumière nos manières habituelles de concevoir la normalité ». Dès lors, les théories compréhensives vont interroger la notion même d'infraction et « rendre compte des procédures utilisées pour conférer un caractère déviant à un acte et en attribuer la responsabilité à son auteur ». Ainsi, la question posée par ce second type de théorie serait plutôt : « qu'est-ce que commettre une infraction ? ».
Cette dualité n'est évidemment pas définitive et absolue, mais présentée dans une visée pédagogique. Il s'agit d'expliciter les différentes théories accolées à chacune de ces perspectives sur la déviance. Cela étant dit, le texte est très technique et je dois confesser ne pas avoir réussi à en maîtriser toutes les subtilités. C'est d'ailleurs le reproche majeur que j'adresse à ce livre. J'attends d'un manuel, même destiné à des étudiant.es de second cycle universitaire, qu'il se mette au niveau de son public afin de lui transmettre l'étendue des connaissances sur un domaine donné. C'est trop peu le cas ici, et j'ai souvent eu le sentiment que l'auteur ajoutait de la confusion au lieu d'en retirer. Ou… on pourrait aussi envisager que je n'ai tout simplement pas les pré-requis nécessaires à la bonne compréhension de ce livre. Mais, de mon point de vue de lecteur, cela revient au même.
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Citations et extraits (13) Voir plus Ajouter une citation
Foucault, Castel et Donzelot défendent une même proposition : la déviance n'existe pas hors des pratiques de contrôle social qui la définissent et la répriment. (...) Ce qu'il faut expliquer, ce ne sont ni les caractéristiques des actes manifestant la folie, la délinquance ou l'indigence, ni celles des populations prises en charge au titre du péril qu'elles font courir à l'ordre social, mais la légitimité des normes qui définissent et naturalisent ce péril. (...) Ce qui conduit certains individus à être placés en situation de déviance est la différence entre les critères de jugement de la normalité d'une conduite produits par les institutions et ceux qu'admettent les personnes qui défient cette normalité.
(...) C'est donc à ce point que toute enquête sur la déviance devrait débuter : d'où nous viennent les concepts que nous utilisons pour nommer la folie, le crime, la pauvreté? (...) De leur point de vue, en effet, ces notions se construisent de façon historique à l'intérieur de régimes discursifs permettant d'identifier et de décrire l'anormalité et la dangerosité. Les mots ne sont pas innocents : lorsqu'ils composent la terminologie savante des psychiatres, des criminologues, des juristes ou des travailleurs sociaux, ils fondent et justifient une intervention des autorités publiques dont l'objet est de rappeler les limites d'un ordre et de perpétuer l'état des rapports de domination sur lequel il repose. En ce sens, la définition des formes de la déviance et des modalités de leur traitement est toujours, qu'elle se fasse au moyen de l'élaboration d'un savoir professionnel ou par le truchement de mesures législatives, un élément essentiel de l'exercice d'un pouvoir.
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Weber pose que la sociologie ne peut pas découvrir les causes de l'activité sociale, [prenant] acte de ce qu'elle n'est pas un fait naturel, mais un processus qui se construit à partir de la signification qui lui est donnée par ceux qui la réalisent. De ce point de vue, l'explication requiert de tenir compte des "motifs" rationnels qui animent probablement les individus lorsqu'ils agissent.
(...) La tâche de la sociologie compréhensive consiste donc à saisir les raisons qui ordonnent le déroulement d'une activité sociale. Et ces raisons, il s'agit de les dégager d'une double analyse : celle du sens que les individus attribuent à leur action et à celle d'autrui, et celle du type d'activité dans le cadre duquel ces attributions s'inscrivent.
(...) Ainsi, les raisons de l'action rapportent-elles moins à une intention émanant d'une conscience libre qu'à des obligations contenues dans un type d'activité et que l'individu doit respecter s'il entend maintenir l'intelligibilité et la rationalité du monde dans lequel il vit. (...)
En somme, une théorie compréhensive ne se cantonne pas à relater les commentaires que les individus émettent à propos de ce qu'ils font. Si elle renonce à l'ambition d'expliquer la cause des conduites humaines, c'est qu'elle y substitue une interprétation causale des raisons qu'il est possible d'invoquer pour rendre compte d'une activité sociale.
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La criminologie moderne appréhende la causalité du crime dans les formes élaborées au milieu du siècle dernier. (...) Les facteurs explicatifs de l'analyse quantitative ne sont, souvent, que la traduction savante de conceptions implicites à propos de l'origine de la délinquance. (...) Même si l'on y consacrait des années de réflexion, on ne saurait [probablement] où aller chercher les causes du crime ailleurs que 1) dans la personnalité du délinquant, ou 2) dans le milieu dans lequel il a été élevé et inscrit ses activités quotidiennes, ou 3) dans la société à l'intérieur de laquelle ce milieu se situe.
En conséquence, les théories causales de la déviance retiennent quatre grands groupes de facteurs pour essayer de rendre compte du fait criminel : inadaptation de l'individu, émulation du groupe de pairs, dilution de l'autorité des institutions de contrôle, inégalité sociale. A ces quatre types d'explication, on doit ajouter un cinquième, d'inspiration différente : celui qui conçoit la criminalité comme un phénomène lié à la reproduction de la domination, c'est-à-dire découlant directement de la défense d'une forme établie de hiérarchie sociale.
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La première chose que l'analyse sociologique nous apprend au sujet de l'infraction tient en une proposition : la déviance est un jugement exprimant une relation, pas un état de fait.
(...) La déviance peut faire référence à deux phénomènes distincts [illustrant la double nature, prescriptive et procédurale, de la norme] : enfreindre une prescription, c'est-à-dire se mettre ou être mis en marge d'une activité sociale de manière transitoire, ou manquer à appliquer une règle de conceptualisation, c'est-à-dire s'exclure, ne serait-ce que de façon momentanée, de l'ordre même de la rationalité, faire peser un doute sur sa participation à la commune humanité. En effet, être intelligible, ne pas paraître fou, inspirer confiance ou être humain sont des contraintes au moins aussi impérieuses que respecter un article de loi ou des principes de pureté, d'hygiène, de séparation des sexes ou de bienséance, ou se rendre aux servitudes de la hiérarchie sociale.
La deuxième chose que la sociologie de la déviance affirme savoir au sujet de l'infraction prend les allures d'une thèse : un acte tenu pour déviant lorsqu'il est décrit à l'aide de critères relevant d'un certain ordre normatif peut être considéré comme normal lorsqu'il l'est en usant de critères propres à un autre ordre normatif.
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Les théories de la déviance, qu'elles soient causales ou compréhensives, poursuivent un même objectif : expliquer ce qui distingue conduites normales et pathologiques. [Mais] cet objectif s'est transformé à mesure que les tenants de ces théories ont été amenés à abandonner l'idée selon laquelle la déviance s'opposerait radicalement à la conformité. Au fil des recherches, une autre conception s'est imposée, aujourd'hui partagée par la majorité des sociologues : la différence entre normal et pathologique n'est pas définitivement fixée par des conditions nécessaires et suffisantes, s'appliquant de façon mécanique aux phénomènes observables, mais procède d'une réaction sociale faisant jouer une variété de critères d'interprétation.
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Videos de Albert Ogien (3) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Albert Ogien
Les Indignés selon Albert Ogien (3/3) .Le sociologue Albert Ogien, interrogé pour Mediapart par Antoine Perraud et Françoise Blum (Centre d'histoire sociale du XXe siècle), évoque le phénomène des Indignés, à la fois européen et planétaire.
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