Au carrefour des étoiles est un texte profondément doux, mélancolique et porteur d'espoir en même temps. Qui parvient, quand la catastrophe est imminente, à ouvrir une autre porte et trouver des solutions. Qui fonctionnent plutôt bien. Plutôt. J'y reviendrai plus bas.
Peut-être que je suis à côté de la plaque, mais je trouve là une source aux textes de SF positive contemporains.
C'était mon 1er
Simak, il y en aura d'autres :)
Je disais plus haut que le roman parvenait plutôt bien à mener sa barque. J'insiste sur le "plutôt". Parce que l'intrigue en elle-même n'est pas non plus parfaite. Certes, c'est fluide, agréable à lire, facile. Mais… un peu trop, justement. En effet, le schéma narratif est d'une simplicité enfantine, et les éléments perturbateurs assez ridicules, tombant comme un cheveu sur la soupe. On sent bien que ce n'était pas là l'important pour l'auteur, mais quand même. Je me suis marrée plusieurs fois en constatant quels étaient les ressorts utilisés par
Simak pour faire avancer son histoire. Parfois, c'était vraiment risible, tout de même.
Mais non, l'important n'est pas là, en effet.
Au carrefour des étoiles se déroule au centre d'une galaxie interconnectée, au coeur d'un réseau de planètes reliées. Mais on ne sait pas, par exemple, comment s'est construite cette station-gare; ni comment les liens se sont faits entre la Terre et ces autres planètes. On ne sait pas non plus pourquoi, qui, quand.
L'altérité, on la côtoie au moment où des extraterrestres font escale chez Enoch. Ce sont des scènes de vie : un thé, une discussion, une soirée bavarde. Quelques descriptions, quelques impressions personnelles et intuitions d'Enoch permettent d'en apprendre un peu plus sur toutes ces créatures. Mais on n'en sait pas vraiment plus. Mais finalement, on n'en a pas besoin non plus. L'auteur parvient à nous donner juste ce qu'il faut pour attiser notre curiosité, et notre imagination fait le reste toute seule.
Certaines scènes sont très touchantes, porteuses de beaucoup d'émotion très pure et très simple. Je ne m'y attendais pas du tout. En fait, je ne m'attendais pas à un texte empli d'une si grande humanité. Nulle technicité compliquée dans ce roman; pas de jargon, pas de concept tiré par les cheveux ou nécessitant un bac +1000 pour comprendre ce dont il est question. Non,
Au carrefour des étoiles est un roman très abordable et qui donne des étoiles plein les yeux.
Voici donc un texte de SF profondément humain. Car l'enjeu est résolument humain. Enoch doit faire des choix, et il se trouve à un carrefour présentant plusieurs solutions. Laquelle choisir ? Quelles conséquences aura tel choix, pour lui et sa planète ? C'est très intéressant d'avancer dans ses réflexions, parce que l'échelle change; ce n'est plus seulement lui qui compte, mais la Terre entière. Sa place dans la galaxie. Tout devient très relatif : le temps, l'individu, la vie et la mort. D'ailleurs, la différence d'échelle se mesure à chaque instant. L'infiniment grand côtoie directement l'infiniment petit, avec des querelles de voisinage et des histoires du quotidien.
J'ai bien aimé, à ce titre, la place de cette maison. Je n'y avais pas pensé de prime abord, mais ce bouquin rejoint parfaitement mon petit challenge littéraire autour de « la maison en SFFF » (dont j'ai fait une liste ici, d'ailleurs). En effet, elle est au centre du roman, du réseau intergalactique qui se construit; en cela, elle est un lieu de passage, mais aussi de protection contre l'extérieur. Tout se concentre, dans cette maison : les enjeux galactiques, planétaires, et ceux du voisinage. Et évidemment, tout est interconnecté, et la maison joue un rôle prépondérant ici. Je trouve qu'elle symbolise parfaitement ce qui se joue dans ce roman : elle offre des portes aux personnages, vers des chemins différents, jamais empruntés.
Voilà donc un roman dont je redoutais un peu la lecture. Je ne sais pas pourquoi, vraiment. de la SF américaine des années 60, un prix Hugo… J'avais tendance à penser que le texte serait poussiéreux, vieillot, et un peu ardu. Et puis bon, les prix et moi… Et en fait, rien de tout ça. Quels a priori à la con quand même on peut avoir. Bref. La traduction révisée de
Pierre-Paul Durastanti n'est pas non plus pour rien dans le plaisir que j'ai eu à découvrir et lire ce texte. Ca change quand même beaucoup de choses, une traduction dépoussiérée. Je me souviens en avoir fait l'expérience avec Neuromancien... !
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