Depuis 2017, je me dis : "Cette année, je sors une critique sur cet album pour Pâques !" Quatre années plus tard, je m'y mets seulement. Si vous pensiez que personne ne pouvait battre Hamlet en matière de procrastination, vous vous devez désormais de reconnaître que je suis bien meilleure que lui à ce petit jeu.
Il existe deux éditions à ma connaissance de cet album : l'un en format rectangulaire, l'autre en forme... d'oeuf. Je recommande le second, vu que c'est pas tous les jours que vous vous retrouvez avec un livre en forme d'oeuf ; cependant, un avertissement s'impose : l'album-oeuf est moins maniable et plus fragile. Bon, si j'étais un enfant, je m'en foutrais et je voudrais absolument celui en forme d'oeuf si j'avais le choix (j'imagine la déception de l'enfant qui possède l'album rectangulaire découvrant qu'un pote a celui en forme d'oeuf...)
Ne nous emballons pas, cependant ! L'histoire est sympa, les dessins colorés, mignons, mais la forme du livre-oeuf est un rien trompeuse. Pour le coup, ça n'est pas aussi original qu'on s'y attendrait. Sur le mode du conte traditionnel, on nous narre l'histoire d'une poule qui a pondu son premier oeuf et qui court le montrer... à qui, c'est toute la question. On apprend vite qu'elle va à la fête des oeufs, bien qu'il faille attendre la fin pour comprendre quel est l'enjeu : et il est de taille !
Voilà donc notre poule, appelée Poulette (oui, bon, elle aurait pu avoir un nom plus... moins... vous m'avez comprise), qui court tout excitée avec son oeuf. Et ne voilà-t-il pas qu'elle va le faire tomber dans la boue. Ce sont des choses qui arrivent. Oui, mais ensuite elle se remet à courir et elle le fait encore tomber. Et ainsi de suite, encore et encore. Cet oeuf est particulièrement solide, dirait-on ! Vous avez compris le principe, l'oeuf tombe, il est sali, encore plus sali, et encore davantage, et tous les animaux qui se mêlent de ce qui ne les regarde pas viennent pourrir la joie de Poulette pour lui dire que son oeuf est tout pourri et qu'elle ferait mieux de rentrer chez elle. Sauf que...
Je note au passage que parmi les animaux pénibles se trouve un rossignol, et que j'ai découvert que je confondais depuis toujours les rossignols et les rouges-gorges - précisons que le rossignol d'
Amélie Dufour est difficilement identifiable comme tel, ce qui pourrait constituer une excuse au fait que je n'aie pas su reconnaître un rossignol dans l'album, mais qui n'explique certainement pas le fait que je n'ai pas été fichue de savoir à quoi ressemblait un rossignol pendant des dizaines d'années (à cinq ans, j'étais pardonnable, à presque cinquante, beaucoup moins).
Passons. C'est un album sympathique, qui incite les enfants à se montrer créatifs et à ne pas se laisser décourager par les fâcheux qui leur disent que non, c'est pas comme ça qu'on fait, que ce qu'ils font c'est trop trop moche, trop pas bien, qu'il faut suivre telles règles, que c'est comme ci et comme ça qu'on fait un truc joli, etc., etc. Dommage que l'auteur du texte ne se soit pas davantage lâché, le sujet valait la peine, justement, de sortir des clous.
Et puis le truc qui fâche, c'est de voir sous le joli dessin final : "Imprimé en Chine", etc., etc. Déjà, c'est moche et ça aurait pu être imprimé sur la page suivante. Surtout, ça m'insupporte de voir que Flammarion ne fait pas appel à des imprimeurs locaux et que le papier n'est pas issu de forêts gérées durablement. Il y a un moment où il faut arrêter de se comporter de manière irresponsable, et ce moment est arrivé de puis longtemps déjà, faut-il le rappeler ? On dirait bien que oui.