Elle se nourrit de livres et de films, se tient sur la rive, s'oublie tandis que le temps défile sans heurt ni pesanteur, rendu momentanément inoffensif. Il faudrait partir de rien, de la lassitude générale, de l'hémorragie du désir pour dire les limites étroites auxquelles se cogne le moi. Les mots manquent depuis que le vide gagne du terrain. Il semble que ce soit un combat perdu d'avance, un marécage où l'enthousiasme s'enlise bien avant l'âge. La flamme vacille à chaque obstacle. L'avenir fait grise mine. La distance avec le réel s'est épaissie et rétréci le chas de l'aiguille. Quelques timides images font encore frémir. Ainsi le spectacle d'enfants en haillons, assis sur le parvis, dévorant à pleines dents une tranche de pastèque.
Qui dénoncera la supercherie du style, le maquillage des grandes phrases ? Aucune belle page ne répare l'outrage de n'avoir su tenir la main d'un mourant.