Criquet

"La republication de Criquet d'Andrée Viollis est un salutaire antidote aux amnésies de l'Histoire, une précieuse boussole pour naviguer au présent et à l'avenir pour traquer les tropismes binaires, les " cela-va-de-soi" qui empêchent l'aventure, afin que vivent et jouissent sans entrave les amazones-enfants et que les amazones survivent à l'enfance." Clémence Allezard. Préface (2)
1913, première édition de Criquet aux Editions Calmann-Levy. 1934, reparution aux Editions Gallimard.
Andrée Viollis. Grande reporter, résistante, féministe, anti-colonialiste. 2021 : Il est temps que la flamme de son nom soit réactiver!
Criquet est un roman qui s'inscrit dans la marche de l'histoire du féminisme et bien au-delà. C'est le roman de l'enfance, de l'adolescence, de l'identité, de l'émancipation, du combat pour les libertés.
Pour qui, comme moi, ne connaissait pas Andrée Viollis , son travail journalistique et son oeuvre littéraire, je conseille l'écoute de cet intéressant podcasts :
https://podcast.ausha.co/si-si-les-podcasts/episode-1-andree-viollis-grande-reporter-et-resistante

Astrid Shriqui Garain

Dans ce roman paru en 1913, nous découvrons "Criquet" une jeune fille qui, en villégiature en bord de mer, se promène et agit librement comme un garçon manqué. de fait, Criquet à bien grandi et sa tante est affligée: il est temps qu'elle s'habille et se comporte comme une jeune femme, or Criquet ne veut rien changer et préférerait être un garçon ! Elle a en effet remarqué que ces messieurs ont tous les avantages et qu'il ne fait pas bon être une femme, autour d'elles les figures féminines ont l'air malheureuses ou ridicules.
Mais l'été touche à sa fin, et décidément Camille (Criquet) constate qu'elle ne peut plus jouer avec les enfants... La deuxième partie du roman montre alors ce passage à l'adolescence, un bouleversement physiologique et mental.
Ce roman d'apprentissage est une vraie réussite, j'ai surtout apprécié cette deuxième partie où cette jeune fille de la bourgeoisie parisienne voit son existence changer et analyse avec finesse et humour son entourage. C'est un texte extrêmement moderne compte tenu du fait qu'il date du début du siècle, l'écrivaine montre un point de vue féminin et feministe inédit, (elle aborde par exemple le sujet des premières règles). le style, quant à lui, se rapproche de Colette notamment dans la description sensuelle de la nature. Un coup de coeur!

La perte de l'enfance, la capture de ses ultimes enchantements : le refus d'une morne condition féminine dont les tyrannies et empêchements sont finement décrits. La sensualité d'un dernier été insulaire, les jeux que l'on y retrouve plus, l'inquiétude du changement, le refus de ce devenir autre, si tiède, souffrant et bourgeois. Dans la grande pertinence de son regard social, Andrée Viollis montre à quel point refus et reniement servent la naissance d'une sensibilité. Criquet ou la perte qui nous constitue.
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