Tout piller, tout brûler

Wells Tower sera-t-il de ces étoiles filantes qui inondent furtivement la littérature de leur éclat avant de disparaître ? On se le demande et on n'espère que ce n'est pas le cas. Paru en France en 2010 en même temps qu'était annoncé un roman à venir qui n'a apparemment pas vu le jour, Tout piller, tout brûler est en tout cas un recueil de nouvelles incandescent.
Les neuf histoires réunies ici allient verve, cruauté et désespoir. Elles mettent en scène des hommes perdus dont les espoirs, aussi ordinaires soient-ils, viennent se briser sur un quotidien qui ne laisse pas de place au rêve, des enfants et des adolescents auxquels les faces les plus sordides de la vie se révèlent. Tout le propos de Wells Tower pourrait en fait tenir dans la nouvelle qui inaugure ce recueil, La côte de brun, dans laquelle un homme seul et désargenté chargé d'effectuer des réparations dans une maison secondaire en ruine située sur un îlot décide de réunir dans un aquarium les poissons qu'il attrape sur un récif. Occupé à créer ainsi un monde plus beau que le sien, il devra néanmoins en comprendre douloureusement la précarité.
Ainsi va le monde que Wells Tower décrit ici avec son écriture sans fioritures, presque clinique parfois. Il y ajoute un art consommé de la fin suspendue dans l'attente d'une hypothétique chute au sens propre comme au figuré ou, au contraire, de la fin brutale. Une incertitude constante qui lui permet de placer son lecteur dans le même inconfort que ses personnages face à une vie que l'on ne peut programmer, à des sentiments qui ne se commandent pas, à des pulsions que l'on peut juguler ou pas.
Un recueil de nouvelles aussi âpre que beau.

Lien : http://www.encoredunoir.com/..

Recueil de nouvelles, 9 au total, qui ont toutes un goût amer ; des tranches de vie cruelles voire cauchemardesques.
Un écrivain attiré par le tragique ? Pas du tout, il s'agit plutôt de nous dépeindre l'Amérique que l'on ne voit pas, celle tapit dans l'ombre mais l'auteur garde toujours cette idée de famille, bonne ou mauvaise, d'enfants perdus et surtout de violence pas forcément brutale et sanguinaire mais cette violence qui marque l'âme à jamais.
Des personnages paumés et déjantés, rejetés et blessés, pour qui le rêve américain n'est finalement qu'un rêve.
On y rencontre un couple plongé dans l'ennui qui rencontre un homme qui veut se créer un bel aquarium avec les crustacés ramassés au bord de l'eau, un rêve qui échoue !
Deux frères qui essaient de se retrouver après des années d'ignorance, un ancien avocat atteint de la maladie d'Alzheimer, un homme obligé de se coltiner le nouveau copain de sa femme et découvre que sa fille a une étrange habitude, un gamin qui déteste son beau-père et inversement, un homme qui pense rencontrer un prostituer se retrouve face à une dealeuse, une ado révoltée qui échappe de justesse à quelque chose de terrible, un gamin de sept ans violé dans les toilettes d'une fête foraine, et enfin la nouvelle qui donne son titre au livre « tout piller, tout brûler » dans laquelle un peuple viking atteint d ‘une folie meurtrière, décide de poursuivre et de piller les habitants d'une île qu'ils ont déjà détruite à moitié, pillée tous les trésors.
Des situations absurdes, parfois révoltantes mais qui donnent à réfléchir.
Lien : http://www.stemilou-books.co..

Laissons parler l'auteur au sujet de ses nouvelles (voir le lien de interview complète en fin de billet)

"Mais j'ai trouvé qu'elles avaient toutes un point commun : l'amour du lien familial et des relations fraternelles."



L'une des nouvelles s'intitule "Un lien fraternel" et le moins que l'on puisse dire c'est qu'entre Stephen et Matthew il va être difficile voire même impossible de renouer les liens distendus. "J'aime Stephen parce que c'est le seul parent qui me reste." Pourtant "nous partageons la joie avec autant de passion et d'excitation que nous pouvons partager la haine."



La plus emblématique serait "A la fête foraine" où dans un patchwork éblouissant l'on suit un petit garçon victime d'un agression, des types assez paumés, une jeune fille, des parents.



La dernière nouvelle "Tout piller, tout brûler", ne présente pas une Amérique profonde, avec ses compromis, ses personnages en quête d'amour ou de reconnaissance, mais des vikings brut de décoffrage dans un raid "pillage-et-terreur" assez estomaquant!



Si l'on entre très facilement dans les univers de ces histoires, si l'empathie est réelle et sans efforts, il est difficile de les quitter, d'autant qu'il n'y a pas de vraies "chutes", le lecteur ayant les cartes en main pour imaginer une suite après un coup d'oeil par une fenêtre temporelle. Il m'a fallu un peu de temps pour m'y faire, mais cependant impossible de décrocher. L'auteur a un roman en préparation, et là je pense que ce sera aussi du très très bon, mais plus accessible aux non amateurs de nouvelles.



Si vous avez aimé Lâchons les chiens de Brady Udall, ne vous privez pas de Tout piller, tout brûler!
Lien : http://en-lisant-en-voyagean..

Un homme qui tente de renouer sans persuasion des liens avec son frère sur un bout de montagne dans des circonstances inattendues, un homme qui tente de concilier sa vie et son père ingérable et capricieux, un homme qui se retrouve dans un huit clos automobile avec l'amant de son ex femme, un garçon de 15 ans qui découvre les joies de l'adolescence et de ses conséquences dermatologiques, un père désappointé par la voisine de sa fille, encore un homme, qui va et vient et se retrouve dans un univers très masculin ambiance fête foraine, des hommes qui pillent et qui brûlent jusqu'à se demander pourquoi, quoique.

Wells Tower égrène des histoires d'hommes donc, des questionnements, des réflexions, sans nécessairement de réponse, juste des tranches de vie, livrées à l'état brut, sans vernis, qui écorchent même.

Un excellent livre plein de promesses pour cet auteur.
Tout réside dans un style alerte (merci le traducteur) , des situations cocasses, des personnages "imparfaits", abîmés par la vie....
Deux défauts : les nouvelles finissent de manière abrupt et le livre est trop court...
Je suis impatient de lire son premier grand roman.