Mr. Raycie était un homme monumental. La hauteur, la largeur et l'épaisseur de sa taille étaient si comparables que, de quelque côté qu'il se tournât, on avait de lui une vue tout aussi vaste ; chaque pouce de cette aire immense était si soigneusement entretenu qu'à l’œil d'un fermier il eût pu évoquer un vaste domaine agricole dont pas un arpent ne reste en friche. Même sa calvitie, proportionnée au reste, semblait faire l'objet d'un astiquage quotidien. Et, par une chaude journée, toute sa personne constituait un merveilleux exemple de la plus coûteuse irrigation. Si grande en était l'étendue, et si multiple le relief, qu'il était fascinant d'observer le trajet de chaque filet de sueur le long de son canal. Même sur ses grandes mains fraîches d'aspect, les gouttelettes se divisaient, s'écoulant dans diverses directions à partir de la crête des doigts ; quant à son front et à ses tempes, et aux coussins de chair sous ses paupières inférieures, chacune de ses pentes avait son cours d'eau, ses petits lacs et ses soudaines cascades. Ce spectacle n'était jamais déplaisant, tant cette surface ruisselante était d'un rose propret et engageant, et tant la sueur exhalée fleurait bon l'eau de Cologne de prix et la savonnette française de la meilleure qualité.
Parmi toutes ces joies accumulées, au fond de lui bruissait doucement la pensée que rien n'avait été dit ou fait pour contrarier ses plans concernant Treeshy. Il semblait presque que son père eût tacitement accepté l'idée de leurs secrètes fiançailles, et il se sentait à demi coupable de ne pas les lui révéler séance tenante. Mais, même lorsqu'ils s'adoucissent, les dieux sont redoutables - et jamais plus peut-être qu'à ces moments-là...
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Les Jeux olympiques de littérature
Louis Chevaillier
Éditions Grasset
« Certains d'entre vous apprendrez que dans les années 1912 à 1948, il y avait aux Jeux olympiques des épreuves d'art et de littérature. C'était Pierre de Coubertin qui tenait beaucoup à ces épreuves et on y avait comme jury, à l'époque, des gens comme Paul Claudel, Jean Giraudoux, Paul Valéry et Edith Wharton. Il y avait aussi des prix Nobel, Selma Lagerlof, Maeterlinck (...). C'était ça à l'époque. C'était ça les années 20. Et c'est raconté dans ce livre qui est vraiment érudit, brillant et un vrai plaisir de lecture que je vous recommande. »
Marie-Joseph, libraire à La Procure de Paris
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