🐶 « Parce que je ne suis “qu'une” femme, parce que tu n'es “qu'un” chien, parce qu'à des degrés différents, sur l'échelle sociale des êtres, nous représentions des espèces inférieures au sexe masculin - si pétri de perfections ! - le sentiment de notre mutuelle minorité a crée entre nous plus de solidarité encore, une compréhension davantage parfaite. »
(P.5)
🐶 Les mémoires de Sac-à-tout ou le récit initiatique d'un petit chien en quête de survie. Élevé dans un cirque par une famille ingrate et vénale, Sac-à-tout, nommé ainsi pour son appétit vorace, a grandi aux côtés de sa mère, Marquise, longtemps utilisée comme attraction et aussi peu considérée que possible. Blessée mais fidèle, la vieille chienne est un beau jour balancée comme un détritus sur le bas côté de la route depuis la voiture familiale qui file à vive allure ; ni une ni deux, Sac-à-tout saute par la fenêtre pour rester auprès de sa mère agonisante qui lui conseille, dans un dernier souffle, d'échapper à cette famille campagnarde et revêche et de retrouver Séverine, une écrivaine vivant dans la capitale.
🐶 Si l'entreprise lui semble complexe, il n'est pourtant rien qui puisse entraver la promesse qu'il a faite à sa mère. Et c'est ainsi que les aventures de Sac-à-tout commencent : il rencontre d'autres chiens, errants ou abandonnés, des toutous à maman, des pantouflards ou des rebelles, des ennemis ou des amis. Mais sur sa route, il va surtout rencontrer des hommes, aux intentions parfois peu louables et dont il deviendra le malheureux cobaye : la première fois, on lui attache une casserole à la queue et on le laisse fuir un ennemi bruyant et tenace ; ensuite on lui passe une corde au cou, au bout de laquelle est attachée une pierre, et on le jette à l'eau ; finalement, alors qu'il est attrapé par la Fourrière et qu'enfin un maître souhaite l'adopter, Sac-à-tout découvrira finalement qu'il a été choisi non pas pour devenir un compagnon de vie, mais pour être l'ultime cobaye d'une expérience médicale... Fort heureusement, dans son malheur, il rencontre une bonne âme qui le sauvera d'un affligeant dessein.
🐶 Écrit en 1903, ce texte, loin de n'être que l'histoire d'un pauvre petit chien, pose la question de la cause animale et, bien évidemment, de la maltraitance. Reflet de la société d'alors qui considérait l'animal comme un objet dont on pouvait disposer en toute aisance (je rappellerais ainsi l'épisode de l'expérience clinique ...), ce roman est d'une lucidité, d'une intelligence et d'une modernité ahurissantes.
🐶 Ce texte est disponible à la
Bibliothèque Nationale de France et c'est dans le cadre d'une lecture à venir que je l'ai lu et étudié. Si les propos qu'il narre quant à la condition de l'animal sont effarants pour l'époque, je ne sais ce qui me surprend le plus : que de tels traitements eurent été possibles, ou que la loi concernant la considération de l'animal en tant qu'être vivant et non plus en tant que « bien meuble » ne fut adoptée que 112 ans plus tard, le 28 janvier 2015.
🐶 À ceux qui aiment les animaux, ce texte sera d'une troublante vraisemblance, tant il est vrai que l'animal est doué d'une intelligence sensorielle et affective, d'une fidélité à toute épreuve : on a d'ailleurs rarement vu un chien se rebeller contre un maître trop violent ou maltraitant. Se pose alors LA question inévitable après une telle lecture : de l'homme ou du chien, qui est vraiment l'animal ?