AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,96

sur 66 notes
5
15 avis
4
18 avis
3
2 avis
2
0 avis
1
1 avis

Critiques filtrées sur 3 étoiles  
«Même les gens normaux ont droit au bonheur»

Huit livres et autant de dépressions. Gilles Paris raconte une vie rongée par ce mal insidieux et comment il a pu s'en sortir. Autour de ses amis, ses amours et ses emmerdes transparait aussi un message d'espoir.

Au sein d'une maison d'édition, les attachés de presse sont des travailleurs de l'ombre. Quand leur travail paie et qu'un auteur est mis en avant, c'est évidemment parce que l'auteur a du talent et quand le livre ne trouve pas de couverture médiatique, c'est forcément que l'attaché de presse a failli. Si le cas de Gilles Paris est un peu à part, ce n'est pas tant qu'il a plusieurs décennies d'expérience dans le métier, mais parce qu'il est également auteur, avec huit livres à son actif dont le désormais célèbre Autobiographie d'une courgette, adapté au cinéma en 2016 par Claude Barras sous le titre Ma vie de Courgette. Dans les prochains mois suivront une adaptation au théâtre ainsi qu'une bande dessinée (dessins de Camille K et scénario d'Ingrid Chabbert). Il peut par conséquent porter un regard sur les deux aspects du métier. Toutefois, ce n'est pas l'aspect central de son récit. Avec honnêteté et sans filtre, il nous raconte les huit dépressions successives dont il a été victime. Un mal insidieux qui a bien failli l'emporter, car il a quelquefois accompagné sa chute d'une tentative de suicide. Et entendre alors le médecin lui expliquer que «Certains coeurs lâchent pour trois fois rien». le sien a résisté, si bien qu'il peut aujourd'hui témoigner.
Raconter que la première fois qu'il a été laissé pour mort, cela n'avait rien à voir avec une dépression mais aux coups portés par son père. Une violence physique qui a été précédée d'une violence morale puisque régulièrement, il lui répétait qu'il n'arriverait jamais à rien, qu'il n'était qu'une merde. Une phrase devenue comme un mantra, une relation toxique sur laquelle il peut enfin mettre des mots: «Je me suis tu pendant des années. Je n'ai pas cherché à me libérer auprès d'un psychologue, d'un ami, encore moins de ma famille. Je me suis défoncé, abusant de cocaïne et de vodka, j'ai frôlé le bord des abîmes, reconnu si peu le visage verdâtre dans le miroir. Accroupi au-dessus du siège des toilettes, toutes couleurs aspirées, j'ai reniflé la mort, serrant le poing, froissé comme des feuilles sèches éparses que le vent emporte.»
Gilles Paris raconte les folles années de sa jeunesse, les addictions à la drogue et au sexe, la parenthèse avec Pascaline, le seule femme qu'il ait jamais aimée, les nuits à danser et les amants qui s'accumulent jusqu'à ces matins glauques où on se sent seul, triste, perdu. La première dépression arrive en 1992, elle sera suivie de sept autres, entrecoupées par des périodes durant lesquelles l'attaché de presse fera du bon travail, notamment pour les éditions Plon, servira d'homme à tout faire de Françoise Sagan, écrira des livres et rencontrera Laurent, l'homme qui va partager sa vie, l'apaiser, le secourir. Tout semble aller bien. «Je suis heureux avec Laurent. J'ai écrit un livre qui a du succès. J'ai un chouette appartement, un travail que j'aime. J'ai enfin trouvé mon équilibre». Mais ce bonheur sera de courte durée. La nouvelle dépression qui s'amorce «restera la plus inexplicable de toutes, et la plus rude. Elle va durer deux ans».
Comme toutes les dépressions qui vont suivre, elle va s'accompagner d'un séjour en hôpital psychiatrique. Les pages sur ces établissements sont aussi éclairantes que glaçantes. Elles dépeignent «la vie sans magie et sans couleurs». Alors Gilles Paris, comme Hippolyte, son personnage dans Inventer les couleurs, crée les couleurs là où elles n'existent pas. Il écrit. «L'écriture n'est pas une thérapie pour moi, elle est ma vie, en dehors des dépressions. Quand on aime autant la fiction que je l'aime, on en injecte dans sa vie pour la rendre moins cruelle.» le paradoxe veut pourtant qu'après chaque livre une nouvelle dépression suive. Si bien qu'après la parution de Au pays des kangourous il s'imagine que ses livres sont en partie responsables de ses dépressions. «Après chaque lancement, je rechute. C'est systématique. Laurent, toujours pratique, me conseille d'arrêter d'écrire. Autant mourir.»
On remerciera l'auteur de son éclairage sincère et sans fioritures. En le suivant, on comprend combien ce mal est complexe, parce qu'en grande partie inexplicable. Et on se prend à espérer que la bête est enfin terrassée.


Lien : https://collectiondelivres.w..
Commenter  J’apprécie          362
Longtemps j'ai voulu écrire sur l'horreur que vit un "mélancolique" car je ne trouvais pas ce livre dans les publications. J'ai trouvé Noiville (La donation) Sizun, de Vigan Rien ne s'oppose à la nuit mais elle parlaient de leurs mères et toutes les trois se suicident. Parmi les livres lus certains m'ont parlé, curieusement le Trente sixième dessous de Daninos (on ne s'y attend pas, comme pour Gilles Paris) d'autres m'ont paru superficiels: je n'y ai pas trouvé ce que j'espérais: c'est le cas de ce livre: Certains coeurs lâchent pour trois fois rien; l'auteur semble pourtant sincère et dit bien qu'une dépression est chaque fois différente et pourtant il en a vécu huit avec séjour en hôpital psychiatrique. L'auteur parle de ses bons moments comme des mauvais; il a un mari compréhensif mais comme les dépressions surviennent après chaque livre, Laurent lui suggère d'arrêter d'écrire (d'autant qu'il aime son métier d'attaché de presse et qu'il le fait bien), il en crèverait, pense l'auteur.
Entre deux dépressions, il a la chance de vivre normalement et de supporter la menace d'une épée de Damoclès.
Pourquoi suis-je déçue comme je l'ai été par le livre de P.Labro, qui lui aussi est tombé sept fois pour se relever huit.
Quelques phrases de Carrière : Yoga, m'ont parues plus justes.
Mais c'est un livre sur Althusser (et son drame) et surtout Face aux Ténèbres de W. Styron (auteur également du terrible Choix de Sophie) qui ont rendus toute la souffrance et la culpabilité qui mènent souvent à des tentatives de suicide.
Pour Labro, c'est la broyeuse, pour Paris, c'est la bête. Ce dernier semble espérer que ce sera la dernière . La première vous tombe dessus sans crier gare et c'est la pire dans la mesure où on ne sait pas que ça s'arrête! Les suivantes ne sont pas moins douloureuses car on oublie que ça s'arrête aussi étrangement que c'est venu mais il y a les médicaments et l'aide médicale: brusquement le goût revient, la peur disparaît (mais comment être sûr que c'est la dernière?) S'il s'agit de psychose maniaco-dépressive (appelée désormais bipolarité: ça doit moins effrayer?) les psychiatres vous font aimablement savoir qu'il y aura des récidives; ici, seul le mot mélancolie (au sens médical du terme) est prononcé. On a tout pour être heureux, tel est le refrain de l'entourage qui ajoute qu'il faut se secouer que ce n'est pas mortel (en quoi il est inconscient de pousser au suicide). On recherche les causes: ici, c'est la relation au père violent qui l'a frappé sans retenue et qui l'a traité de "merde". Est-ce la lettre qu'il écrit enfin à son père qui lui donne la certitude de ne plus retomber; que c'est la résurrection?
Je ne m'explique pas pourquoi je suis déçue (Marie Desplechin m'a dit un jour: tu n'as qu'à l'écrire toi-même!) mais Styron l'a fait dans un livre très court mais qui a touché juste.
Le livre de Paris se termine par la longue liste de ce qu'il aime, près de cinq pages qui se terminent par "écrire". Bouffée d'oxygène!
Commenter  J’apprécie          64


Lecteurs (169) Voir plus



Quiz Voir plus

autobiographie d'une courgette

"Courgette" est le surnom du personnage principal mais quel est son vrai prénom?

Indigo
Florent
Yoan
Icare

10 questions
190 lecteurs ont répondu
Thème : Autobiographie d'une courgette de Gilles ParisCréer un quiz sur ce livre

{* *}