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3,99

sur 4925 notes
(Je remercie les éditions Gallmeister et Babelio pour l'envoi de ce livre- audio et la voix claire , élégante et si expressive, de Marie Bouvet qui m'a raconté cette histoire … )

Dans une petite maison dans la prairie , il y avait une adolescente de 14 ans, baptisée Julia, au départ , surnommée Croquette par son père ( et uniquement par son père ), elle préférera qu'on l'appelle, Turtle et c'est ce qui lui correspond le mieux.
Elle vit seule avec son père , le grand-père vient les voir de temps en temps. Passant ses journées à nettoyer des armes, s'entrainer au tir et crapahuter dans la forêt, Turtle n'est pas une collégienne modèle, il faut dire qu'à l'école , elle a fort à faire : se réfugier dans sa carapace , pas trop parler , cacher à tout prix ce qu'il se passe chez elle, car si ON savait , les services sociaux l'emmènerait Dieu sait où , et ce serait pire.
Aussi odieux, et inimaginable que ça puisse paraitre, ça serait pire…
Pire que cette" chambre où tout se termine", pire que ce père monstrueux incestueux, violent , fou, manipulateur, survivaliste; mais dés fois , tendre et cultivé ("Elle pense")…
Il faudra une suite d'événements , pour que Turtle , enfin , réagisse, mais pas assez tôt pour nous…


Curieusement , ce ne sont pas les scènes de violence qui m'ont dérangées, aussi insoutenables qu'elles soient . Parce que je les ai trouvée magnifiquement écrites… pudique, crues, justes.
Gabriel Tallent ne nous place pas en situation de voyeurisme, Gabriel Tallent est au dessus de ça !
Ce qui l'intéresse, son but, sa démarche artistique , c'est de nous montrer l'ambivalence de la victime. Car c'est cela le drame de Turtle, malgré tout ce que lui fait son père, elle l'admire, et elle l'aime.
Julia n'est pas une adolescente "normale" et innocente , malgré son jeune âge, elle est "dangereuse " et elle manie les armes comme peu d'adultes savent le faire..., Elle devrait être aussi pure que la nature dans laquelle, elle se sent si bien mais Croquette n'est pas un personnage manichéen.
La nature aussi est ambivalente, si belle, si séduisante mais aussi , capable de se retourner contre vous, de vous broyer , tout comme l'océan si près …
Même les quelques adultes croisés par Turtle ne sont pas "fiables" : jusqu'à quel point de doutent-ils de ce qui se passe chez elle, mais ils n'ont rien fait , Les seuls qui sont ce qu'ils devraient être, sont ses amis adolescents et la jeune Cayenne.

Ambivalences et dichotomie, même dans le style…
Contrastes entre la précision du vocabulaire , ( j'ai envie de parler de pureté lorsque Gabriel Tallent nomme les plantes, par exemple ), et les gros mots répétés à foison par le père et la fille [" Putain ! Putain! Putain" /" Espèce de connasse"/ "Espèce de poufiasse").
Je dois dire que je comprend (pour toutes les raisons évoquées plus haut ), les lecteurs enthousiastes et je comprend aussi les lecteurs qui ont détesté...
Le style est spécial… Toutes ces précisions, tous ces détails peuvent agacer, de même que la lenteur et les répétitions.
J'ai aimé celles du matin , le rituel immuable (presque rassurant... ) : Turtle prend un oeuf / jette une bière à son père/lui précise qu'il n'est pas obligé de l'accompagner.
Et puis les: " Elle pense", qui scandent le récit ...
Non, ce qui m'a dérangé, c'est la longueur !
Il est possible que ce soit le format (livre audio) qui soit le "coupable", c'est ma "première fois" ! 12 heures d'écoute, ce n'est pas rien … J'ai dû étaler cela dans le temps , ce qui dilue l'imprégnation..
Moults fois, je cru être arrivée au bout, et non…
Quelques scènes en trop, qui ont rendue ma lecture moins intense . Selon moi, elles n'apportent pas grand-chose au récit (celle de la plage avec Jacob ) et font passer Turtle pour une extraterrestre , au niveau résistance physique… ainsi que la fin , très douce qui permettent de redescendre en douceur et de montrer que la "renaissance "de Turtle viendra par la nature . On y revient…
La nature est le troisième personnage de ce livre ( la signature des éditions Gallmeister… ) . Gabriel Tallent signe un premier roman qui revisite le thème de l'inceste d'une façon extrêmement originale, percutante . Son style ultra précis, (je ne trouve pas de meilleure définition…), va mériter qu'on suive sa carrière de près…
Je lui souhaite une Absolue réussite, c'est bien parti, je crois….


Challenge Mauvais Genres 2018/19.
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L'auteur a mis huit ans pour écrire cette histoire qui a remporté le prix América du meilleur roman étranger, le grand prix de l'héroïne madame Figaro, le prix Marianne – un aller-retour dans le noir, le prix Lucioles des lecteurs, le prix libr'à nous du roman étranger et le prix mystère de la critique. 400000 exemplaires vendus à ce jour.
Que dire de plus ? Sinon, qu'il y a une véritable atmosphère dans le roman de Gabriel Tallent, l'atmosphère lourde des veilles de guerre, des veilles de chaos, et des questions sans réponse, toujours ces mêmes questions sur le fléau antédiluvien de l'inceste, la barbarie de tels comportements et la destruction psychologique des victimes. L'auteur n'y va pas avec le dos de la cuillère, pas de place pour les apitoiements médiocres ou les larmoiements inutiles. le phrasé tranche dans le vif et il y a un gout de sang sur chaque page, le papier sent la cordite.
Un roman que je recommande de lire, il brise les codes du genre.
Apprécions la préface de François Busnel et la traduction de Laura Derajinski.
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Il est des livres qui marque la mémoire au fer rouge. My absolute darling en fait partie, ô combien! Quand on sait qu'il s'agit du premier roman du jeune auteur de 31 ans, c'est à la fois admirable et inquiétant.
Admirable car son récit est vraiment une réussite, abouti et construit avec une maîtrise impressionnante.
Inquiétant par le fonds même de l'intrigue d'une noirceur oppressante et terrifiante.

Lorsque mon libraire m'a chaudement recommandé cette nouveauté éditée chez Gallmeister, il m'a derechef prévenue que c'était "plutôt sombre"... Doux euphémisme que ce plutôt... Lui-même avait été littéralement scotché par la qualité de ce premier texte. Comment ne pas l'être? Si j'en crois les avis qui se multiplient sur Babelio, l'Américain a conquis d'emblée son lectorat.

Et pourtant, ce n'est pas une lecture facile. Il n'est pas fait pour les amateurs de bouquins détente sans prise de tête. Ni pour les âmes trop sensibles. Gabriel Tallent dresse ici le portrait dérangeant d'une jeune ado, Julia dite Turtle, élevée à la dure (là aussi, doux euphémisme) par un père à l'esprit tordu empreint de réflexions philosophiques et apocalyptiques. Martin aime sa fille; il le lui répète sans cesse. Un amour terrifiant par son absolutisme dévorant et abusif.
Turtle, du haut de ses quatorze ans, galère au niveau scolaire mais est sans égal - merci papa - pour démonter et remonter pistolets et carabines. Les armes n'ont pas de secret pour elle, sa précision de tir est imparable. Là où les autres filles de son âge répandent autour d'elle l'odeur de parfum et de maquillage, elle ce serait plutôt la graisse et les lubrifiants pour fusils et compagnie.
Elle est également confrontée à sa relation au père, lourde et dérangeante. Si elle sent bien que ça cloche, l'emprise affective et psychologique ainsi que l'habitude sont si fortes que la gamine vacille, ne sachant pas où elle en est.

Cette famille atypique vit dans des conditions minimalistes dans une maison qui se déglingue de partie, avec veuve noire dans la baignoire et une plaque de contreplaqué pour lit. Le tout dans un admirable écrin naturel de la Californie du Nord, avec forêts de séquoias, rouleaux du Pacifique et une flore diversifiée que l'auteur détaille à l'envie. Ce cadre à la beauté sauvage rend d'autant plus forte la violence de l'histoire.

My absolute darling est un roman qui se lit avec une boule d'appréhension tout du long. Gabriel Tallent a insufflé dans chaque page une tension dramatique qui se ressent avec force. On est vraiment loin de la lecture détente!
J'en suis ressortie comme étourdie par un uppercut, heureuse d'être parvenue au bout des 450 et quelques pages afin de pouvoir souffler et me remettre des émotions violentes que le roman m'a données. Il y a une fascination oppressante qui s'exerce au rythme des chapitres. Et comment ne pas ressentir d'empathie et de compassion pour ce magnifique personnage de Turtle, confrontée à la folie du père? Même si la nature et les manifestations de cette folie diffèrent, Martin Alveston m'a fait penser plus d'une fois à l'excellent et douloureux Profession du père de Sorj Chalandon.

Dur, rude, prenant et noir, tel est My absolute darling. Au-delà de ces qualificatifs, il est également un grand roman qui ne s'oublie pas.
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Encore un cadeau du Père Noël qui m'avait prévenu que cet ouvrage était splendide malgré quelques scènes très crues et dures. Pour ces dernières, en effet, j'avoue avoir été servie mais cela en valait la peine (même si je suis loin d'être ressortie indemne de cette lecture et crois que j'en ai pour quelques nuits d'insomnies, non tout de même pas, quoi que...).

Julia, que tout le monde appelle Turtle sauf sauf son père qui l'appelle Croquette, vit seule avec ce dernier depuis que sa mère mourut dans d'étranges circonstances. le moins que l'on puisse dire, c'est qu'elle n'a pas été gâtée par le vie. Vivant avec un père extrêmement dur, souvent violent et qui plus est, qui a des gestes impardonnables envers elle, à savoir ceux qu'un père ne devrait ô grand jamais avoir avec sa fille, est une belle adolescente très renfermée sur elle-même comparée aux jeunes de son âge mais si il y a bien un domaine dans lequel elle excelle, c'est celui du maniement des armes à feu et de la débrouillardise en n'importe quelle circonstance lorsqu'elle se retrouve en pleine nature ou dans sa maison qui a tendance à partir à va-l'eau. Son grand-père paternel, avec qui elle qui elle a de très bon rapports, même si ce dernier a un peu trop tendance à abuser du Jack Daniel's se rend bien compte que Martin, son fils et père de notre héroïne, déconne à bloc avec cette gamine mais il n'a jamais fait de vagues (la mort l'emportera avant malheureusement). Les professeurs du lycée eux aussi se rendent compte que quelque chose cloche mais sans preuves, ce qu'Anna, l'une d'entre eux se reprochera longtemps, c'est justement d'avoir été impuissante et de ne pas avoir pu empêcher que le ou les drames se produisent. A quoi fais-je allusion ? Je ne vous le dirai pas car j'en ai d'ailleurs trop dit...
mais sachez que si vous avez le coeur bien accroché, il faut que vous lisiez cet ouvrage absolument car, comme dirait Turtle elle-même "c'est un putain" de bon livre.

Un roman splendide même si souvent très dur mais accrochez-vous car je vous garantis que vous ne serez pas déçus, loin de là...Mon premier coup de coeur pour cette nouvelle année ! le niveau étant très élevé, la compétition démarre à un niveau très élevé !
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Putain, quel livre !... Je n'ai pas mieux pour exprimer l'effet ressenti en lisant My absolute darling ! Pourquoi d'ailleurs me priverais-je de ce mot, alors que ma liseuse le décompte plus de cent cinquante fois dans les quatre cent cinquante pages du roman. « Putain ! » vocifère Martin, chaque fois qu'il sent sa fille Julia, dite Turtle ou Croquette, lui échapper. « Putain ! » grogne Turtle, quand elle est en colère, en général après elle-même.

Lorsque je lis, je m'efforce de garder du recul afin de préserver mon émotivité. Au début de My absolute darling, je me suis tenu au-dessus de l'univers glauque de Martin et Turtle. Mais j'ai fini par être embarqué par l'immense talent de conteur et de descripteur de Gabriel Tallent, un jeune écrivain qui aura passé huit ans à écrire ce premier roman. Avec lui, j’ai arpenté des terrains flamboyants et indomptés, j'ai humé les senteurs des fleurs sauvages dans les collines, j'ai vu entre les rochers noirs le soleil rouge se coucher sur l'océan, j'ai entendu les craquements de la vieille maison et frissonné en tombant sur l'énorme veuve noire au ventre velu, j'ai suffoqué lorsque le ressac de l'océan m'a submergé et j'ai souffert dans mon corps en voyant Turtle soigner toute seule ses blessures… Et chaque fois que Turtle retombait sous le joug de Martin, j'aurais voulu crier : « Putain, Turtle !... Non ! »

Pour une large part, le roman consiste en un huis-clos entre un père et une fille, dans une maison délabrée, perdue sur une côte sauvage de Californie. Martin est un ours mal léché, un colosse pourvu d'une véritable culture littéraire, sachant aussi tout faire de ses mains. Adepte du survivalisme, il se prépare, avec Turtle, aux conditions de vie primitives et hostiles d'une post-catastrophe écologique. La maison regorge de kits de survie, de stocks de nourriture, d'outils, de médicaments. Sans oublier un véritable arsenal de flingues plus ou moins sophistiqués, que Turtle ne cesse de démonter et remonter pour les nettoyer, quand elle n'observe pas le monde par un viseur et qu'elle ne s'exerce pas au tir. Pour Martin, elle doit devenir une championne de l'autodéfense.

La relation père - fille s'avère rapidement malsaine. Martin est en fait un loser replié sur lui-même, ruminant ses échecs et sa malchance. Turtle, qu'il élève seul, est la dernière chose qu'il lui reste. Elle est son amour absolu, exclusif, ultime. En proie à un sentiment pervers, monstrueux, qui bascule dans la haine, il l'humilie, la roue de coups, la viole régulièrement. Elle a quatorze ans et ça fait des années que ça dure. Insoutenable !… Putain ! Je ne crois pas avoir jamais autant haï un personnage de fiction.

Comme tous ceux qui sont violentés par un proche, Turtle trouve des justifications à son bourreau et croit même mériter les supplices qu'il lui inflige. Bien que n'ayant jamais rien connu d'autre, elle pressent toutefois que sa situation est anormale, elle en a honte et elle la dissimule. Elle reste partagée entre le dégoût et l'adulation, entre la peur et la confiance, entre la tentation de protéger un secret et le parti pris de le révéler.

N'y a-t-il personne pour arracher Turtle à son monstre de père ? Un grand-père alcoolique et une enseignante mal dans sa peau soupçonnent la vérité mais sont trop pusillanimes pour intervenir. Un jour, Turtle rencontre Brett et Jacob, des jeunes gens un peu plus âgés qu'elle, passionnés de littérature. Leurs dialogues désopilants fascinent Turtle, même si elle a du mal à suivre. Brett est issu d'une communauté de hippies des années soixante, Jacob d'un père ayant réussi dans le high-tech et d'une mère branchée art contemporain. Peut-être l'espoir d'une libération.

Gabriel Tallent imagine et dresse des scènes incroyables, haletantes, dignes d'un thriller, comme l'apocalyptique règlement de comptes final. Ou comme ce jour de grande marée, où Turtle et Jacob, surpris dans une crique par la violence soudaine de l'océan, sont roulés dans des tourbillons, aspirés par les bas-fonds, engloutis par les déferlantes, projetés contre les rochers où s'accrochent des coquillages qui sont autant de « rasoirs de porcelaine ». Blessés, isolés pendant plusieurs jours sur un rocher inaccessible et invisible, ils ne s'en sortiront que grâce à la résilience de Turtle, à sa capacité à se nourrir et à se soigner avec les moyens du bord.

Un savoir-faire qu'elle tient de son père, qui aurait rêvé qu'elle soit capable « de vivre avec les loups et de fonder un royaume ».
Lien : http://cavamieuxenlecrivant...
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Une lecture mitigée : le style de l'auteur d'abord : on passe d'une écriture nouvelle et un peu scolaire à une poésie échevelée sur la nature, les plantes, les champignons ...

Je trouve que ce livre se bonifie au fil des pages car on attend qu'une chose, c'est la révolte de Croquette mais c'est long et la psychologie des personnages, principalement celle de Croquette est particulièrement bien fouillée.

J'ai été écoeurée, révoltée mais je me suis souvent ennuyée car les répétitions sont légions.

Conclusion : ni contre ni pour, c'est lu, ce fut dur, marquant mais sans plaisir.
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Ma meilleure amie m'a prêté "My absolute darling" en me disant : "Tu verras, c'est dur, mais c'est bien", et son avis semblait alors rejoindre celui de très nombreux lecteurs. Je referme ce roman après une semaine de lecture pénible et je me dis : "C'est dur, et pourquoi est-ce bien ?".

Je ne sais pas si Gabriel Tallent a voulu montrer par ce premier roman le spectacle navrant de la décadence des ploucs américains ; en fait, je ne sais pas ce que Gabriel Tallent a voulu montrer à travers son roman, si tant est qu'il ait voulu montrer quelque chose. Personnellement, je ne vois pas en quoi l'histoire de Turtle, 14 ans, prisonnière d'un géniteur pédophile et ultra-violent, dont les progrès à l'école sont stagnants et la capacité de survie exacerbée, tout comme son goût pour les armes à feu, héritage éducatif de son enfoiré de paternel, est représentative de quelque chose de concret. Au début de ma lecture, j'ai cru que l'auteur voulait dénoncer quelque chose voire l'absurdité de la société et certains passages m'ont semblé creusés avec soin mais dès la seconde partie du roman, tout est parti en eau de boudin : quand Turtle et Jacob font naufrage sur un îlot désertique au large de la côte californienne, c'est tout le roman qui chavire et bascule dans un mauvais scénario de blockbuster hémoglobiné.

Roman noir, roman dur, comment en serait-il autrement quand on subit les scènes d'inceste et de pédophilie, de violences sur enfants, d'entraînements intensifs au tir et au maniement des armes à feu, et quand les seuls mots qui franchissent les lèvres de Martin, l'enfoiré de paternel, sont "Putain" et "Bordel de Dieu" ? Chez Tarantino, ces mots ont une résonance, ici, aucune.

"My absolute darling" raconte la lutte à mort entre un père abusif et sa fille victime du syndrome de Stockholm jusqu'à la mise à mort de l'un d'eux. Mais pour autant, je n'ai jamais eu la sensation que Gabriel Tallent voulait illustrer une lutte à mort contre la prédation sexuelle ou contre l'usage familier des armes dans les foyers américains. Il y a ce quelque chose de gratuit et de voyeur dans la précision chirurgicale de son style qui m'a agacée.

Bien sûr, il se dégage de la narration une urgence, une terreur réfrigérante, une détresse et une violence qui ne peuvent laisser insensible le lecteur le plus blasé mais la même question revient : pourquoi ? A quoi ça sert ? A qui ça sert ? La finalité de toute cette merde, de toute cette noirceur et de tout ce vice, où et quelle est-elle ?

La psychologie des personnages principaux se veut fine mais elle est grossière, inutilement complexe et alourdie par des introspections hors-de-propos pas même justifiées par l'urgence à survivre de Turtle. C'est complaisant et surjoué, l'auteur prépare ses effets comme un magicien le lapin caché dans son chapeau. Les descriptions de la nature sont valables mais l'auteur donne l'impression d'être fier du moindre mot un peu érudit. le style manque de naturel ; j'ai ressenti de la pitié pour Turtle mais pas de compassion, dommage. Si le but ultime était de faire naître chez le lecteur la rage du vengeur et du justicier, très peu pour moi, merci.

Bref, je suis arrivée au dénouement épuisée et soulagée d'en finir. Définitivement, me méfier des romans dont la première page jette à la figure du lecteur les critiques dithyrambiques des magazines. La puissance et l'authenticité unanimement vantées auront été les grandes absentes de cette expérience littéraire.


Challenge MULTI-DÉFIS 2020
Challenge TOTEM
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Mon plaisir de lecture, avec My Absolute Darling, aura évolué au fil des pages. Même si j'ai tout de suite été happée par le récit, celui-ci n'a pas débuté aussi fort que je ne le pensais. Mais j'ai été de plus en plus bousculée, au fur et à mesure que l'héroïne mettait des mots sur ses émotions, se libérant ainsi de la présence psychologique et physique de son père.

Ce roman est très fort. Il l'est sans aucun doute par les sujets qu'il aborde, celui de l'inceste surtout, celui aussi de la protection de la nature ou encore de la détention d'armes à feu.

Mais sa très grande force réside sans conteste dans la caractérisation des personnages, et notamment ceux de Julia et Martin Alveston. Quelle justesse de ton !
Julia/Turtle/Croquette est un personnage tout simplement inoubliable. Sa complexité en fait un être de chair et d'os. Amour et haine, culpabilité et désir de vengeance, indépendance et soumission, courage et lâcheté : Turtle vit et jamais à moitié. L'intensité de son être et de son quotidien nous marquent un peu plus à chaque page.

Gabriel Tallent a aussi un talent certain pour instaurer du suspens. Le duel Turtle/Martin prend de l'ampleur jusqu'à la confrontation finale qui emporte le lecteur et le laisse épuisé et pantelant. Croquette réussira-t-elle à s'émanciper, à s'évader, à se délivrer de l'emprise paternelle néfaste ? C'est ce que je me propose de vous laisser découvrir par vous-même.

Si je dois être totalement franche, ce dont je ne doute pas, je me dois d'ajouter que j'ai parfois été agacée par l'utilisation répétée (c'est un euphémisme) de l'expression "genre" dans les discours directs prononcés par les adolescents du récit. C'était beaucoup trop caricatural et sonnait faux. De même sans doute que les envolées philosophico-lyriques de Jacob et Brett.
D'autre part, si j'ai apprécié la poésie du lexique botanique et la rugosité du lexique d'armement, j'ai regretté mon incompétence en la matière car je me suis sentie perdue plus d'une fois.

Mais je n'ai pas peur d'affirmer qu'il s'agit là de détails au regard de la force qui se dégage de l'ensemble du roman. Alors n'ayez pas peur, sautez le pas !
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Une lecture éprouvante , fracassante qui vous retourne l'âme sans aucune retenue .

L'histoire de la jeune Turtle qui vit avec son père n'est autre qu'une immersion dans la perversité absolue au coeur d'un environnement sauvage isolé , solitaire et misérable .
Au fil du roman, on mesure l'impact de l'emprise , de la soumission et de l'altération du discernement .
Turtle s'en défend comme elle peut : on la sent fragile mais en proie à une animalité exacerbée et les comportements pathologiques du père , son mal-être et sa personnalité vont au fil du roman éclater à la gu... du lecteur jusqu'à l'insupportable.

Sans doute fallait-il frapper fort pour traiter un tel sujet : là , c'est réussi !
Mais, je me garderai bien de le qualifier d'excellence ou du contraire car il me laisse dans un état de totale ambivalence .

Voilà un jeune auteur qui , à mon humble avis , s' impose surtout par le choix du thème percutant de son roman .
Sur le plan littéraire , c'est fort, c'est violent , c'est noir .
Heureusement, par contraste, la nature vient par moment apposer un peu de baume au coeur .
Aucune empathie pour les personnages n'est venue adoucir ma lecture .

Sinon, l'intrigue en elle-même ne m'a pas vraiment passionnée . Mais, elle permet de bien cerner l'environnement social en mettant en exergue tout au long du récit les difficultés pour décrypter les comportements à risque ainsi que l'inertie face à l'enfance en danger.
Partout dans ce roman l'enfant évolue dans un milieu hostile : folie, abandon, désamour , violence .
Un monde où les enfants sont armés .
Un récit qui oscille sans cesse entre fiction et réalité . C'est aussi pourquoi il interpelle autant .

Malgré tout , j'ai parfois éprouvé un sentiment de voyeurisme : ce roman , je l'ai lu par curiosité suite aux avis élogieux , je l'ai terminé malgré un sentiment de malaise et il m'aura ensuite fallu un peu de recul pour en parler.
Les thèmes ici traités ne sont pas sans rappeler ceux des romans de David Vann dont je suis une " absolute " fan . Mais, pour moi la comparaison s'arrête là . Chacun son style .

Alors, aujourd'hui , je me refuse à dire si j'ai aimé ou pas : je n'en sais rien car ce n'est pas en ces termes que je définirais mon opinion .

Voilà, je crois qu'il faut le lire comme un roman social , une étude psychologique et quelle que soit l'appréciation de sa forme, il laisse un souvenir fort , aussi dérangeant que peut l'être l'évocation du pire tabou .
Pas de doute, ce roman est un hurlement déchirant !

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Julia, petite sauvageonne, réfléchie, et peu loquace, Julia s'est dévoilée au fil de ce roman, m'invitant tantôt à la colère, tantôt à l'ennui, souvent à la révolte, parfois à l'agacement et sans aucun doute à l'admiration.

Colère contre ce père violent, possessif à l'extrême, pour lequel Julia doit abandonner ses sentiments, son identité pour suivre son chemin, et quel chemin ! Chemin qui risque fort de ne mener nulle part… Colère contre ce père maltraitant.

Admiration pour cette adolescente qui certes, ne possède pas le savoir « académique » des autres filles de son âge, et qui, à maintes reprises, montre sa vive intelligence pour s'accommoder de son environnement et s'adapter à la nature parfois bien hostile.

Ennui face à une foultitude de détails, qui certes, précisent la situation de notre héroïne, de scènes trop longues à mon goût.

Agacement face à la pauvreté de vocabulaire ou d'argumentation du père qui se résume trop souvent à des « putain, merde », peut être également nécessaires pour cerner le personnage, mais qui deviennent vite lassants, agacement également lors des dialogues entres jeunes qui ponctuent leurs affirmations de " genre, genre, genre…" sans doute pour faire contraste avec le parler de Jacob, petit amis de Julia, et pour montrer une différence entre Julia et les autres, Julia qui ne peut se comporter comme une jeune de son âge.


Je me suis longtemps demandée quel était le but de l'auteur, et c'est Kittiwake qui me l'a suggéré, (Merci Kitty !) : Sans aucun doute, dresser un portrait type de l'enfant maltraité qui subit l'inceste. Je ne peux me permettre d'en parler car je serais obligé de rentrer dans les détails et de spoiler, je m'abstiendrais donc.

Je sors donc quelque peu mitigée de cette lecture. L'écriture ne m'a pas fait vibrer, le récit me semble inégal, tantôt ennuyeux, tantôt prenant, une Julia bien seule face à ses difficultés, des adultes qui se doutent mais qui ne semble pas vouloir réagir, une scène avant la fin plus que surprenante, violente à l'extrême qu'il serait impossible de voir se dérouler dans la réalité sans un minimum de tumulte et qui semble passer inaperçue dans la communauté.

Je trouve cette scène bien peu crédible.

J'ai donc apprécié ce roman … Sans plus.

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