Je voulais me (re)plonger dans l’adolescence, l’adolescence comme moyen de transfigurer la réalité, de la fantasmer, d’inventer d’autres possibles, d’être à la fois dans une pulsion de vie et de destruction - il y a une grande violence chez mon personnage, et ce, dès le début du livre.
L’adolescence, du point de vue de la fiction, est fascinante car elle permet d’explorer les sentiments les plus exacerbés. C’est aussi un âge où l’on perd son innocence, où l’on vous confisque votre monde intérieur, votre monde imaginaire pour vous projeter dans la vie d’adulte, une vie où la compétition règne sans relâche.
Cela s’explique sans doute par mes racines germaniques, dans mon premier roman, La chance que tu as, il y avait des références très claires aux Contes de Grimm. ou à l’univers de Franz Kafka. Le Bon Fils reste dans cette veine germanique, très vieille Europe avec ce personnage de Hans qui ressemble à la fois à la figure du Diable ou du Vampire, cet homme à la beauté et au discours hypnotiques mais le ton du roman est très différent ; Le Bon Fils est une tragi-comédie, le roman se veut plus grinçant, beaucoup plus ironique que le premier.
Hans est une figure démoniaque, beaucoup de symboles dans le livre le montrent. Je voulais que le mal soit incarné par un homme pour que mon personnage principal puisse s’identifier à lui, et cherche à tout prix lui ressembler, que Hans exerce sur lui une fascination presque malsaine.
J’avais aussi l’envie de décrire un monde d’hommes puisque c’est là que naît la violence, la violence domestique surtout, celle dont on ne parle presque jamais et qui sévit derrière les portes clauses.
J’y ai songé, bien sûr. J’ai écrit ce livre en plein débat sur le mariage pour tous, certains lecteurs m’ont d’ailleurs demandé si le père et Hans étaient ensembles ce que je ne crois absolument pas, mais à la rigueur, le lecteur voit ce qu’il veut. Et c’est là la grande force de la littérature : nous permettre à chacun de se réapproprier l’histoire afin de mieux comprendre la nôtre.
Mais je ne vous cacherai pas que de décrire cette drôle de famille, qui plus vit à la campagne, c’était aussi une manière pour moi d’égratigner la société française très à cheval sur ses « valeurs ».
Le Bon Fils égratigne, non sans humour, notre obsession de la réussite sociale, réussite qui passe, dans un premier temps, par la réussite scolaire.
Mon personnage est soumis dès le début du roman à une très grande pression, d’abord par son propre père, puis par son père de « substitution », Hans, ces deux hommes incarnant, au fond, une société ne voyant dans ses enfants que de bons petits soldats dont on attend qu’ils ramènent de bonnes notes à la maison.
Ce qui permet, soit dit en passant, de ne pas parler des véritables enjeux : le désir, la sexualité, les peurs, les souffrances, la construction de l’identité qui sont au cœur de l’adolescence.
A un moment de l’histoire, le narrateur devra faire face à un choix cornélien : accepter ou non la violence, de là dépendra son intégration, ou non, dans la société.
Je préfère le terme déstabilisant plutôt que pesant. La lecture d’Elfriede Jelinek mais aussi de Thomas Bernhard, autre grand auteur autrichien, m’ont conforté dans ma volonté d’écrire une littérature exigeante. J’aime leur colère, leur façon de réinventer la langue, la profondeur métaphysique et la beauté qui transparait dans leur écriture.
Jelinek joue beaucoup avec les niveaux de langage, elle sait se faire poète tout en incluant dans son texte des références très prosaïques (chansons populaires, slogan publicitaire etc..)
Bernhard est plus drôle, plus grinçant, ses personnages sont des misanthropes esseulés qui ne parviennent pas à s’extraire d’un monde en déliquescence.
Et tous deux sont très politiques, la critique qu’ils ont fait ou continuent de faire de la société autrichienne est sans appel.
Stephen King et Guy de Maupassant font également partie de mes auteurs de chevet, j’admire l’inquiétante étrangeté qui transparait dans leur écriture.
Enfin, il y a deux auteurs femmes contemporaines qui comptent énormément à mes yeux, ce sont Joyce Carol Oates et Lydie Salvayre.
La première pour la folie, la monstruosité même de son oeuvre (et par le nombre de publication et par leur thématique). La deuxième pour l’engagement politique, l’humour, le grotesque et la langue très mouvante qu’on retrouve tout au long de ses livres.
Je marche sans cesse sur un fil, entre le tragique et le comique, entre le réalisme le plus prosaïque et des passages plus oniriques, entre des scènes de violence très dure et des envolées, disons, plus « lyriques », c’est ça qui crée le décalage et une forme d’ironie, il y a toujours un sens caché derrière le sens premier, c’est très jouissif à faire et compliqué aussi, le livre est écrit, réécrit jusqu’à l’épuisement.
Mais cette ironie ne m’empêche nullement d’aborder des thèmes universels : la transmission, la violence domestique, la place du père dans une famille…
Le personnage du père est obsédé par certains mots en effet, il n’a de cesse de répéter des occurrences comme salon-salle à manger traversant, chambrette, macchinetta bon fils. C’est un homme qui ressasse parce qu’il est dépassé par les événements, il croit se rassurer en agissant ainsi, mais c’est un leurre.
Dans La chance que tu as, le personnage est en effet abandonné par ses parents dans un monde, celui du travail, dont il ne parvient pas à déchiffrer les codes. Je voulais montrer par là qu’à force de violence (dans les rapports dans l’entreprise), on finit par détruire l’individu.
C’est le même processus dans Le bon fils, le système scolaire dépasse complètement le personnage, parce qu’il est, en de nombreux points, absurde.
Le personnage principal avance à tâtons dans un univers qui se délite et qui menace de l’anéantir, d’où la sensation, pour le lecteur, d’être déstabilisé sans cesse, et c’est exactement ce que je cherche à faire : mettre le lecteur dans une situation de malaise, la littérature est faites pour ça. Il faut qu’elle dérange, comme l’écrivait si bien Franz Kafka : « un livre doit être la hache pour la mer gelée en nous. Voilà ce que je crois. »
Ecriture : Mémoires d`un métier de Stephen King soit un essai autobiographique où l`auteur dédramatise l`acte d`écrire.
Après avoir refermé le livre, je me suis dit "essaie au moins une fois dans ta vie !", c`est un livre qui m`a donné une vraie force, car au fond pour écrire, l`envie ne suffit pas, c`est l`énergie qui compte.
Lorsque j`ai lu Perturbation de Thomas Bernhard, j`ai été soufflé par deux choses. Son style (je n`avais jamais lu ça auparavant, quelle musique et quel rythme !) et la liberté totale avec laquelle il a construit son récit : au bout d`une centaine de pages disons "classiques" (une intrigue, des personnages, un décor…), l`auteur "offre" à son lecteur un monologue long de presque 150 pages…
J`ai pensé qu`aujourd`hui plus personne n`oserait écrire et surtout "composer" un roman de la sorte, et qu`on serait tous condamnés à raconter de petites histoires sans ambition aucune.
Krabat de l`écrivain allemand Otfried Preussler que je lisais enfant. L`histoire d`un jeune garçon qui est appelé, en rêve, par onze corbeaux à les rejoindre dans un moulin… Bien meilleur que tout ce qui se fait aujourd`hui en littérature fantasy et jeunesse….
La Chute d`Albert Camus, moins fort que l`Etranger certes, mais qui se lit comme souvent chez l`auteur à plusieurs niveaux (du simple "thriller" au roman philosophique). A noter que l`histoire se déroule à Amsterdam, Albert Camus excelle aussi (mais qui pouvait en douter ?) dans la description d`ambiances nordiques, brumeuses, bref à mille lieux de ce à quoi il nous avait habitués.
Le Rouge et le Noir de Stendhal, il est sagement rangé dans ma bibliothèque...
Passer le pont de Pia Petersen : l`auteur s`interroge sur le phénomène des sectes, les sectes comme réponse à la déshumanisation de notre société, le tout sur fond de roman noir, très étouffant, et déstabilisant à souhait.
J`avais été fasciné, mal à l`aise, et totalement happé par ce huis-clos.
C`est le seul roman de fiction, à ma connaissance sur ce sujet.
Il devrait être réédité en poche !
Gatsby le magnifique de Francis Scott Fitzgerald : je n`y arrive pas !
Je trouve que l`action est "bizarrement" amenée, quelque chose ne colle pas dans ce chef-d`oeuvre...
Non…..
Pour quelle raison Astérix doit-il se rendre chez les Goths?