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Florence Courriol (Traducteur)Filippo Fonio (Traducteur)
EAN : 9782810707515
150 pages
Pu Midi (11/07/2023)
4.17/5   3 notes
Résumé :
Un soldat de la Première Guerre mondiale se fait porte-parole des souffrances et des pensées de toute une génération envoyée au front, tissant un discours démystificateur qui remet en cause les propos officiels et le patriotisme des élites.


Spectacle-récit de guerre créé le 30 mai 2015 au festival Primavera dei Teatri à Castrovillari (Calabre), au moment des commémorations de la Première Guerre mondiale, Soldat Inconnu 15-18 met en scène le so... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Ce n'est ni un roman, ni un essai historique… Mais qu'est-ce donc ?
Une pièce de théâtre ! Une pièce de théâtre très particulière ! Un soldat sur scène représente à lui seul tous les pauvres bougres italiens, extirpés jusque dans les campagnes les plus reculées pour aller affronter la mort. La pièce écrite en italien… Pardon ? Vous dites ? … En patois italien ? … Ah, dans des patois italiens issus de tout le royaume ? … Des paroles qui sonnent le napolitain, le sarde, le piémontais, et combien d'autres encore !
Cet acteur sur scène représente à lui seul tous les soldats connus, méconnus et inconnus d'Italie venus mourir pour la patrie ! La patrie, mais qu'est-ce donc pour un paysan du Frioul pour qui son « pays » s'arrête à la sortie de son village ? Qu'est-ce donc pour un Napolitain jamais auparavant sorti de sa ville ? C'est la tragédie de tous ces oubliés envoyés à la mort pour un pays dont ils ignorent presque tout tant leur univers se résume le plus souvent à la terre qu'ils labourent.
Loin d'être unifiée, la langue italienne est celle de la culture, des gens éduqués, de ceux qui ont fait des études… Une minorité qui parle de patrie, de gloire… à des hommes qui ne découvrent qu'ils sont Italiens que dans la boue des tranchées, au milieu des cadavres putréfiés d'autres pauvres zigues comme eux, éclatés sous les pluies de métal, crevant de faim et de soif… Et de froid dans l'effroi !
L'auteur de théâtre, Mario Perrotta, réussit le véritable exploit de faire s'exprimer tous ces patois dans un salmigondis compréhensible par… les Italiens ! Rassurez-vous, amis francophones, des traducteurs, dont Florence Courriol et Filippo Fonio, ont réuni leurs multiples talents pour faire vivre « en français » le « témoignage » de ce Soldat Inconnu quinze-dix-huit. Quel nom bizarre, ne trouvez-vous pas ? quinze-dix-huit !? Rappelez-vous que l'Italie est entrée dans la Grande Guerre en 1915 et non en 1914 comme la France et la Belgique, ou encore les états du Commonwealth !
Pour autant, y a-t-il tant de différences que cela avec un poilu français de la Première Guerre mondiale ? La situation n'était-elle pas quelque peu similaire avec ces Bretons, ces Poitevins, ces Basques, ou encore ces Corses ? N'ont-ils pas vécu les mêmes horreurs ? Probablement qu'en France, l'utilisation du français était bien plus répandue que l'italien en Italie, et que l'enseignement rendu obligatoire par la loi Jules Ferry du 28 mars 1882 rendait la compréhension plus aisée (mais pas nécessairement pour les soldats plus âgés qui n'avaient pas bénéficié de l'enseignement obligatoire).
Le soldat 15-18 va évoquer l'ensemble de la guerre, et l'entrée dans le conflit pays par pays, en s'exprimant comme des paysans auraient pu le faire en 1914. Cela rend la pièce d'autant plus crédible.
L'ouvrage présente sur la page de gauche le texte en « italien » et sur la page de droite, sa « traduction » en français. Essayez de lire à haute voix le texte et vous serez transportés dans la peau de ce(s) soldat(s) inconnu(s) aux multiples accents.
C'est peu dire que cette pièce, montée en 2015 pour célébrer le centième anniversaire de l'entrée en guerre de plus de quatre millions et demi d'Italiens est « violemment » pacifiste. Toutes les horreurs du conflit sont évoquées. Nul doute, qu'à part l'usage de technologies nouvelles, un combattant en Ukraine, aujourd'hui-même, n'aurait aucune peine à se reconnaitre dans ce « Milite Ignoto », ce soldat inconnu qu'on n'oubliera jamais… du moins c'est ce qu'on affirme à l'entrée des cimetières militaires. Il suffit de voir dans quel état se retrouvent certains cimetières militaires français pour se rendre compte que c'est du pipeau (contrairement aux cimetières américains ou du Commonwealth).
Si ce sujet vous intéresse, laissez-vous tenter par cette lecture. Peut-être aussi un metteur en scène audacieux vous offrira l'opportunité de la regarder au théâtre, accompagnée par des éclairs et les sons des canons !

La fin de l'ouvrage, strictement en italien, traite du parcours de Mario Perrotta et du théâtre en Italie (1920).
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Pour qui s'intéresse à la Première Guerre Mondiale et à la manière dont les textes littéraires la représentent, cette pièce de théâtre a un grand intérêt.

Pour l'Italie, la Première Guerre Mondiale est donc 1915-1918, comme le rappelle le titre de la pièce de Mario Perrotta. Ce spectacle a été créé en Italie au moment du centenaire de la Grande Guerre.

Cette guerre y est représentée comme la matrice du peuple italien, un peu comme le Canada perçoit la bataille de Vimy comme un creuset fondateur. "L'Italie s'est vraiment unifiée ici : plus de différence, plus de sud ou de nord qui tienne, on est tous égaux : nourriture de merde pour tout le monde."
La piètre condition du soldat, la peur, le danger, les blessures, la mort telles qu'elles sont peintes ici recoupent les descriptions des textes de fiction français de Céline ou de Dorgelès. le texte s'appuie sur des lettres de conscrits. Pas de glorification de l'héroïsme militaire, le monologue initial d'un soldat inconnu qui à lui seul représente tous les soldats italiens souligne la puanteur, la crasse, la boue des tranchées, les poux ; c'est un point de vue minimaliste sur ce conflit. Les mécanismes du déclenchement du conflit mondial en août 1914 sont expliqués du point de vue, rustique, d'un troufion italien de base : "Pour nous autres, c'est rien qu'une nouvelle dans le journal : même pas lue qu'on s'en torche le cul à la campagne. Nous aut' on a d'quoi faire à piocher et bêcher, pas l'temps de penser aux archiducs et à leurs bourgeoises !"

Un émouvant travail mémoriel à coup sûr. Un bel hommage aux combattants italiens de cette guerre assorti d'une dénonciation féroce du caractère dérisoire et déshumanisant de ce conflit. On est bien loin du respect inconditionnel à une devise de type "Dieu, Patrie, Famille". La vision de la guerre des tranchées que cette pièce propose rappelle les témoignages de Poilus français provinciaux (je pense par exemple à la correspondance de Maurice Gastellier, publiée récemment). L'art du dramaturge concentre, dramatise, trivialise, politise et transcende l'expérience du conscrit italien. le talent des comédiens et metteurs en scène hissera ce texte au-dessus de l'écueil du pédagogisme.

Le théâtre était présent sur le front en 1914-1918. Ce texte s'enracine donc dans une tradition historique. J'ignorais que l'on créait en Italie sur cette période. Ces représentations sur la Grande Guerre sont toujours très présentes, y compris dans le théâtre populaire, dans le monde anglophone. J'ai ainsi eu l'occasion d'assister à une représentation de la pièce "Observe the Sons of Ulster Marching towards the Somme" par Frank McGuinness. Même sujet, traitement différent, tout à fait remarquable.

Le lecteur non-italianiste, et dont la culture sur le sujet se limiterait à avoir vu le film "La Grande Guerra" de Mario Monicelli, rendra grâce à l'introduction de l'édition française, très éclairante.
L'édition est bilingue, textes italien et français en regard, la traduction semble particulièrement soignée et respectueuse de l'oralité du texte, ce qui ne peut que plaire à ceux qui le joueront.

Livre reçu dans le cadre de l'opération "Masse critique." Merci, il m'a grandement intéressé.
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Soldat inconnu quinze-dix-huit est un texte de Mario Perrotta destiné plus précisément au théâtre. Celui-ci met en avant la destinée d'un jeune combattant italien pendant la première guerre mondiale. Celle-ci débute en 1915 pour l'Italie qui a un peu tardé à s'engager dans la grande guerre. Les troupes italiennes sont elles composées de soldats venant de régions et de contrées très différentes avec des patois et des expressions marqués par ce régionalisme. Perrotta a réussi à créer une langue italienne inspirée de toutes ces provenances.
Florence Courriol et Filippo Fonio ont essayé de retrouver cette création dans la traduction française, très inspirée par le régionalisme et pleine de néologismes. Certains moments on retrouve aussi du vocabulaire de poilus, qui nous plonge dans cette période.
Le début de ce texte semble assez compliqué dans l'entendement mais en s'accrochant un peu, ce texte nous transporte dans la vie du soldat de première classe italien.
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Citations et extraits (2) Ajouter une citation
La patrie, la patrie ! La patrie c't'un truc d'étudiants, de gens qui travaillent avec les livres, pas ave' les mains, de gens qui bossent Avec leur tête, qui pensent à penser, pensent pas du tout à comment faire pour gagner leur croûte ! Ah y z'en ont du temps, et y pensent, y pensent, y pensent , mais après ça bouillonne sans arrêt dans la cervelle et à trop vouloir en faire ça fait du mal, ah ça oui, ça fait du mal, encore plus que si on en fait trop avec les mains, au pire on finit aveugle, qu'si on exagère avec les... euh... zétudes, alors là, tu vrilles, tu détrancanes... t'as compris, l'étudiant ? Fais gaffe ! L'étudiant ?! Mais rien à faire ! C'était le 28 juin, ce diable d'étudiant, ce bouffeur de livres, pam ! il tire pas sur l'Archiduc ?! 28 juin 14, 1914;;;
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Bref ! La guerre, comme qui disent les fouturistes, c'est "la grande fête de la jeunesse, de la virilité, de l'énergie physique, le bain d' sang qui régénère l'espèce" : mais va t' faire foutre ! Toi, le professeur induqué,, et çui qui t'a dit ces conneries !
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