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sur 540 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
« C'est fou. Quand on te répète en permanence qu'il y a des races et que ce sont elles qui fondent les rapports humains… Quand la religion est partout, qu'on t'élève dans l'antisémitisme, la haine des protestants, des homos, des métèques… Comment as-tu fait ? Et ta mère ? Ta mère ! Elle a grandi avec ces idées-là, elle les a partagées avec son mari… Et puis la rupture. C'est inouï. Comment avez-vous fait pour vous affranchir de tout ça ? » Évelyne me ressert un verre de vin en souriant : C'est tout l'objet du livre, non ?  »

Evelyne avait donc un père, haut fonctionnaire en Indochine puis à Nouméa, qui a élevé ses enfants dans l’exécration de l'autre. Un maurassien, pétainiste, antisémite, raciste, machiste, dont les idées détestables vont conduire sa femme et ses filles — dans la mouvance de mai 68 — vers le militantisme féministe et l'engagement politique d'extrême-gauche. Un engagement fort, dictant tous les instants de la vie d'Evelyne — pendant ses études à la Sorbonne elle va plusieurs fois à Cuba rencontrer Castro (et devenir une de ses maîtresses) — même si plus tard, alors qu'elle est professeur agrégée de lettres, devenue moins révolutionnaire, elle épouse Bernard Kouchner 😁.

La vie d'Evelyne Pisier (et de sa mère) symbolise une époque de la lutte des femmes pour leur liberté ; un moment où des idées progressistes en modifiant, entre autres, la place et le rôle des femmes, ont transformé la société en profondeur. Racontée avec chaleur et admiration par son amie éditrice, faute d'avoir pu le faire elle-même, une vie d'aventures et de combat, passionnante.

Challenge MULTI-DÉFIS 2018
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Point n'était besoin de romancer l'existence déjà si romanesque d'Evelyne Pisier (sœur d'une certaine Marie-France, pour les ceusses qui s'en souviennent), intellectuelle française aux multiples facettes, gracieuse enfant née dans les années quarante au cœur de l'Indochine en guerre.

Témoin, victime ou militante engagée, bercée par l'émergence des mouvements féministes, elle aura mené son émancipation au rythme des grands basculements du siècle dernier, de la seconde guerre mondiale à Mai 68 en passant par la révolution cubaine ou la décolonisation.

Ça nous fait un pitch plus que concis, je sais, et c'est exprès. Car le destin peu ordinaire d'Evelyne et de sa famille mérite que l'on s'attarde en détail sur cette autobiographie romancée et non sur un résumé forcément réducteur.

Avant de mourir soudainement l'année dernière, l'auteure avait fait promettre à Caroline Laurent, sa jeune éditrice et amie, d'achever son roman. Au cas où…
Il en résulte aujourd'hui cet intéressant travail à deux voix où les réflexions de Caroline se mêlent au passionnant témoignage d'Evelyne. Un cheminement conjoint vers la liberté, dans la touchante connivence d'une amitié par-delà l'au-delà.


Lien : http://minimalyks.tumblr.com/
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Je remercie Babelio et les Editions Les escales pour "Et soudain la liberté."
Quelle incroyable vie que celle d'Evelyne Pisier !
Avoir une relation avec Fidel Castro, des enfants avec Bernard Kouchner puis Olivier Duhamel. Mais, elle m'en voudrait de commencer par cela. Comme si je n'avais rien compris.
Je devrais plutôt parler de ses essais, son doctorat de droit et de sciences politiques, du fait qu'elle fut professeur émérite à l'Université Paris I Panthéon-Sorbonne. Je devrais parler de tous les pays où elle a vécu avec sa famille (via son père haut fonctionnaire), en Indochine, Nouvelle-Calédonie, Cuba, France. Je devrais surtout parler de sa vie de militante, féministe.
Elle a souhaité parler de ses premières années de sa vie par le biais d'une biographie romancée. Elle a ainsi fait la rencontre d'une jeune éditrice Caroline Laurent. Elles vont rapidement s'apprécier et devenir amies, malgré les années qui les séparent. Mais du fait de sa maladie, c'est Caroline qui a fini cette oeuvre qui mêle biographie et roman biographique.
On plonge dans ce texte, ébahis par tant d'évènements marquants, par tant de volonté et de conviction de cette femme (dont sa mère, avec tant de caractère, n'est pas étrangère) et rapidement on s'attache à elle, comme son éditrice.
Cette oeuvre oscille entre des chapitres où l'éditrice Caroline raconte leur rencontre, raconte cette amie, leur travail en amont de ce texte, et des chapitres « romancées ». Evelyne ne souhaitait pas écrire une vraie autobiographie mais avait préféré prendre des prénoms d'emprunt pour se raconter, raconter sa vie et sa famille. Evelyne deviendra Lise, sa mère Mona, sa soeur Marie-France sera un frère fictif Pierre.
Peut-être se perd-on un peu de temps en temps avec ces changements de style sans arrêt. Peut-être aurais-je préféré entendre la voix d'Evelyne, lire ses vrais mots. Mais la vie ne nous a pas offert cette chance-là puisqu'elle est décédée avant la fin de l'écriture. Et pourtant elle aurait bien méritée cela, elle si battante, si volontaire, elle qui nous montre qu'avec la foi, qu'en se battant pour ses convictions, qu'à faire entendre sa voix, même faible, on peut réussir à ouvrir quelques portes et pas des moindres. Bien entendu, c'était une superbe jeune femme blonde et elle a su en profiter. Mais c'était avant tout quelqu'un d'intelligent, positif et volontaire.
J'aurais aimé que l'histoire se déroule sur plus d'années. J'ai eu le sentiment d'un arrêt brutal, passant si rapidement sur sa vie de femme, d'épouse, de mère. Peut-être étais-je déjà conquise par ce personnage que j'aurais aimé en connaître plus encore.
J'ai regretté aussi que le prénom de sa soeur Marie-France (cette actrice avec une telle élégance) ne soit pas plus présent. Même si je sais que c'était la volonté d'Evelyne Pisier, par respect pour sa soeur (décédée en 2011) qui n'aimait pas tout ce qui était people. Pourtant le personnage de « Pierre » me perturbait (et me faisait tiquer parfois) car en réalité, nous savions qu'il s'agissait d'une soeur.
En lisant ce livre, je ne pouvais m'empêcher de penser au précédent que je venais de refermer « L'idée ridicule de ne jamais te revoir ». Merveilleux essai de Rosa Montaro sur Marie Curie et qui tout en faisant la biographie de Curie, se raconte elle aussi, faisant des parallèles avec sa propre vie, en parlant notamment de la perte, du deuil ou encore du féminisme. Des livres comme des poupées russes mi bio, mi roman, mi autobiographie.
Caroline Laurent a réussi le pari : raconter Evelyne Pisier, nous faire ressentir sa présence et être impressionnée par son caractère.
C'est un texte qu'il faut lire pour découvrir plus en détails quelques pans d'histoire : la guerre d'Indochine où elle a été enfermée 1 an avec sa mère dans un camp de concentration japonais alors qu'elle était bébé), Cuba et Castro (étonnant de le voir sous le jour de l'amoureux) et bien-sûr, surtout, l'histoire d'une femme exceptionnelle.
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Cinquième roman faisant partie de la sélection des Talents Cultura, « Et soudain, la liberté » trouve son originalité par sa conception : roman écrit à deux voix, Evelyne Pisier et Caroline Laurent, deux femmes qui n'auront passé que six mois ensemble.

En effet, la première étant décéde d'une grave maladie et la seconde, son éditrice devenue sa biographe, tentant de porter le message de la première en lui restant le plus fidèle possible et on rendra grâce à Caroline Laurent d'avoir porté ainsi la salutaire voix d'Evelyne Pisier.

On voit à quel point cette relation d'abord professionnelle s'est immédiatement transformée en une amitié réciproque, faite d'admiration et de compréhension mutuelle.

Ce livre qui alterne d'une part le récit d'une vie, celle de Lucie ( le nom du personnage d'Evelyne), l'histoire de ses parents, de sa mère Mona qui fut si importante et d'autre part la voix de Caroline l'éditrice du roman qui nous parle de son lien avec Lucie/'Evelyne,

Un récit doux et sensible, plein de sincérité qui se mue vite en une ne ode à la liberté, aux combats nécessaires pour acquérir les droits que toute femme se doit d'obtenir : un récit entre fiction et roman qui montre combien ces destinées sont peuplés de lutte sans merci entre désir et contraintes et désir de se réaliser pleinement et librement.

Un livre écrit à quatre mains avec une belle fluidité, par ces deux femmes unies par une amitié fulgurante qui laisse irriguer une émotion douce et sincère.
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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Evelyne Pisier (soeur de Marie-France peu citée, dommage !) envoie à une jeune éditrice un manuscrit à qui elle donne la charge de le romancer. 37 ans les séparent. A priori elles sont opposées et pourtant… Amitié et complicité vont naître… jusqu'à la mort de Evelyne, il y a un an. Quelle vie incroyable ! Malgré l'envie que j'en ai, je ne le dévoilerai pas parce que c'est ce qui fait le charme et que le lecteur est à chaque page tour à tour surpris, étonné, bluffé. Caroline Laurent insère quelques brides de sa vie tout en finesse. Ne se raconte pas, se lit. En un mot Magnifique !

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Je découvre cette biographie fictionnelle, Et soudain, la liberté, grâce aux 68 premières fois… un roman écrit « à quatre mains, à deux âmes », sur une idée et un manuscrit d'Évelyne Pisier et une écriture finale de Caroline Laurent.
Nous sommes devant un cas de figure assez exceptionnel : une histoire originale et intéressante mais qui mérite d'être remaniée, la rencontre entre une vieille dame et une jeune éditrice pour un travail de relecture et de réécriture… Quand la vieille dame meurt à peine le chantier littéraire mis en oeuvre, la jeune éditrice termine et publie le roman.
J'ai eu le privilège de rencontrer Caroline Laurent et de l'écouter parler de ce livre ; c'est une jeune femme passionnée et passionnante. Ce roman est devenu l'histoire et le reflet d'une belle rencontre, d'une belle amitié et il porte en lui cette force étrange et intimiste. Il y a du partage, de la transmission, une polyphonie empreinte de « confiance »…

La petite Lucie pose un regard de gamine attentive sur le monde qui l'entoure, sur cette ambiance coloniale dans laquelle elle est venue au monde, là où les « gens de couleur » sont les domestiques des blancs, là où les nounous n'ont pas de prénom mais une fonction, où elles sont malmenées et si peu considérées, sauf par l'enfant, dans « une société naturellement hiérarchique ». Il y a beaucoup de moments forts autour des nounous dans ce livre, notamment « la scène du crouton »… Nous voyons grandir Lucie à Saigon, lors de l'emprisonnement avec sa mère dans le camp de concentration japonais… Nous l'accompagnons dans sa construction de l'Indochine à la Nouvelle Calédonie puis en France, dans son parcours d'adolescente, d'étudiante, de femme, d'amante, d'épouse, de mère, de fille surtout.
Mona voulait être médecin, mais elle a interrompu ses études pour devenir l'épouse d'un haut fonctionnaire et obéir ainsi aux codes de la bourgeoisie du milieu du XXème siècle. Ce livre est l'histoire de sa quête de « libération » ; l'objet du livre tourne autour de l'affranchissement, de la rupture d'avec une éducation raciste, coloniale, antisémite, intolérante, homophobe… dans laquelle un homme vaut toujours mieux qu'une femme.
Ce livre est « un grand portrait de femmes dont le courage doit nous inspirer et, qui sait, nous guider dans nos propres vies » pour reprendre ici les termes de la dédicace de Caroline Laurent.

Ce roman est riche d'une intertextualité particulière, fruit à la fois des souvenirs et des notes d'Évelyne Pisier et du parcours universitaire de Caroline Laurent.
Je n'ai pas tout relevé mais particulièrement apprécié, entre autres, l'Antigone d'Anouilh pour faire le lien entre les nounous de Lucie et celles qui, des années plus tard, s'occuperont des enfants d'Évelyne. La littérature va souvent servir de ponts entre les époques et entre la fiction et la réalité. Nietzsche éclaire le rapport au passé, « l'attitude antiquaire » de la jeune éditrice qui ne peut rien jeter.
L'allusion à La petite Chèvre de Monsieur Séguin de Daudet pour illustrer deux points de vue antagonistes sur le courage et la défaite est assez savoureuse ; pour les deux auteures, « on ne perd rien à essayer ».
La lente décolonisation et ses limites, ses séquelles, est admirablement mise en lumière par la lecture de Peau noire, Masques blancs de Frantz Fanon…
Le deuxième Sexe de Simone de Beauvoir est remis à sa juste place ; en effet, pour nous aujourd'hui, c'est une haute référence féministe, mais pas forcément lue en entier. Le beau personnage de Marthe, la bibliothécaire, est entièrement inventé, figure emblématique et synthétique de « littéraire engagée ».

Caroline Laurent nous propose aussi une plongée dans la mise en abyme de l'écriture, dans ses nuits blanches, dans ses doutes, dans l'urgence de terminer le livre et de le faire exister… dans l'inévitable confrontation de la vie d'Évelyne Pisier avec sa propre vie de fille et de femme.
Se mettre en scène dans le roman donne une dimension autre, une ouverture ; c'est une réponse aux remarques et aux questions, une défense contre « la peur du jugement, du mépris, des mauvaises interprétations » et surtout contre « la peur de blesser, de tomber à côté de la plaque », la peur de trahir Évelyne…
L'écriture est claire et fluide bien que scandée par un chapitrage court. Cela traduit l'urgence, l'impossibilité de fignoler, de donner un cadre trop strict… Malgré la complexité entre les différents niveaux de narration, la lecture est facile… trop, peut-être.

Qui dit biographie fictionnelle, dit contexte historique, personnages référentiels et informations sur une réalité extérieure au récit. Et soudain, la liberté répond à ces critères définis par les théories littéraires, qui autorisent la liberté de l'imaginaire, mais pas seulement : il y a une dimension supplémentaire qui en fait un roman atypique et original mais qui me gêne un peu.
En effet, si Lucie et Mona sont les miroirs d'Évelyne Pisier et de sa mère, si Victor est le double de Bernard Kouchner, si Fidel Castro participe à la fiction et procure un effet de réel… la vraie Évelyne, souvent convoquée par Caroline Laurent, peut-être dans un souci de légitimité de son écriture posthume, brouille les codes du genre. C'est un ajout que j'aurais mieux accepté si le livre était axé sur Lucie, mais Et soudain, la liberté s'achève avec la mort de Mona ce qui prouve bien que le noeud thématique du roman s'inscrit autour du rapport avec cette mère, autour de son parcours exceptionnel, de son évolution d'épouse soumise et dépendante à son rôle de femme militante et libérée, jusque dans le choix de sa fin.
Ainsi, j'ai pu être perturbée par des passages ou des phrases qui mêlaient Mona et Évelyne, la mère de fiction et la véritable instigatrice du roman…

Je salue le travail de recherche, de mise en forme, d'interprétation respectueuse, la part de danger acceptés et assumés par Caroline Laurent.
Un étrange roman qui me laisse une impression d'inachevé, comme si moi, lectrice, j'avais aussi un rôle à jouer.
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Ce récit m'attirait à plusieurs titres : j'ai lu beaucoup de billets le concernant : plus ou moins enthousiastes, ensuite le thème : la condition féminine qui me touche particulièrement, et puis rien que la couverture : magnifique portrait de femme, regard étonnant..... à l'époque de la révolution cubaine d'une femme qui assume ses choix, qui va jusqu'au bout mais avec un petit côté fleur bleue. Mais n'allons pas trop vite.

Et d'ailleurs il n'est pas question d'une femme mais de 2 femmes, voir 3, non 4 : Mona, Lucie, Caroline, Guillemette, Marthe et puis de toutes les autres. Et tout commence avec Mona et là nous partons de loin.... Mariée à un homme raciste, colonialiste, pétainiste, antisémite, brutal etc..... tout pour plaire mais le problème c'est qu'il lui plaît, elle l'aime et il l'aime, elle le suivra au bout du monde, frôlera la mort avec sa fille (Lucie/Evelyne) dans les prisons japonaises durant la guerre d'Indochine, aura un amant, divorcera, reviendra.

Lucie/Evelyne, une des auteures avec Camille Laurent, qui sont devenues très proches, très vite, amies de courte durée puisque Evelyne est décédée après quelques mois de collaboration. Un destin étonnant, qui fréquentera Fidel Castro, rencontrera Ché Guevara, épousera un médecin humanitaire de renom...... Un certain Bernard K (Victor dans le récit).

J'ai été touchée, intéressée par l'amitié de ces deux femmes qui semble avoir été profonde, intense, ébauchée mais incomplète, mais tel n'était pas le but du livre. Et là est un peu le problème : biographie, roman, féminisme, amitié ...... tout se mélange un peu.

Le personnage le plus marquant pour moi est Mona : peut être une question de génération mais aussi parce que c'est en partie cette génération qui a été de toutes les luttes féminines, sûrement par leurs parcours des années 40 : planning familial, avortement, contraception, liberté, droit à mourir dans la dignité etc.....  Ce qu'elles ont vécu, enduré depuis si longtemps ont forgé une énergie,  une force incroyables mais avec parfois des réflexes encore violents devant certaines causes (homosexualité) mais avec la lucidité de reconnaître ses erreurs pour Mona.

Evelyne a été élevée par une mère qui a du se battre pour exister, pour gagner sa liberté, pour affronter le regard des hommes, de la classe bourgeoise dans laquelle elle vivait. Elle a permis ainsi à sa fille d'être libre et de faire ses choix, de vivre sa vie. On suit la lente transformation de cette mère, la prise de conscience de sa condition et tout ce qu'elle a refusé par la suite. Une vie libre, refusant le mariage par tout ce qu'il a de contraignant et d'enfermement, portant un regard sur la détresse humaine et une détermination à vouloir changer les choses. Agaçante parfois par sa passivité au début mais sûrement expliquée par l'amour qu'elle portait à son mari, par son éducation, mais active, combattante ensuite, jusqu'au bout refusant même de laisser le temps et la souffrance passer sur elle.

Dans sa philosophie, rêver et agir se confondaient : elle voulait la vie mais en mieux. (p85)

Du fait du décès d'Evelyne Pisier durant la rédaction de ce livre, Caroline Laurent a repris les rênes et ses interventions régulières au cours du récit sont parfois un peu gênantes car elles le coupent, interrompant le flux de l'histoire, mais peuvent aussi permettre de comparer, à 50 ans d'intervalles, que parfois les choses ne changent pas tant que cela ou que les combats du passé, au contraire, ont pu les modifier. Elle nous fait surtout partager l'amitié qui la liait à Evelyne, rapide, fulgurante, inexplicable sûrement une concordance de parcours, de passion.

Pour moi un flash-back sur une époque, pas si lointaine, que j'ai connue, mais où les choses ont bougé un peu mais nous partions de loin, les combats étaient rudes, violents parfois, mais grâce au combat de certaines, en particulier Simone Veil et Simone de Beauvoir, nos vies ont changé et il n'est pas inutile de les rappeler (voir les récents scandales). 

On découvre également un Fidel Castro amoureux,  assez caricatural même, bien loin de l'image que l'on peut s'en faire. Image média et intimité...... En parlant d'intimité je me suis interrogée sur l'absence de Marie-France Pisier dans le récit mais on en a l'explication à la toute fin du livre.

Le livre est composé de 3 parties : la première retrace le parcours de Mona en Indochine, la deuxième traite de la découverte du féminisme par Mona grâce à Marthe et en particulier du deuxième sexe de Simone de Beauvoir, la troisième le retour à Paris et les combats.

J'ai été beaucoup plus passionnée par la narration du parcours de Mona mais je ne comprends pas la volonté de modifier les prénoms alors qu'il est clairement établi qu'il s'agit d'une biographie enfin deux biographies : Mona et Lucie (Evelyne Pisier et sa mère). Soit on romance totalement soit on assume totalement surtout que certains personnages sont clairement révélés.

Je pense que la lecture peut être très différente en fonction de l'âge que l'on a : pour une tranche d'âge ce sont les souvenirs plus ou moins bons, pour une tranche d'âge plus jeune c'est une découverte des luttes féminines et de la lente et difficile accession à la liberté pour les femmes.
Lien : http://mumudanslebocage.word..
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Deux plumes entremêlées (Evelyne et Caroline) pour deux vies entremêlées, indissociables tant elles se sont influencées l'une l'autre : Mona la mère et Lucie-Evelyne sa fille.
Avec seulement une vingtaine d'années de différence et une même fougue pour les justes causes, chacune suit un parcours de pasionaria, entre idéal, ferveur et fureur.
A la fois roman et témoignage, le récit exalte leur penchant pour la vie militante et leur désir tout puissant de liberté, avec ses limites, ses erreurs, ses contradictions .
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Livre lu dans le cadre du Prix Elle des lycéennes 2018.

Evelyne Pisier est décédée un jeudi de février 2017, en laissant inachevé un projet d'écriture commencé avec son éditrice Caroline Laurent. Très touchée par la mort de son amie, cette dernière a pris son courage à deux mains et a décidé de terminer le livre, selon les dernières volontés d'Evelyne. Dans ce roman, les deux femmes réinventent l'histoire de la mère d'Evelyne, « Mona ». Jeune mère au foyer au départ follement amoureuse de son mari, un pétainiste, qui élève leur fille, Lucie, dans une optique raciste et intolérante, elle va petit à petit se détacher de lui pour devenir plus indépendante. Lorsque le Deuxième Sexe atterrit entre ses mains, tout change. Mona et sa fille ne sont qu'au début d'un long chemin : celui de la liberté…
Il s'agit d'un roman efficace et pertinent, émouvant parfois. Caroline Laurent insère dans le récit des anecdotes, comme pour poursuivre le dialogue avec Evelyne : j'avoue avoir parfois été dérangée par ces intrusions qui nous font sortir du récit principal – certains commentaires me paraissaient moins pertinents que d'autres. Toutefois, je me suis régalée à la lecture de ce livre : l'enfance à Hanoi puis l'adolescence dans les rues de Nouméa, mais aussi la vie au camp suite à l'invasion japonaise, la vie auprès de Fidel Castro : Lucie est devant nous, et nous l'observons grandir et mûrir. Evelyne Pisier et sa mère ont eu une vie remplie et passionnante : une vie de roman.
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Cet ouvrage à la structure inhabituelle est écrit à quatre mains, Evelyne Pisier ayant fourni la « matière première » à sa jeune éditrice qui a transformé ce leg en roman. C'est un récit à deux voix qu'elle propose, avec une alternance de chapitres dont certains racontent le passé de « Lucy », et d'autre reprennent le ressenti de la jeune éditrice qui nous dévoile les coulisses de sa rédaction. Mon avis est partagé sur ces derniers : Caroline Laurent n'avance pas masquée, ces courts intermèdes nous ramènent au temps présent. Très bien écrits, intéressants, mais ils interrompent le récit principal, et semblent répondre à un besoin de justifier une certaine liberté dans la réécriture d'un leg composé de conversations, récits, lettres et photos qui s'avère sans doute très brut. Mais quel leg ! Lucy, fille de Mona, grandit d'abord en Indochine puis Nouvelle Calédonie, dans un environnement familial marqué par un père pétainiste et une mère lumineuse. Un récit très fort, certains passages – le camp à Hanoï – sont remarquables d'évocation. Lucy et Mona sont des personnages inoubliables, leur évolution nous guide dans les soubresauts de la société d'après-guerre. J'ai regretté que sur la fin du roman Mona perde de sa substance et de sa cohérence. Notamment dans la douleur de séparation de ses enfants devenus grands. Comme si elle s'était affranchie du carcan de femme qui lui était imposé mais pas celui de mère. Ainsi quand nait le bébé de sa fille : « Elle aurait voulu seulement se réjouir, profiter de ce moment si rare et si beau, mais l'angoisse, la sale angoisse à gueule de bête, pointait déjà. Elle était de trop ; sa fille désirait rester avec son mari et son bébé, seule. Et elle ? Exclue. »
Une lecture inhabituelle pour moi, allant toujours à reculons vers les romans contemporains primés, que je ne regrette absolument pas.
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