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Ce n'est pas une défaillance de votre téléviseur, n'essayez donc pas de régler l'image. Nous maîtrisons à présent toute retransmission, nous contrôlons les horizontales, et les verticales, Nous pouvons vous noyer sous un milliers de chaînes ou dilater une simple image jusqu'à lui donner la clarté du cristal, et même au-delà… Nous pouvons modeler votre vision, et lui fournir tout ce que votre imagination peut concevoir. Pendant l'heure qui vient, nous contrôlons tout ce que vous aller voir et entendre. Nos partagerons les angoisses et les mystères qui gisent dans les plus profonds abysses... (et si vous ne connaissez toujours pas Howard Phillips Lovecraft je présente largement l'auteur et son oeuvre ici : https://www.babelio.com/livres/Lovecraft-LAppel-de-Cthulhu-Illustre/969228/critiques/1558635)


"La Couleur tombée du ciel" (1927) :
https://www.youtube.com/watch?v=1VmORBsaldM
Décidément HPL adore la narration indirecte... Dans cette nouvelle nous suivons l'enquête de terrain d'un ingénieur de Boston dans environs d'Arkham au sujet de l'installation d'un nouveau barrage réservoir. Il est intrigué par les légendes locales au sujet d'un endroit controversé appelé « la lande foudroyée »... Et c'est ainsi qui apprend de la bouche du dénommé Ammi Pierce la triste et terrible histoire de la famille Gardner.
Un jour un météorite s'écrase sur la propriété de Nahum Gardner, et une armée de scientifiques vient échantillonner la Chose pour en découvrir les secrets (et HPL s'éclate à piocher dans "Modern Science and Materialism" de Hugh Elliott). Alors que les hommes de sciences aboutissent tous à l'Inconnu, Nahum voit la nature se colorer, croître et prospérer avant de changer, évoluer, voire carrément se transfigurer. Puis faune et flore perdent leurs couleurs pour devenir grisaille avant de dépérir et de mourir (ben oui HPL a une légère tendance à spoiler ses propres révélations ^^)... le pauvre Nahum spectateur impuissant des événements voir ainsi disparaître ses champs et ses troupeaux, avant que les membres de sa famille ne deviennent fous ou ne disparaissent. Quand après un silence de deux semaines Ammi Pierce vient aux nouvelles, il découvre un Nahum agonisant qui lui confie qu'il a compris trop tard être victime d'un vampire stellaire mais aussi où se trouve la tanière de ce dernier... Lui et les autorités passent la ferme au peigne fin, avant d'assister médusés au décollage du vampire stellaire pour l'espace intersidéral d'où il est venu (enfin une partie du vampire stellaire, car quelque chose est resté, et c'est pour cela qu'Ammi Pierce et le narrateur flippent à mort que le cauchemar ne recommence un jour).
Relecture aussi efficace que la lecture. Ici HPL s'inspire de "The Book of the Damned" de Charles Fort pour aborder le classique du choc des civilisation entre terriens et aliens qui remonte à "La Guerre des mondes" de d'H.G Wells. Après la force de la nouvelle est aussi sa faiblesse à savoir sa longueur et son rythme : après toutes les bonnes descriptions des mutations de l'environnement, la partie humaine du récit est précipitée et on aboutit directement ou dénouement (imaginez le même récit avec une narration directe comme dans les thrillers). On pense tout de suite aux ravages de la radioactivité, et HPL s'est directement inspiré du scandale des filles du radium pour décrire le calvaire de la famille Nahum (alors que Pierre et Marie Curie avertissait leurs contemporains des dangers du radium, les crevards yankees faisaient bosser des ouvrières avec jusqu'à ce qu'elle en crève : combien de millions de gens auront-ils été empoisonnés par l'hypercapitalisme juste pour se faire plus de pognon?). Mais c'est saisissant de voir que la mort de leur ferme Nahum illustre à la perfection la destruction du Dust Bowl la décennie suivante par les apprentis sorciers de Monsanto (qui va récidiver avec le DDT, le napalm, l'agent orange et ses nombreux dérivés, avant d'inonder le monde de ses très douteuses semences OGM... quand est-ce que l'hypercapitalisme cessera de nous empoisonner ?)
Le récit a beaucoup inspiré : Brian Aldiss avec "The Saliva Tree", Jeff VanderMeer avec "Annihilation", Stephen King avec "Les Tommyknockers" (qui une fois encore trahit son modèle en faisant des aliens anthropomorphiques alors que HPL avait tout fait pour ne pas tomber dans cette facilité) et bien sûr Michael Shea qui a rédigé une suite intitulé "The Colour Out of Time", mais aussi les films "Die, Monster, Die !" (Daniel Haller, 1965), "The Curse" (David Keith, 1987) et "Colour From the Dark" (Ivan Zuccon, 2008)...


"L'Abomination de Dunwich" (1928) :
https://www.youtube.com/watch?v=amcdiiCOoFM
A première lecture c'est l'une des nouvelles lovecraftienne qui m'avait le plus marqué, et à relecture force est de constater que ce n'est plus le cas. La faute sans doute à une narration indirecte où le narrateur omniscient nous met à l'écart avant de tout spoiler (ben oui, le vieux Whateley qui parle de ses petits-fils à qui veut bien l'entendre mure son étable, et en abat les cloison intérieures avant d'acheter à la chaîne des têtes de bétail que personne ne revoit jamais : d'après mes souvenirs Joseph Michael Straczynski avait écrit quelque chose d'assez similaire pour la série animée "Ghostbusters" ^^)...
Dans la ruralité profonde de Nouvelle Angleterre, où dans chaque patelin les familles se divisent en branches saines et en branches dégénérées à cause de la consanguinité, on suit le destin de la famille Whateley dont tout le monde considère le patriarche (à juste titre ^^) comme un sorcier inféodé aux forces cachées derrière les ruines cyclopéennes d'origines amérindiennes ou indo-européennes qui hantent la communauté de Dunwich. Et les choses s'accélèrent quand sa fille albinos accouche d'un père inconnu le 2 février 1913 à 5 heures du matin d'un garçon aux traits étranges et à la croissance inhumaine. le garçon anormalement précoce suit le chemin tracé par son grand-père et cherche à percer les secrets du tristement célèbre Necronomicon (pour évidemment précipiter la fin du monde dans l'espoir de tirer les marrons du feu quand les astres seront propices ^^), et les nuages d'engoulevents semblent observer et juger chaque acte de la famille... Quand l'héritier de la funeste dynastie Whateley meurt dans une tentative désespérée de mettre la main des connaissances interdites, un monstre invisible répand le chaos et la désolation parmi les habitants de Dunwich et un trio d'érudits formé par Henry Armitage, Francis Morgan et Warren Rice collabore avec les habitants menés par Earl Sawyer pour évacuer la population et empêcher l'abomination de rejoindre les ruines cyclopéennes d'origines amérindiennes ou indo-européennes... Car Yog-Sothoth est à la fois la Clé et la Porte ! (remember le Maître des Clés et le Cerbère de la Porte dans "Ghostbusters" ^^)
HPL signe un récit désormais classique mais néanmoins efficace inspiré par "The Great God Pan" et "The Novel of the Black Seal" d'Arthur Machen, et évidemment celui-ci a eu une longue postérité (les jumeaux inhumains faisant par exemple une apparition marquée et marquante dans "Au-delà de la Rivière Noire" de R.E. Howard),


"Le Cauchemar d'Innsmouth" (1931) :
https://www.youtube.com/watch?v=iZwOeRCY6ic
Robert Olmstead est un étudiant qui souhaite réunir observation de terrain et frisson de l'aventure, et c'est ainsi qu'il est magnétiquement attiré par la localité d'Innsmouth de sinistre réputation... Dans son mini road-trip, il interroge employé de chemin de fer, conservatrice de musée, magasinier de petit commerce et quand il écoute le récit de Zadok Allen, clochard nonagénaire toujours en manque d'alcool, les pièces du puzzle semble se mettre en place si tant est que tout cela soit vrai : dans une ambiance plus lourde que jamais dans laquelle la Innsmouth est un personnage à part entière pour ne pas dire une créature qui veut l'engloutir, il apprend d'où viennent les bancs de poissons qui permettent à la ville de survivre malgré la crise, d'où vient l'or qui alimente la fonderie qui permet à la famille Marsh de régner sur elle, d'où vient la tiare que son chef tient absolument à récupérer, et que si la population a naguère été décimée ce n'est pas par une épidémie (OMG un préquel de la nouvelle dans laquelle on nous raconterait la guérilla urbaine entre cultistes et loyalistes et le massacre perpétré par l'invasion des Profonds, cela serait génialissime ! Il va falloir que j'aille fouiller du côté de Robert Price, Stephen Jones, Neil Gaiman, Ramsey Campbell, David Sutton et Kim Newman qui ont poursuivi d'une manière ou d'une autre le cauchemar d'Innsmouth)… Désormais Robert Olmstead en sait beaucoup trop pour son propre bien, et c'est tout naturellement qu'on lui refuse de quitter la ville à la tombée du jour pour mieux s'en débarrasser le nuit. Nous entrons dans le survival et je confesse que la phase indoor est bien plus flippante que la phase outdoor (mais c'est peut-être un héritage de mes parties d'"Alone in the Dark" et de "Resident Evil" ^^)… Et il y a la chute du récit qui n'était sans doute pas nécessaire pour que celui-ci soit réussi mais qui a néanmoins assuré sa célébrité : en reconstituant l'arbre généalogique plein de dégénérescences biologiques du sorcier maudit Obed Marsh, le narrateur continue son chemin du Côté Obscur en apprenant qu'on peut échapper à tout sauf à soi-même !
La nouvelle illustre à la perfection les phobies de l'auteur puisqu'il insère ses tragédies familiales pleines d'internement à l'asile aux héritages de R.L. Stevenson, H.G. Wells et Lord Dunsany, et qu'au final il met en avant ces maux personnels et primordiaux que sont la peur des autres et la peur de soi... D'où les interprétations complètement racistes qu'on peut faire de l'oeuvre, qui ne doivent pas êtres très éloignées de ses pensées parfois nauséabondes... Chinois, Canaques et Polynésiens ne sont pas considérés comme de véritables êtres humains, et ça ce n'est que la face émergée de l'iceberg du racialisme et du suprématisme bien-pensant : grosso modo nous avons un bobo WASP qui se rend dans un ville portuaire pour découvrir avec horreur que sa population s'est mélangée avec des êtres qui ne sont pas considérés comme humains pour donner naissance à des hybrides jugés repoussants, mais comme tout ressortissant d'une nation fondée sur l'immigration lui aussi est peu ou prou semblable aux métisses / hybrides qu'il abhorre... Ah ça on sent bien les tourments des mouvements d'extrême-droite américains confrontés à leurs propres contradictions ! (ce qui invalide complètement les private jokes intellos de Norman Spinrad dans "Rêve de fer", mais ceci est une autre histoire ^^)
Évidement le récit a inspiré films, comics et jeux vidéos et je mentionnerai "Dagon" de Stuart Gordon qui déplace l'action de la Nouvelle-Angleterre étatsunienne en Galice espagnole pour une oeuvre gore certes mais qui se termine par un épilogue à la fois terrifiant et fascinant plus démons et merveilles que jamais, ainsi que le survival vidéoludique "Call of Cthulhu: Dark Corners of the Earth" qui vous permettra d'incarner le fuyard d'Innsmouth pourchassé par toute sa population humaine ou inhumaine...


"Celui qui chuchotait dans les ténèbres" (1930) : https://www.youtube.com/watch?v=VZl9jVp_7EA
HPL est décidément à lui tout seul un pont entre la SF et l'Horreur, qui ici prend la forme d'un récit épistolaire… En effet les folkloriste Albert Wilmarth universitaire du Massachusetts n'est pas d'accord avec Henry Akeley l'érudit du Vermont à propos d'étranges cadavres emportés par de violentes inondations :
- pour l'universitaire urbain, il s'agit de résurgence de superstitions païenne d'origine amérindiennes ou européennes, les légendes rurales anciennes se transformant en légendes urbaines modernes...
- pour l'érudit campagnard, il s'agit d'une preuve de l'existence d'une colonie extraterrestre dans la chaîne montagneuse des Appalaches !
Albert Wilmarth se demande si son correspondant n'est pas fou à lier, mais celui-ci est calme et posé, courtois et cultivé, et c'est le plus sérieusement du monde qu'il étaye sa théorie avec une argumentation issu d'un travail de moine cistercien. Quand arrive par la poste photographies mystérieuses, enregistrement sonores et mystérieux artefact d'origine non humaine celui-ci se met carrément à douter… L'un et l'autre en savent déjà trop, et les aliens qui ne veulent pas que leur existence soient révélée passent à l'action mettent en action : lettres et colis semblent mystérieusement interceptés, et Henry Akeley se met à relater comment sa résidence isolée se retrouve en état de siège… le jour il se repose, se ravitaille et se prépare, etla nuit il combat pied à pied avec les créatures d'outre-monde et les agents humains : entre lui et un funeste destin ne se dresse son chenil de chiens de garde constamment renouveler à la plus grande consternations des habitants qui se demandent pourquoi chaque soir on les entends hurler à la mort entre deux coups de fusils… Puis silence radio… Albert Wilmarth se demande si son correspondant n'est pas mort quand il reçoit une ultime lettre…

Les scientifiques découvrent Pluton, et le narrateur sait que la guerre avec les habitants de l'astre infernal a déjà commencé : il sait car il a vu ! le récit a très bien vieilli, et il aurait pu parfaitement constituer un bon pitch pour les séries télévisées "Au-delà du réel", "La Quatrième Dimension", "Les Envahisseurs" ou "X-Files" (d'ailleurs je crois que cela a été fait par chacune d'entre elle : il n'y a pas de mal à se faire du bien hein ^^), et il est charnière dans le mesure où il pioche chez Arthur Marhen, Robert W. Chambers, et Lord Dunsany, et qu'il a inspiré Fritz Leiber, Brian Lumley et Caitlín R. Kiernan qui l'ont intégré dans leur propre mythologie (Albert Wilmarth aurait ainsi crée une fondation destiné à protéger humiliation des Grands Anciens et leurs séides humains et non-humains : nous basculons dans le monde des chasseurs d'horreurs, dignes héritiers du vénérable professeur van Helsing !).


Lu dans le numéro 4 de l'excellente mais défunte collection Présence du futur, euthanasiée voire assassinée par Serge Brussolo et Gilles Dumay, avec la couverture de l'indescriptible Serge Bihannic, la traduction vintage de Jacques Pépy et une préface courte mais intense de Jacques Bergier. Et relu dans le cadre d'un mini challenge Halloween en 2018 avec les potos des Trolls de Babel ! ^^
Lien : http://www.portesdumultivers..
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Gou Tanabe est un mangaka discret spécialisé dans les adaptations de classiques de la littérature fantastique, et il a trouvé un filon inépuisable en s'attaquant à celle du Maître du Providence alias Howards Phillips Lovecraft. Ses personnage peu expressif sont écrasés par une ambiance lourde et pesant savamment distillé, et leurs visages étranges ne peuvent que manifester la peur et l'angoisse. Et le mangaka réussit encore une fois brillamment l'exercice de style avec "La Couleur tombée du ciel", primée au Festival d'Angoulême en 2020. Et comme l'adaptation du récit est assez voire très fidèle, je vais cannibaliser ma critique du récit originel...


Décidément HPL adore la narration indirecte... Dans cette nouvelle écrite en 1927 nous suivons l'enquête de terrain d'un ingénieur de Boston dans les environs d'Arkham au sujet de l'installation d'un nouveau barrage réservoir. Il est intrigué par les légendes locales au sujet d'un endroit controversé appelé « la lande foudroyée »... Et c'est ainsi qui apprend de la bouche du dénommé Ammi Pierce la triste et terrible histoire de la famille Gardner. (Sauf que Gou Tanabe opte lui pour la narration directe, mais je vais revenir là-dessus un peu plus tard...)
Un jour un météorite s'écrase sur la propriété de Nahum Gardner, et une armée de scientifiques vient échantillonner la Chose pour en découvrir les secrets (et HPL s'éclate à piocher dans "Modern Science and Materialism" de Hugh Elliott). Alors que les hommes de sciences aboutissent tous à l'Inconnu, Nahum voit la nature se colorer, croître et prospérer avant de changer, évoluer, voire carrément se transfigurer. Puis faune et flore perdent leurs couleurs pour devenir grisaille avant de dépérir et de mourir (ben oui HPL a une légère tendance à spoiler ses propres révélations)... le pauvre Nahum spectateur impuissant des événements voir ainsi disparaître ses champs et ses troupeaux, avant que les membres de sa famille ne deviennent fous avant de mourir ou de disparaître sans laisser aucune trace. Quand après un silence de deux semaines Ammi Pierce vient aux nouvelles, il découvre un Nahum agonisant et délirant qui lui confie qu'il a compris trop tard être victime d'un vampire stellaire mais aussi où se trouve la tanière de ce dernier... Lui et les autorités passent la ferme au peigne fin, avant d'assister médusés au décollage du vampire stellaire pour l'espace intersidéral d'où il est venu (enfin une partie du vampire stellaire, car quelque chose est restée, et c'est pour cela qu'Ammi Pierce et le narrateur flippent à mort que le cauchemar ne recommence un jour).
Ici HPL s'inspire de "The Book of the Damned" de Charles Fort pour aborder le classique du choc des civilisation entre terriens et aliens qui remonte à "La Guerre des mondes" de d'H.G Wells. On pense tout de suite aux ravages de la radioactivité, et HPL s'est inspiré du scandale des filles du radium pour décrire le calvaire de la famille Nahum (alors que la famille Curie mettait en garde contre les dangers du radium, les crevards yankees faisaient bosser des ouvrières avec jusqu'à ce qu'elle en crève : combien de gens auront-ils été empoisonnés juste pour faire de l'argent ?).
Mais c'est saisissant de voir que la mort de la ferme Nahum illustre à la perfection la destruction du Dust Bowl la décennie suivante par les apprentis sorciers de Monsanto (qui va récidiver par la suite avec plein de saloperies dangereuses pour tous les êtres vivants avec le DDT, le napalm, l'agent orange et ses nombreux dérivés, avant d'inonder le monde de ses très douteuses semences OGM... quand est-ce que l'hypercapitalisme et l'ultralibéralisme cessera de nous empoisonner ?)


J'avais écrit concernant la nouvelle :
« Après la force de la nouvelle est aussi sa faiblesse à savoir sa longueur et son rythme : après toutes les bonnes descriptions des mutations de l'environnement, la partie humaine du récit est précipitée et on aboutit directement ou dénouement (imaginez le même récit avec une narration directe comme dans les thrillers) ».
« Show, don't tell ! » dit l'adage américain. L'ingénieur de Boston n'est qu'un passeur de témoin, et finalement tout est vu à travers les yeux d'Ami Pierce et de Nahum Gardner qui assistent à toutes les étapes successives de l'influence néfaste et pernicieuse du vampire stellaire (sous que seul l'un d'entre eux vit à cause de la créature et est lui aussi soumis à son influence). Mis en scène sous nos yeux cela a vachement plus d'impact que les sempiternels « indicible » et innommable » : on voit bien chaque élément de la flore et de la faune croître et se multiplier, puis muter bizarrement puis horriblement, avant de dépérir et de pourrir… Dans la nouvelles originelle, la phase humaine était traitée au pas de course alors que Gou Tanabe prend plus de temps pour développer l'affaiblissement physique et psychique des membres de la famille Gardner qui finissent par sombrer un à un dans la folie parce leur instinct de survie se rebelle contre leur morte programmée (car le vampire stellaire vident petit à petit leur santé physique et psychique avant de sonner l'hallali quand il a fini de se gaver). On s'attarde donc sur la déchéance, avec la folie, l'affaiblissement puis le pourrissement (des phobies de l'auteur américain dont le père est mort de la syphilis et qui est mort du cancer), c'est assez pour ne pas dire très glauque avant le cataclysme qui clôt le récit (pourtant je reste persuadé qu'on aurait pu aller encore plus loin dans cette voix). Encore une fois force est de constater que l'homme persuadé d'avoir été créé par Dieu et placé au centre de l'univers par lui pour le gouverner n'est finalement pas grand-chose par rapport à ce qui hante les profondeurs insondables de l'espace et du temps… Mais le mangaka n'oublie pas de mettre un taquet à ses vieux amis, car les classes aisées citadines se moquent des classes modestes avant de se rendre compte que leurs préjugés de classe non seulement les a fait passer à côté de la plus grande découverte de l'humanité mais a aussi provoqué la mort horrible de toute une famille (gageons qu'un DRH de chez General Electrics, de chez Auchan ou de chez Danone en aurait rien eu à secouer dans les deux cas s'il n'y avait pas eu de pognon à se faire). Rien à faire, vu les récentes déclaration de plusieurs mangakas je n'arrivent pas à m'enlever de la tête que Gou Tanabe a essayé de faire des allusions à la catastrophe de Fukushima...


Je sais que je radote, mais je rappelle que le récit a beaucoup inspiré : Brian Aldiss avec "The Saliva Tree", Jeff VanderMeer avec "Annihilation", Stephen King avec "Les Tommyknockers" (qui une fois encore trahit son modèle en faisant des aliens anthropomorphiques alors que HPL avait tout fait pour ne pas tomber dans cette facilité, mais la parenté est encore plus patente avec l'adaptation de Gou Tanabe) et bien sûr Michael Shea qui a rédigé une suite intitulé "The Colour Out of Time", mais aussi les films "Die, Monster, Die !" (Daniel Haller, 1965), The Curse (David Keith, 1987) et "Colour From the Dark" (Ivan Zuccon, 2008)...

PS: prochaine étape pour le duo HPL / Gou Tanabe ? "L'Appel de Cthulhu" !
Lien : http://www.portesdumultivers..
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Plongeons-nous au coeur de l'horreur et du paranormal le temps de ce manga à glacer le sang. Tel est le style d'écriture de Lovecraft que je connais assez mal mais que mon mari adore (d'où la fait que j'en ai lu certains volumes mais trop peu encore à mon goût) et à qui je trouve que Gou Tanabe rend admirablement hommage. Certes, il est vrai que l'on a du mal à s'imaginer que cet ouvrage "La couleur tombée du ciel" puisse bien rendre sur un manga en noir et blanc (ce qui est paradoxal à mon sens pour le mot couleur) et pourtant, c'est bel et bien le cas.

Ici, nous découvrons le récit de Ammi Pierce pour un jeune homme chargé d'étudier le terrain pour la construction d'un nouveau réservoir à Arham, vallée reculée dans la campagne américaine. Si tous le prennent pour un fou, lui, sait ce qu'il a vu il y a environ une cinquantaine d'années de cela et qui a emporté avec lui son regretté ami Nahum, sa femme et ses trois enfants. Ceux-ci vivaient alors tranquillement dans leur ferme et les récoltes qu'ils cultivaient leur permettaient de vivre chichement mais convenablement. Tout bascula le jour où un météore s'écrasa en plein milieu du terrain de Nahum. Si la première chose que pensa à faire ce dernier fut celle de prévenir les autorités afin, pensait-il, de faire analyser cette "chose" par des scientifiques et de faire progresser la science, il n'imaginait pas qu'avec cet événement exceptionnel, sa vie et celle des siens allait sur sa fin. Comment ? Voilà tout ce qui nous est narré ici et nous emmène vers un au-delà qui plongera le lecteur au plus profond de l'horreur mais aussi de l'inexplicable.

Un ouvrage extrêmement bien rendu du point de vue graphique et une histoire entraînante, comme seul Howard Phillips Lovecraft pouvait le faire (auteur que je rapprocherais d'Edgar Allan Poe - excusez-moi pour cette comparaison grossière et que certains d'entrevous jugeront peut-être grossière - que je connais mieux et qui m'a toujours passionné pour ces "histoires extraordinaires" ! A découvrir et à lire (ce que je ne manquerai pas de faire si cela m'est possible) en version originale !
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田邊剛 / TANABE Gō est né en 1975 à 東京 / Tōkyō. Il osa, un jour, s'attaquer à l'indicible : adapter graphiquement l'Oeuvre (aujourd'hui justement si populaire dans le monde entier) du génial "storyteller" américain Howard Phillips LOVECRAFT (1890-1937).

Mais relisons bien cet extrait de la notice biographique de l'encyclopédie en ligne WIKIPEDIA consacrée à "Gou Tanabe" :

« En automne 2005, en pleine période sombre, il cherche « des histoires de monstres sans issue positive » : son éditeur lui présente le mythe de Cthulhu de l'écrivain américain Howard Phillips Lovecraft. Il est impressionné par les personnages qui « perdent alors tout espoir et appétit de vivre. C'est ce point commun aux récits de Lovecraft qui m'a particulièrement marqué. » [Découvrez l'intégralité de ce passionnant interview accordé par notre "mangaka" sans peur-ni-reproches au media extrême-droitiste français "CNews"... ].

En 2007, il publie un premier recueil d'histoires courtes horrifiques アウトサイダ / "The Outsider" / "Je suis d'ailleurs" librement adapté de la nouvelle de Lovecraft (1926). Passionnante transgression où l'innommable est enfin représenté : l'humain s'y mire enfin dans le miroir de sa propre monstruosité (Cf. la nouvelle "Born of Man and Woman" / "Journal d'un monstre" (1950) de cet grand "styliste" du Fantastique Richard MATHESON, inspirée de "The Outsider" de HPL) ...

Suivront, en 2015, l'adaptation de 異世界の色彩 / "The Color Out of Space" / "La Couleur tombée du ciel (1936) puis, en 2016, 闇に這う者 / "The Haunter of the Dark" / "Celui qui hantait les ténèbres" puis 狂気の山脈にて / "The Mountains of Madness" / "Les Montagnes hallucinées" (en deux tomes). En 2018, 時を超える影 / "Dans l'abîme du temps" puis en 2019, クトゥルフの呼び声 : "The Call of Cthulhu" / "L'appel de Cthulhu". Enfin, en 2020 et 2021, インスマウスの影 / "The Shadow over Innsmouth" / "Le cauchemar d'Innsmouth" (en deux tomes).

"The Color Out of Space" de HPL (écrite en mars 1927, publiée pour la première fois en sept. 1927 dans le pulp "Amazing Stories"), donc... Histoire d'une malédiction. Satané météorite, pourrisseur de vies... Vie végétale, terre nourricière, vie animale, vie humaine, santé mentale : tout y passe. Cela imprègne tout, absolument tout ! L'organisme extraterrestre n'a que faire du détail" qu'est notre Biosphère... On se souviendra de ce film insurpassable que fut en 1982 "The Thing" de John CARPENTER, autre grand admirateur de l'art de LOVECRAFT. On peut aussi repenser à la catastrophe très imbécile (une grande spécialité soviétique/russiste !) de Tchernobyl en 1986 et au passionnant film en cinq parties (dit "mini-série HBO") "Chernobyl" de Craig MAZIN en 2019.

TANABE Gô nous invente six chapitres à son superbe roman graphique, faisant revivre sous nos yeux fascinés la célèbre nouvelle horrifique... Ah, l'instinctuelle poétique des toujours si inventives dénominations lovecraftiennes telles "The Blasted Heath" / "La lande foudroyée" !

Gros plans des visages angoissés, pétrifiés... Immersion dans les "grands espaces" noir et blanc... Les rameaux dénudés aux excroissances monstrueuses bougent sans vent, les fruits, les vaches deviennent bizarrement gras puis les corps se liquéfient et se transforment en un brouillard vivant d'une couleur "jamais vue sur notre Terre"...

Comme dans "The Thing", tous les habitants qui demeurent dans ce lieu malade pressentent qu'ils vont mourir... A petit feu et de façon horrifique. En effet, que nous soyons dans un glacier de l'Antarctique ou prisonniers de cette vallée maudite de la Nouvelle-Angleterre, la présence de l'Altérité (une forme de vie extra-terrestre presque "innocente", au fond... ) ne pardonne pas !

Le fermier bientôt condamné — paysan très "rousseauiste" voué à l'auto-suffisance — se nomme "Gardner"... Et voilà que pour le malheur de tous, son épouse blonde (à vocation de "fée du foyer") devient folle : il faut vite la cacher et l'enfermer dans la soupente de la ferme (Nous retrouvons là le motif de "la monstruosité cachée" dans le film "The Haunted Palace"/ "La malédiction d'Arkham" de Roger CORMAN, très brillante et très "cheap" adaptation de "L'affaire Charles Dexter Ward" de LOVECRAFT avec Vincent Price Debra Paget en 1963).

L'un des trois enfants du couple Gardner devient épileptique puis pousse des cris... Les deux cadets s'évaporent... Ils ont bu l'eau du puits où "quelque chose s'est réfugié"...

La science des contrastes de TANABE, l'amour des détails, l'inventivité graphique, les harmoniques de l'étrangeté, la maîtrise d'une sorte de cinémascope bédéiste horrifique...

L'art désormais si maîtrisé de TANABE Gō nous rappelle les débuts de ce grand illustrateur que fut l'immense Virgil FINLAY (1914-1971) qui commença sa carrière d'illustrateur SF/fantastique en illustrant, très jeune, les meilleurs récits de LOVECRAFT pour la fameuse revue "Weird Tales"... La finesse des tracés "black and white", l'utilisation savante des flous et des bulles de lumière, la puissance suggestive de toutes ces images tracées à l'encre de Chine (indélébile dans notre conscience) s'y révèlent pareillement fabuleuses...

Bien sûr, il nous faudra découvrir peu à peu toute l'Oeuvre graphique du Maître-mangaka TANABE qui nous incite fermement à relire patiemment chaque nouvelle du Maître de Providence, après ce très salutaire bain de noir-et-blanc expressionniste et d'étrangetés sans Nom...



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Si je lis Lovecraft depuis plusieurs décennies, en revanche l'univers du manga m'est tout à fait inconnu.
Quand j'ai découvert en librairie les adaptations de Gou Tanabé, j'ai tout de suite été intéressé mais il restait à franchir l'obstacle du sens de lecture !

Les lecteurs et lectrices de mangas, vont peut-être me trouver bien timoré, mais j'ai bêtement été habitué à commencer un livre par le début et pas par la fin !
On s'arrête à de ces détails !

Ceci dit, après avoir feuilletée une fois de plus l'une des ces adaptations, j'ai décidé de franchir le pas, et me suis offert "La couleur tombée du ciel", qui se trouve être la nouvelle qui donne son nom au premier recueil de Lovecraft que j'ai lu.

Verdict : une fois passé la difficulté (oui, s'en est une pour moi !) du sens de lecture, j'ai bien apprécié le traitement que Tanabé a donné à la nouvelle.

Restant fidèle à l'originale, la version dessinée de " La couleur tombée du ciel" sait restituer l'ambiance de la nouvelle.
Le dessin de Tanabé est un noir et blanc des plus réussi, et parvenir à rendre l'impression d'étrangeté d'une couleur/lumière sans justement utiliser de couleurs est une réussite en soi !

je ne regrette donc pas d'avoir tentée cette expérience de lecture, même si je n'ai pas toujours trouvé cela confortable et que cela diminue un peu mon enthousiasme, je pense continuer à découvrir les albums de cet auteur.
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Et si la plus grande menace venait de l'espace ? Un thème très connu des amateurs de SF. Lovecraft, en 1927 en a fait une nouvelle angoissante, sombre et réaliste.
Presque cent ans plus tard, Gou Tanabe, nous offre cette nouvelle en image dans une sublime adaptation graphique. Quand un maître du manga s'attaque au maître de l'horreur et du fantastique, c'est explosif!!! Un ouvrage à posséder absolument dans votre bibliothèque.
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Autre adaptation graphique d'une oeuvre de HP Lovecraft par le mangaka Gou Tanabe, celle-ci reste particulièrement fidèle au texte d'origine. Tous les ingrédients scénaristiques traitant de l'ambiance oppressante du texte originel sont au rendez-vous. Mais ici, ils sont en plus portés par un graphisme traduisant avec efficacité l'horreur s'immisçant progressivement, chapitre après chapitre, page après page, vignette après vignette...
Même si ce n'est pas mon adaptation préférée, elle devrait ravir tout de même les fans !
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J'avais lu ces nouvelles il y a très longtemps, le cauchemar d'Innsmouth étant la première nouvelle que j'ai lu de cet auteur. On ne présente plus Lovecraft et le mythe de Cthulhu qui ont eu énormément de dérivés dans de nombreux domaines y compris des bonbons pour avoir l'haleine fraiche comme je l'ai appris récemment grâce à Xapur. Étant en vacances au bord de l'océan atlantique, j'ai eu envie de relire un peu de Lovecraft, après tout ça ne fait pas de mal de temps en temps et au bord de l'océan c'est encore mieux!😉

Quand on parle de littérature d'horreur, on pense souvent à Edgar Poe ou à Stephen King mais pour moi, le maître de ce genre est Lovecraft. Il a imaginé tout un univers peuplé de créatures plus horribles les unes que les autres et surtout arrive à créer des ambiances particulières et angoissantes. La couleur tombée du ciel me fait toujours peur même après l'avoir lue plusieurs fois. C'est une nouvelle plutôt courte mais en peu de temps Lovecraft impose un climat d'angoisse et d'oppression qui prend aux tripes. Tout commence lorsqu'un jeune architecte se rend à Arkham (ville imaginaire créée par l'auteur, dans le nord est des Etats Unis) pour la construction d'un réservoir d'eau et entend parler de la Lande foudroyée une endroit immonde à la végétation dévastée et grise. Il apprend bientôt que tout cela date d'évènements qui se sont produits en 1880 où une météorite est tombée sur le champ de la famille Gardner. Peu à peu des choses étranges se produisent ainsi que des accidents morbides. La couleur de la météorite donne son titre à cette nouvelle et un aspect horrible à tout ce qu'elle touche. Cette nouvelle touche à la fois à l'étrange, à la science-fiction, avec un aspect inexplicable et pourtant inéluctable à ce qui arrive et une situation tendant vers l'horreur. L'angoisse monte peu à peu et rend cette nouvelle vraiment unique.

L'action de l'abomination de Dunwich se situe dans les années 20. Dunwich est également une ville imaginée par Lovecraft, elle fait son apparition dans l'oeuvre de l'auteur pour la première fois dans cette nouvelle. C'est une ville pauvre située dans le Massachusetts (état du nord est des états unis), peu attirante avec des habitants peu éduqués et d'aspect plutôt sinistre. En résumé, une ville où a envie de passer ses vacances! Tout commence avec la naissance de Wilbur Whateley de père inconnu et de mère simplette dont le père (donc grand père de Wilbur) est réputé sorcier, une super famille en somme. Wilbur grandit de façon anormale et des évènements étranges se produisent dans son entourage. Beaucoup d'éléments de la mythologie de Lovecraft sont révélés dans cette nouvelle avec l'apparition de la notion des anciens et surtout de Yog-Sothoth, un dieu extérieur. On y croise également le professeur Armitage et le fameux Necronomicon, ouvrage inventé par l'auteur sur lequel plane toujours de nombreux mystères et fantasmes. L'atmosphère de la ville est lourde et angoissante tout comme celle de la nouvelle. C'est une nouvelle clé dans l'univers de l'auteur.

Le cauchemar d'Innsmouth est pour moi la meilleure nouvelle de Lovecraft. C'est un véritable summum de l'horreur et l'écriture de l'auteur y prend toute sa dimension. La nouvelle est écrite à la première personne et raconte ce qui est arrivé à un jeune homme, Robert Olmstead, voyageant au travers de la Nouvelle Angleterre et choisissant de passer par le village d'Innsmouth pour des raisons d'économie. Ville côtière et fictive ayant connu une situation florissante au XIX ème siècle, Innsmouth a une sinistre réputation et peu de gens s'y rendent en raison de son aspect lugubre et de l'étrangeté de ses habitants. Sa visite à Innsmouth se solde par des événements pour le moins étranges et il comprend vite la singularité de cette ville à la forte odeur de poisson et aux habitants à la physionomie plus que particulière qu'il nomme le masque d'Innsmouth. La fin de cette nouvelle est très surprenante et la rend exceptionnelle. Beaucoup d'éléments du mythe sont également révélés dans ce texte, on y parle de Dagon et de Cthulhu et les origines de certains aspects du mythe sont développés. C'est donc une nouvelle capitale dans l'univers de Lovecraft. Elle est d'une richesse impressionnante sur la mythologie imaginée par Lovecraft, l'ambiance de l'histoire est sombre et très bien amenée, le suspense vous prend au corps et tout cela dans un texte pas très long de 1936. Beaucoup d'éléments présents dans cette nouvelle seront réutilisés dans le fantastique par la suite. Au cas où cela ne serait pas clair, c'est pour moi un vrai chef d'oeuvre que je relirais encore et encore, même si je connais la fin j'y prend toujours beaucoup de plaisir.

Celui qui chuchotait dans les ténèbres est une nouvelle épistolaire dont l'action se situe en 1927. Peu après de grosses inondations, des témoignages disant avoir aperçu des créatures inconnues dans des rivières. Albert Wilmarth, professeur à l'université de Miskatonic s'intéresse à ces créatures et entame une correspondance avec Henry Wentworth Akeley, habitant une maison isolée du Vermont. Ce dernier a des preuves de l'existence de ces créatures et en fait part à Albert Wilmarth. Des faits étranges se produisent peu à peu. Cette nouvelle est plus orientée vers la science fiction avec des notions sur la planète d'origine de ces êtres surnaturels. le suspense monte aussi en intensité tout au long du texte. C'est également une très bonne nouvelle du maître de Providence.

Je recommande donc vivement cet ouvrage, si vous le trouvez dans cette collection, ou dans les recueils comme ceux des éditions Bouquins, ou la récente édition par Sans-détour des oeuvres fondatrices du mythe par Lovecraft. Il est sûr que le style n'est pas toujours facile, mais quand on pense que ces textes sont presque centenaires on se rend compte du génie de l'auteur.
Lien : https://aupaysdescavetrolls...
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Ce volume, initialement paru dans la collection "Présence du futur" chez Denoël dont il est le n°4 rassemble 4 des meilleures nouvelles du "reclus de Providence" : la couleur tombée du ciel"," l'abomination de Dunwich"," le cauchemar d'Innsmouth", et," celui qui chuchotait dans les ténèbres".
C'est en lisant ce livre que j'ai découvert l'univers des Grands Anciens.
Si vous voulez découvrir cet auteur emblématique, voilà de quoi bien commencer !
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Lovecraft est l'un de mes auteurs préférés, mais force est de constater que les adaptations de ses nouvelles sont souvent médiocres. Prise d'un sursaut de folie, si ce n'est de masochisme, j'ai néanmoins voulu tester ''Color out of space'' de Richard Stanley il y a quelques jours, et si ce film comporte quelques points positifs, j'ai toutefois trouvé qu'il s'agissait d'une adaptation assez mauvaise (je lui ai largement préféré ''Die Farbe'' de Huan Vu, ou alors les films de John Carpenter comme ''The Thing'' ou ''L'Antre de la Folie''). Ici, Stanley lorgne du côté de Carpenter mais aussi de David Cronenberg mais sans leur arriver à la cheville, au point que les lamas m'ont directement fait penser à ''Black Sheep'', ce qui n'est guère glorieux quand on prétend adapter Lovecraft (et ce même si j'ai bien aimé ''Black Sheep'' qui est un nanar à bestioles franchement fun).

Afin de me ''purifier'' de cette mauvaise expérience, j'ai donc jeté mon dévolu sur l'adaptation en manga de Gou Tanabe, que je suis depuis des années déjà et qui ne m'a jamais déçue. Si son ''The Outsider'' était perfectible en 2009, il était déjà très bon, et le mangaka s'est beaucoup amélioré depuis jusqu'à nous présenter de superbes oeuvres. Ayant ainsi relu ''Le cauchemar d'Innsmouth'' il y a une dizaine de jours, j'ai trouvé ça intéressant de comparer ces deux adaptations, parce qu'elles sont à la fois très semblables et très différentes.

Déjà, ''La couleur tombée du ciel'', ça raconte quoi ? Et bien ça raconte l'histoire d'une météorite qui vient s'écraser juste devant la ferme des Gardner, et qui va avoir d'horribles effets sur tout ce qui entoure son point d'impact. D'abord étrange voire onirique avec sa couleur inconnue, l'histoire prend bientôt un tour plus inquiétant lorsque l'environnement est touché à son tour, voire terrifiant lorsque cela concerne les êtres vivants. Dans la nouvelle, tout nous est raconté de manière indirecte par un voisin et ami des Gardner mais dans le manga, Gou Tanabe a choisi de passer plus de temps avec les Gardner et de nous présenter plus en profondeur ce qu'ils ont vécu, d'une manière plus directe, et j'ai bien aimé ce changement. Malgré cette modification, l'histoire demeure très fidèle au texte d'origine, elle est simplement racontée différemment, respectée mais prise sous un angle quelque fois différent.

Avec tous les changements qui affectent la nature, Gou Tanabe a pu s'en donner à coeur joie pour dessiner des environnements et des animaux qu'il réussit à rendre à la fois très normaux tout en y instillant un petit quelque chose de différent, de dérangeant. Comme dans la théorie de l'Uncanny Valley, ce qui choque c'est le détail étrange, qui petit à petit prend plus d'ampleur jusqu'à envahir tout au fur et à mesure de l'avancement du manga. J'ai beaucoup apprécié cette manière de procéder qui adapte parfaitement bien le thème de ''l'indicible'', à la fois si cher à Lovecraft et si difficile à représenter.

La fameuse couleur aussi est sublimée, même si j'avoue que je me demandais un peu comment ce serait possible dans du noir et blanc. Ici, la couleur est devenue un jeu de mouvement, d'ondes folles et dépourvues de sens, d'émanations qui poussent à l'inquiétude, de petites formes étranges qui viennent perturber des éléments communs, juste un peu mais pas trop. Là encore, je trouve que c'est très très bien pensé et tout aussi bien dessiné.

Dans ''Le cauchemar d'Innsmouth'', les éléments de l'histoire étaient présentés de manières plus brute et directe, le malaise apparaissait via des impressions de délabré, de pourriture, et des jeux avec le cadre très inspirés du cinéma. Ici, nous ne sommes pas du tout face à la même horreur, et Gou Tanabe l'a bien compris et a donc adapté sa vision afin de coller au mieux avec l'ambiance. L'étrange est plus subtile, plus pernicieux, et si le cadre n'est pas utilisé, c'est parce que les jeux d'ombres viennent le remplacer. Cette fois-ci, le mangaka ne nous montre pas tout, l'ombre vient dissimuler certains éléments, ce qui ajoute encore à la lourdeur de l'ambiance.

En bref, cette adaptation est vraiment un chef d'oeuvre ! Gou Tanabe est un artiste complet, qui comprend l'horreur et ses nuances et qui sait parfaitement les retranscrire en jouant avec bon nombre de détails différents.
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