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sur 997 notes
Je viens de découvrir(merci Babelio)un auteur que j'avais envie de lire depuis longtemps.Je suis incapable de dire pourquoi je ne l'avais pas encore fait mais ce que je sais c'est que je serais passée à côté de son intelligence,de sa plume à la fois parfaite et envoûtante.
Dans ce roman,j'ai eu l 'impression d'accompagner l'auteur dans les coulisses du Pouvoir,sur le théâtre des opérations en Afghanistan et ce sentiment très jouissif de comprendre presque tout ce qui s'y jouait.Chacune des personnalités principales y est analysée,comprise,aimée ou détestée.Le racisme,d'où qu'il vienne,y est omniprésent et vecteur d'une grande violence"ordinaire"-si j'ose dire-.L'amour y est passionné,perdu,sans issue,magnifié,banalisé....Parler de la guerre c'est aussi comprendre que ses motivations sont souvent plus économiques que religieuses,qu'il s'agit de montrer qu'on est le gagnant et qu'on a le pouvoir d'anéantir l'autre impunément.
Comme il me faudrait écrire un roman pour expliquer tout mon ressenti,je vais choisir d'arrêter là en vous disant que lire ce roman m'a fait me sentir plus intelligente.A vous de voir!
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Trois hommes engagés sur ses fronts différents : Romain dans l'armée, Osman dans les milieux du pouvoir présidentiel et François à la tête d'une grande entreprise. Exposés, ils vivent les poussées d'adrénaline enivrantes propres aux élites... jusqu'à ce qu'ils se prennent de plein fouet le pépin, celui qui change tout, définitivement.
Incapables de prendre soin de leurs proches, ils se retrouvent seuls quand il faut se battre contre la culpabilité ou des accusations injustes.
Fataliste, l'auteure rend ces personnages exceptionnels humains à travers des histoires fouillées. Elle s'autorise des généralités parfois contestables, mais elle aborde des thèmes en profondeur tel celui des identités : celle qui est attribuée et celle que l'on revendique, ou celui de la fidélité. Elle se situe en France ou en Irak, où l'horreur mène le drame à son point le plus critique.
La fin amène une forme de rédemption, même si les acteurs de ces tragédies restent transpercés par ce qu'ils ont vécus.
Une lecture intense.
Lien : https://partagerlecture.blog..
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Je découvre cette auteure avec ce roman et ce ne sera pas le dernier car j'ai vraiment apprécié ! Au début de ma lecture pourtant, j'ai un peu bloqué sur le style mais j'ai très vite su l'apprécier. C'est très bien écrit, tellement que la lecture devient addictive ! On suit quatre personnages qui vont être liés par l'amour ou les circonstances, des personnages très réalistes, tout comme le roman lui-même, que l'on adore ou l'on déteste tour à tour . le tout dans le contexte des guerres d'Afghanistan et d'Irak, avec des thèmes centraux autour de l'argent, la puissance et l'identité. C'est fort , ça remue, ça pose des questions sur cette société française et ces déviances. A lire !

Challenge pavés 2019
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«Liberté, égalité, fraternité, prônez ces valeurs, mais tôt ou tard, vous verrez apparaître le problème de l'identité.» Aimé Césaire, Nègre je suis, nègre je resterai. Entretien avec Françoise Vergès

Quel roman captivant, extrêmement riche au ton provocateur, dénonciateur des abus de pouvoir de notre société moderne, dans laquelle on y est constamment conditionné par notre identité. Trois personnages, trois portraits formidablement bien brossés, autour desquels gravitent une myriade d'autres succulents personnages.
L'analyse psychologique précise de ses trois personnages distincts, au destin pourtant lié donnent au récit sa forme tryptique, chacun des personnages prenant place dans le récit à tour de rôle.

Romain Roller, militaire tout juste de retour d'Afghanistan, traumatisé par ce qu'il y a vécu, François Vély, riche entrepreneur, doté d'une grande force d'impassibilité, esclavagiste moderne, en pleine crise identitaire et Osman Diboula, au coeur lui aussi de la tourmente, devenu "persona non grata" sur la scène politique.

Racisme, antisémitisme, sexisme, discrimination, violence du pouvoir politique, coups bas, règlements de compte, traumatisme de la guerre, immigration, adolescence «résistance instinctive au formatage social», relations père-fils (référence à la Lettre au père de Kafka) l'amour et la trahison «Ne croyez pas que la loyauté soit la règle en politique. Elle est l'exception. La règle, c'est la trahison.», le conflit orchestré par les américains et les occidentaux en Afghanistan ...autant de thèmes soulevés et parfaitement maîtrisés. Karine Tuil porte un regard sombre sur les combats de notre société, adouci par une tendre histoire d'amour.

Karine Tuil rend aussi un poignant hommage aux soldats français pris dans une embuscade en Afghanistan et dont peu s'en sont sortis, un fait de guerre qui avait tant ému la France. Elle ne tombe pas dans le pathos du tout, et le témoignage sur cet événement sonne juste; je retiens tout particulièrement le témoignage de cette mère ... déchirant (p.205/206/207). «Morts pour la France. Qui s'en souviendrait ?»

L'écriture est parfaitement maîtrisée avec une alternance de styles choisi parfaitement à propos : poétique et sensuelle quand elle parle d'amour, saccadé, haché et oppressant quand elle raconte les scènes de guerre, de violence, de remise en cause personnelle, l'abîme des âmes.

«La peur - ce dérèglement de l'esprit-, la confusion, voilà, c'est ça, une brume diffuse qui aveugle Roller, bloque sa trachée, le flux de ses pensées, son cerveau s'opacifie, plaque compacte, concentration impossible, reprise des tremblements, desquamations au sang, tentative de maîtrise des membres, plaies cachées - consomption progressive, la guerre l'a brûlé.»

Une lecture passionnante et dense, un portrait au vitriol de notre "belle" société d'aujourd'hui dans laquelle l'insouciance se perd bien trop vite, et qui pousse à la réflexion ... voire à la fuite !
Lien : https://seriallectrice.blogs..
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J'annonce directement la couleur, c'est pour l'instant mon coup de coeur de cette rentrée littéraire.
Ce qui peut déranger certains lecteurs m'a au contraire beaucoup plus, j'ai apprécié cette ambiguïté sur le réel et la fiction. Il ne faut pas se focaliser sur le fait que certains personnages peuvent nous rappeler des politiques bien connus. J'aime son style d'écriture, la construction du roman, le fait qu'elle parle des soldats revenus de missions difficiles avec des blessures invisibles… On voit bien que tout un travail a été réalisé en amont sur la psychologie de ses personnages. Une petite touche d'histoire d'amour est le bien venu pour nous apporter un peu de fraicheur
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Ils sont quatre, trois hommes et une femme, dont les destins vont se croiser et se mêler dans une fresque violente et chaotique, terriblement réaliste.

Romain Roller, soldat appartenant au corps des chasseurs alpins et traumatisé par une mission en Afghanistan, noue une liaison avec Marion Decker, journaliste et romancière, lors de son séjour de décompression en Grèce. Mais la jeune femme est mariée à l'un des entrepreneurs franco-américains les plus puissants de France, François Vély. de retour en France, les amants poursuivent leur passion amoureuse. Romain retrouve également Osman Diboula, ancien éducateur social devenu une figure montante à l'Elysée suite à son intervention comme médiateur lors des émeutes de 2005 dans les cités. Ces quatre personnes vont se retrouver au coeur d'un scandale qui, dans un effet domino, va faire voler en éclats tous leurs repères sociaux, moraux et politiques.

C'est un récit glaçant et passionnant que nous offre Karine Tuil avec « L'insouciance ». Ses personnages principaux évoluent dans un monde contemporain impitoyable, dans une société où les clivages sociaux, religieux et raciaux perdurent, où la loi du plus fort et du plus influent s'impose aux plus faibles. A cela s'ajoute une donnée implacable et ineffaçable, que même le plus puissant ne peut faire disparaître : les origines identitaires. Car malgré l'ascension sociale, intellectuelle, financière ou politique, c'est bien à ce niveau que se joue la destinée de chacun : le diktat identitaire qui ramène chacun là d'où il vient.
François Vély, fils d'un ancien résistant juif, est rattrapé malgré lui par une judéité qu'il n'a jamais reconnue. Osman, fils d'immigrés ivoiriens et enfant des cités, est accueilli dans le cercle intime du Président non pas pour ce qu'il est mais plutôt pour l'image qu'il renvoie, un fils d'immigrés intégré et « assimilé ». Romain Roller, qui avait trouvé sa voie dans l'armée, s'interroge sur la nécessité et la légitimité des guerres face aux pertes humaines. Quant à Marion, marquée par un drame et qui a connu une enfance chaotique placée sous le signe de l'engagement gauchiste de sa mère, elle peine à trouver sa place parmi les nantis.

Autour d'eux, le décor est planté et sa description sous la plume de l'auteur est fascinante : nous voici au plus près de l'exercice du pouvoir, déambulant parmi les puissants et découvrant les règles qui codifient leurs relations. Forcément, le Président, ses conseillers et ses ministres nous font penser à des personnes bien réelles… Dans ce monde clanique où aux privilèges succèdent les bannissements, tout n'est qu'un jeu de paraître où la puissance des médias tient les rênes.
Racisme, antisémitisme, terrorisme, clivages sociaux, jeux de pouvoir, histoire d'amour, pouvoir des médias, question identitaire… le mélange des thèmes est détonnant et maîtrisé à la perfection. Et l'insouciance dans tout cela ? Elle s'est envolée depuis longtemps...

Je découvre Karine Tuil avec ce roman. Indéniablement, elle se place parmi les grands auteurs. Narration puissante et accrocheuse, intensité permanente de l'intrigue, style très riche, analyse parfaite et très documentée de la société du XXIe siècle, personnages à la psychologie travaillée au scalpel, l'auteur nous offre ici un roman époustouflant. Bravo.
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Je pense que c'est acquis pour moi : Karine Tuil fait partie des autrices qui s'interrogent  et nous interrogent sur les hommes et notre monde et L'insouciance en est une fois de plus la démonstration. Cette lecture tombait en pleine période où notre insouciance depuis deux ans est mise à rude épreuve et encore plus depuis quelques jours..... Nous n'avions pas conscience de notre bonheur (tout en restant relatif) et c'est à travers trois personnages qu'elle expose et interroge nos consciences. La bombe est là, inoffensive jusqu'au jour où la goupille saute.....

"Il faut vingt ans pour construire une réputation et cinq minutes pour la détruire.(p213)"
Warren Buffett (homme d'affaires américain)

Il y a Osman Diboula d'origine ivoirienne, qui, grâce à son travail de médiateur dans les banlieues, a été remarqué et s'est vu promu à un poste de conseiller dans le cercle très fermé qui entoure le Président de la République, cercle dans lequel il a rencontré sa compagne Sonia, une métisse qui elle a gravi les échelons grâce à ses diplômes, mais l'on sait que dans les sphères du pouvoir politique, les chaises sont tournantes et un mouvement d'humeur suite à une remarque sur sa couleur de peau va le reléguer au rang dont il est issu.

"Les rapports humains ne se déroulaient plus que sur le mode de la rentabilité, de la réciprocité, de l'efficacité et de l'intéressement. On vous donnait si vous pouviez offrir. On vous proposait si vous pouviez rendre. Plus vous montiez dans l'échelle sociale, plus vous étiez convoité. Vous descendiez d'une marche et le monde se dispersait. (...) Il avait été comme eux, un ambitieux, heureux d'en être (...) Et voilà qu'il se trouvait dans la situation des excommuniés. (p130)"

Parmi ses amis issus de la banlieue, il y a Romain Roller, un lieutenant de l'armée française, marié et père d'un jeune enfant, de retour d'Afghanistan où il a perdu des hommes (perte dont il se sent en partie responsable) et vu un de ses amis devenir tétraplégique.

"Il y a les vivants et les morts, et au milieu d'eux, les morts-vivants, ils sont là, devant vous, ils vous parlent, ils mangent, ils font leur travail mais ils n'appartiennent plus tout à fait à ce monde-là, ils sont passés de l'autre côté et sont revenus, ils ont vu ce que vous ne verrez jamais, ont entendu les cris de la douleur profonde, il ne sont pas des vôtres. (p240)"

Romain s'en est mieux sorti, apparemment, et rencontre, lors de son séjour à Chypre pour "décompresser" Marion Decker, une écrivaine-journaliste dont il tombe éperdument amoureux. Marion est mariée à François Vély, plus âgé qu'elle, un homme d'affaires puissant mais qui s'est créée une nouvelle identité pour échapper à un passé identitaire dans lequel il ne se reconnaît pas.

Trois hommes reliés d'une manière ou d'une autre (sans oublier Manon) et qui ont en commun un basculement dans leurs vies.... ll y avait la vie d'avant celle de l'insouciance, de la réussite, du bonheur et puis il y a celle d'après pour chacun, la vie qui bascule quand les événements s'emballent, quand on remet en question son identité celle que l'on pensait avoir et celle que l'on vous "colle", celle pour laquelle on était prêt à combattre, oui l'identité est finalement le thème central du roman. Quand la couleur de peau vous relègue à la discrimination qu'elle soit positive ou négative comme un outil de manipulation pour des enjeux stratégiques dans un sens ou dans l'autre. Quand la guerre et ses dégâts collatéraux mais également une rencontre remettent tout en question, tout ce que vous aviez construit, tout ce en quoi vous aviez cru. Quand ce que vous aviez tenu à dissimuler vous explose à la figure et qu'en des temps troublés l'identité vous catégorise, vous désigne d'office.

Karine Tuil décide de faire de ses protagonistes le reflet d'une époque où la question de l'identité est au centre des combats, moraux et physiques, où les humains doutent de leurs propres désirs, espoirs, dans ce qu'ils croyaient avoir construit et qui par un concours de circonstances, par un conflit, par une rencontre vont se réduire à néant ou tout remettre en question.

"L'héroïsme, c'est ce qu'il reste aux soldats quand ils ont tout perdu. Une petite médaille morale, le hochet de la hiérarchie militaire (p480)"

C'est un roman profondément ancré dans notre époque avec ce qu'elle comporte d'hypocrisie politique, de jeux de pouvoirs, de combats en terre étrangère, de sacrifices humains mais également des stigmatisations dont sont l'objet certains, dont ils doivent soit se défendre soit se détacher pour conserver ou atteindre ce qui leur paraît être la réussite et la reconnaissance allant jusqu'à savoir où mettre le curseur de l'acceptation pour réussir.

Tour à tour, chacun des trois hommes, Osman, Romain et François vont être mis face à leurs ambitions, leurs contradictions et réagiront avec l'énergie du désespoir ou de la revanche, l'autrice leur offrant le choix des armes avec lesquelles combattre, survivre et nous propose, une fois de plus, un regard sans complaisance et réaliste sur le pouvoir,  la puissance, l'identité et comment ceux-ci peuvent vous broyer sans pour autant rester  dans ce cercle "élitiste" dont chacun veut sa part.

C'est un roman dont on garde, comme les personnages, des cicatrices, dont on ne ressort pas indemne une fois la dernière page tournée, car une fois de plus elle nous place en tant que témoin d'un monde dans lequel nous vivons. La plume est ferme et ne faiblit pas, elle dénonce les maux de nos sociétés qu'ils soient financiers, catégoriels, racistes à travers des héros ordinaires face à la société mais également face à eux-mêmes, des hommes et une femme qui ont perdu l'insouciance dans laquelle ils pensaient vivre (un peu comme nous actuellement) et qui basculent sur l'autre versant, celui du combat et de la réalité,  plus dur, plus abrupt, plus sombre, celui de la conscience d'un monde où rien n'est acquis, où rien n'est sûr et dans lequel tout chacun peut un jour se retrouver.

"C'est l'obstacle sur lequel tous les êtres humains butent un jour ou l'autre. Peut-être qu'il ne faut pas chercher à être heureux mais seulement à rendre la vie supportable. (p510)"

Coup de 🧡 car cela se lit comme un thriller mais dont les enjeux et les thèmes abordés ne sont pas du domaine de l'imaginaire. C'est une étude et analyse de trois vies de notre temps, que ce soit sur le plan professionnel, sociétal, psychologique et même politique, un récit maîtrisé de bout en bout et qui laisse un goût amer une fois refermé, le goût de la désillusion et des idéaux perdus.
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J'ai entendu parler de Karine Tuil pour la première fois lors de la sortie de son précédent roman « L'invention de nos vies ». Je n'avais pas eu l'occasion de le lire alors je me devais de ne pas manquer le nouvel opus.

Se basant sur trois destins totalement différents, Karine Tuil nous propose un roman choral sur le monde d'aujourd'hui. Elle profite du portrait de ces personnages principaux et de ceux gravitant autour pour décrire les règles qui régissent la société actuelle. Avec des origines variées, ils permettent de mettre en lumière les différences de traitement dont sont victimes les gens selon leurs

origines. Ainsi l'auteure ouvre la discussion sur un grand nombre de thèmes omniprésents dans notre quotidien. Elle nous fait entrer dans le milieu de la guerre, de la politique, de l'économie, de la presse… Cela lui permet de mettre le doigt sur les dérives de notre temps comme le traumatisme militaire, le racisme, l'antisémitisme, le sexisme, l'argent et bien sûr l'égoïsme, point commun à toutes ces discriminations. Devant toutes ces lois devenues presque naturelles, les protagonistes évoluent et s'adaptent pour survivre dans la communauté. Chacun y va de sa mesquinerie afin d'arriver à ses fins. Et pour ce faire, ils sont capables de tout. Certains iront même jusqu'à renier tout ce en quoi ils croyaient, juste pour exister.

C'est un roman qui met fin à l'insouciance, quand la réalité nous rappelle que l'Homme continue avec tous ces failles et que le temps ne change rien aux préjugés, malheureusement inscrits dans notre Histoire. L'auteure maîtrise son sujet grâce à une belle plume et au contraire de certaines critiques (de renom en plus !), je ne me suis jamais ennuyé malgré l'épaisseur de l'ouvrage. J'ai été emporté par le scénario et le romanesque de ses destins. On pourrait lui reprocher de ne pas approfondir la multitude de domaines traités mais ce n'est pas l'objectif de cette histoire. En narrant des évènements parfois un peu caricaturaux mais sans jamais vouloir donner de leçons, Karine Tuil cherche juste à photographier notre monde à un instant T, c'est réussi mais ce n'est pas vraiment réjouissant !
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Le monde est devenu grave. Une gravité qui tourne autour de tous et de chacun jusqu'à ce qu'elle s'insinue et se propage. L'inquiétude comme une obsession. La fuite de l'insouciance. Crainte, insécurité, menace, pression. Des conflits au loin qui s'avancent désormais et retentissent tout près. Des incompréhensions, de l'ignorance, des amalgames, laissant une société française étirée de toute part, embrouillée. le pouvoir qui se prend et se perd en un instant, un vrai jeu où l'on distribue des cartes stratégiques, spéculatives, médiatiques...Manège de la politique qui se déploie entre convenance et apparence, tournant sur le socle de l'Identité, social, raciale, religieuse. La violence engendrée par la différence, l'intolérance entraînée par la rigidité.
Dans ce roman, l'auteure fouille l'intime de quatre personnages, en extrait la noirceur, la douleur, le doute, la contradiction et les sentiments – d'amour, d'amitié, de honte, de colère, de chagrin, de peur... – pour éclairer – et tenter de comprendre – ce qui se passe à l'extérieur. Quatre protagonistes emblématiques : Romain Roller, un soldat tout juste rentré d'Afghanistan où a eu lieu une embuscade faisant de nombreux morts et blessés, détruit psychologiquement, terriblement affaibli, il ne vit plus il survit, la fureur de la guerre le hante sans répit, même sa femme et son fils ne peuvent l'apaiser, seule une journaliste Marion Decker ravive chez lui le désir ; Marion Decker, il l'apprendra assez vite est l'épouse d'un grand patron, François Vély, sur le point de faire affaire avec les États-unis, mais une photographie de lui posant assis sur une sculpture représentant une femme noire, connotée immédiatement de raciste, va entraîner une exécution médiatique ; Ousman Diboula, fils d'immigré ivoirien, ancien éducateur social devenu un proche conseillé du Président de la République, soudainement évincé subissant de plein fouet les affres de la politique, écrira un texte retentissant sur l'affaire François Vély, qui lui permettra de retomber dans les bras du pouvoir...
Une fiction puissante sur une réalité abrupte et sombre. Une lecture dure et intense d'où s'échappe toute de même à la toute fin l'esquisse d'une quiétude.
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Mon programme de cet après-midi : Cinéma, je suis allé voir la tresse de Laetita Colombani, puis j'ai terminé la lecture de l'insouciance de Karine Tuil. Et il m'est venu cette idée que ce roman ressemblait à la tresse en ce sens que ce sont des histoires distinctes qui vont progressivement se mêler pour former une unité.
Il est question d'identité, de parcours de vie, certains s'engagent dans l'armée pour aller combattre en Afghanistan ou en Irak, d'autres arpentent les couloirs élyséens, d'autres encore gravitent dans les hautes sphères de l'entreprise, certains se hissent au sommet pendant que d'autres dégringolent de leur piédestal. On y parle d'amour aussi, des amours impossibles qui transcendent les classes sociales, on y parle de terrorisme, de religion, de racisme et d'antisémitisme, du pouvoir, de trahison.

Comme les cheveux mêlés dans une tresse, nos destins s'entrecroisent, nous devons vivre les uns avec les autres et c'est difficile parce qu'une fois passée l'insouciance de l'enfance, il faut se battre pour se trouver une place dans ce monde, puis pour la garder et on n'est pas préparés à ça. Alors on se bat, on lutte contre les autres, contre soi-même, on tente d'oublier notre condition, nos origines, mais celles-ci nous reviennent come un boomerang.

Un roman dense, documenté, riche sur le plan de la psychologie des personnages, sur la sociologie de notre époque. Des pages mémorables sur l'horreur de la guerre et le syndrome du stress post traumatique. Un grand roman.

« On se déteste, on se déchire
On se détruit, on se désire
Mais au bout du compte
On se rend compte
Qu'on est toujours tout seul au monde »

Les uns contre les autres – Luc Plamondon

Challenge Multi-Défis 2024.
Challenge Pavés 2024.
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