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Fata Morgana (01/01/1900)
4/5   2 notes
Résumé :

Victor Segalen

Dans un monde sonore

Bibliothèque artistique et littéraire

1985 ‒ 56 pages ‒ 14 x 22 cm ‒ ISBN 978.2.85194.751.2

BAL 14

Une inquiétude me survint : comment faire admettre, aux amis lecteurs, – même en une préface onctueuse et servile, – que mon héros se renferme dans une chambre tendue de ficelles, meublée de boules de cuivre, et qu’il s’éclair... >Voir plus
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Nous montions un escalier entièrement revêtu d’un tapis spongieux où le pied s’encotonnait : précaution contre « ses » chutes, évidemment. Mais je me composais une attitude. Comment aborde-t-on un fou ? En restant impénétrable et digne afin de lui en imposer ? ou mieux, d’une façon joviale, avec un débraillé bon garçon ? Je me décidais à peine quand Mathilde ouvrit une porte : un son continu, doux et transparent me coula dans les oreilles. Mon débraillé s’en envola ; et ce fut évidemment sous des apparences ébahies que je pris la main qu’il me tendait, lui, le plus simplement du monde.
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— Avant tout, reprenait Mathilde, promettez-moi de n’en rien dire…

Je promis. On promet toujours. Il n’est pas d’exemple qu’un ami, sollicité de mystère, et taxé par là même de discrétion solide, se soit, du premier mouvement, récusé. C’est un préambule aimable, intime, si confiant, et qui masque si gentiment les trahisons certaines… Je promis.
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Et puis, cent mètres plus loin, — comme un sentier fonçait sur ma gauche, dans le noir d’une saulaie, tout changea. Des notions sèches et impératives surgissaient, et des formules me venaient aux lèvres : « Construction du monde extérieur… La perception extérieure est une hallucination vraie… » Je sentis, à l’allure professorale de ces réminiscences, combien l’esprit dogmatique reprenait en moi le dessus. Taine a dit… mais voici que Taine n’avait pas dit, au moins sous cette forme : « La conception mécanique de l’univers n’est que du réalisme naïf. » — D’où sortait cela ? Et ceci « L’idée d’objet, l’idée de corps, l’idée de matière, dérive des sensations visuelles et tactiles qui ont été illégitimement érigées en entité… » D’autres données du même genre se mirent à danser dans mon souvenir, en foule, mais moins précisées : « Enfants que nous sommes de rapporter aux impressions de l’œil et de la peau et des muscles — élevées à la dignité de causes extérieures et permanentes, — toutes les autres sensations… Oui ! pourquoi choisir et hiérarchiser de la sorte ? Nous avons très indûment pétri la matière de vision et de toucher, mais nous pouvons imaginer d’autres matières, aux qualités totalement différentes et rapportées à nos oreilles… On affirmerait alors : la matière, c’est du Bruit, le néant, c’est le Silence… mais qui donc, mais qui avait bien pu lancer ce dernier aphorisme ?…
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La résonance indéfinie prolongeait chacune de ses syllabes, et m’interloquait si bien que je perdis à peu près tout de ses explications. Il me souvient de quelques mots particulièrement descriptifs « ces loufoques arriérés… ces ruminants de laboratoire » qui remâchent toute une vie les formules dont on les a, une fois pour toutes, gavés. Puis, peu à peu, mes oreilles se faisant d’elles-mêmes à ces bruissements touffus, j’en vins à pouvoir le suivre. Mais il concluait :

— Tu comprends, après tout ça, je n’avais qu’une chose à faire, m’en aller. Mais je ne leur ai pas caché ma façon de penser. Tu en aurais fait autant à ma place ?

— Oh ! ça oui !

— Oui-i-i, prolongea le chœur invisible.

Je toussai de nouveau, comme si j’avais compté éclaircir ma voix ou chasser de mes oreilles ces petits échos bourdonnants. Les échos toussèrent. Interdit, je regardai mon ami dans l’attente vague qu’il percevrait, enfin, ma stupeur et, d’un mot, la ferait cesser. Mais il s’obstinait à promener des yeux dans le vide. Et comment interroger un maniaque sans craindre à tout instant de le voir, sur un mot maladroit, se ruer contre vous ?
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Il m’apparut que tout s’éclairait et que tout s’illuminait — mais je repoussai très sagement ces lueurs déraisonnantes ; car il faisait nuit, presque nuit. J’en étais sûr : on ne voyait plus rien à travers la fenêtre. Mais en étais-je bien sûr ? Et puis, qui parlait de voir ? En avais-je seulement besoin ? Je cessai brusquement de m’étonner à vide ; et, reposant ma nuque étourdie sur le dossier mou, je me laissai baigner par ces sortes d’effluves où tressaillaient des tonalités matinales et des timbres de jeune soleil à l’aurore des jours. Je n’écoutais même plus mon ami. Sa voix se dissolvait aux rumeurs de l’espace ; et son parler, devenu rythmique et ralenti comme une houle, s’imposait à ma rêverie, me berçait et me submergeait… — vraiment, qui avait parlé de « voir » ?
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