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Mathilde Tamae-Bouhon (Traducteur)
EAN : 9782264083982
216 pages
10-18 (01/02/2024)
3.25/5   66 notes
Résumé :
Puisqu’elle est la seule femme de son équipe, c’est Mme Shibata, une jeune trentenaire diplômée, qui hérite des tâches quotidiennes les plus ingrates. Faire le café, ranger la salle de réunion, laver les tasses sales de tous ses homologues masculins… Mais un jour, dans un accès de rébellion non prémédité, elle refuse. L’odeur d’un mégot se consumant au fond d’une énième tasse de café lui donne la nausée. Du fait de sa grossesse, annonce-t-elle. Seule ombre au tablea... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (21) Voir plus Ajouter une critique
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Emi Yagi livre avec Journal d'un vide son premier roman, paru en 2020 au Japon, et qui a reçu le prix Osamu Dazai.

L'intrigue repose sur un mensonge lâché par la narratrice Mademoiselle Shibata au sein de son entreprise. En ayant marre que ses collègues masculins la laisse systématiquement faire le café et débarrasser en cas de réunion ou de réception de clients, elle affirme subitement qu'elle est enceinte, ce qui va lui permettre d'obtenir des conditions de travail aménagées et les égards, gentils mais passablement intrusifs et maladroits de son collègue masculin Higashinakano.

Pour le coup, si c'était prémédité, c'est un peu sorti tout seul, et Shibata va devoir assumer le mensonge au fil des jours, alors que son ventre n'est pas censé s'arrondir. Alors elle mange beaucoup, et comme il faut jouer le rôle au plus près de la réalité, elle se documente en téléchargeant une appli spécialisée qui va lui permettre de vivre sa grossesse. Elle aura notamment accès à des séances d'aérobic où elle sympathise avec de jeunes femmes dans le même état de grossesse, puis un congé maternité. Si elle grossit peu pendant très longtemps, l'échographie qu'elle passe montre bien apparemment un foetus, qui ne se gêne du reste pas pour taper du pied, dans un ventre qui finit par s'arrondir sérieusement. Pourtant on comprend qu'au terme de « l'accouchement », il lui faudra continuer d'esquiver le sujet délicat de ce bébé et s'arranger pour ne pas avoir à le présenter à ses collègues.

Le roman présente pour point fort de nous plonger dans la société japonaise et ses travers en termes de condition de la femme. Elles sont trop souvent contraintes à des tâches peu intéressantes en entreprise, quand elles ont un cdi, et doivent tout faire au foyer, en particulier s'occuper seules du ou des enfants. L'auteure en est fortement agacée, qui en profite pour bien le faire savoir à travers les paroles des amies de Shibata.

Pour le reste, l'histoire tient difficilement debout. L'auteure maintient une ambiguïté sur la réalité de la grossesse dans une grande confusion. J'avoue que s'il n'y avait pas cette échographie qui semble bien montrer un bébé, je livrerai volontiers une explication, avancée par personne dans les critiques des lecteurs qui m'ont précédé : et si tout cela était le fruit d'une grossesse nerveuse ?

Car notre héroïne, c'est entendu, est seule et bien seule, pas de copain, pas de relations sexuelles semble-t-il, elle ne peut pas être réellement enceinte. le passage de l'échographie est donc absurde, l'auteure s'est ratée. Mais s'il eut été plus crédible de sortir un copain de derrière les fagots, le mystère aurait été dissipé et l'histoire n'avait plus aucun intérêt…Du coup, on reste dans un flou, pas très satisfaisant.

J'avoue qu'en tant qu'homme, le déroulé page après page de l'état de grossesse et ce qui va avec ne m'a pas spécialement passionné. En outre, Emi Yagi, comme nombre des écrivaines de la nouvelle génération littéraire japonaise, a la manie du détail dans sa narration. Quel est l'intérêt de noircir des pages et des pages décrivant ce qu'elle décider de s'acheter à manger, ou les courses qu'elle fait ou je ne sais quoi ? Ces éléments n'apportent rien pour saisir la personnalité de Shibata, pas plus que pour l'intrigue. A la place, on aurait préféré davantage d'expression de ses sentiments. Elle ne montre même pas de surprise de se voir réellement enceinte (mais bon justement, l'est-elle vraiment ?!).

Alors oui, la grossesse nerveuse, pourquoi pas ? En tout cas une grossesse vraiment fabriquée par un esprit un peu dépressif ? Elle se sent peut-être seule, la communication avec ses parents est assez difficile et impersonnelle, elle ne leur confie d'ailleurs pas son secret. Elle est déjà trentenaire, pas mariée, pas de copain, c'est assez mal vu au Japon. Sans compter, donc, un boulot qui peut ne pas la passionner.

Et si le vide, c'était d'abord un vide de l'esprit plus que du ventre, l'expression d'une solitude intérieure, un malaise que Shibata va tenter de combattre en s'inventant une vie, une vie de femme « normale », dans un pays où la conformité à la norme est très souhaitable ? C'est une hypothèse, à laquelle je me suis raccroché pour trouver un peu de consistance et de crédibilité à cette fable féministe.
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Madame Shibata étant la seule femme à travailler au sein de son service, c'est donc à elle qui reviennent systématiquement les tâches comme la préparation du café pour pour l'étage ou le nettoyage de la cuisine.
Lasse de cette injustice, elle va prétendre être enceinte pour y échapper.
Nous allons donc suivre l'évolution de sa fausse grossesse au fil des mois.
J'aimais beaucoup l'idée mais concrètement, je me suis un peu ennuyée par moment, car on ne sait plus trop ce qui est réel ou ne l'est pas.
Pour ceux qui ne connaissent pas trop la vie au Japon, vous pourrez découvrir que le travail y a une importance capitale et que les conditions de vie des femmes sont loin d'être idéales, même avec de bons diplômes, elles n'obtiennent que rarement des postes hauts placés et dès qu'elles se marient, elles sont censées démissionner afin de prendre soin de leur enfant, leur avenir passe donc surtout par la famille.
J'ai trouvé que la fin était assez abrupte et manquait de piquant, avec un tel sujet, je m'attendais à une surprise finale, il n'en est rien et j'ai été déçue.
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Journal d'un vide est un roman surprenant, critique et tellement drôle.
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Madame Shibata travaille dans une entreprise japonaise où il n'y a que des hommes dans son service. Elle est donc naturellement la préposée au café, au service, et au nettoyage. Un jour, quand son patron s'indigne à voix haute que les tasses de café soient toujours visibles dans l'espace de travail, en ne pointant du doigt personne, mais en attendant clairement que Madame Shibata lève la tête de son poste de travail, Madame Shibata sent que le vase est sur le point de déborder. Un collègue s'approche d'elle pour lui donner des tasses de café à débarrasser et c'est alors qu'elle lui annonce qu'elle ne peut plus s'en occuper à partir de maintenant car les odeurs de café et de cigarettes lui donnent la nausée. Et oui, Madame Shibata est enceinte. Enfin, pas vraiment. Oui, avec ce petit mensonge, elle voit son quotidien changer totalement. Elle découvre les horaires aménagés, les applications pour gérer sa grossesse, la curiosité souvent mal placée de ses collègues, le fitness pour femme enceinte et elle réapprend à prendre du temps pour elle.
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Dans ce roman, on découvre à quel point Madame Shibata n'avait plus de vie, plus d'horaire de travail décente, sa vie était son travail et en se servant de ce mensonge pour ne plus faire certaines tâches, elle a redécouvert les joies d'avoir une vie privée, de rentrer à l'heure, de revoir ses amis, et de juste profiter de la vie. Elle découvre aussi le monde de la maternité, comment certaines femmes vivent leur grossesse, comment les maris sont présents ou non, comment certaines entreprises ou collègues peuvent s'immiscer dans le moindre détail de la grossesse. Et puis au fur et à mesure que sa grossesse fictive progresse, la frontière entre le réel et le mensonge devient flou et on se pose sans cesse cette question : et si Madame Shibata était vraiment enceinte ?
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Tout le récit oscille entre humour et critique de la société, entre mensonge et pure réalité. C'est un récit frais, original et surtout déstabilisant.
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Un gros coup de coeur
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Quelle idée de tomber enceinte alors que l'on a un bon job et que l'on est célibataire ?

C'est pourtant ce que décide la narratrice un beau jour : elle est enceinte.

J'ai aimé son oeil acéré sur les comportements de ses collègues de bureau : seule femme, elle est chargée de servir le café, débarrasser et nettoyer, distribuer les cadeaux.

J'ai aimé son collègue de bureau, Higashinakano, au petit soin dès l'annonce de la grossesse. On apprendra plus tard pourquoi, ce qui m'a touché.

J'ai aimé l'appli de grossesse qu'utilise Mme Shibata, la narratrice : elle y note ce qu'elle fait, ses prises de poids, etc…

J'ai adoré ses cours d'aérobique pré-natal, ses amies qu'elle écoute pour glaner des informations.

J'ai aimé avoir parfois un doute sur sa grossesse : enceinte, ou pas ?

J'ai aimé que Mme Shibata travaille dans une entreprise qui fabrique des tubes en carton pleins de vide, eux aussi.

Un roman sur le monde du travail japonais qui, si il offre de beaux aménagements de travail (finir plus tôt, congés longs), considère les femmes comme des servantes dans les murs de l'entreprise.

Une citation :

« Hé, le café », me lançait-on alors que je vaquais à mes occupations. Or, je ne suis pas un café non plus. (p.62)

L'image que je retiendrai :

Celle de la jeune femme en doudoune rouge que croise Mme Shibata un soir par hasard, et qu'elle reverra plus tard.
Lien : https://alexmotamots.fr/jour..
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Mme Shibata, seule femme de son équipe, occupe un poste à responsabilités mais doit se coltiner tout ce que ses homologues masculins considèrent comme lui revenant d'office: à savoir nettoyer, ranger derrière eux. Un jour, tout à trac, cette jeune trentenaire annonce qu'elle est enceinte. Cela va aussitôt changer la donne et la libérer de pas mal de charge mentale.
Par ce mensonge, elle entre dans un nouvel univers: celui des femmes enceintes, sorte de tribu qui se promène avec un porte-clés annonçant leur état, se livre à une débauche de sueur dans des cours d'aérobic survoltés...
Le récit bascule encore une fois brutalement quand un nouveau fait important est annoncé au détour d'une phrase (ne pas lire la quatrième de couv' qui en dit beaucoup trop) et change totalement la perception du lecteur. Nous naviguons ainsi,à vue, entre rêve et réalité, dans ce roman à charge contre la société patriarcale japonaise que l'héroïne va dénoncer avec une fausse candeur à la toute fin du roman, juste avant une ultime pirouette... Un roman déstabilisant mais jubilatoire. Une réussite.

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critiques presse (1)
Marianne_
27 février 2023
Voilà un récit qu’aucun homme n’aurait écrit. Un récit absolument féminin, et en même temps universel sur les souffrances de l’accouchement d’une œuvre. Une absolue réussite.
Lire la critique sur le site : Marianne_
Citations et extraits (3) Ajouter une citation
Tous les employés restaient de longues heures au bureau. Chaque réunion était le prétexte à rassembler l’ensemble du personnel dans une salle pour y écouter les supérieurs répéter inlassablement les mêmes discours, idées et griefs, plusieurs fois par jour ; la moindre dépense devait être justifiée en détail auprès du chef de section, puis reformulée à l’intention du directeur de département, avant d’être finalement présentée sous la forme d’une épaisse liasse qu’il fallait distribuer, Dieu sait pourquoi, à chaque membre de l’équipe. Nous n’avions ni le temps ni l’énergie de réfléchir au sens de nos actions, encore moins de poser des questions
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Je suis enceinte. L'odeur de café me donne la nausée. Et la cigarette, n'en parlons pas... D'ailleurs, il est interdit de fumer dans l'immeuble, non ? Voilà comment je suis tombée enceinte.
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Me voilà de retour, entre rêve et réalité.
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