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3,98

sur 216 notes
Voici un roman de science fiction avec tout ce qu'il faut pour en faire une réussite : des personnages bien campés, avec des profils riches et attrayants, une intrigue haletante et un suspens fort, une vision ethnologique des êtres de la planète visitée pleine d'idées originales et intelligente, un point de vue en science dure qui tient la route, une structure avec 3 périodes qui se chevauchent (avant leur départ en 2019, pendant l'expédition jusqu'en 2041 et après le retour de Sandoz sur terre en 2060) qui maintient la tension dramatique, et une écriture de qualité.
Mais, car il y a un "mais", J'ai quand même été agacé à la lecture de ce roman pour deux raisons. Ce livre a bien failli me tomber des mains à plusieurs reprises.
Tout d'abord, je sais bien que l'approfondissement du caractère des personnages pour qu'on puisse s'attacher à eux impose de les camper avec minutie et précision, mais avant que l'action ne commence, il faut avoir lu 200 pages sur les 500 du livre, c'est trop long, surtout à cause du deuxième point noir. le fait de choisir le cadre "jésuite" pour cadre de l'expédition d'exploration est franchement exaspérant. Autant du point de vue hard SF ou ethnologique le livre est une grande réussite, autant le point de vue théologique est un poids à la limite de l'insupportable. La Phrase "Deus vult" revient comme un leitmotiv et que ça soit la volonté de Dieu ou pas n'apporte rien à l'histoire, sinon un prétexte spirituel superflus et une lourdeur du propos. A force de vouloir intégrer trop d'ingrédients pour réussir sa recette, on fini par y mettre celui de trop.
Dans ce genre de littérature, je préfère me tourner vers la subtilité, la poésie et la justesse de Ursula le Guin.
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Le Mal est le sujet central de ce livre. le problème de sa co-existence avec un Dieu créateur bon et tout puissant est la douloureuse aporie à laquelle se heurte la foi.
Une expédition organisée et financée par la Compagnie de Jésus est envoyée vers une planète d'Alpha du Centaure dont proviennent des signaux radios faisant présumer de l'existence d'une vie intelligente.
L'expédition est un échec. Ses membres rencontrent le mal absolu et n'y survivent pas, à l'exception du Père Sandoz, l'un des jésuites membres de l'expédition, qui revient ravagé moralement et psychologiquement. L'histoire nous est racontée à travers deux récits entrecroisés, celui de l'expédition, très riche, où nous faisons la connaissance des membres de l'expédition, de leurs histoires personnelles entrecroisées, de leurs relations, et nous attachons à eux, et celui du retour de Sandoz sur Terre et de la relation qu'il fait de son aventure à ses supérieurs.
La révélation complète de ce qui s'est passé sur la planète, qu'on attend jusqu'à la toute fin du livre, est épouvantable, comme on a pu le pressentir dès le début.
Le Père Sandoz s'efforce jusqu'au bout de concilier son expérience et sa foi en un Dieu bon. La conclusion est ambiguë. En effet le Père Sandoz avait vu sa foi confortée, voyant dans les circonstances de la découverte la réalisation d'un plan de Dieu. Mais le rêve tournant au cauchemar, ou bien Dieu n'existe pas ou bien il a voulu lui donner un mauvais tour. Dans ce cas, Sandoz doit continuer à croire en lui. Quitte à le haïr ?
Je ne donne ici qu'un pâle reflet de la richesse du livre, à la fois sur le plan romanesque. ( C'est un excellent roman de science-fiction et un excellent roman tout court ; sa première édition a d'ailleurs eu lieu chez un éditeur mainstream, sans mention du genre) que métaphysique, où il atteint un niveau poussé.
Pour les fans de SF, ce n'est pas la première oeuvre de ce domaine où apparaissent des Jésuites. On peut citer au moins
- la très bonne nouvelle d'Arthur C. Clarke,"Le jésuite et l'étoile", dont la problématique est proche de celle du Moineau de Dieu
-le très mauvais roman de James Blish, Un cas de conscience, imprégné d'une vision caricaturale bien anglo-saxonne de l'Église catholique.
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Curieuse, curieuse lecture. le quatrième de couverture était pourtant (je trouve) prometteur. Mais il ne tient pas ses promesses. Ou plutôt, il nous laisse attendre autre chose de cette lecture que ce gloubi-boulga religieux à la limite du prosélytisme...

Je ne vous assommerai pas avec un résumé, vous le trouverez en le cherchant sur Google. Mais il faut d'emblée préciser qu'il s'agit ici plus de religion-fiction que de science fiction...
L'histoire elle-même met bien 200-300 pages (version pocket en tout cas, pour un total de presque 800 pages) à vraiment démarrer. Avant, on nous brosse en long en large et en travers les circonstances capillotractées de la rencontre des divers protagonistes. Comme de par hasard, ils se connaissaient presque tous avant d'être envoyés dans l'espace.Ils sont tous, grosso-modo potes. Ou plutôt "amis", du style "amis pour la vie". Leurs relations ne fleurent pas forcément le naturel. Ils sont tous affublés de tics de langages digne de la plus caricaturale des mères maquerelles tout droit sortie d'un film des années 80 : "mon chou", "mon lapin", "mon amour" en voici en voilà, à toutes les sauces dès que l'un des gugusses s'adresse à un autre. C'est soit fatigant, soit limite vulgaire à la longue... Les traits d'humour tombent toujours à plat, d'ailleurs il est souvent précisé que c'est de l'humour... Signe que ça n'est pas drôle (sinon, pourquoi le préciser ?). Néanmoins, effectivement, si ça n'était pas signalé, on ne le remarquerait pas tellement la notion d'humour de l'auteur doit être diamétralement opposée à ce dont je suis habitué...

Donc tous ces gens biens sous tous rapports baignent dans la religion, même les athées, et s'embarquent pour une autre planète après avoir capté des chants venus de l'espace. Chants dont on n'entendra quasiment plus parler tout au long de l'histoire. Il en sera vaguement question dans les dernières pages, histoire de boucler l'histoire, mais ça fait quand même léger.
Ils sont tous agaçants, ils s'adorent tous, aiment passer du temps ensemble, faire des repas, s'inviter les uns les autres, bref, ils sont sans doute comme la famille américaine moyenne telle qu'on la voit dans des films/sitcoms (et conforme aussi aux rares spécimens que je connais personnellement) à ne pas savoir vivre détaché(s) des autres.
Pourtant on voit bien que l'auteur a voulu brosser des personnages dont les caractères diffèrent (Yarbrough, Robichaux...), mais elle ne parvient jamais à s'affranchir de son modèle. Son personnage typique est beau, intelligent, cultivé. Il aime ses semblables et il aime Dieu. Même s'il ne comprend pas vraiment ce que "Dieu" signifie pour lui/elle-même.

Au final l'idée qui sous-tend ce roman pourrait tenir en 2-3 lignes. Une délégation catholique part dans l'espace pour prendre contact (/évangéliser ? Même quand ils disent le contraire, je me permets d'en douter) les auteurs des chants captés de l'espace. Ils y arrivent. Tombent sur une planète abritant 2 espèces intelligentes. Voilà.
200-300 pages de mise en place des personnages. La vie sur place sera vaguement décrite un chapitre sur deux ensuite. L'autre chapitre sur deux sera consacré au procès/débriefing de la mission sur place par l'unique survivant auprès de sa hiérarchie jésuite.



Au final, pour un roman qui se veut de science-fiction, on parle beaucoup de Dieu, et relativement peu de la nouvelle planète et de ses habitants (en dehors des quelques pages entre la découverte des chants et le lancement de l'expédition).
Une lecture somme toute décevante, pour un livre que je ne recommanderai pas.
Lisez plutôt "les croisés du cosmos" de Poul Anderson, pour une histoire à peu près similaire, qui, bien que capillotractée, est beaucoup plus agréable, et qui assume sa quintessence.

Dans la petite interview disponible après l'histoire, il est stipulé que l'auteur a voulu décrire les contacts entre un nouveau peuple et notre civilisation, un peu comme lors de la découverte des Amériques. Ses personnages reproduisent alors toutes les erreurs qu'il aurait fallu éviter (déjà la première : ne pas ramener son Dieu avec soi pour le fourrer sous le nez des autres, ne pas se pointer avec sa technologie chez un peuple moins avancé technologiquement, ne pas ramener ses microbes avec soi sans savoir ce que ça va faire, ne pas modifier les habitudes de vie locale en important des façons de faire...).
Il est dit quelque part dans cette interview que de (vrais) astronomes et astrophysiciens ont nommé une planète du nom de Rakkat en honneur à ce livre... Je ne comprends pas pourquoi. Les romans de SF ne manquent pas, les bons romans de SF non plus, et il y a quelques oeuvres cultissimes où piocher de l'inspiration sans avoir à taper dans un livre d'une moyenneté assourdissante.
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Un signal musical venu d'ailleurs a été capté sur terre. Une mission scientifique est alors organisée pour partir dans la galaxie à la rencontre des extra-terrestres. Celle-ci est dirigée par Emilio Sandoz, prêtre et linguiste, qui seul survivra à l'expédition. A son retour sur terre, il devra mettre son âme à nu et répondre de ses crimes devant un tribunal religieux.

Tout ceci étant dit dans le résumé en quatrième de couverture, je ne dévoile donc rien de l'histoire. En fait, rien de bien intéressant à rajouter. J'aurais voulu en savoir davantage sur ces « extra-terrestres musiciens », mais, bien qu'il s'agisse d'une mission scientifique, le côté musical n'a pas été creusé, pas plus que le côté linguistique d'ailleurs. Et j'ai trouvé les habitants de Rakhat plutôt « ordinaires » dans leur apparence et leur mode de vie, et peu curieux ou intrigués par ces quelques terriens débarqués parmi eux.

Bref, un long voyage inter-galactique de plus de 500 pages assez décevant.
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ActuSF nous propose la réédition d'un roman mêlant la religion et le space opera (enfin, peut-être surtout le planet opera), avec le récit d'une expédition partant découvrir une nouvelle planète. Des sons en ont en effet été captés, et il s'agit en fait de chants. Tandis que les Etats s'interrogent sur les moyens à mettre en oeuvre, les jésuites prennent tout le monde de vitesse et lancent leur propre vaisseau spatial !

Le récit alterne deux périodes. le présent de l'histoire, tandis que le père Emilio Sandoz, seul survivant de l'expédition, mutilé, brisé psychologiquement, lâche à regret des informations fragmentaires quant au désastre qui le voit accusé de prostitution et de meurtre. le passé, avec le long récit de la mise en place de la mission, l'histoire des différents membres, leur préparation et leur choix de quitter la Terre, sachant qu'ils perdront toute famille et amis à cause du voyage et de la relativité.

Un long début, au rythme assez lent, et avec de nombreux détails sur l'équipe hétéroclite qui va se constituer peu à peu et se retrouver à bord du vaisseau. Les personnages sont assez attachants, même si certaines scènes sont quand même assez gentillettes et si les choses s'arrangent un peu trop facilement.

L'arrivée sur la planète d'où les chants sont émis amène peu à peu les problèmes liés à l'incompréhension culturelle, puis la confrontation finale à la barbarie et à la cruauté (selon le point de vue humain) qui peuvent en découler. Comment dans ce cas ne pas remettre en cause sa foi ? C'est l'épreuve que subit le père Sandoz, traumatisé physiquement et psychologiquement, dont le récit, allant crescendo, sera dévoilé lors d'entretiens laborieux avec ses pairs, impatients de comprendre ce qui s'est finalement passé et si le prêtre est réellement coupable des maux dont il s'accuse.

J'ai trouvé que le récit souffrait parfois de longueurs, et d'un esprit trop bon enfant dans la première moitié. Heureusement, la suite est plus intéressante, les concepts évoqués également, ce qui fait que la lecture de l'histoire est au final satisfaisante. Bien sûr, les révélations finales, même si elles sont partiellement devinables, contribuent au choc et à la compréhension des réactions du héros malheureux de l'histoire.
Lien : https://bibliosff.wordpress...
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J'ai longtemps apprécié ce roman, mais il aura vraiment fallu attendre la toute fin pour que je le trouve génial. Il commence comme un banal roman de Hard SF, si ce n'est que le personnage principal est un jésuite, avec la découverte d'une civilisation extraterrestre et l'envoie d'une expédition vers leur planète (dans le système Alpha du Centaure, comme d'habitude). Les descriptions techniques sont riches dans tous les domaines (physique, astronomie, linguistique, botanique, sociologique...) ce qui a facilité mon immersion (c'est pour ça que j'apprécie la Hard SF).
Seulement, l'expédition a échoué et seul un membre, Emilio Sandoz, en a réchappé. Les circonstances de cet échec vont être dévoilées tout au long du roman selon deux axes : on suit à la fois Emilio au présent, à son retour de l'expédition, traumatisé physiquement et psychologiquement par ce qu'il a vécu sur cette planète, et à la fois au passé, lors de la découverte de l'existence des extraterrestre et la préparation de l'expédition. Cette narration met en évidence deux aspects distincts dans ce livre: une dimension SF et une dimension psychologique. Ces deux aspects sont d'abord assez clairement séparés : la science et la technique occupent une grande partie des chapitres antérieures aux événements, tandis que les chapitres actuels insistent sur le traumatisme vécu par Emilio. Puis les deux narrations se mélangent progressivement tandis que le roman s'enrichit de questionnements psychologiques, interroge sur le sens de la foi, sur le traumatisme, sur la résilience, sur la rédemption et le pardon pour atteindre son paroxysme dans le dernier chapitre. Ces thèmes pas souvent abordées dans des romans de science-fiction en font un roman très original.
La composition de l'expédition complètement hétéroclite est une autre originalité bienvenu. Les personnages sont très attachants, très variés et très humains sans tomber dans le cliché. le seul personnage qui m'a un peu déçu est celui de Jimmy Quinn, qui ne me semble pas faire partie de l'histoire mais plutôt d'apparaître selon les besoins du roman.
Rétrospectivement, je dirais que le début est trop long et trop lent, ce qui aurait pu me décourager, mais peut-être est-ce nécessaire pour apprécier pleinement la suite. Car le voyage est long, mais il en vaut la peine.
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En 1492 a eu lieu le premier contact entre les Indiens d'Amérique et les colons européens. Un événement historique qui a été analysé, digéré et jugé avec un regard moderne pas toujours approprié car hors-contexte. Les colons européens ont été critiqués pour avoir eu des comportements immoraux ne correspondant pas à nos critères actuels – et je suis d'accord : bien des souffrances auraient pu être épargnées si nos ancêtres avaient fait preuve de plus de jugeote.
Mais la question à laquelle tente de répondre Mary Doria Russell est : peut-on réellement les condamner ? Si nous avions été à leur place et si nous avions été propulsés dans un environnement inconnu presque sans espoir de retour, aurions-nous fait mieux ? La bonne volonté et l'ouverture d'esprit suffisent-elles à assurer de bonnes relations de voisinage ?
La dame est tranchante sur le sujet : non, ça ne suffit pas. Dès le premier chapitre, elle nous présente un protagoniste défait, affaibli et profondément blessé. Aussi bien physiquement que mentalement. Un seul survivant, plus aucune nouvelle des autres. Et de terribles rumeurs dues aux derniers rapports : les relations avec les extraterrestres sont affreusement tendues, et Emilio Sandoz, prêtre jésuite de son état, se serait prostitué et aurait tué une enfant lorsqu'il était sur la planète Rakhat… Il convient de faire la lumière sur cette affaire, ne serait-ce que pour laver l'honneur de la Compagnie de Jésus. Ce sont donc John Candotti et Edward Behr, prêtres jésuites de leur état, qui seront mandés afin de faire passer Sandoz aux aveux.

La narration s'effectue sur deux temporalités :
- Une en 2015-2019, dans laquelle les personnages de la mission se rencontrent, sympathisent, captent le signal extraterrestre et décident de partir rencontrer ces autres enfants de Dieu ;
- Une en 2059-2060, dans laquelle Emilio revient ravagé, sa réputation défaite, son corps et son esprit brisés.
La plus abondante est la première : Mary Doria Russell a à coeur de ciseler chaque détail de ses protagonistes et de leurs relations. Sur plus de deux cents pages, il ne sera pratiquement pas question d'espace et d'extraterrestre, mais de rencontre, d'amitié, de religion et d'amours contrariées. C'était très intéressant, mais un peu long : comme si elle essorait ses personnages afin d'en faire ressortir toute l'humanité. Et à les rendre trop attachants, on finit par ne plus y croire. Tout est trop parfait, trop fusionnel.

Ne vous y trompez pas : j'ai adoré le début. Il aurait peut-être juste fallu en retrancher un peu et dé-idéaliser Anne, Georges et Emilio – qui semblent être totalement étrangers à l'égoïsme, l'emportement et la haine. Par ailleurs, Emilio (le protagoniste) fleurait bon le fantasme : c'est un sex symbol plein de charisme, de douceur, d'empathie, accroché à des idéaux contre-nature, mais beaux (ou bien beaux car contre-nature), viril quand il le faut, sensible quand il le faut.
Anne et Georges ont la relation de couple la plus équilibrée que j'ai jamais rencontrée dans la littérature. Basée sur l'empathie, le partage, la communication et l'humour, ils peuvent tout se dire, car en plus d'être mari et femme, ils sont aussi meilleurs amis.
Jimmy, en comparaison, est quelqu'un de plus abordable. Trop grand, trop candide, trop dépendant de sa mère, il a bon coeur mais est loin d'être un canon de beauté. Il est la raison pour laquelle tout ce petit monde sera appelé dans l'espace : travaillant à la SETI (Search for ExtraTerrestre Intelligence), c'est lui qui entendra le chant et décidera d'impliquer ses meilleurs amis.
Par le plus grand des hasards (hum hum), ceux-ci ont toutes les compétences nécessaires à ce genre de mission : Emilio est un linguiste polyglotte d'exception, Anne est anthropologue, George est bricoleur touche-à-tout-bénévole-à-la-SETI-depuis-sa-retraite, et Sofia a un esprit d'analyse, de synthèse et d'adaptation hors normes.
Je ne vous ai pas encore parlé de Sofia Mendes. C'est la cinquième (roue du carrosse ?) membre du groupe. Intégrée tardivement à ce dernier, elle est le love interest de presque tous les hommes (tout comme Emilio est le love interest de presque toutes les femmes). Et tout comme Emilio, elle n'est absolument pas disponible, non pas pour des raisons d'engagement religieux, mais pour des raisons émotionnelles. D'un abord froid, presque inhumain, si concentrée sur son travail qu'elle ressemble à un robot, c'est l'histoire de son passé qui nous la rend attachante. Elle en a bavé, croyez-moi.
Mais bien sûr, au contact de ce groupe si hétéroclite et bienveillant, elle ne pourra que baisser ses barrières.

En fin de compte, c'est la temporalité de 2059 que j'ai trouvé plus intéressante. Un peu plus oppressante et un peu moins feel good, elle laisse planer un épais mystère : qu'est-ce qui a foiré ? Comment ces gens-là, si attachants, si touchants, ont pu commettre des crimes ? Qu'est-ce qu'Emilio a subi pour revenir avec de telles blessures et de tels traumatismes ?
Le seul défaut que je trouve à cette timeline, c'est Sandoz lui-même. le bougre devenait franchement irritant à répéter : « Vous ne pouvez pas comprendre ce que j'ai enduré. — Non on ne peut pas comprendre, c'est pour ça qu'il faut que vous nous expliquiez. — Non, je ne veux pas en parler parce que j'ai trop souffert. — Emilio, il FAUT que vous vous justifiiez, vous allez être trainé en justice ! — Je m'en fiche, personne ne peut me comprendre ! »
Ce genre de scène n'est clairement pas choquant quand elle concerne une personne traumatisée, mais elles reviennent tellement souvent que je me suis surprise à soupirer en attendant que ça avance.

Au-delà de ces quelques défauts, l'écriture est précise et riche. Scrutant les détails afin de nous rendre un maximum d'émotion. Et Mary Doria Russell aborde des thématiques qui me fascinent :
- La religion : étant issue d'une famille très catholique et ayant moi-même embrassé l'athéisme, je me sens toujours très concernée par le sujet. Pendant la majeure partie du roman, j'étais dérangée par le discours légèrement pro-chrétien : Sandoz a souvent le dernier mot, et même les personnages agnostiques semblent se laisser tenter par le réconfort de la croyance. Cependant, la timeline de 2060 contrebalance cette tendance. ;
- Dieu : c'est un thème que je séparerais de la religion, surtout dans ce roman. Les personnages s'ébahissent que tout leur soit si facile, s'étonnent que les astres s'alignent pour leur permettre d'accomplir leur mission. Est-ce la volonté divine ? Pour Sandoz, oui : Dieu se cache dans les petits hasards du quotidien. ;
- L'amour contrarié : là aussi, très concernée par la question, moi qui suis si fleur bleue ! L'auteure a intégré une profonde réflexion sur le sujet du désir et de son renoncement (qu'elle a entremêlé avec la religion, évidemment). Comment gère-t-on la tentation après quarante ans de mariage ? Après un serment de chasteté ? Quand les personnes de l'autre sexe ne sont pas intéressées ? Une thématique riche et ouverte, très liée à la suivante ;
- L'engagement : est-il toujours bon de suivre des voeux qu'on a fait il y a plusieurs décennies ? Que ce soit pour le mariage ou la prêtrise, est-il naturel, est-il SAIN de s'engager en toute bonne foi sur le restant de son existence ; sachant que le changement fait partie intégrante du vivant ? Je n'ai pas pu m'empêcher de relever quelques passages que j'ai trouvées très pertinents ;
- le destin : à rejoindre avec le thème de Dieu. Les personnages s'interrogent énormément sur le sens de leurs actes, leurs libre-arbitre et la volonté de leur Créateur. Était-ils prédestinés à aller sur Rakhat ? Ont-ils été façonnés par une puissance supérieure, ou leurs compétences sont-elles bien les fruits de leur travail et de leurs choix ?


Non, le point fort de l'histoire n'est pas l'exotisme : ce sont les relations « humaines ». Je me répète, mais Mary Doria Russell fait la part belle à ses personnages, leur laisse toute la place de croître, de s'étoffer, d'approfondir leurs liens. Ici, la technologie future est à peine évoquée (tout juste voit-on apparaître quelques « bloc-notes électroniques » – l'équivalent des tablettes, je suppose). Amateurs de hard SF, passez votre chemin !

En conclusion, j'ai passé un très bon moment en lisant le Moineau de Dieu, malgré un passage un peu longuet à la fin du premier tiers. Des personnages riches, creusés, une écriture fluide et précise, et des thématiques fascinantes ont stimulé mon engouement. L'intrigue est un peu longue à démarrer, mais la seconde moitié du roman est tout simplement fascinante et se finit dans une apothéose qui m'a coupée le souffle et laissée brûlante d'émotion. Cela faisait longtemps que je n'avais pas eu ce sentiment de ne pas pouvoir décrocher de mon livre et de me sentir vaseuse une fois refermé.
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Cela fait un peu plus de deux semaines que j'ai fini ce livre et je n'ai toujours pas écrit ma chronique. Il faut dire que ce roman ne m'a pas enthousiasmé plus que ça, ce qui ne motive pas vraiment.

Pourtant, tout commençait bien, le pitch était accrocheur : Emilio Sanchez un linguiste jésuite est l'un des membres de LA mission spatiale qui doit permettre de rencontrer pour la première fois une espèce intelligente extra-terrestre. Malheureusement, il revient seul de ce voyage, dans un état déplorable, décharné, affamé, les mains atrocement mutilées. Un malheur n'arrivant jamais seul, il est de plus accusé à son retour sur Terre de meurtre et de prostitution...

Dans une première partie, nous assistons en parallèle à la réception du message extra-terrestre, aux préparatifs du voyage et aux premieres explications du jésuite sur son voyage. Cette alternance permet de découvrir tous les protagonistes, leurs antagonismes et de se projeter dans l'horreur qu'a vécu Emilio. Malgré quelques longueurs, quelques lenteurs cette première moitié est la plus intéressante à mes yeux, celle qui ouvre les portes à l'imagination, qui interpelle et qui donne envie de connaître la suite...

Cela se complique par la suite, l'arrivée dans le système planétaire, la découverte de la planète et la rencontre avec les habitants... et là il faut laisser une grande partie de son incrédulité au placard. de nombreuses invraisemblances, des facilités de narration font que je ne suis pas arrivé à m'identifier ou à me fondre dans le décor. J'ai perdu le fil de l'histoire, je n'y crois plus et à partir de ce moment j'ai lâché l'affaire et lu les dernières pages en diagonale.

Que reste t-il de ce roman ?
La difficulté de communication entre deux espèces totalement différentes l'une de l'autre, cela me rappelle les problèmes de langage qu'évoquait China Mieville dans Légationville.
Et surtout une immense réflexion sur l'(in)existence de Dieu, où les arguments des croyants, agnostiques et athées s'entrecroisent le long des six cents pages. Immense réflexion qui parfois tourne en une litanie sur la foi, un peu usante sur la longueur.

Pour conclure, le moineau de Dieu n'est pas un livre pour moi, un peu trop porté sur le questionnement d'un hypothétique Dieu et sur la foi qui s'y rattache. Il pourra plaire à certains et je sais que certains de mes blogopotes l'ont dans leur PAL... j'attends avec impatience leur retour.


Lien : https://les-lectures-du-maki..
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Une savante construction avec l'alternance de deux récits, l'un qui suit le cours du temps et l'autre qui le remonte. Quelques belles pages mais j'ai trouvé le rythme du livre trop lent à mon goût.
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On démarre doucement, sans trop savoir où l'on va et même si on va continuer, mais on s'obstine et puis on est pris dans une spirale qui devient passionnante avant de plonger vers la fin, comme il se doit, quand tout est dit, tout est révélé, dans l'horreur à l'état pur, la déréliction ultime. Je n'ai que rarement ressenti un tel sentiment à la lecture d'un livre. Un livre pour ceux qui aiment les sensations fortes. J'ai adoré !
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