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sur 334 notes
Ryôsuke, un jeune homme suicidaire de vingt-huit, sans famille s'engage dans des travaux de terrassement sur une île au fin fond de nul part, Aburi. Mais le but de cet engagement est apparemment tout autre. "Vivait-il encore à Aburi ? Cet homme dont sa mère lui avait si souvent parlé, comme s'il avait été son seul espoir dans la vie. Arriverait-il à lui remettre le paquet enfoui au fond de son sac à dos, à percer le secret de sa naissance ? Et s'il y parvenait, sa façon d'être au monde changerait-elle ?"
Quand on descend du ferry avec Ryôsuke sur l'île, on a l'impression. d'avoir atterri sur Mars, des personnages insolites, des chèvres sauvages, une forêt primaire de banians......Voici le debut d'un livre et d'un personnage mystérieux, taciturne, accompagné d'un garçon plus jeune et d'une fille, un trio qui va nous entraîner loin.
Comme dans son livre précédent "Délices de Tokyo", il est question d'une rencontre,
et de cuisine....ici pas de dorayakis mais du yaourt de pinza, une vaste variété de sashimis arrosés de shôchû .....et "l'objet du rêve de Ryosuke".......un rêve qui lui permettra de reprendre pied dans la vie, mais pas facile à réaliser dans les conditions de l'Île.
Ici aussi l'auteur nous en ("l'objet du rêve ") explique le processus de fabrication avec beaucoup de finesse, de délicatesse. Un vrai processus artistique, où l'amour qu'on y met avec le savoir technique vont donner un résultat de rêve, "on croirait manger des nuages" en dit un des personnages. Les sensations gustatives les suivent avec beaucoup de poésie, "C'était une saveur tout à fait particulière,........Le parfum de l'herbe, la chaleur de Hanayo, une averse soudaine… C'était tout cela, concentré, qui rayonnait."
Alors que son livre précédent était solaire, ici c'est un peu la grisaille, du moins je l'ai ressenti ainsi. Même les personnages sont en demi-teintes, on ne voit que leur côté sombre noyé dans la solitude et le désarroi , avec peu de chaleur humaine, un brin de chaleur animale, dans l'atmosphère lourde et humide de l'île . le fond du livre est à l'image de sa couverture, plutôt un roman jeunesse que je verrais bien en BD. Mais pour autant c'est une lecture agréable car la prose est belle et les descriptions de paysages, magnifiques.J'ai apprécié, mais sans plus.
Sucré ou salé ? Pour moi définitivement sucré et j'espère que son prochain livre le sera.....


P.s. J'ai mis de côté une caisse de shôchû pour Bison ( j'espère que t'aimes ça , "gomen " mais le vin rouge importé y coûtait trop cher ) qui m'a fait découvrir ce livre en avant-première .
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Après la vieille qui murmurait à l'oreille des haricots azukis dans « les Délices de Tokyo », je te propose de poursuivre le parcours culinaire de l'auteur japonais, avec le vieux qui murmurait à l'oreille de ses fromages de chèvres.

Un roman basé sur l'art de fabriquer du fromage de chèvres. le lait, qu'il faut traire, les chèvres sauvages sur une île ô combien mystérieuse, puis l'affinage sur le bord de la fenêtre au vent, à la chaleur, à l'humidité. Mais ils font comment les français ? pour obtenir du fromage si bon, si fondant, si piquant. de la moisissure en plus ? Et pourquoi pas de la paille ou de la cendre… Ce roman est un hommage au fromage de chèvre tel que l'on en fait encore – un peu – artisanalement. le Japon nous envie notre fromage, ou du moins les règles de l'art ! L'art de l'affinage. Alors de là à se faire seppuku…

Ryôsuke, la vingtaine, débarque sur cette île reculée de toutes, presque abandonnée. Une île étrange et mystérieuse, qui à elle seule pourrait être exploitée plus pour entretenir le mystère de ses habitants et de ses chèvres noires. Avec deux autres adolescents, il est venu faire de l'intérim, creuser une tranchée pendant quelques mois. Pelleter le rassure, pelleter jusqu'à épuisement et s'oublier dans la terre la mélancolie et la tristesse de sa putain de vie. Une grosse cicatrice lui barre le torse, je comprends aisément le pourquoi, je m'identifie à lui, et aux échecs de sa vie. Lui est jeune, il pourra s'en remettre. Il suffit de le guider, d'aiguiller des chemins qui mènent aux plaisirs et à la réussite. le roman devient initiatique. A Ryôsuke de créer sa légende personnelle, ou celle du fromage de chèvres. A Ryôsuke d'oublier le col de sa chemise tachée par le sang giclant de la chèvre, la carotide tranchée.

Durian Sukegawa mène un nouveau roman gastronomique mais je lui trouve un petit goût d'inachevé. Il lui manque un peu d'affinage. J'aurais aimé en savoir plus sur l'île et ses habitants qui semblent porter tous le même nom. Il me manque aussi les histoires des deux compagnons de route de Ryôsuke que j'aurais souhaité également plus développé (pourquoi cette fille au tatouage et piercings est de cette destinée ?). Il faut du temps pour fabriquer du fromage de chèvre affiné, comme pour connaître les hommes, leur coeur, leur âme. Je m'attache aux personnages, et il est malheureusement déjà temps qu'ils prennent le ferry pour de nouveaux horizons. A mon sens c'est le point négatif du roman, qui n'engage que moi. C'est que j'en veux toujours plus, toujours insatisfait de ma vie.

L'île, ses escarpements et sa forêt isolée m'attendent. Elle garde son côté sauvage – le réseau a même du mal à franchir les vagues. Probablement de ce fait que les jeunes la délaissent. Ryôsuke y est trop jeune pour s'enfermer à son âge, d'autant plus qu'il a encore des rêves, lui. de rêve, il est surtout question d'une promesse faite implicitement à son père – pourquoi est-ce qu'un père se suicide, l'amour de l'enfant n'est-il pas assez fort pour le retenir ? Mais moi, je m'y verrais bien, entouré de chèvres, à méditer sur les échecs de ma vie, nombreux même, tout en regardant le soleil se coucher dans l'océan, tout en pêchant des coureurs arc-en-ciel, tout en trayant les mamelles gonflées d'une chèvre mi-sauvage mi-caline.
Lien : http://memoiresdebison.blogs..
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Avant toute chose je remercie chaleureusement Babelio et les éditions Albin Michel pour cet envoi.
Comme tout récit initiatique, celui-ci n'est pas exempt d'injustice, d'une certaine forme de violence et de tristesse.
Ne vous fiez pas trop à la quatrième de couverture, elle n'a que peu de lien avec l'histoire et un élément important est même totalement faux.
Un mal-être particulièrement poisseux semble coller à la peau de Ryôsuke quand il débarque sur une île japonaise isolée pour un boulot saisonnier.
Mais il a aussi une raison personnelle d'avoir choisi ce lieu, il espère pouvoir retrouver une personne qui vit peut-être ici.
Ryôsuke n'est pas bavard, difficile donc de savoir quel chagrin l'accable à ce point, on le sent triste, mais surtout perdu. Il a besoin d'une pause, d'un moment pour recharger ses batteries et savoir ce qu'il veut faire de sa vie.
Le rêve dont il est question dans le titre semble assez flou, il ressemble plus à une promesse faite à quelqu'un qu'à un désir profond du protagoniste principal.
Peut-on et doit-on faire ce que l'on attend de nous ou a-t'on le droit de choisir sa propre existence ?
Et chaque décision entraîne inévitablement des conséquences auxquelles il faut être préparé, ce qui semble ne pas être le cas du tout de ce jeune homme complètement largué.
L'auteur nous raconte une jolie histoire, douce, pudique, mélancolique et cruelle à la fois, une sorte de conte poétique qui sent bon la forêt, le vent, les embruns et le fromage de chèvre.
A ne pas lire durant un petit coup de blues passager...

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Huis clos aux chèvres

Les chèvres sont sur le dessin de couverture, la quatrième de couverture. Elles sont dans la forêt, la forêt est dans l'île, les chèvres sont condamnées à l'île, et les habitants qui vivent d'elles leur ont donné un nom autochtone. Tout tourne en rond, mais pas si rond dans ce microcosme (l'enfer, c'est les autres).
La perturbation arrive de l'extérieur, trois travailleurs -pour quoi au juste les a-t-on fait venir ? Parmi eux, Ryôsuke, passablement perturbé. Des rencontres avec des personnes bienveillantes vont lui révéler son rêve, sa possible raison de vivre. Il devra choisir s'il l'accepte. Ses rapports avec les chèvres vont l'amener à réfléchir sur le prix de la vie, animale et humaine. Va-t-il s'en sortir ?

En lisant sur Babelio la biographie de l'auteur : « Artiste éclectique, Durian Sukegawa est poète, écrivain et clown, diplômé de philosophie et de l'École de pâtisserie du Japon. D'abord scénariste, il fonde en 1990 la Société des poètes qui hurlent, dont les performances alliant lecture de poèmes et musique punk défraient la chronique. » je me disais que sa production risquait d'être intéressante autant que bizarre. Mais non, sa prose coule bien, n'est pas non plus du genre outrageusement poétique qui s'écoute ronronner. La narration est vivante, prenante, le livre se lit facilement et avec un intérêt constant.

Tout n'est pas rose, des conflits éclatent, mais tout cela m'a semblé juste, bien amené : si c'est un roman de construction – ou de reconstruction, Ryôsuke n'est pas tout jeune – il est articulé autour de plusieurs pôles, pas manichéen. La nature est un pôle, avec les chèvres et la forêt primitive, qui font l'objet de belles descriptions, pas non plus trop longues. Les personnes bienveillantes dont j'ai parlé sont un second pôle stabilisateur. Pour le troisième, j'hésite : est-ce l'île ou ses habitants ? Leur organisation sociale est bizarre pour un européen et un continental, sans doute née des conflits intrinsèques à l'insularité.

Une scène autour de la page 200 est assez typique : commencée par une conversation amicale, elle culmine avec une scène d'une beauté presque magique au milieu des noctiluques, et s'achève par une réflexion sur la maternité et la mort.

En somme, c'est une lecture agréable, avec son lot de surprises, qui donne à penser sans épuiser. Je remercie Babelio et Albin Michel pour cette lecture privilégiée et appréciée. J'ajoute que vous en apprendrez sans doute beaucoup sur la fabrication du fromage si vous me suivez.



Note 1 : une fois de plus, la 4e de couverture est fausse : « l'île où celui-ci a passé ses dernières années ». Il y a aussi une erreur à la ligne suivante, d'ailleurs. Ne faites jamais confiance aux 4e de couverture, mais dans l'esprit celle-ci ne trahit pas le livre et c'est ce qui compte.
Note 2 : difficile de juger la traduction de Myriam Dartois-Ako quand on ne connaît pas le japonais. Il me semble que le compliment sur la fluidité de la narration se partage entre l'auteur et sa traductrice. Quelques expressions m'ont un peu surpris, et le fait de donner des noms de poissons comme « coureur arc-en-ciel » est sans doute moins naturel en français qu'en japonais.
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Une jolie histoire, un joli conte.
Toutefois, j'y suis restée assez froide. Je n'ai pas retrouvé, il me semble, la même poésie , la même fluidité que dans Les délices de Tokyo.
Ce n'est pas bien grave car j'aime Durian Sukegawa pour la personne qu'il est et pour ce qu'il dégage.
Et, ce fut quand même un bel après-midi de lecture.

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C'est un livre déprimant que je conseille d'éviter si l'on n'est pas au mieux de sa forme.
Je vais même jusqu'à penser qu'il est aussi préférable de l'éviter si l'on se sent d'humeur enjouée, car après tout, la gaieté et le dynamisme sont fugaces, et ce serait dommage de faire le lit du cafard et de l'abattement.

Le livre s'ouvre avec l'arrivée sur une île isolée de trois jeunes japonais des villes et sur les difficultés qu'ils rencontrent pour s'intégrer dans ce milieu insulaire très fermé. Mais très vite, une autre piste s'ouvre : la quête de l'un d'entre eux, Ryôsuke.
Ryôsuke est un jeune homme taciturne, qui manque d'assurance et dont le récit nous livre les failles petit à petit. Après avoir tenté de mettre fin à ses jours, il est venu sur cette île dans le but de rencontrer un ami cher, de son père disparu. Une fois sur place, il se prend d'intérêt pour les chèvres laitières et aussi pour les chèvres sauvages et pour la fabrication du fromage. C'était le rêve de son père et de l'ami de son père, Hashi. Les deux hommes ont échoué dans la passé et Ryôsuke reprend leur rêve à son compte et se heurte à son tour à de nombreuses difficultés pratiques, techniques mais aussi culturelles.

C'est à mes yeux un livre sombre, extrêmement pessimiste. Sans en avoir pleinement conscience, Ryôsuke, choisit d'avancer inexorablement dans une voie sans issue. À cet égard, cet extrait du chapitre 37 est une synthèse du livre lui-même :
« Quelle direction était la bonne ?
À chaque pas, il s'enfonçait plus profondément. La surface de l'eau invisible lui arrivait maintenant à la taille. le grondement enflait. le courant qui venait buter contre son corps avait gagné en puissance, sans commune mesure avec ce qu'il avait été.
Soudain il sentit le tourbillon.
Il tenta de faire un pas en arrière mais il glissa et s'enfonça dans l'eau. Il poussa un hurlement déchirant. Son corps fut entièrement immergé en un clin d'oeil. Instinctivement, il donna un coup de talon pour remonter, en vain. Dans les ténèbres le mur d'eau l'engloutit. Son genou cogna contre un rocher. Il était aspiré. Il tombait. C'est tout ce qu'il comprit. »

Bien sûr, « l'enfer, c'est les autres » écrit Sartre dans « Huit Clos ». « Les autres » sont une perpétuelle menace pour ma liberté.
« Ryôsuke…
- Oui ?
- Je ne te conseille pas d'aller vivre sur l'île abandonnée d'Aigaki. »
[…]
Ryôsuke ferma les yeux.
« Vivre ici est difficile, reprit Hashi, mais ce n'est pas le plus important. Je crois qu'un être humain finit par renoncer quand il est exclu de la société. Quand la solitude est insoutenable. […] Je crois que personne ne peut supporter la solitude et l'isolement. »

Le paradoxe c'est que « les autres » sont constitutifs de mon humanité, parce que « Sans eux, je ne suis rien, je n'existe pas ».
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Bien que ce roman ne soit pas des plus gais, il m'a enfermée dans une bulle de douceur dont j'ai eu du mal à m'extraire.
Durian Sukegawa nous emmène sur une île sauvage, quelques maisons, une nature envahissante, des parois abruptes et des chèvres, beaucoup de chèvres.
C'est pour effectuer des travaux de terrassements que Ryosuke y débarque, mais ce n'est pas un hasard. le jeune garçon s'est fixé la mission de retrouver un ami de son père afin de lui remettre un paquet soigneusement enveloppé au fond de son sac à dos.
« le rêve de Ryosuke », c'est avant tout celui de son père.

L'auteur prend son temps pour faire avancer son histoire et c'est ce qui en fait tout le charme. Il s'attarde sur les paysages, sur la psychologie de ses personnages.

J'ai particulièrement aimé le héros, jeune garçon mal dans sa peau, timide, solitaire mais déterminé.
Avancer pour accomplir ses rêves est son crédo.
Je l'ai suivi en ayant presque envie de le protéger. Je n'ai pu m'empêcher d'avoir peur avec lui et pour lui.
Durian Sukegawa m'a émue à travers cette histoire belle, douloureuse mais cependant chargée d'espoir.

Son précédent roman « Les délices de Tokyo » avait réussi à me séduire et à me donner envie de le lire à nouveau.
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Les délices de Tokyo avait fait le mien, aussi étais-je ravie de retrouver Durian Sukegawa avec le rêve de Ryôsuke.

Ryôsuke est un jeune homme dépressif, tendance suicidaire, de 28 ans. Un père pendu, une mère morte de maladie dans l'amertume, ni frère ni soeur ni petite amie, on ne peut pas dire que la vie lui a beaucoup souri à ce taiseux ancien cuistot. Mû par diverses raisons, il s'embarque avec deux autres jeunes assez amochés également pour une petite île à neuf heures de ferry des côtes, à l'ouest de l'île principale de l'archipel.
Embauchés pour des travaux de terrassement, ils vont découvrir une communauté surprenante aux yeux de citadins, une vie rude et non exempte de violences. Et des chèvres.

Hymne à la fabrication du fromage de chèvre, dont toutes les étapes de fabrication, de la traite aux divers affinages, sont joliment amenées au fil du récit. Ryôsuke s'accroche au rêve fromager de son père tout en luttant contre ses propres tendances au désespoir et à l'appel du néant.
On est loin des lumières jaillissant des Délices de Tokyo. Dans cette île rocailleuse, à la population hostile et sous la férule du Président, véritable Parrain îlien, malgré le vert de la végétation et le bleu de la mer, il flotte une aura sombre autour des personnages. Il n'y a guère que Toshio "Bah alors", le facteur, a en être exempt. Et les chèvres qui apportent un peu de douceur dans cette lourde et désespérante atmosphère.

Contrairement à son premier roman, j'ai trouvé que les personnages de celui-ci étaient moins abouti. Tout comme l'ensemble en fait qui laisse un goût d'inachevé. Il y a des protagonistes mis en avant à certains moments sans que ça mène quelque part; les deux camarades saisonniers de Ryôsuke auraient mérité d'être plus approfondis. Si le message global est "La vie est dure", ce qui en soit n'est pas faux, surtout avec le passif que se traîne Ryôsuke, ça manque de nuances.  Enfin, tant qu'il y a du shôchū il y a de l'espoir car pour le lever de coude, ils excellent tous!

Je ressors donc de cette lecture avec un avis mitigé. Il serait erroné de dire que je m'y suis ennuyée mais je ne suis pas parvenue à rentrer pleinement dans l'histoire. Comme on reste dans le domaine culinaire ici, je dirais qu'il manque de liant, la sauce ne prend pas complètement. Et du coup, me laisse sur le côté du récit. Bon, j'aurai toujours appris la fabrication artisanale du chèvre.
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Bien que différent Des délices de Tokyo par son histoire, j'ai retrouvé dans ce roman des thèmes qui semblent chers à Durian Sukegawa: L'amour de la cuisine,bien sur,mais aussi le poid des non dits,les secrets d'un passé qui parasitent le présent,les blessures familiales, l'amitié.J'ai également retrouvé le rapport à la nature dans ce qu'il a s'apaisant et de ressourcant.La singularité du rêve de Ryosuke me semble être celle de se rapprocher du conte initiatique et philosophique.Ce rêve est bien plus profond que le simple désir de faire du fromage de "pinzas" et c'est une quête existentielle que nous livre Durian Sukegawa.J'ai beaucoup aimé ce petit livre qui aborde avec pudeur et sensibilité des thèmes universels dont la question de la tolerance.
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Ryôsuke est un adolescent tokyoïte mal dans sa peau. Son père s'est suicidé et lui-même a tenté de le faire. Il en a perdu son travail de cuisinier. A la quête de ses origines, il s'embarque avec deux autres jeunes désoeuvrés, Tachikawa et Kaoru (une fille), pour une toute petite île du sud de l'archipel nippon, pour un job d'été consistant à creuser une tranchée pour alimenter un nouveau réservoir d'eau potable. le travail s'avère éprouvant, les habitants sont méfiants et moyennement accueillants, l'impulsif Tachikawa provoquant même une bagarre avec un autre jeune. L'île est gouvernée par un « Président », et a la particularité d'être fortement habitée par des chèvres, qui servent de viande pour les autochtones. Au terme de leur mission, et sur le point de repartir, Ryosuke décide de rester, entraînant dans son sillage ses deux comparses interloqués. Non point dit-il pour les beaux yeux de la charmante institutrice de l'île, Mademoiselle Yoshikado, mais d'abord pour réaliser ce qui lui trotte dans la tête depuis longtemps sans doute : relancer une petite production, viable, de fromage de chèvre, comme ses parents ont tenté de le faire un jour avec leur ami Hashi, toujours en vie sur cet île et dont le jeune homme s'est peu à peu rapproché pour apprendre à faire le fromage mais aussi cerner les relations qu'a eu cet homme avec sa mère...
L'affaire avait périclité à l'époque, criblant de dettes le père de Ryôsuke et le conduisant au geste fatal. Mais Hashi a encore le tour de main pour apporter sa précieuse expérience, les petits chevreaux sont mignons et ne devraient en aucun cas finir en morceaux de bouche, Ryôsuke est fermement déterminé...Vont-il réussir ce pari, et auront-ils l'entier soutien de l'ensemble des habitants, partagés pour certains entre jalousies et désir de faire enfin revenir et s'enraciner des jeunes et de l'activité sur ce petit caillou à la population bien vieillissante ?

N'ayant pas encore lu les Délices de Tokyo, je ne pouvais pas être grandement influencé dans mon appréciation de ce nouveau roman de Durian Sukegawa. Simplement, je constate qu'à nouveau l'écrivain aime à nous faire saliver sur des bons petits mets. Après les Dorayaki, c'est ici la gastronomie française, à distance il est vrai, qui est à l'honneur ! Il signale largement que le fromage de chèvre est d'abord une affaire de fermiers français, n'hésitant pas dans son bel élan à louer le roquefort (Dont il rappelle qu'il s'agit d'un fromage de brebis). Il redouble d'efforts pour nous expliquer la technique de fabrication des fromages. La qualité littéraire n'est pas exceptionnelle, sans être non plus indigente : l'auteur maîtrise les ingrédients qui donneront à son livre une intrigue simple mais suffisamment originale pour maintenir l'attention du lecteur. Amitié, amour, quête des origines, solidarité générationnelle, un peu d'action, de jalousies et bagarres, de mignonnes petites chèvres, des gourmandises, un zeste d'action. Il m'a cependant quelque peu déçu, la poésie et une émotion toute intériorisée dans la solitude du héros ne surgissant que dans les 20-30 dernières pages. Mais cette histoire est rafraîchissante, susceptible de plaire (plus ou moins, donc) à tout le monde, tout en pouvant aisément à mon avis être classée en littérature jeunesse. Les chèvres, prénommées, sont de véritables héroïnes, on s'y attache. Il a aussi le mérite de nous livrer sans caricaturer ni en faire son propos essentiel quelques traits propres à la société japonaise actuelle et à la mentalité nippone.

La fin est assez réussie finalement. Sans la dévoiler, disons que l'auteur prend le parti de privilégier la quête originelle du héros, à savoir se retrouver soi-même et se sublimer par le succès de son projet, à toute dérive facile vers une histoire d'amour très prévisible.

Pour moi une lecture agréable. J'adresse un grand merci à Babelio et aux éditions Albin Michel pour cet envoi, qui m'a enfin décidé à lire les Délices de Tokyo, probablement d'une qualité un peu supérieure.
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