C'est le travail, historique, anthropologique, archéologique... de toute une vie que nous propose
Christophe Sand, archéologue calédonien depuis quarante ans, dans ce riche ouvrage qui retrace, avec rigueur, multiplicité et croisement des sources, - illustrations d'époque, témoignages d'européens, comme Cook ou
La Pérouse, pour ne citer que les plus connus, ayant assisté aux évènements, tableaux ou graphiques statistiques... -, l'histoire de la dépopulation de l'Océanie des premiers contacts européens à nos jours.
Car cette dépopulation, comme cela a été le cas pour d'autres parties du monde qui ont connu ces premiers contacts, est avant tout due à une explosion d'épidémies de maladies, virales comme vénériennes, transmises par les marins à des populations qui n'y étaient pas immunisées, entraînant nombre conséquences sur celles-ci, tant démographiques - infertilité causée par les maladies vénériennes notamment -, que culturelles, religieuses, ou encore politiques - missionnaires chrétiens, colonisations, blackbirding, modification nécessaire de fonctionnement des sociétés... - en quelques siècles. La repopulation a enfin repris dans les îles du Pacifique, mais au prix d'une hécatombe terrible, effectivement, mais aussi de la transmission d'un "traumatisme historique multigénérationnel", et d'une nécessité de redonner, désormais, sens à l'identité même de ces îles, dans toute leur diversité et leur richesse.
Et cette dépopulation nous est décrite précisément, régions par régions, archipels par archipels, d'abord à partir de ceux pour lesquels les données sont les plus nombreuses, jusqu'aux zones les moins documentées, et à partir, parfois de plusieurs hypothèses démographiques, justement par manque de sources. La conclusion est en, néanmoins, sans appel : de la Polynésie à la Micronésie, en passant par la Mélanésie, la dépopulation du Pacifique a atteint une moyenne de 80-90% du XVIème au XXème siècle...
Je remercie les éditions Au vent des îles et Babelio de m'avoir permis de découvrir cet ouvrage édifiant, qui m'a donné l'occasion d'en apprendre encore davantage sur une partie du monde bien souvent méconnue des occidentaux en dehors d'une image exotique, et l'on peut le dire, encore de nos jours, fortement racialisée, qui ne demande qu'à être modifiée. Je vais continuer, non seulement à partir de la riche bibliographie proposée en fin d'ouvrage, mais aussi à partir de mes découvertes, de plus en plus nombreuses ces derniers mois, de la littérature océanienne, à me plonger, avec plaisir et intérêt, dans
L Histoire, les cultures, les traditions du Pacifique, qui recommence à faire voix pour dépasser le traumatisme originel de sa dépopulation.