Les élégantes éditions de poche bilingues des Belles-Lettres donnent au public le texte des grandes oeuvres antiques, Iliade, Odyssée, Enéide, Histoire, mais aussi des textes moins connus, comme cette Vie de Plotin, rédigée par son disciple Porphyre. Porphyre est l'auteur d'une critique philosophique du christianisme que nous avons perdue, critique qu'il faisait au nom de la philosophie et de la culture gréco-latines. L'éloge de son maître Plotin tend à éviter l'ordre chronologique et il choisit une forme plus thématique de la biographie, propre à la vie et au destin d'un homme de pensée. On pourrait souligner deux points frappants : le premier est que la philosophie au III°s est une manière de vivre, l'objet d'une conversion et d'une mise en ordre de l'existence, plus qu'une discipline universitaire. Pierre Hadot l'a bien montré dans son introduction à la philosophie antique. Le second concerne la vie idéale telle que ces hommes la voyaient : avec Peter Brown ("Le renoncement à la chair") on se rend compte que païens et chrétiens, en ce temps-là, parlent tous le même langage de l'ascèse et de la chasteté. Si tout le monde, dans l'empire romain tardif, s'accorde à mépriser le corps, les chrétiens scandalisent les païens non par leur ascétisme et leur courage devant la mort (on les admirait plutôt pour cela) mais parce qu'il introduisaient la chair, l'incarnation, dans la sphère divine que le paganisme concevait comme purement incorporelle. Ce petit livre nous fait entrer dans un univers mental très différent.
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A vingt-huit ans il s'adonna à la philosophie ; on le mit en relation avec les célébrités d'alors à Alexandrie ; mais il sortait de leurs leçons plein de découragement et de chagrin, au point même de raconter ses impressions à un ami ; cet ami comprit le souhait de son âme, et l'amena chez Ammonius qu'il ne connaissait pas encore. Dès qu'il fut entré et qu'il l'eut écouté, il dit à son compagnon : "Voilà l'homme que je cherchais." De ce jour, il fréquenta assidûment Ammonius.
§3, p. 9
Il eut encore pour compagnon Zéthus (...) ; c'était lui aussi un médecin, et Plotin l'aimait beaucoup ; mais comme il avait un naturel politique, porté à la politique, Plotin essayait de le redresser.
§7, p. 27