La geste de l'hétérodoxe : Persecutores demonum

Le début commence par un monologue aussi déroutant qu'étrange,  "une personne" plaintive commente son existence et très vite on comprend que c'est le Sang qui parle.

Extrait :
Je vous l'ai dit, mon essence, ma disposition et ma viscosité racontent toujours quelque chose. Je suis un conteur né. Les histoires découlent et les récits bouillonnent lorsque l'on a remarqué ma présence.

Puis, on fait la connaissance de Marjan, une soignante appelée Avicenne par les adeptes de la foi chrétienne. Elle pratique les arts d'Ibn Sina et c'est en tant qu'invitée de la princesse Sybille,  soeur du roi Baudouin, qu'elle réside au sein de la Tour David à Jérusalem.

Ainsi, Marjan va être amenée à mener des investigations sur des disparitions étranges et maléfiques en collaborant avec Gilles de Brousse l'hétérodoxe, un ancien moine devenu un apothicaire bien connu. Ce tandem "Persecutores demonum" devra, coûte que coûte, poursuivre sans relâche ce ténébreux ravisseur démoniaque pour dénouer leurs obscures enquêtes.


Par ailleurs, chapitres après chapitres, pages après pages, les monologues et les dialogues aux textes addictifs, vont s'enchaîner : Marjan, le sang, Sybille, la lèpre, le garde, l'apothicaire, le vent, le capitaine Guillaume de Milly, le destrier et bien d'autres encore.

Extrait :
Moi, la lèpre
Longtemps, jai sillonné les contrées immenses et torturé la chair des humains. J'en ai tordu des muscles. J'en ai mangé des visages. J'en ai emporté des âmes. Mais je me suis fatiguée. Je n'ai plus la même virulence qu'autrefois. Ma substance purulente s'est dispersée dans les royaumes et cette dilution m'a sévèrement affaiblie.

Extrait :
Moi, le vent
Ah ! Regarde étranger ! Regarde comme les masques tombent ! Regarde comme je les arrache de mes bourrasques puissantes, comme je les déchire et comme ils s'effritent pour disparaître et me nourrir ! Oui, étranger, ces fourbes, ces chuchoteurs m'ont délaissé, refusant de partager leurs histoires et me forçant à  broder une intrigue alors qu'ils m'en dissimulent les fils. Tant d'irrespect ! Voilà ce à  quoi ça vous a menés ! Maintenant, je montre ma colère et, hurlant, me déchaîne en tempête mortelle.

Persecutores demonum est un roman puissant qui tient en haleine jusqu'au bout. Les textes m'ont énormément plu, en particulier ceux du sang, de la lèpre, du vent....  C'est si inattendu et si agréable à découvrir. Un roman intriguant, mystérieux et addictif !

Merci aux éditions PVH ( Plaisir et valeurs d'Histoire ) pour cet envoi dans le cadre d'une opération " Masse Critique".
Je vais commencer par l'édition : ce livre est un bel objet, original dans sa conception comme l'est le point de vue narratif de l'oeuvre. le 4 ème de couverture se trouve ici en première de couverture et le 4eme de couverture est une illustration d'une scène du livre.
La construction du roman : ce qui marque au début n'est pas le sujet ou le déroulé de l'histoire mais le point de vue narratif choisi par l'auteur. le roman est construit en une succession de point de vue des personnages.... mais également d'éléments presque omniscients qui voient, comprennent, expliquent, et par moment influent sur l'histoire.
Aux points de vue des personnages succèdent le point de vue du vent, du sang, de la montagne, de la cité.
Cette originalité de construction apporte beaucoup de charme au roman.
L'histoire : j'ai mis du temps à apprécier l'histoire mais plus le roman avançait plus la confrontation des trois religions monothéistes et les tiraillements internes des personnages rendaient le roman passionnant.
Un regret : la désagréable impression que comme souvent la religion des " démons" les plus fanatiques est toujours la même...

Il est des lectures qui ont le pouvoir de vous transporter dans un univers inconnu, qui permettent de développer un imaginaire et de se sentir "dans sa bulle" de la première à la dernière page.
"Persecutores demonum" est de ceux-là.
Dans ce roman, dont l'action se déroule à Jérusalem et sa région au 12eme siècle, plusieurs voix viennent nous conter l'histoire de Gilles de Brousse (moine, hétérodoxe et apothicaire) et de son assistante Marjan (soigneuse), tous deux engagés par Sybille de Jérusalem, soeur du roi Baudoin, pour élucider le mystère de la disparition de plusieurs de leurs sujets, disparitions accompagnées d'une arche de sang. A ce titre, ils deviendront donc les traqueurs de démon.
Les multiples voix : celle du sang, du vent, de la pierre mais aussi celle des différents protagonistes, nous ferons suivre, chacun avec leur ressenti, le déroulement des évènements et les multiples rebondissements.
Le style de l'auteur et à la hauteur de l'histoire qu'il nous raconte, sobre, profond et très abouti. Il donne au récit une solennité qui rend la lecture très enrichissante.
Je garderai un excellent souvenir de ce roman, de cette belle fable, et c'est avec plaisir que je lirai à nouveau Stéphane Paccaud.
A ce titre, je remercie infiniment Babelio et les éditions PVH, qui m'ont permis, via l'opération Masse Critique, cette si belle découverte.