Surtout connu comme l'auteur du Roman comique, Scarron a été de son temps, un auteur de théâtre très apprécié. Plusieurs de ses comédies ont été écrites pour l'acteur comique le plus célèbre de son époque, Jodelet, et leurs titres comportent son nom. Les situations comiques reposent souvent sur une situation dans laquelle, Jodelet, qui est un valet, passe pour quelqu'un d'autre, un grand seigneur, voire un prince. Il y une inadéquation, un décalage, entre le rôle social attribué au personnage et son comportement.
Scarron a imité dans ses pièces des auteurs espagnols, en modifiant, francisant, un peu les situations, et aussi en réduisant ses sujets d'origine, puisque les comédies espagnoles se passaient souvent en trois journées. Or il fallait résumer cela en une pièce en cinq actes.
Les dates de création de ses pièces ne sont pas connues avec précision. Jodelet ou le maître valet est considérée comme la première, sans doute jouée pour la première fois en 1643. Elle a eu un immense succès, elle a été souvent reprise, et imitée. Scarron s'est inspiré de Rojas Zorrilla, un des auteurs espagnols parmi les plus connus à l'époque.
Don Juan un beau jeune homme noble vient à Madrid pour épouser une jeune fille dont il est devenu amoureux fou après avoir vu son portrait. Il enrage, parce que son valet, Jodelet, a par erreur envoyé son propre portrait à la jeune fille au lieu de celui de son maître. Arrivé de nuit, Dom Juan voit sortir par la fenêtre d'Isabelle, sa fiancée, un homme. Jaloux, il imagine de faire passer Jodelet pour lui-même pour observer Isabelle, et voir s'il va vraiment l'épouser. En même temps, il voudrait retrouver l'homme qui a tué son frère et séduit sa soeur.
Jodelet se cure les dents, se goinfre, se soûle et ronfle, et se montre couard en face de l'homme qui veut séduire sa promise. Il est sans doute difficile pour nous d'imaginer pourquoi cela faisait rire autant à l'époque, car la drôlerie devait venir en grande partie du jeu de l'acteur. Sans doute, comme par exemple pour
Louis de Funès, dont les mimiques, les grimaces, les courses éperdues et les gestes frénétiques étaient plus importants que les dialogues et les scénarios (enfin dans beaucoup de ses films), Jodelet devait avoir un répertoire burlesque qui faisait son succès.
A noter, que
Molière va engager en fin de carrière Jodelet dans sa troupe. Un Jodelet vieilli et qui n'a sans doute plus autant de ressources, et dont les pièces sont trop connues du public pour encore provoquer des triomphes. Mais
Molière va utiliser brillamment la vieille gloire comique, en lui écrivant « Les précieuses ridicules » où il jouera encore une fois un valet déguisé en maître. Simplement, l'Espagne sera bien loin, c'est dans les salons parisiens (ou plus exactement ruelles, puisque le mot salon n'existe pas encore en français) que
Molière va placer son action, produisant une brillante satire des moeurs de son temps.