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Philippe Pratx est un auteur discret qui se renouvelle à chaque parution. Son dernier ouvrage est un recueil de poésie avec en toile de fond la Colombie.

Philippe Pratx est le porte-voix des anonymes, des humbles. Des personnes tellement insignifiantes qu'elles oublient de raconter ce qu'elles sont. L'auteur nous offre de belles pages, les mots sont simples mais nous touchent en pleine poitrine. Il nous relate la vie simple, la souffrance, la mort, de laissés pour compte. Beau, authentique et indispensable.
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« Je n'existe pas
Je n'ai voix que de vos vies »

C'est ainsi que commence Humble chant, ce recueil de poèmes que nous délivre Philippe Pratx.
C'est un hommage, c'est une ode, c'est un chant qui convoque les plus humbles, ceux qui n'ont pas de voix, un texte pour leur en donner enfin une.
Philippe Pratx convoque les mots, le ciel, des plaines immenses, les horizons lointains, le ruissellement des rivières, le vol des colibris...
Il le fait sans bruit, sans éclat, il redonne naissance à celles et ceux qui parfois n'existent plus, ceux qu'on ne veut plus entendre, à qui l'on ne prête pas attention parce qu'ils sont considérés comme insignifiants, écrasés, méprisés, oubliés. Ils naissent, vivent et meurent ainsi.
Philippe Pratx leur offre une autre vie, tout en jetant un cri de révolte sur le sort qui leur est donné. La souffrance, les rebuffades, la répression...
C'est une litanie, c'est une prière, je dirai même que ce texte généreux est un acte d'amour.

« vous nous traitez comme des ombres
vous ne comprenez pas que l'on puisse être humble
à notre humilité vous ne savez répondre que par
l'humiliation »

L'écriture de Philippe Pratx met du baume au coeur. Poète des abîmes, il veut combler la détresse sidérale des laissés-pour-compte.
Mais Humble chant montre aussi un chemin.
En lisant ce texte, nous voyons bien que Philippe Pratx s'adresse aux peuples de Colombie, plus précisément aux minorités de ce pays. Pourtant, je ne peux pas m'empêcher d'y voir ici une portée universelle.
Ce texte est véritablement un chant puissant, il y a une force incantatoire dans ses mots.
Ne pas avoir peur de l'infini, des abîmes solitaires...
Certains poèmes sont douloureux et obscurs, d'autres attirent le soleil et la joie, c'est une alchimie verbale, onirique, sensuelle.
C'est un texte qui sent l'odeur de la peau, le soleil écrasant par-dessus les pages, la peau comme un territoire qui mugit.

« je ne suis rien
ce je n'est rien
si ce n'est cette volonté d'être
en dépit et malgré
si ce n'est cette peau
cet oripeau
qui cache plus qu'il ne montre
qui montre plus qu'il ne cache
ces rides aux coins des yeux
ces entrées de cave sous les yeux
ces taches qui grandissent
ces rides encore ces autres rides
ces effondrements »

C'est une terre singulière où faire escale ressemble à un coeur qu'on délivre enfin.
Faire parler ces autres jusqu'ici aux voix mutilées, c'est aussi exister à travers leurs voix enfin entendues. Leurs vies.
En lisant ce texte, en l'aimant, en abordant ses rivages, nous devenons tous des enfants d'Amazonie.
Je remercie Philippe Pratx pour m'avoir fait confiance une fois de plus en m'adressant ce texte torturé et attachant, empli d'humanité, que j'ai beaucoup aimé.
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Je remercie en premier lieu Philippe Pratx pour la confiance qu'il m'accorde en m'offrant ses oeuvres à leur sortie. Je suis toujours admirative de sa façon d'écrire sur tous les sujets. Aucun livre ne se ressemble. Et que ce soit de la prose ou de la poésie, il a une plume reconnaissable entre toutes.

Passée l'adaptation à l'absence de majuscules et à la mise en page avec des espaces répétitifs, je me suis laissée emporter par la poésie, par la magie des mots. Sous des dehors modernes, les messages restent intemporels : misère, souffrance, répression… ce qu'ont pu vivre les peuples d'Amérique latine, d'une part, mais également toutes les minorités opprimées. Les poèmes sont à lire à plusieurs degrés.

Ce recueil est à lire absolument !
Lien : https://promenadesculturelle..
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‌ Héraut des humbles de Colombie, ce chant résonne des silencieux, Indiens autochtones, mais aussi descendants d'esclaves noirs, paysans ou citadins pauvres. La révolte noyée dans le sang il y a 2 ans ressurgit à travers les prénoms de ceux qui y sont restés, qui n'étaient pas dans le programme au goût furieusement cosmopolite : "l'art de vous élever au prix de cent bassesses".


Un texte scarifié par chaque entaille faite aux légendes qui comblaient les peuples millénaires.
On suit les rêveries de l'auteur le long des chemins des peuples du Soleil, anciennes tribus Calima et Muisca, des chemins faits aux pieds de toute une vie ; arbres et montagnes aux visages familiers, écorces lues en braille.
Se gargariser d'un paysage-animal fait de muscles et de peau, un être vivant dont le pouls donne l'heure et le sens à chaque pulsation.
"Fouler cette terre en sachant en sentant tous les corps tous les esprits toutes les âmes que je suis".


Ah la cabane au sable fin ! Comme il nous tarde d'y poser la tête, les paupières traversées par les silhouettes des chevaux enfuis.
Un texte célébrant les courbes, voussures et encolures , sinuosités des veines-rivières. Elles saperont un jour sans défaut la course rectiligne du métal propulsé vers nulle part des modernes civilisations mangeuses d'hommes, mondes sans légendes.

Merci à l'auteur d'avoir partagé ses rêves de paix et de silhouettes glissant entre les arbres.
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La Colombie
Cette terre éloignée qui m'est totalement inconnue,
Philippe Pratx me l'a fait découvrir au travers de ses poèmes où : les chiens, les oiseaux, les cochons, les petits enfants, les poules, les pêcheurs, les boutiques où l'on vend de tout même de l'insolite ; on mange dehors, on boit des bières sous les auvents de tôle ...

"Que l'humilité de leur vie soit la ligne qui mesure les mots".

Talent certain d'un "fou sublime" qui nous offre ces poèmes douloureux, obscurs qui parle de la mort et glorifie la vie -

Ainsi que des chansons qui se connectent entre elles en un long chemin dans un pays où le désespoir des humbles donne au poète un regard d'où surgit un art poétique dans de riches alchimies verbales.

Chants qui résonnent de nuages en nuages et se dispersent dans l'air pour former une brume.

"Invitation au voyage vers l'éclat de cette "lune humble", si nécessaire à nos yeux, même si elle ne parvient pas à sauver le monde : la poésie".
(Juan Sebastian Rojas)

"Ainsi sans bruit, entend-on le chant de ceux qui n'ont pas de voix, ou qu'on ne voudrait pas entendre, parce qu'ils naissent, vivent et meurent trop humbles pour qu'on y prête attention".

Et bien, Philippe Pratx a su couché sur le papier un bel hommage rempli d'humanité à tous ces humbles qui nous sont inconnus.

Merci à lui d'avoir bien voulu partager cela avec moi et d'avoir eu la gentillesse de m'envoyer et de me dédicacer son livre.
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CANTO HUMILDE – CHANT HUMBLE - PHILIPPE PRATX*****

« Je n'existe pas
Je n'ai voix que de vos vies », quelle meilleure façon d'exister ?

J'étais partie loin, très loin, dans des contrées où le passé est mort, sauf dans la mémoire, où la terre a souffert, elle s'en souvient encore, où l'herbe a brûlé et d'autres vies avec elle, les cendres en parlent, où la vie demeure puisqu'elle porte ce nom, et dans ces contrées éloignées et tellement proches j'ai revécu la colère et embrassé les humbles, j'ai crié ma rage et mon impuissance, j'ai souri aux humbles et serré leurs mains, les guambianos et les koguis, j'ai appris leur langue, le ticuna, maintenant un isolat, et monté à cru les plus beaux étalons, me suis accrochée à leur crinière face au vent et aux grandes étendues et suivi les cours des rivières, je me suis arrêtée chez les wayuus, ils m'ont offert un alijuna, cadeau précieux.

C'est la Colombie et ses peuples, c'est la terre entière qui crie, gémit, sous le poids lourd de l'indifférence du mépris et de la cupidité, c'est la vie qui s'éteint, ce n'est pas pour demain, vous dites, c'est vrai c'est pour après-demain.
Des chants comme une prière, une litanie, un amour entier pour ceux dont la vie a creusé des rides plus profonds qu'ils ne veulent montrer, dont la peau s'est tannée au travail sous le soleil de feu et dont la voix est celle des « los nadie »(personne) .

L'endurance des llaneros va au-delà des vastes plaines herbeuses et au-delà du temps dont les marques la rendent encore plus forte et plus solide.
De tous les noms dont la beauté s'est fait baptiser, elle a choisi ici, dans les plaines aux horizons lointains, les noms de dureté, chevaux et poésie, j'ai accompagné leur solitude, celle qui ne fait pas mal, car « ce qui fait mal/c'est une douceur menteuse/une douceur violente/.../nous étouffe et nous vide/.../elle pèse sans poids », et dans notre solitude nous avons chanté la guajira accompagnée du son plaintif des guitares.

L'amour et la poésie sont inséparables sous la plume et dans le coeur de Philippe Pratx. Amour sensuel qui caresse et embrasse, amour hommage aux fils de la terre, amour révolte contre le saccage, et amour tristesse et nostalgie après le désastre, devant les ruines et devant cette certitude "de ne rien pouvoir. »

La colère bouillonne dans mon ventre, elle m'étouffe mais je continue à lire :
« et vous nous contemplez
non pas nous
ce serait trop d'honneur pour nous
mais notre posture d'impuissance...
vous nous traitez comme des ombres
vous ne comprenez pas que l'on puisse être humble...
vous souvenez-vous que vous êtes nos semblables ?
vous chassez ça
tout de suite de votre esprit...
parce que vous êtes plus vieux que nous
vous croyez être plus respectables
parce que vous êtes jeunes
vous nous prenez pour de vieux cons
parce que vous êtes riches
vous nous prenez pour des ratés
parce que les frigos
de vos têtes
sont pleins de certitudes
vous jouissez de voir les
convulsions de nos doutes affamés
vous n'êtes pas
plus forts que nous
mais vous savez tricher...
mais vous n'avez jamais
honte d'oser
quand il n'y a pas de risque et
beaucoup à gagner...
votre indifférence plus méprisante que le mépris. »

Cinq lettres meurtrières ESMAD, et tant de morts, mais leurs paroles et leurs noms resteront vivants : Angie, Nicolàs, Brayan, Maicol, Jesus, Alison, Einer, Marcelo, Cristian, Llucas, Dilan. Pour le souvenir, ils sont la vie.

« ce monde meurt
sans apocalypse
cela peut prendre encore des siècles
la sagesse
l'humilité
aurait pu le faire vivre
plus longtemps
avec plus de bonheur. »

Le grand suicide de l'humanité entière est en train de se faire, la vie crie au secours :
« car la vie quand même !...
celle qu'on entend et celle qu'on n'entend pas
celle qui te ligote les chevilles
pas pour les immobiliser au contraire
pour insuffler la frénésie le souffle le feu...
penser à tout ce qu'on peut faire
de sa vie
les rêves oh ils ne sont pas tous bien reluisants
mais ça te donne la rage de vivre .»

Où trouver des mots plus justes plus éloquents, plus forts pour parler du Canto humilde - Chant humble de Philippe Pratx ?
Dans le texte même témoin d'un style qui martèle l'ignominie et panse les plaies, d'un rythme qui suit les battements du coeur, les pauses de respiration, le recueillement, et l'énergie d'un vie rebondissant à chaque vers et à chaque page.

Le texte est témoin d'un poète qui ne pourra peut être pas sauver le monde mais en tout cas l'éveille, transmet, ne laisse pas mourir des voix d'un passé inconnu par un grand nombre, dont je fais partie, et donne aux humbles la place respectée.

Toujours le texte est témoin d'un chroniqueur authentique, connaisseur de l'histoire d'un peuple dont il partage la vie.

Je souhaite, tout comme Juan Sebastian Rojas qui a préfacé tes chants, que le plus grand nombre de lecteurs lisent tes pages et s'empreignent d'un cri de révolte, d'un chant d'amour, d'un style dont la poésie, la noirceur et la lumière viennent d'une profonde obscurité et portent la cape du talent et la voix de tous les humbles frères humains.
Magistral !
Un énorme merci, Philippe, pour tout.
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Voici des poèmes hallucinés, d'un monde tantôt rêvé, tantôt perdu ou tantôt refuge, tantôt violent et néant. La violence des hommes se retourne contre eux, contre la vie, toute forme de vie. Ces poèmes sont des chants comme des lamentations, un appel à l'aide, un souvenir qui fait naître la nostalgie. On y croise des terres désertées par le bonheur, des territoires confisqués, des mémoires effacées, l'absurde, la mort toujours, semée partout, la résistance aussi, la lutte sociale et politique.

La partie Chansons exprime toujours de la douleur, qui s'exprime à travers celle du deuil, de l'enfermement mental, de la culpabilité, de la chasse à l'homme, de la trahison amoureuse, de la lutte féministe. Une belle découverte que cette seconde partie.
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Ma deuxième incursion dans l'univers poétique de Philippe Pratx avec Humble chant.
J'ai virtuellement rencontré l'auteur sur Babelio… Je ne le connaissais pas avant ; pourtant, nous sommes nés au même endroit et sommes pratiquement du même âge. En outre, nous avons un pays lointain en commun : la Colombie…

Une référence au Chant général de Pablo Neruda… Quelques accents à la manière de François Villon, aussi…
Une lecture que l'auteur nous propose de prolonger par un album de photos accessible avec un lien Internet. Un recueil de poèmes en hommage à ceux qui, en Colombie comme ailleurs, sont les plus humbles. Évidemment, j'embarque pour le voyage. Lecture volontairement fractionnée pour m'approprier les poèmes.

Pas de ponctuation, pas de majuscules… Même le texte se fait métaphore d'humilité. Vers libres.
Pour un recueil de poèmes, n'attendez pas de moi une véritable chronique. En matière de poésie, je suis touchée (ou pas) et il est question de ressenti. Certains poèmes me parlent et se répondent, d'autres sont restés, pour moi, incompris.
J'ai lu dans ce recueil des accents épiques, une volonté de rendre la Colombie à ses premiers habitants, de révéler une mémoire tellurique mise à mal par l'Histoire (avec ce grand H destructeur) de la colonisation, de l'esclavage, des guerres civiles… L'auteur parle d' « histoire assassinée »…
La tonalité d'ensemble du recueil m'a semblée résignée, au sens de capacité à constater sans illusion, de poser des mots sans vraiment croire à leur possible valeur de résilience. Philippe Pratx nous montre un monde qui meurt et se regarde mourir.
L'auteur a aussi ancré ses vers dans des faits d'actualité récents, comme la violente répression policière lors de la grève nationale de 2021, quand les escadrons mobiles anti-émeute ont délibérément visé les yeux des manifestants et même tiré sur eux à balles réelles…
J'y ai trouvé aussi une grande humilité, celle annoncée dans le titre… Et puis, il y a cette quête, pas identitaire, mais personnelle. Moi aussi, j'ai un peu de Colombie au fond du coeur, j'ai laissé un peu de moi, là-bas, dans ce magnifique pays)… Alors, à ma manière, je me suis approprié ces poèmes.

Mes mots sur ceux de Philippe Pratx, pour vous donner envie d'y mettre aussi les vôtres :
Les humains réduits à leur peau et à ce qu'elle nous dit…
La vie dans les villages reculés…
La vie précaire…
La vie des habitants des plaines, à cheval. La nostalgie, une danse…
Des chaussures (Moi aussi, j'ai des images de la Colombie au fond du coeur et j'ai pensé au monument de Carthagène, une sculpture géante représentant de vieilles bottes)…
Une montagne qui brule…
La Violencia, cette période ambiguë et troublée de l'Histoire colombienne…
Légendes amérindiennes, fondatrices…
La vraie vie sous la couleur locale…
Une ballade des victimes de L'ESMAD (Escuadrón Móvil AntiDisturbios)…

Les « Autres chansons » sont davantage en lien avec l'imaginaire, avec des références à Alice au pays des merveilles de Lewis Carroll, une mélancolie romantique, des airs de blues, des paroles féminines sur le consentement, sur la violence, la jalousie… Les textes sont plus académiques, plus structurés avec ponctuation et majuscules, refrains ; j'ai ressenti un besoin de musique pour les accompagner, une envie de fredonner : « Tchou tchou bidou wa… ».

Vous aviez raison, cher Philippe Pratx, ce recueil a beaucoup parlé à ma sensibilité, plus que Carmina Vltima.
J'ai savouré chaque poème et je sais que j'y reviendrai. Les documents sonores sur http://www.philippepratx.net/chindex.htm, en espagnol, sont vraiment superbes.

Un magnifique recueil !

Lien : https://www.facebook.com/pir..
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(en italique, mes mots, les autres sont ceux de Philippe Pratx)

Fou
mais écoutez la voix elle n'est pas ma voix
ces mots sont ceux de la Bible
ce n'est pas de la haine pas de l'amour
cela n'a aucun sens c'est juste la vérité
je répète sans cesse la vérité sans jamais me fatiguer

Llanero,

Nous voici dans les pas de Pedro Paramo,
quand je lui prêtais mes yeux pour pleurer

un cheval ne parle pas n'écrit pas n'écrit pas de poésie
Vouloir démontrer en partant de l'idée (en elle-même) que les idées (dans les choses) ne sont point l'idée (en elle-même) vaut moins que de vouloir démontrer en partant de la non-idée que les idées (dans les choses) ne sont pas l'idée (en elle-même). Vouloir démontrer en partant de cheval (en général) qu'(un) cheval (blanc) n'est pas (un) cheval (en général) vaut moins que de vouloir démontrer en partant du non-cheval qu'(un) cheval (blanc) n'est pas (un) cheval (en général). En vérité, l'univers n'est qu'une idée ; tous les êtres ne sont qu'un cheval.


la nostalgie la nostalgie
un dessin d'enfant dessiné par un homme
déjà mûr
pas vieux mûr
comme murissent les douleurs nées de la douceur



c'est du genou de Yuche que sortirent les humains
quelle guêpe l'avait piqué ?
et l'arbre lui l'arbre Lupuna
dont l'ombre couvrait le chaos
il ne marchait pas non accroché au ciel
il tomba d'un coup et lui aussi créa le monde
ça ce sont des légendes

Resté stérile
Nul Sparte n'y naquit.
Et Cadmée laboure encore avec ses taureaux féroces
un champ pour y enterrer les dents du monstre,
gardien de la toison d'or.



peut-on être sûr et aveugle à la fois ?
parce que les frigos de vos têtes
sont pleins de certitudes
vous jouissez de voir les convulsions de nos doutes
affamés

La vie est un vide qu'on comble avec de l'erreur
même pas
juste votre indifférence
la négation de nous
votre indifférence plus méprisante que le mépris.



rêver des rêves,

Nous serons les rêveurs de rêve du deutéronome


quand toutes les routes du pays laisseront de nouveau
passer le flot du quotidien qui rassure et qui dispense de
penser
quand les tables des riches seront de nouveau pleines
du superflu
leurs tables et leurs poubelles
quand les ventres des pauvres seront toujours vides

la famine est ma nourriture

du nécessaire
tu m'oublieras
alors je serai là seulement

Comme je lisais des lignes impérissables,
je glissais dans les souterrains du vertige
où les lettres et les mots tout autant implacables
me défiaient de comprendre leur folle voltige.

Mon esprit jeté par ces tourbillons furieux
sur les rivages désolés des océans
d'obscurité et de secrets mystérieux
se perdait dans le voyage au coeur du temps.

Lisez ce rêve en mots,
Philippe Pratx possède la parole.




écoutez sa voix
ses mots,
aussi ceux de la Bible,
du Deutéronome
'rêveur de rêves'
rêves d'amour et de justice
autour d'un cheval qui ne parle pas n'écrit pas de poésie
Vouloir démontrer en partant de l'idée (en elle-même) que les idées (dans leschoses) ne sont point l'idée (en elle-même) vaut moins que de vouloir démontrer en partant de la non-idée que les idées (dans les choses) ne sont pas l'idée (en elle-même). Vouloir démontrer en partant de cheval (en général) qu'(un) cheval (blanc) n'est pas (un) cheval (en général) vaut moins que de vouloir démontrer en partant du non-cheval qu'(un) cheval (blanc) n'est pas (un) cheval (en général). En vérité, l'univers n'est qu'une idée ; tous les êtres ne sont qu'un cheval.

Au pays de Rulfo
c'est du genou de Yuche que sortirent les humains
et les titans des dents à Sparte
quand Nietzsche dit 'Le contraire de la vérité, ce n'est pas le mensonge mais la conviction'
parce que les frigos de vos têtes
sont pleins de certitudes
et les ventres des pauvres seront toujours vides
du nécessaire

On n'oubliera pas Philippe Pratx,
aiguillon de nos indignations.
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Pour moi, un poème est réussi quand j'oublie que je tiens un livre dans les mains, quand je quitte le moment présent pour partir loin, ou que le poète me fait voir le monde différemment.
Avec ce recueil, je suis bien parti à presque 9 000 km de chez moi (je sais où se situe la Colombie maintenant), j'ai bien oublié que je tenais ma liseuse dans mes mains.
Certes, pas tout de suite, Il m'a fallut le temps d'entrer dans l'univers de Philippe Pratx, le temps de naviguer sur son site internet, visualiser les photos qui figurent dessus et qui permettent de bien cerner ce qui a parfois pu être au départ d'un texte.
Puis sont arrivés des textes que j'ai pris de plein fouet.
Sur le mépris des riches pour les pauvres, les humbles.
Sur le mépris de l'Homme pour sa planète.
Sur les émeutes sanglantes de mai 2021 et les exactions de commandos civils à Cali, une des villes importantes du pays et "Paroles des morts" qui rend hommage à certaines victimes de cette folie humaine.
Quelle triste espèce nous formons sur cette Terre.
Allez, pour revenir sur terre, quelques derniers textes, des dernières chansons.
Un grand merci à l'auteur de m'avoir transmis ses textes, pour cette belle découverte.
Je ne regarderai plus la Lune de la même façon, cet astre HUMBLE qu'on détecte à peine quand elle parait après le grand show du coucher du Soleil, ce grand acteur.
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