AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Emmanuelle Péchenart (Traducteur)
EAN : 9782491147426
Marie Barbier (12/05/2023)
4.75/5   2 notes
Résumé :
À Taïwan. Le héros, qui s’est remis récemment à voir sa mère décédée en rêve, interprète ces visites d’outre-tombe comme le signe que la sépulture ne convient pas. Alors qu’il est rongé par la maladie mentale, rendu depuis des années presque impotent par les calmants, il puise dans ses rêves récurrents (mais aussi dans la lecture du gourou Osho et dans l’inspiration donnée par sa femme et par son ex-petite amie) l’énergie d’agir. Il va donc entreprendre les démarch... >Voir plus
Que lire après Le Recueil des ossementsVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
La nouvelle est parue à Taïwan en 1993 et en France en mai 2023.

Un homme de 41 ans, fils, d'une mère morte 19 ans auparavant, cloué au lit, apathique, sortant de plusieurs années passées en maison de repos, malade, ramolli par les calmants, misanthrope, va à la succession de plusieurs rêves dans lesquels apparaît sa mère, grâce à son amour pour elle, sortir de sa léthargie, prendre part à un certain mouvement de la vie, se relier à ses deux frères, sa femme, son ex petite amie.

Sortir plus souvent de son lit, se nourrir (de pieds de porc aux vermicelles ce met réputé à Taïwan pour éloigner les mauvaises influences, et la longévité).

Il lit Osho, qui est comme son double. OSHO qui dit des défunts qu'ils sont entrés dans l'illimité, qu'ils appartiennent à une sorte de qualité intemporelle. 

Il y a ses rêves où sa mère apparaît qui peuvent sembler délirants, lui va les interpréter, notamment "le rêve du 6ème oncle" où sa mère est recouverte de terre. L'oncle en question dit au héros :  "Tâche de lui trouver une solution, à ta maman, pour qu'elle s'en sorte."

Quelle obstination pour exhumer le corps de sa mère afin de faire le shigu … on le verra recueillir d'abord les fonds pour enfin recueillir ses ossements.

Cette période dans laquelle il sera dans la compassion, dans l'action lui permettra, de revenir à lui-même, de se reconnecter à la vie, de se décentrer de ses délires ? … Ce projet guidé par l'amour qui pourrait paraître à certaines personnes, morbide va le sauver lui qui sombré dans le vide.

Cette nouvelle de 66 pages décrit l'explosion des sens d'un homme qui ne ressentait plus rien dans la réalité, c'est une renaissance grâce à sa défunte mère… paradoxalement . 

Est-ce sa mort qui l'avait fait sombrer dans la folie ? On l'ignore.

La traduction de l'écriture de Wuhe est sans tabou, de poétique jusqu'à cru et bien d'autres nuances. Authentique !

La nouvelle est découpée en 30 chapitres où vogue le héros, entre le rêve, l'action, les souvenirs de sa mère, le rituel de bonne santé qu'elle pratiquait, Osho et son appropriation par le héros etc…

Cette nouvelle m'a beaucoup plu, la mort d'une mère est un sujet qui me parle beaucoup depuis longtemps et Wuhe le raconte d'une manière très originale qui peut-être ne plaira pas à tout le monde. Moi j'ai vraiment adoré. 

Ceux qui se laisseront tenter auront eu l'impression de vivre une expérience hors du temps, dépaysante car l'atmosphère de Taïwan est présente, et les interactions authentiques et les sensations et émotions profondes.

"Osho a épluché de l'ail, nous nous jetons de l'espace entre les buildings qui surplombent notre vallon, et nous élançons vers peu importe quel lointain. "

Un autre livre de Wuhe a été traduit en France : Les survivants, est-ce que vous l'avez-lu ?

Autre extrait:

"(...) personne ne dit un mot ni ne questionne, mais tout le monde s'étonne: même les morceaux de cercueil ont pourri, voilà qui répond vraiment à cette phrase des anciens, «tout sera réduit en poussière». Pour soulager mes yeux, si concentrés qu'ils me brûlent, j'observe au loin les rayons du soleil qui se brisent sur l'eau profonde de la rivière - serait-ce que notre mère, lassée d'attendre, a déménagé?"

Commenter  J’apprécie          70
Ce fragment est à l'instar d'une plume duveteuse flottant au vent. On est d'emblée dans l'intrinsèque d'un rituel funéraire.
La sève de ce livre est une délectation. La trame est captivante et nous emmène dans un cheminement qui interpelle. L'écriture atypique et surdouée de Chen Kuocheng dont le pseudonyme Wuhe est signifiant : la Grue qui danse. Comme l'exprime si bien la quatrième de couverture.
Le « je » prend place. Un homme conte. Ce dernier est malade mentalement. En proie à une psychose, à la mélancolie. Dévoré par les sédatifs, il passe sa vie au lit et l'assume à merveille. On a l'impression de côtoyer un homme fragile et dans un même tempo, il est épris d'une liberté absolue. Un peu comme un Cynique à l'instar de Diogène. Mais en plus raffiné, plus subtil. Il jongle avec les heures longues, complètement lymphatique. Sa femme est attentive, patiente et observatrice. On ressent une acceptation de son état. Comme si son mal-être était normal. Il faut dire que le narrateur est comme un enfant qui aime être choyé.
Mais un jour certain advient le déclic. Il va lire une collection complète de Osho (Rajneesh), le gourou, un peu, voire beaucoup sulfureux, au libre-arbitre avéré. Les livres ont été donné par une ancienne rivale de sa femme, devenue la meilleure amie de cette dernière. Comme quoi tout peut changer et le récit est la preuve de toutes les possibilités.
Osho va soulever la poussière sous le tapis. Interpeller le narrateur, brusquer sa nonchalance. Allumer la flamme d'un plausible renouveau.
Subrepticement il va rêver de sa mère décédée dix-neuf ans plus tôt. Elle, dont le corps attend le rite funéraire. Celui du recueillement des ossements. Il va rassembler l'épars.
« Osho dit que maman est entrée dans l'illimité, qu'elle appartient à une sorte de qualité intemporelle ».
Il va avec ses frères oeuvrer pour la Mère. Acheter un emplacement à la pagode de l'Assemblée Vaste comme la Mer de la Rivière des Bambous. Relier cette gestuelle mortuaire au chaos des insomnies. Il aura fallu qu'Osho parle à sa conscience pour que le deuil accomplisse son pouvoir de résilience.
« Osho, aussi, a révélé que le secret fondamental de l'existence, c'est de sauter en l'air tout vivant, sauter tout vivant jusqu'au bout, et que c'est un remède naturel contre les insomnies ».
Wuhe est l'épicentre de ce récit. Il dépose l'ésotérisme, le rite et ses vertus dans les mains du narrateur. On ressent un magnétisme puissant, une poésie souveraine. La lutte pour la rédemption. Les entrelaces jusqu'au paroxysme d'un théologal spéculatif. Ce fragment parfois insolent, radical est une mise en abîme du lien, la matrice Mère dans son apogée. le générationnel comme un chef-d'oeuvre à concevoir. Acter le rite comme un enjeu de guérison pour le narrateur et d'honneur pour la mémoire de la Mère.
Un rite qui est le mimétisme même d'un narrateur en proie aux tourments existentiels.
Mais il reste égal à lui-même. C'est à dire résolument satirique et burlesque. Comme s'il jonglait avec l'humour noir. Sans aucun doute, une douleur infinie qui s'exprime ainsi.
D'ombre et de lumière, « Le Recueil des ossements » est la prononciation d'une mort emblématique qui adviendra grâce aux coutumes taïwanaises. Ce livre est un levier. L'initiation, l'osmose avec la Mère. Un périple hautement symbolique. le tissage taïwanais, en filigrane : Osho qui, ici, est le détonateur des épreuves salvatrices pour un narrateur intriguant, tourmenté, mais formidablement maître de lui-même. Un livre rare au courage éditorial hors norme, tant il est un pas de côté original. Traduit à la perfection du chinois et doté d'une postface par Emmanuelle Péchenart. Publié par les majeures Éditions Marie Barbier.
Commenter  J’apprécie          30

Citations et extraits (4) Ajouter une citation
Les oiseaux qui pépient dès l'aurore dans les bambous épineux m'ont tiré du sommeil, je traînais au lit, le soleil de midi qui frappait la terre de la cour a fini par m'inonder de sa chaleur. Prostré sous l'ardeur printanière dans mon siège de rotin, je mastique à lentes bouchées mes pieds de porc au vermicelle. Les récits des voyageurs d'autrefois le disent: en mars, quand le printemps s'éveille, la fleur est encore en bouton, la feuille a déjà tant poussé, dans l'herbe drue le coeur s'affole, alors mieux vaut rester chez soi à mastiquer ses pieds de porc au vermicelle.
Commenter  J’apprécie          40
(...) personne ne dit un mot ni ne questionne, mais tout le monde s'étonne: même les morceaux de cercueil ont pourri, voilà qui répond vraiment à cette phrase des anciens, «tout sera réduit en poussière». Pour soulager mes yeux, si concentrés qu'ils me brûlent, j'observe au loin les rayons du soleil qui se brisent sur l'eau profonde de la rivière - serait-ce que notre mère, lassée d'attendre, a déménagé?
Commenter  J’apprécie          30
Toute la nuit, assis sous l'auvent dans la cour, j'attends que la pleine lune pénètre dans ce vallon au milieu deg buildings. Sa lumière inonde aussi l'arche sur la tombe de maman. Dans la rumeur qui monte des rues commerçantes, j'écoute le reflux du vent à la pointe des herbes du tombeau.
Commenter  J’apprécie          20
Avec trente mille yuans, on n'achètera pas la moitié d'un emplacement à la pagode de l'Assemblée Vaste comme la Mer de la Rivière des Bambous. Autant déposer l'urne à mon chevet, maman mangera ce que je mangerai et si je me rends dans l'Antarctique, elle m'y suivra.
Commenter  J’apprécie          10

autres livres classés : romanVoir plus
Les plus populaires : Littérature étrangère Voir plus

Autres livres de Wuhe (1) Voir plus

Lecteurs (4) Voir plus



Quiz Voir plus

Quiz Harry Potter (difficile:1-7)

De quoi la famille Dursley a-t'elle le plus peur?

des voisins curieux
des hiboux
de Harry
de tout ce qui peut les faire paraître étranges

20 questions
8165 lecteurs ont répondu
Créer un quiz sur ce livre

{* *}