Plume à la main, vingt-deux internationalistes témoignent et racontent leur participation à la lutte armée menée au Rojava, le sud-ouest du Kurdistan, soit le nord de la Syrie. Chacun, de sa voix libre, écrit, avec une grande retenue et une émouvante pudeur, ce qu'il a vu, vécu, connu au Rojava. Chacun livre un peu de son expérience pour faire connaitre, au monde, une guerre que l'on a suivi de loin, très loin.
Les textes sont courts, forcément. Certains le sont même beaucoup trop. On voudrait parfois davantage. On voudrait savoir pour mieux percevoir même si on ne pourra jamais totalement entrevoir ce qu'est réellement une guerre. Les mots ne suffisent pas pour dire son atrocité et sa misère. Ils permettent seulement de sortir de l'indifférence. Et c'est sans doute ce que veulent leurs auteurs. Ils veulent secouer, même un peu, notre conscience; lui dire que le monde ne s'arrête pas à notre nombril, qu'il existe un ailleurs menacé où des âmes plus éveillées essayent, avec beaucoup de difficultés, de faire advenir un monde, une société meilleure. Ils veulent, ces témoins, qu'on les regarde enfin; qu'on cesse de leur tourner le dos car notre indifférence n'est que lâcheté et mépris. Surtout et plus que tout, elle n'est pas sans conséquence.
Ce livre, dont les droits d'auteurs seront reversés à l'association Rojasor (Soleil rouge), est salutaire. Il est nécessaire, bienvenu. Même imparfait, même lacunaire, même avec quelques défauts - tous les textes ne se "valent" pas, il est essentiel car il oblige le lecteur à s'ouvrir à un monde largement inconnu pour la très grande majorité. On parle des Kurdes mais pas seulement car ils ne sont pas seuls à lutter. Ils ont, en effet, avec eux, quelques alliés qui ont le soucis de la liberté, celle des leurs, des autres et plus largement celle de leurs terres, de leur pays.
Que vous dire...Lisez ce livre pour vous faire votre propre opinion, pour vous ouvrir à un monde qui vous est peut être inconnu; lisez l'histoire des Kurdes et plus largement encore celle des peuples du Moyen-Orient. Que vous dire...soyez attentifs à ce qu'il se passe ailleurs dans le monde car cet ailleurs en dit long sur nos propres sociétés.
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Le monde regardait. Afrîn tomba aussi, aux mains des islamistes et des fascistes. Et le monde regardait toujours. Les populations non arabes sunnites ou turkmènes se firent massacrer. Et le monde regardait. La sharia fut imposée, on réduisit les femmes en esclavage et on viola, tortura et exécuta toutes celles qui résistaient. Le monde regardait toujours. Une police d’Afrîn fut créée, composée de néo-fascismes turcs principalement issus des Loups gris, police à l’uniforme proche des SS, se prenant en photo en faisant le salut nazi au centre-ville d’Afrîn, pendant que les milices islamistes ravageaient le canton et détruisaient tout symbole de la culture kurde, alévie, yézidie et, surtout, tout symbole de la libération des femmes. Le monde, fidèle à lui-même et fier de sa constance, regardait. Peut-être entendit-on quelques voix de ceux et celles qui se pensent être des “gens de bien“, voix indignées, outrées, mais seulement des voix. L’indignation ne sauve pas des vies ni ne gagne des batailles. L’indignation est une farce pour le fascisme.
Afrin tomba aussi, aux mains des islamistes et de fascistes. Le monde regardait toujours. Les populations non arabes sunnites ou turkmènes se firent massacrer. Et le monde regardait. La sharia fut imposée, on réduisit les femmes en esclavage et on viola, tortura et exécuta toutes celles qui résistaient. Le monde regardait toujours. Une police d'Afrîn fut créée, composée de néofascistes turcs principalement issus des Loups gris, police à l'uniforme proche des SS, se prenant en photo faisant le salut nazi au centre-ville d'Afrin, pendant que les milices islamistes ravageaient le canton et détruisaient tout symbole de la culture kurde, alévie, yenidie et, surtout, tout symbole de la libération des femmes. Le monde, fidèle à lui-même et fier de sa constance, regardait. Peut-être entendit-on quelques voix de ceux et celles qui se pensent être des gens de bien, voix indignées, outrées, mais seulement des voix. L'indignation ne sauve pas des vies ni ne gagne des batailles. L'indignation est une farce pour le fascisme [...] Le monde continuera à regarder, parce qu'il est spectateur. Nous, nous n'assisterons plus jamais au spectacle.
Car il ne suffit pas de tuer pour gagner une guerre et mener une révolution, il faut aussi vivre, et donc être capable de mener une vie digne, de la défendre et de la transmettre.
Nous ne faisons donc pas partie d’une armée mais d’une milice, d’une force alternative, de formations partisanes, parce que l’intérêt est de défendre la population face aux forces réactionnaires et fascistes et de garantir la réussite de la révolution.
En somme, par-delà les divergences idéologiques, nous partagions le même besoin de quitter les sociétés endormies dans lesquelles nous vivions et ressentions la même nécessité d’agir au lieu de regarder le monde s’effondrer.
Pour consulter les titres parus dans cette collection : https://www.lesbelleslettres.com/collections/20-memoires-de-guerre
La collection Mémoires de guerre a pour but de publier des textes inédits ou oubliés d'écrivains, de journalistes, de soldats sur les conflits qu'ils ont vécus. Celle-ci a débuté à l'automne 2012 avec la publication de deux auteurs majeurs : Curzio Malaparte avec La Volga naît en Europe récit de son expérience de correspondant de guerre sur le front russe durant le second conflit mondial et Winston Churchill, avec, son tout premier ouvrage, inédit en France, La Guerre de Malakand dans lequel le futur prix Nobel de littérature raconte, en 1897, sa guerre en Afghanistan. .
Si la collection a publié à parts égales ces dernières années les grands classiques du genre, parmi lesquels les écrits de John Steinbeck, Martha Gellhorn, Eugène Sledge, Evelyn Waugh, elle a aussi accueilli des auteurs contemporains. Des militaires français comme le commandant Brice Erbland, pilote d'hélicoptère en Afghanistan et en Libye, Guillaume Ancel et ses témoignages sans concessions sur la guerre en ex-Yougoslavie et au Rwanda, André Hébert, jeune militant communiste parti se battre aux côtés des Kurdes contre Daech, la journaliste Pauline Maucort et ses portraits de soldats victimes de stress post-traumatique ou encore les officiers de la Légion étrangère qui ont témoigné dans un ouvrage collectif. La collection vient également d'obtenir le prix Erwan Bergot 2020 pour le texte du dernier Compagnon de la Libération, Hubert Germain.
Mémoires de guerre est dirigée par François Malye, petit-fils d'un des fondateurs des éditions Les Belles Lettres et grand reporter au magazine le Point. Il est l'auteur de plusieurs ouvrages historiques : Histoire secrète de la Ve République (en collaboration, La Découverte, 2006) ; Napoléon et la folie espagnole (Tallandier, 2007) ; François Mitterrand et la guerre d'Algérie (avec Benjamin Stora, Calmann-Levy, 2010) ; La France vue par les archives britanniques (avec Kathryn Hadley, Calmann-Lévy, 2012 . De Gaulle vu par les Anglais, Calmann-Lévy, 2020, reédition) Camp Beauregard, Les Belles Lettres, 2018.
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