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Auteur prolifique s'il en est, le britannique Adrian Tchaikovsky s'est déjà taillé une sacrée réputation dans le milieu de l'imaginaire.
Après Dans la Toile du Temps chez Denoël Lunes d'Encre, Sur la route d'Aldébaran chez le Bélial' ou encore le Jour de l'Ascension dans l'univers de Warhammer 40.000, voici qu'il retourne dans la collection Une Heure Lumière pour une novella des plus excitantes : le Dernier des Aînés.
Et si vous ne savez que choisir entre science-fiction et fantasy, pas de problème, Adrian Tchaikovsky a tout prévu !

Il était une fois…
Tout commence par la fin d'un périple, celui d'une princesse, Lynesse Quatrième Fille. Bien décidée à aider les peuples voisins à son Royaume, Lynesse, qui connaît par coeur les histoires et légendes de jadis, sait qu'il reste encore une personne qui peut contrecarrer la nouvelle et sinistre puissance qui s'étend dans l'Ordibois.
Cette personne, c'est Nyrgoth l'Aîné, dernier des sorciers.
En compagnie d'Esha Libre Marque, elle tente l'ascension de la montagne jusqu'à la tour mystérieuse de l'ancêtre.
Mais…
Hum.
Un sorcier, vous dites ?
Dès le deuxième chapitre, tout change.
Ce qui semblait être une énième histoire fantasy d'une jeune fille courageuse qui veut prouver sa valeur à sa famille et sauver son peuple, se transforme complètement.
Car Nyrgoth se réveille et il n'a rien d'un sorcier.
Nyr Illim Tevitch est anthropologue de deuxième classe du Service d'Exploration Terrien. Il a plusieurs siècles, des cornes augmentiques et un Système de Dissonance Cognitive (SDC) pour l'aider à prendre les meilleures décisions en toutes circonstances. du moins, sur le papier.
Ce qui renvoie inévitablement à la troisième loi de Clarke :
« Toute technologie suffisamment avancée est indiscernable de la magie. »
Pour Lynesse et son peuple, Nyr est un sorcier, un magicien, capable d'accomplir des choses extraordinaires comme dompter des bêtes métalliques qui rôdent encore dans la forêt.
La vérité, c'est que Nyr dispose d'une technologie extrêmement avancée et qu'il fait partie de ceux qui ont « ensemencé » Sophos 4, cette lointaine planète, pour la rendre habitable. Nous sommes dans le même univers que Dans la Toile du Temps mais ici, point d'araignées intelligentes.
Ce qui intéresse l'auteur reste pourtant exactement la même chose au fond mais par une approche différente et rudement maligne.

Des hommes et des mythes
Le Dernier des Aînés se propose de nous raconter l'histoire d'une jeune femme consciente du passé de son peuple mais aussi de la souffrance de ses voisins. C'est une histoire de courage et d'héroïsme, une histoire qui pourrait être tout à fait fantasy s'il n'y avait ce second point de vue, complètement science-fictif cette fois, où Nyr nous donne une perception radicalement différente de la situation.
Celle d'un peuple qui ne comprend pas ce qu'il se passe, qui ne sait plus d'où il vient et qui a évolué de façon franchement fascinante.
Délicieux dans sa double-vision des évènements, le récit se concentre en réalité sur le thème favori d'Adrian Tchaikovsky : la communication.
Et pour être plus précis, l'incommunicabilité.
Celle-ci n'est plus ici entre des races différentes mais entre des peuples/paradigmes différents. C'est le décalage technologique qui crée ici l'incommunicabilité entre Nyr et Lynesse.
Et pourtant.
Pourtant tout est affaire de traduction entre ces deux représentants de deux civilisations aux attentes différentes. Lors d'un excellent chapitre, vous aurez droit à la traduction directe entre ce qu'explique Nyr et ce que comprend Lynesse. le résultat est à la fois drôle et édifiant tant le fossé entre les deux montre à quel point le temps a fait son effet.
Au centre de tout ça se trouve aussi une plongée dans le rôle du conte et du mythe, dans ce que sa transmission a d'important historiquement et dans sa manière de consacrer l'adage que tout mythe contient une part de vérité.
S'il l'on peut tout à fait lire le Dernier des Aînés comme une aventure sur une lointaine planète pour sauver des innocents des griffes d'une étrange créature (d'ailleurs elle aussi difficilement compréhensible, même pour Nyr), il faut admettre que ce qui fait tout l'intérêt de cette histoire, c'est de faire entrer en collision directe deux genres que tout sépare : la fantasy (et sa magie) d'un côté et la science-fiction (et sa rigueur) de l'autre.
Cette différence se ressent jusque dans la personnalité des deux personnages principaux, que ce soit Lynesse et son courage à toute épreuve ou Nyr et sa solitude glacée d'où suinte une tristesse matinée de rationalisme. En faisant se rejoindre ces deux êtres, Tchaikovsky ne fait pas qu'établir un pont entre les genres, il opère aussi une jonction entre deux humanités différentes qui en ressortent plus forte et plus durable.
Finissons sur une réflexion intéressante sur l'interventionnisme et sur ce que peut (doit) faire un observateur technologiquement plus avancée face à une civilisation pas forcément prête pour accueillir son savoir et ses conseils, et vous comprendrez définitivement que cette novella déborde de thématiques fascinantes et modernes.

Novella intelligente et passionnante, le Dernier des Aînés compte assurément comme l'un des meilleurs textes de la collection Une Heure Lumière et comme l'un des meilleurs écrits d'Adrian Tchaikovsky autour du thème de la communication entre les espèces, les peuples et… les genres littéraires !
Indispensable et réjouissant.
Lien : https://justaword.fr/le-dern..
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Un court récit très intéressant sur les problèmes de communication inhérents à une différence de langage et de culture.

Dans une lointaine galaxie, Nyr Illim Tevitch, anthropologue terrien, étudie la jeune civilisation que les humains ont créée sur la planète Sophos 4. La civilisation est au stade du début Moyen-Age. Un sujet d'études intéressant mais ennuyeux.
A tel point qu'il n'a pu s'empêcher, cent ans auparavant, d'intervenir dans une guerre qui opposait deux clans, trahissant ainsi une des premières règles de sa profession : ne jamais interférer.
Il a surtout révélé sa présence aux habitants.

Lynesse, princesse de Praimesite, une cité de la civilisation que l'anthropologue est chargé de surveiller, se souvient de sa légence. Elle vient requérir son aide, celle du grand magicien Nyrgoth, le dernier des Aînés, pour chasser un terrible démon qui fait des ravages dans la région.

Adrian Tchaikovky réussit en 180 pages à décrire tout un univers et deux cultures différentes et à nous attacher à ses personnages.
Un bel exploit.

J'ai savouré les dialogues entre les deux protagonistes qui montrent à quel point il est difficile de communiquer lorsque les repères sont aussi différents. Lynesse est convaincue que le savoir et les actions de l'anthropologue relèvent de la magie alors que Nyr, alias Nyrgoth, tente de lui expliquer qu'il s'agit de science et non de magie.
Le final montre à quel point la frontière entre les deux est mince.

L'auteur pose une question intéressante : comment expliquer des concepts lorsqu'il n'existe pas de mots pour les décrire ?
Il démontre la difficulté de communiquer et de se comprendre quand on ne parle pas la même langue et qu'on n'a pas le même niveau d'avancée technologique.
Magie pour l'une, sciences pour l'autre.
Quand le langage ne fonctionne pas, ne reste alors plus que les actes pour se comprendre.

J'ai beaucoup aimé.

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« Toute technologie suffisamment avancée est indiscernable de la magie. »
Telle est la troisième de loi de Clarke, et ce roman l'illustre à merveille, comme le souligne très justement la présentation de l'auteur en 2e de couverture.

SF ou Fantasy ?
Prenant au mot son illustre aîné (le dernier ?) et compatriote, Adrian Tchaikovsky, par ailleurs lauréat du prix Clarke 2016, semble s'être fixé pour objectif premier de mettre en défaut les maniaques de l'étiquette, les puristes du genre.
Ce texte repose ainsi sur un équilibre subtil entre les deux genres majeurs de l'Imaginaire. Et pour balayer définitivement les arguments des classifieurs les plus endurcis, l'auteur a sorti sa botte secrète, un coup imparable : se servant de la troisième loi de Clarke comme d'un cheval de Troie, il fait entrer la question – technologie ou magie ? – à l'intérieur même de l'histoire, de son intrigue principale ! Un coup de maître ou… serait-ce de la magie ?


La forme du texte est parfaitement adaptée au propos : une succession de paragraphes alternant les points de vue des deux principaux protagonistes : la princesse Lynesse (une référence au cycle Lyonesse de Vance ?) et le l'anthropologue Nyr.
La narration reste simple et linéaire, étant donné que les personnages sont ensemble du début à la fin.
Quand Lynesse raconte, on a le point de vue Fantasy, car pour elle et son peuple, le comportement de Nyr et ses actions relèvent de la magie.
Quand c'est Nyr qui raconte, on a le point de vue Science-Fiction.
Mais, comme je l'ai dit, ce n'est pas qu'une question de point de vue narratif : le thème est intégré à l'intrigue, car les personnages débattent de leurs divergences de point de vue. Par ce dialogue et par les épreuves qu'ils vont traverser ensemble, il vont également faire évoluer leur compréhension. Tout simplement fascinant !


L'histoire se déroule sur une planète ayant traversé deux périodes de colonisation humaine : la première dont est issue Lynesse et son peuple, et la deuxième, plus récente, dont Nyr est le dernier représentant.
Ce contexte permet à l'auteur de développer naturellement son idée.
Le thème de la double colonisation est riche en possibilités. Sigbjørn Skåden en donne un bel exemple dans sa nouvelle « Oiseau ». le propos est différent, mais on a ce même fossé générationnel qui est exploité, et qui dans les deux cas fait particulièrement ressortir la naïveté chez les premiers colons.


Dans les thèmes développés et la façon de les traiter, on est assez proche de ce que propose un Jean-Michel Calvez : la colonisation, la compréhension de l'autre, le point de vue anthropologique...
L'idée de la régulation des hormones (le Système de Dissonance Cognitive) pour atteindre une « objectivité maximale », mais aussi pour gérer la douleur, est particulièrement développée. On la retrouve aussi dans l'un des derniers romans de Calvez : Aliénations.

La dimension psychologique est omniprésente. Nyr et Lynesse se heurtent constamment à la barrière culturelle qui les sépare, et les connaissances anthropologiques de Nyr s'avèrent finalement peu utiles. Beaucoup de finesse dans le rendu de cette confrontation et des ressentis. J'ai retrouvé un peu l'ambiance de la Main gauche de la nuit, d'Ursula K. Le Guin.
C'est aussi une belle histoire humaine.


Enfin, difficile de ne pas dire un mot sur l' « adversaire » auquel sont confrontés nos héros dans cette histoire. En même temps, je ne veux pas trop en dire car ce serait un peu gâcher le plaisir de la découverte. Disons que cet adversaire est assez étonnant. Il détonne autant pour de la SF que de la Fantasy. Cela ressemble à ce qu'on trouve dans Annihilation, de Jeff VanderMeer. J'avoue que le manque d'explications m'a gêné, mais après réflexion on comprend très bien ce choix si l'on suit la logique de l'auteur sur ce point, qui est assez bien vu et donne encore plus de relief au propos.


Petit bémol, j'ai trouvé l'écriture pas toujours très précise, m'obligeant à relire certains passages plusieurs fois afin d'être sûr de comprendre ce qui était dit. Or, entre quiproquos, monologues intérieurs et expression des sentiments, beaucoup de choses sont dites, et de manière souvent assez élaborée. Pour rester positif et selon la formule consacrée, je dirais que c'est une lecture exigeante (pour ce type de roman). de bons points malgré tout, comme cette idée des épithètes qui rend assez bien et joliment l'exotisme de la culture de Lynesse.
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"Le dernier des aînés" est un savant mélange de science-fiction et de fantasy où nous allons suivre une princesse décidée à éradiquer les méfaits d'un "démon", pour se faire elle sera accompagnée d'un personnage considéré comme un magicien, le dernier des aînés, vivant depuis toujours dans une tour difficile d'accès.
Il va s'avérer que la magie des uns est la technologie des autres, car l'histoire se déroule sur une planète colonisée depuis des millénaires par l'humanité sans que les descendants des colons n'aient conscience de cela.
Une quête va avoir lieu, ce qui sera prétexte au chocs de deux mondes, deux civilisations, deux manières de penser différentes.
Quand les uns voient de la magie, la réalité est technologique, ce qui est impossible à faire comprendre dans un monde féodal.
Choc des cultures, peur de l'inconnu, humain augmenté versus simple mortel, savant anthropologue en opposition à la croyance de fables et autres contes.
Les personnages sont très intéressants, en particulier l'aîné, qui est face à des dilemmes importants, notamment de comportement et de déontologie, torturé aussi par le fait de ne plus avoir de nouvelles de la Terre et des siens.
La princesse Lynesse est une jeune femme forte mais aussi très seule, deux autres personnages vont se greffer au duo.
J'ai adoré ce récit de la collection "Une Heure-lumière", très prenant et convaincant et vous le recommande vivement.
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Adrian Tchaikovsky est un auteur dont l'imaginaire me fascine depuis notre première rencontre. Son travail sur l'autre, sur l'altérité et l'évolution de nos relations avec eux a quelque chose de fascinant pour moi. C'est à nouveau le cas dans cette novella aussi intéressante qu'amusante au concept original.

Auteur avant tout pour moi de la saga Dans la toile du temps où il fait preuve d'un très beau sense of wonder. Il récidive ici, mettant encore une fois à profit ses études de zoologie et de psychologie dans un récit aux frontière entre la science-fiction et la fantasy où il joue avec la Troisième loi de Clarke : toute technologie suffisamment avancée est indiscernable de la magie. On adore !

Dans ses précédents textes que j'ai lus (note à moi-même : lire absolument Sur la route d'Aldébaran), l'auteur s'intéressait déjà aux relations entre colons et autochtones, entre humains et races extraterrestres ou créatures ayant échappées à leurs créateurs. Il récidive ici en nous plongeant le temps d'une novella assez conséquente, 175 pages quand même, dans la rencontre entre Nyr Illim Tevich, un anthropologue terrien, et Lynesse Quatrième fille, princesse de Praimesite, sur la planète Sophos 4, qui est un lieu d'étude pour le premier. Contrevenant aux règles, Nyr en interagissant avec les autochtones a acquis un statut légendaire de quasi divinité sous le nom de Nyrgoth l'Aîné, et nous allons suivre ses interactions avec Lynesse au cours d'une aventure où celle-ci aura besoin de l'aide du « sorcier » pour vaincre une menace qui pèse sur sa royale famille.

Le concept m'a de suite interpelée. J'ai aimé ce jeu entre ce qu'est vraiment Nyr et ce qu'il représente pour Lynesse et ses sujets. L'auteur avec une certaine malice joue énormément là-dessus dans sa narration, offrant un ton léger qui frôle l'humoristique, quand il met face à face que dit, voit, pense, considère Nyr et la façon dont Lynesse le reçoit, l'interprète et le transmet. le décalage entre les deux est savoureux et met le doigt sur ce que peuvent représenter des problèmes de communication entre individus pas sur la même longueur d'onde, pour employer une image grossière. C'est vraiment particulièrement parlant dans un des chapitres où sur deux colonnes face à face l'auteur oppose le discours et l'interprétation de chacun, éclairant !

Ce faisant, il flirte donc avec les frontière de la SF et de la fantasy et c'est savoureux également. Cela rappelle la façon, par exemple, dont les natifs américains ont pu accueillir les colons européens et voir en eux des dieux, des démons, des sorciers, des génies, que sais-je ! Il se noue alors entre l'auteur-narrateur et nous une certaine connivence voire même un jeu, celui de deviner ce que cachent les interprétations « magiques et extraordinaires » de Lynesse. On se plaît à essayer d'imaginer qui se cache derrière telle ou telle créature qu'elle nous décrit, car bien sûr ce n'est pas le monstre qu'elle croit, et c'est très amusant. Mais du coup, le revers, c'est que ça donne une teinte légère à l'oeuvre et que par moment, je suis passée à côté de l'ambiance plus sérieuse que j'attendais et aurais voulu.

L'auteur joue de cette maxime de Clarke sur la science et la magie, donc, il joue également avec la morale et interroge : Est-ce bien de se faire passer pour ce qu'on est pas auprès de gens crédules et de jouer sur leur foi et croyance ? Ce questionnement agitera Nyr tout au long de l'aventure et le lecteur se verra lui-même poussé à trouver sa propre réponse à cela, ce qui est intelligent. Mais à être tourné essentiellement vers lui, il en oublie parfois un peu Lynesse qui n'est là que comme contrepoids et témoin de l'expérience, ce qui est dommage. Idem pour l'aventure, juste prétexte à mettre en scène cette idée et au final assez survolée et peu exploitée, ce qui la rend parfois un peu longue et répétitive. Il ne faut pas que le jeu prenne le pas sur le récit.

Alors oui, j'aurais peut-être aimé un texte plus dense et sérieux, mais cela m'a amusée également d'être surprise par ce versant de la production de Tchaikosky qui continue d'exploiter ce qu'il aime en SF : les questions sur les rencontres et communications avec l'autre. J'ai aimé ce jeu de flirt entre magie et science. C'était amusant de voir ce que chaque discours cachait et comment il allait être interprété. Petit texte peut-être plus de test et d'essai avec un concept, il a su me charmer par son ton et son originalité. C'était une vraie ode à l'Histoire de la colonisation et des natifs.
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Adrian Tchaikovsky est un auteur britannique très prolifique connu en France pour sa série Dans la toile du temps publiée chez Denoël dans la collection Lunes d'Encre. Il a également eu les honneurs de la collection Une-Heure-Lumière avec un objet littéraire horrifico-science-fictif : Sur la Route d'Aldebaran et nous revient aujourd'hui dans cette même collection avec un texte de Fantasy, de Science-Fiction et/ou de Science-Fantasy, bref un récit qui transcende les genres et qui met en application la troisième loi de Clarke : Toute technologie suffisamment avancée est indiscernable de la magie.

Le dernier des aînés est la rencontre entre Lynesse, Quatrième fille, princesse de Praimesite et de Nyr Illim Tevitch anthropologue de seconde classe. Ils symbolisent deux mondes que tout oppose bien qu'ils aient une Histoire commune. En effet Nyr a été envoyé sur Sophos 4, en tant qu'observateur afin d'étudier le comportement d'une ancienne colonie humaine et surveiller son évolution. Lyn, quant à elle, est l'une des descendantes des premiers colons à s'installer sur Sophos 4 et puise son histoire dans les contes et légendes de sa famille. Lui, un transhumain bardé de technologies et de connaissances scientifiques ne doit jamais interférer avec les colons. Elle, a pour modèle sa grand-mère qui avait fait appel au sorcier des montagnes pour libérer son royaume d'un terrible danger. Quand Lyn apprend qu'un démon hante ses terres et s'attaque à ses habitants, elle décide d'invoquer le sorcier des montagnes pour qu'il leur vienne en aide. Pour la seconde fois, Nyr accepte d'aider le Royaume de Praimesite. Cependant le fossé technologique entre les deux monde est énorme et l'incompréhension totale...

Adrian Tchaikovsky met en scène la rencontre entre deux univers si opposés qu'ils ne peuvent se comprendre. La technologie est différente mais le langage associé l'est aussi, comment expliquer ce qu'est la science à quelqu'un qui n'a pas de mots pour la décrire. Toute l'ambiguïté du récit se résume dans cette incompréhension. Passant de Lyn à Nyr et de Nyr à Lyn, l'auteur nous narre la même histoire vue de deux perspectives différentes, la même scène ayant des explications rationnelles ou irrationnelles selon celui ou celle qui la raconte et/ou l'entend. C'est un tour de force de l'auteur et vraiment le seul intérêt de la novella mais qui vaut à lui seul cette lecture. Quant à l'intrigue, elle n'est en fait qu'un prétexte à cette dualité de point de vue, et l'auteur maitrise de main de maitre ce récit à la frontière des genres.

Le dernier des aînés est donc une novella qui joue sur les genres de l'Imaginaire, un texte de Fantasy qui sera apprécié par le lectorat de Science-Fiction ou un texte de Science-Fiction qui sera adoubé par le lectorat de Fantasy. le dernier des ainés symbolise les deux faces d'une même médaille qui bien qu'étant toujours dos à dos ne font en fait qu'une !

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La collection Une Heure Lumière du Bélial s'enrichit avec ce quarante-sixième ouvrage d'une nouvelle pépite signée Adrian Tchaikovsky. le format adopté ici reste court, mais la novella s'inscrit malgré tout parmi les plus longs textes édités dans la collection. Avec « Le dernier des aînés », l'auteur nous entraîne dans une histoire qui ravira aussi bien les amateurs de science-fiction que ceux de fantasy, puisque ce court roman peut se revendiquer (et ce n'est pas banal) des deux genres. En effet, l'histoire nous est narrée selon le point de vue de deux protagonistes et, selon celui que l'on va suivre, on ne va pas du tout avoir la même vision de la situation ni du monde dans lequel se déroule l'intrigue. le premier de ces deux protagonistes est Lyn (ou, pour être plus exact, Lynesse Quatrième fille), la princesse d'un royaume qui a décidé d'en appeler à un puissant sorcier, désormais retiré du monde mais ayant conclu autrefois un pacte avec sa famille. Son objectif est de le pousser à sortir de sa tour pour l'aider à affronter le démon qui sème la terreur dans un territoire voisin, chose que sa mère et l'ensemble de la cour, réprouvent fortement, ce qui l'oblige à agir dans la clandestinité. Passionnée par les histoires de monstres, de magie et de combats épiques, la jeune fille entend répondre au cynisme et à la déception de sa famille par l'accomplissement d'une quête certes périlleuse, mais qui, avec l'aide du magicien, pourrait enfin faire d'elle une princesse reconnue et admirée de tous. le second héros du roman n'est autre que ce sorcier, Nyr, qui ne possède en fait aucun pouvoir magique. Et pour cause, puisqu'il s'agit d'un anthropologue envoyé étudier les habitants de cette colonie fondée par les humains il y a plusieurs siècles. Laissé seul sur cette petite planète après la disparition de ses collèges et l'arrêt total de toute émission venue de la Terre, le scientifique dispose de toute une batterie de technologies qui lui permettent de prolonger sa vie et d'observer les habitants de la planète avec lesquels il n'est pas censé interférer puisqu'il n'est là qu'en tant qu'observateur. le doute le ronge cependant : et s'il était le dernier à se souvenir des origines de cette planète et de la Terre ? Quel sens cela aurait-il alors de continuer à se cloîtrer dans son avant-poste ? Et si l'appel au secours de Lyn lui fournissait l'occasion de rompre sa solitude et de vivre une palpitante aventure ?

Le roman alterne entre l'un et l'autre des points de vue, ce qui nous permet d'appréhender la situation dépeinte de manière totalement différente. En effet, nombreuses sont les technologies sophistiquées utilisées par les premiers colons à être restées sur place bien après que la population ait totalement oublié leurs origines ainsi que l'existence même des robots et autres machines. Si Nyr identifie sans mal un drone ou une quelconque autre technologie lui paraissant parfaitement banale, Lyn, elle, va y voir un monstre ou un démon doté de pouvoirs exceptionnels et d'une apparence effrayante. Ce n'est certes pas la première fois qu'un auteur tente de mêler fantasy et science-fiction : on pense beaucoup par exemple au « Livre de Koli », publié récemment par Mike Carey, ou encore à l'oeuvre la plus connue de Javier Negrete qui reprenait un peu le même concept dans les derniers tomes de sa série. Il faut toutefois reconnaître qu'Adrian Tchaikovsky s'y prend ici à merveille, et que la construction de son intrigue permet astucieusement de maintenir constamment en éveil l'intérêt du lecteur. Les deux personnages sont pour leur part aussi attachants l'un que l'autre, et il est amusant de les voir se parler sans parvenir à toujours se comprendre en raison du décalage profond entre leur culture. le chapitre mêlant brièvement le point de vue des deux protagonistes est notamment remarquable et permet à la fois de se rendre compte du fossé séparant les deux personnages, mais aussi de souligner la beauté que peut receler cette histoire, et ce quelque soit le genre littéraire avec lequel on choisit de la raconter. La langue elle-même paraît jouer contre le scientifique puisque, lorsqu'il tente d'expliquer qu'il n'est pas le sauveur tout puissant que la jeune Lyn espère, celle-ci ne possède par les mots ni les concepts nécessaires pour le comprendre. Pour elle, il reste un sorcier, capable de parler aux monstres et aux démons, de repousser une attaque par la pensée ou de ne ressentir aucune émotion, tandis que tous ces prodiges trouvent au contraire une explication parfaitement cartésienne du point de vue de Nyr. A l'envers, ce dernier ne parvient pas toujours à saisir les codes de ce monde qu'il connaît finalement très mal et dont il doit se familiariser avec des aspects aussi basiques que la façon dont on s'adresse respectueusement à une personne, ou avec des facteurs plus complexes tels que la hiérarchie sociale ou la géographie des lieux. On prend ainsi autant de plaisir en tant que lecteur à découvrir l'intrigue du point de vue de Lyn ou de Nyr, avec l'impression de suivre parallèlement deux histoires différentes et pourtant étroitement liées.

« Le dernier des aînés » est une excellente novella dans laquelle Adrian Tchaikovky mêle astucieusement fantasy et science fiction grâce à deux personnages appartenant à deux civilisations dont le degré de sophistication technologique est extrêmement différent. L'alternance entre le point de vue de la princesse et de l'anthropologue permet ainsi de vivre en même temps le récit d'une quête épique peuplée de sorciers, de princesses guerrières et de démons terribles, que celui d'une expérience spatiale ayant dérapé et dont il s'agit à présent de gérer les conséquences. Les deux sont aussi passionnants l'un que l'autre.
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Vous vous demandez comment on peut efficacement mêler la science-fiction et la fantasy ? Ce texte est la réponse.

La narration s'alterne entre deux points de vue. le premier est celui de Lynesse, princesse peu considérée dans son royaume qui a été bercée par les anciennes légendes et qui souhaite combattre le démon qui semble s'en prendre au royaume voisin. le second est celui de Nyr, un anthropologue envoyé par la Terre pour surveiller le développement de Sophor 4, une colonie qui a tout oublié de ses origines et qui s'avère être le lieu où vit Lynesse. Nyr est connu là-bas parce que, livré à lui-même et abandonné par les siens, il est intervenu des siècles plus tôt pour les aider à affronter un "mage noir" (quelqu'un qui avait redécouvert les anciennes technologies des colons) et c'est donc naturellement que Lynesse vient lui demander son aide, invoquant un ancien pacte.

Ce qui fonctionne particulièrement bien ici, ce sont les qui pro quo issus des divergences culturelles et des incompréhensions de langage. Quand Nyr craque et essaie de raconter la vérité sur qui il est, son module de traduction ne trouve aucun équivalent conceptuel dans la langue de Lynesse si bien qu'on en revient toujours à des histoires de sorcellerie et de magie alors que lui essaie de parler sciences. Ça montre bien que finalement, tout est une question de point de vue et que la magie, c'est ce que la science n'a pas (encore) expliqué.
L'idée est bonne et fonctionne très bien, sa matérialisation ultime se trouve d'ailleurs dans le fameux chapitre rédigé sur deux colonnes. On frôle le génie.

Outre cet élément particulièrement intéressant, j'ai aussi beaucoup apprécié le personnage de Nyr ainsi que ses tourments. Il parvient à contrôler temporairement sa dépression et ses émotions négatives grâce à un module qui lui permet de garder la tête froide mais sa souffrance reste palpable et très bien exploitée par l'auteur. Ça rend ce personnage profond et attachant, face à une Lynesse un peu plus fade à mon goût mais pas dénuée d'intérêt pour autant.

Fidèle à lui-même, Adrian Tchaikovsky livre une histoire courte et originale à la frontière des genres qui propose en plus de nombreuses réflexions sur la manière dont on interprète L Histoire en fonction de son époque, de sa culture. Il aborde aussi des sujets plus psychologiques comme les dangers de la solitude, la dépression et dépeint des personnages très humains avec leurs faiblesses plus que leurs forces. C'était passionnant à découvrir et digne de l'auteur de Dans la toile du temps.
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Plus riche qu'il n'y paraît.

Cette plaisante novella d'Adrian Tchaikovsky me paraît soulever bien d'autres questions que celle de l'incommunicabilité, et être bien plus qu'une belle illustration du principe d'Arthur C. Clarke selon lequel toute technologie suffisamment avancée est indiscernable de la magie. Y sont en effet abordés le transhumanisme, la rationalité -- Nyr est-il plus à même de prendre des décisions lorsque ses émotions sont tenues à distance, ou lorsqu'il les laisse s'emparer de lui ? --, la science dans le rapport entre l'observateur et l'observé mais aussi dans son but ultime -- y-a-t-il un sens à faire des observations et prendre des notes que personne ne lira jamais ? --, et d'autres encore. L'alternance des chapitres Nyr-Lynesse est bien adaptée au propos, les autres personnages bien intéressants, en particulier Esha, et l'ensemble comme toujours intelligent et bien écrit. En conclusion, un divertissement malin et un petit livre tout à fait recommandable.

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Un nouvel UHL est toujours synonyme de bons moments, de belles couverture, et de découvertes. le dernier opus qui vient de paraître fin août, le dernier des aînés de Adrian Tchaikovsky, ne déroge pas à la règle. L'auteur anglais a une très riche bibliographie dont seulement une petite partie a été traduite en France. La traduction est à nouveau l'oeuvre de Henry-Luc Planchat comme pour les autres romans de l'écrivain en France.

Le point de départ de ce court roman est assez simple: si une personne du moyen-âge venait à côtoyer la technologie moderne, elle penserait certainement que c'est de la sorcellerie, de la magie, car elle ne pourrait pas la comprendre. Sur la planète Sophos 4, la vie s'écoule normalement, les armes sont des épées, la technologie n'est pas du tout développée. C'est un monde qu'on pourrait qualifier de médiéval fantastique. Malheureusement, depuis quelques temps, un redoutable démon voleur d'esprits fait des ravages dans une région appelée l'Ordibois. Lynesse Quatrième Fille, princesse de Praimesite, veut résoudre ce problème et pour cela, elle veut faire appel au sorcier Nyrgoth l'Aîné qui a jadis aidé le royaume. Cependant, les choses ne sont pas celles qu'elles paraissent être. En réalité, Nyrgoth est le dernier scientifique terrien venu il y a des années en mission sur cette planète étrangère. Nyrgoth était un simple observateur, il a transgressé les règles et a aidé les habitants de la planète. Aussi hésite t'il à les aider à nouveau quand Lynesse vient quérir son aide. Ne recevant plus de nouvelles de la Terre depuis longtemps, il se laisse tenter par l'aventure.

Avec ce point de départ, Adrian Tchaikovsky s'amuse à mélanger les genres entre science-fiction et fantasy. Il change de points de vue à chaque chapitre entre Lynesse et Nyrgoth, ce qui donne un échange savoureux de points de vue. Nyrgoth essaye désespérément de faire comprendre à Lynesse qu'il n'est pas magicien, mais la communication entre eux est fort difficile. Il en ressort des situations plutôt comiques dues au décalage entre les deux mondes d'où viennent les héros. Un chapitre en particulier est fort bien écrit avec le point de vue en parallèle des deux personnages, et présente à merveille l'incompréhension entre les protagonistes. A travers ces deux êtres, ce sont deux mondes totalement différents qui se confrontent. Lynesse représente la fougue, les combattants, l'esprit médiéval. de l'autre côté, Nyrgoth apparaît plus détaché, venant d'un monde où la technologie est à des années lumières, il est plus raisonné, moins passionné, c'est un scientifique. Ils représentent ce mélange entre fantasy et science-fiction, mélange savoureux et qui fonctionne à merveille.

Le dernier des aînés est la novella la plus longue parmi la collection UHL. On y suit avec grand plaisir les aventures de Lynesse et Nyrgoth et surtout leurs difficultés à se comprendre.
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