Le voeu maudit regroupe sept récits publiés initialement au Japon entre 1975 et 1992 de celui qui est considéré souvent comme le maître du manga d'horreur et l'inspirateur de
Junji Ito.
Bon, si la terreur affichée est un peu surfaite (ok, je suis un grand garçon approchant la cinquantaine), ces récits n'en sont pas moins excellents, et le volume se lit d'une traite.
Les deux premiers,
le voeu maudit et Death make, sont dans la même veine : un ou des jeunes en viennent à fabriquer, ici un automate, là un masque, qui ne vont pas tarder à s'animer et à se retourner contre leurs créateurs. Sujet assez classique, mais bien traité, ça fonctionne.
Le vieillard, troisième récit, est le plus ambitieux me semble-t-il. Un gamin, en jouant dans un parc découvre un être se trouvant dans un trou et qui appelle au secours pour en sortir. Il en a peur. Comment peut-on être aussi horrible, terriblement ridé ? Il dit être un vieillard ? Doit-il le croire, le délivrer, est-ce bien un humain ? le gamin n'en a jamais vus…et pour cause, du haut de ses cinq ans, il doit penser à succéder comme boucher à son père, qui âgé de vingt ans arrive à la fin de sa vie. S'instaure un échange fascinant dans un monde situé dans un futur indéterminé, qui interpelle le lecteur sur l'humanité, peut-être sur le sort qu'on fait à nos vieux.
Le cadeau m'a semblé assez embrouillé, disons qu'à l'occasion de Noël, la lecture d'une carte de voeu transforme une fête entre amis en partie fine à plusieurs dans un hôtel. Mais le père Noël surgit pour stopper cette orgie, en déchiquetant des bras, des jambes et des têtes, se transformant en père fouettard. L'autrice de la lettre, participante, croît finalement avoir rêvé tout cela, d'autant que ses amis disent aller bien. Chose bien étrange pourtant, ils ont tous rêvé de la même chose qu'elle…
Le serpent est ma seconde préférée. Un groupe de jeunes est fasciné par la rumeur qu'un grand serpent est élevé dans le voisinage. Ils vont pénétrer dans la maison, mais en lui donnant à manger dans sa cage, ils prennent peur et oublient de refermer. Les informations s'affolent, un serpent s'est échappé. le petit Keiichi qui faisait partie de la bande prend peur, surtout que le serpent l'avait regardé droit dans les yeux. Quelques temps plus tard, son papa, veuf, lui annonce qu'il part pour revenir avec Kaori sa nouvelle compagne, qu'il veut lui présenter. Mais une fois Keiichi seul, une jolie femme qui prétend être Kaori se présente à la maison, seule…Keiichi n'a d'autre choix que de l'héberger en attendant le retour de son père…Un récit assez flippant.
La faucille est tout aussi palpitant. Un père et sa fille vont rendre visite à la grand-mère, à la campagne. C'est le jour de la fête des morts. Mais quand ils arrivent, trop tard, elle est morte, et déjà veillée par le reste de la famille, dans son cercueil, sur lequel une faucille est placée, curieusement. Dans cette nuit d'orage, quelqu'un entre pour venir chercher de l'aide, et demande à la petite fille restée seule de ne surtout pas déplacer la faucille, qui serait un talisman pour chasser les démons. Mais lorsqu'un démon tente de s'introduire dans la maison, la petite prenant peur fait tomber la faucille…Dès lors s'ensuit une lutte dont le dénouement qui semblait un instant heureux nous laissera sur une mauvaise surprise.
Umezu a placé tous les ingrédients pour mijoter de délicieux récits, mélangeant l'horreur et la terreur, un peu, les faux-semblants, et même un peu plus de gravité, de réflexion dans certains d'entre eux. Il y a parfois comme du
Philip K. Dick, dans ses nouvelles où les êtres ne sont pas ce qu'ils semblent être, dans une ambiance truquée et malfaisante. C'est de là qu'on sent venir une forme de prémonition angoissante. Quant au trait, il est assez inégalable, extrêmement précis pour rendre à la perfection la moindre variation de sentiment chez les personnages, il sait au besoin se faire moins chargé. C'est comme s'il suivait le rythme et l'ambiance générale. Plus aéré et simple dans les moments d'apaisement (scènes familiales sereines), il se charge et s'assombrit quand la tension monte, jusqu'à un paroxysme.