Les dominicains en France

En premier lieu, bien que les cinq confesseurs de Philippe le Bel aient été nettement différents du point de vue de la personnalité, il me semble éclairant de les imaginer comme un groupe cohérent, à cause de la formation dominicaine qu’ils avaient en commun, mais aussi à cause des liens personnels entre ces hommes.

Tous ces Dominicains ont vécu pendant de longues années au couvent Saint-Jacques à Paris. Frère Laurent et Nicolas de Gorran y ont été en effet tous les deux prieurs. Laurent est parti pour Tours après 1285, mais il se trouvait de nouveau à Paris avant sa mort en 1298. Ces deux hommes, Laurent et Nicolas de Gorran, devaient bien se connaître, et pouvaient très facilement trouver des occasions pour causer ensemble au sujet des responsabilités liées à leur charge de confesseur du roi. Et, bien que Nicolas de Fréauville et Guillaume de Paris aient été des hommes de la génération suivante, ils devaient connaître leurs prédécesseurs. Lorsque Nicolas de Gorran est mort vers 1297 et Laurent en 1298, Guillaume de Paris était déjà chapelain, et Nicolas de Fréauville confesseur royal.

Le roi donna ses ordres secrets aux baillis et sénéchaux le 14 septembre ;
quelques jours plus tard, le 22 septembre, Guillaume de Paris écrivit aux
inquisiteurs, prieurs, et lecteurs de son ordre, partout dans le royaume de
France, pour demander leur aide lors des interrogations des Templiers qui
auraient lieu après les arrestations à venir. Dans la formule de salutation au début de sa lettre, il soulignait son identité de Dominicain, et donnait tous ses titres d’inquisiteur papal, de chapelain papal, et de confesseur royal.

Mais le plus intéressant, c’est la manière dont il manipula la vérité. En
écrivant à ses propres confrères dominicains, il insinua qu’il leur adressait
sa requête pour obtenir leur aide, non seulement de la part du roi Philippe,
mais également de la part du pape Clément V, et que les arrestations et les
interrogations seraient faites avec l’approbation papale48. Tout cela était
absolument faux.

Clément n’était pas du tout au courant, et après les arrestations qui avaient eu lieu le 13 octobre, le pape était très mécontent de l’inquisiteur Guillaume!