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sur 2136 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Si un soir de réveillon, après avoir abusé de boisson, vous vous trouvez pris par "l'Amok", je vous souhaite de ne jamais vivre ce qu'a vécu le héros de cette terrible nouvelle.
J'ai eu l'amok, j'ai couru comme une folle au fil des pages, enchainant les feuillets comme l'on enchaine les kilomètres, avec l'angoisse montante et oppressante que sait nous insuffler Zweig.

Je ne me suis pas identifiée à ce médecin, mais j'ai tout ressenti, une fois de plus avec ce style précis qui fait mouche, qui me touche, et me laisse une fois de plus
l'âme KO, à défaut de l'âm'OK !

Je ne résumerai pas l'histoire, d'autres l'ont fait, mais je poursuis ma découverte de cet auteur sublime qui fait se déployer sous nos yeux les tourments de l'humain et sonder les travers des labyrinthes intérieurs avec la précision d'un horloger...
…en parlant d'horloge, je vous dis à tous à l'année prochaine, même si de l'autre côté du globe certains y êtes déjà !
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Sexe latent.
Zweig écrivait aussi bien qu'il portait la cravate. Toujours tiré à quatre épingles, pas de mèche folle, ce n'était pas le genre à offrir le sourire du plombier quand il se penchait pour ramasser un feuillet égaré. Avec lui, il n'y avait pas une virgule qui dépassait et il avait la ponctuation d'un homme qui rechignait à l'apostrophe.
Dans la famille des personnages suicidés, issue tellement récurrente qu'elle lui inspira sa propre fin, Amok est un récit digne d'une séance freudienne. Un voyageur rencontre sur un bateau qui rejoint l'Europe depuis Calcutta, un docteur taciturne. A défaut d'un psy à bord ou d'un curé de voyage pour se faire faire tout pardonner, l'homme va lui raconter une passion qui a dévoré son âme et sa raison.
Le docteur s'était retrouvé en Asie, non en raison d'une passion pour les colonies ou le soleil mais à cause d'une incartade amoureuse peu glorieuse en Allemagne. Affecté dans un bled isolé, la solitude tropicale le faisait dépérir jusqu'au jour où une belle anglaise un brin arrogante, bourgeoise dominatrice, Jane Austen à fouet, vient le voir de façon clandestine pour qu'il lui retire un passager clandestin. le mari, parti pour affaires quelques mois plutôt, devait rentrer au bercail et même avec un niveau CE1 en calcul, il aurait douté d'une immaculée conception. Pas charpentier, le bonhomme.
La rencontre se passe mal et la jeune femme, ne voulant rogner sur sa dignité, s'en va, toujours enceinte. Epris d'un amour obsessionnel, le docteur va la poursuivre dans la bonne société pour la convaincre de le laisser l'aider.
Et l'Amok dans tout cela ? Et bien, ce n'est ni une pâtisserie locale, ni une MST honteuse, mais une forme de folie homicide observée en Malaisie, fruit pathologique de frustrations et d'humiliations. En Inde, le terme était utilisé par les anglais pour décrire les éléphants incontrôlables qui s'essuyaient les pattes sur le quidam.
Je lis Zweig comme je rends visite à une vieille tante, quand j'ai besoin d'un peu de nostalgie et de vieux gâteaux secs. C'est fin, élégant, très sage et tellement bien construit. Chez lui, même les névroses sont bien peignées. Il voile les vices derrière l'inconscient, souffle la bougie avant de décrire les pulsions animales.
Amok me semble être une bonne porte d'entrée à l'oeuvre de Zweig. Par ici, la sortie.





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J'ai beau adorer lire, et ce depuis l'enfance, j'ai de grosses lacunes, je le confesse. La faute en revient sans doute en grande partie à de mauvais professeurs (ou des professeurs découragés) qui m'ont donné envie de fuir les grands noms classiques pour aller me réfugier chez King, Barker et consorts. Je n'avais jamais lu Zweig et j'avoue que c'est en moonwalk que je me suis lancée dans la lecture d'Amok qui devait me permettre de remplir la lettre Z du challenge ABC. C'est tout l'intérêt de ces challenges, nous pousser à plus de curiosité, nous inciter à dépasser nos a priori.

A priori qui, dans le cas d'Amok, ont été complètement balayés. Je craignais de m'ennuyer. Il n'en est rien. J'ai été bluffée par le sens de la narration de l'auteur. Les récits sont parfaitement menés, ce sont des modèles de construction narratives.
L'écriture est superbe. L'intrigue de "la ruelle au clair de lune" m'a un peu moins emballée que le très bon "Amok" ou la sublime "lettre d'une inconnue" mais là aussi j'ai été séduite par le style. C'est tellement bien écrit ! Et les personnages sont si finement ciselés...
Outre la construction narrative et le style parfait de l'auteur, les 3 récits du recueil brillent par leur profondeur psychologique. Dans ces histoires, Zweig dissèque les affres de la passion. Ici, il n'est pas question d'amour simple et tranquille, l'amour n'apporte pas la paix. Au contraire, c'est un sentiment violent où se mêlent humiliation et souffrance, et qui peut conduire à la folie.

J'ai été totalement séduite par ce recueil de nouvelles. J'ai été emballée par le style de l'auteur et son romanesque incandescent. Il ne fait aucun doute que je lirai d'autres oeuvres de Zweig.

Challenge ABC 2016-2017 - 11/26
Challenge 14-68 entre 2 points de bascule - 1
Challenge Petits plaisirs 2016 - 51
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Au début du siècle dernier, le narrateur reçoit les confidences d'un homme qui a embarqué sur le même bateau. Ce médecin, personnage assez médiocre, fait face à une demande inhabituelle d'une jeune femme. Enceinte, pas de son mari puisqu'il est absent depuis plusieurs mois, elle requiert son aide. Agacé, énervé sans doute par l'attitude de la jeune femme, il lui fait une proposition inacceptable. Les conséquences seront dramatiques, mais tous deux se révéleront d'une force de caractère peu commune, prêts à tout sacrifier pour ce qui leur est essentiel. Alors, certes, notre médecin aura un comportement plutôt incohérent, faute à l'amok (comportement meurtrier) nous dit le titre. Je n'en suis pas si certaine, ou du moins, ce n'est pas ainsi que je l'ai perçu.


Lettre d'une inconnue

Un homme reçoit une lettre d'une femme qui lui révèle avoir vécu dans son ombre, dès ses treize ans. Cette nouvelle gravit un cran dans la cruauté, à moins qu'elle ne soit difficilement compréhensible aujourd'hui. Faut-il y voir le sommet de l'amour romantique, celui d'une femme qui consacre sa vie à un seul être, qui — elle le répète assez — ne l'a jamais connue ou l'acte cruel d'une victime d'un amour maladif ? L'histoire est dérangeante, trouble aussi, malgré le bouquet de roses, symbole d'une vie qui se termine.

La ruelle au clair de lune
Notre narrateur est obligé de faire escale dans un petit port français. Il s'égare dans les ruelles. Attiré par une chanson en allemand, il entre dans un établissement où il rencontre une prostituée dont l'histoire va être racontée par un inconnu, pauvre diable, éternellement amoureux de cette femme. Folie et fatalité sont également au rendez-vous.

Lien : https://dequoilire.com/amok-..
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Amok ou quand la rage tue!
Stefan Zweig, poète, essayiste, dramaturge et romancier, est connu entre autres pour sa foi inaltérable dans les sentiments les plus profonds et les plus intenses de l'humanité.

Comme à son habitude l'auteur autrichien peut passer de la hâte furieuse à la tiédeur ennuyeuse en un éclair.

Dans cette nouvelle, grave et tourmentée, la narration revêt un sentiment d'urgence avec un rythme d'une grande vivacité et d'une profondeur malaisante.
Par moments semblables à des rêveries, les mots nous attrapent en nous fauchant en simultané avec le personnage, nous polluant d'une inquiétude poisseuse qui nous permet de partager et de ressentir son malaise.

Ces 63 pages se transforment en une sorte de descente en montagne russe avec des creux et des pics de variation inattendues.
On a envie de secouer ce personnage qu'on juge, prématurément, trop fataliste, trop mou, trop perturbé, ainsi que sa façon de subir les événements dans un état de prostration extatique insupportable.

Tiré du malais "amuk", le terme "amok" désigne, dans l'ensemble du «monde malais» une rage meurtrière incontrôlable. Selon la tradition, c'est la réaction d'un homme humilié en public qui, pour prouver sa virilité et soigner son orgueil meurtri, se lance dans une tuerie de masse sans discrimination qui prend parfois la forme de meurtre-suicide.

L'auteur autrichien nous prend en otage d'un épisode de l'amok: un manque de contrôle, une impulsivité, un trouble dissociatif ou une psychose suivis d'une crise de violence et d'une sorte de décompensation extrême.

Stefan Zweig nous communique encore sa passion de connaître et sa curiosité jamais apaisée qui ont fait de lui un fin observateur des hommes et de leurs émotions.

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J'aimerais pouvoir parler de ces hommes atteints de folie meurtrière, de ces hommes à la désespérance telle qu'ils en arrivent à tuer des inconnus et même leurs proches, de ces hommes ne supportant pas l'humiliation et qui d'un brusque désir de vengeance anéantissent tout ce qui fut leur vie.
Quand la passion atteint son paroxysme et que plus rien ne peut retenir la main fanatique et dévastatrice.

Difficile de parler de ces hommes, auteurs d'acte infâme, monstrueux, barbare...sans ressentir de l'aversion, et même parfois de la haine.

Quoiqu'il en soit l'incompréhension règne. Et les mots deviennent bien futiles et vains.
Si ce ne sont ...les mots de Zweig.

L'Amok, c'est ça. "C'est plus que de l'ivresse...c'est de la folie, une sorte de rage humaine...une crise de monomanie meurtrière et insensée, à laquelle aucune intoxication alcoolique ne peut se comparer." Ainsi parle de cette folie meurtrière un médecin ayant exercé en Malaisie, personnage de cette nouvelle de Zweig.
L'amok, c'est cet accès de rage qui provoque chez certains malais une course effrénée au cours de laquelle ils tueront tout ce qui se trouve sur leur passage.
Zweig s'appuie sur ce phénomène pour écrire "Amok ou le fou de Malaisie" avec toute la subtilité et le talent qu'on lui connaît. Subtile évocation de ces sentiments qui submergent, qui rendent fou, qui dépassent l'entendement au plus haut point et qui poussent l'individu tourmenté vers l'irrationnel, vers l'insensé.

Zweig est incontestablement le maître quand il s'agit de plonger le lecteur au coeur de "ce monde souterrain des passions" et c'est, avec bien sûr une certaine appréhension à chaque fois, qu'on le suit fébrilement et qu'on écoute docilement ses mots :
" Surgissez de vos ténèbres crépusculaires,
Et n'ayez pas honte des tourments qui vous plongent dans l'ombre ! "

Sage conseil et bien avisé sans nul doute, que je me permets de généraliser. N'est ce pas en prenant à bras le corps ces tourments inconscients et en les partageant qu'on peut espérer retrouver la lumière ?

Petite pensée émue pour cet auteur épatant qui je l'espère a finalement retrouvé la lumière...

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Amok, c'est une partie de billard à trois bandes : l'honneur, la fierté, le devoir, contre lesquelles vient rebondir la boule de la passion dans sa course folle et précipitée. Quand Stephan Sweig donne l'impulsion, cela devient un subtil chassé-croisé de regards qui contiennent toutes les peurs, tous les désirs.

Elle est orgueilleuse et froide. Il est envoûté, survolté, déstabilisé. Sa complexion féminine souveraine et méprisante rallume chez lui des ambitions éteintes, y compris celles de provoquer, de posséder l'inaccessible. Ils vont se jeter l'un contre l'autre dans un affrontement par contumace, une course contre la montre, un dangereux crescendo endiablé dans lequel la passion se heurte à l'humiliation, la colère, la jalousie, l'obstination. Pour finalement se rejoindre dans le serment du secret à défendre.

La beauté est dans la détermination qu'elle n'a jamais perdue. Que lui se découvre. La beauté est dans la consolation du rival honni puis magnifié. La beauté est dans le texte, souple et puissant à la fois. La beauté est dans cette mécanique infernale qui emporte le lecteur et ne le lâche plus jusqu'à …
… jusqu'à la confidence salvatrice dans l'oreille d'un inconnu, la fuite sur un bateau qui extirpe notre héros sans nom de la sujétion, l'éloigne de la vengeance. Mais surement pas la mâchoire du remord.

C'est beau et bien fait. C'est du Stefan Zweig.
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Zweig est l'un de mes auteurs préférés, l'un de ceux qui a su le mieux écrire l'amour, le sentiment amoureux et la souffrance d'aimer.
Dans ce recueil de trois nouvelles, il exprime le lien de l'amour et de la folie, avec tendresse, passion et absolu. Comme souvent, le texte est à la hauteur des sentiments, les mots glissent comme des caresses, sont bruts comme des gifles et doux comme des baisers.
C'est un vrai plaisir de lire Zweig, on n'est jamais déçu.
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Dans cet entre-deux-mondes que constitue un voyage en bateau, tout devient possible, y compris les aveux d'un inconnu à un autre inconnu, le narrateur, témoin attentif d'une hallucinante confession.

Et cet inconnu, médecin de son état, n'hésite pas un instant à se mettre à nu en dévoilant, non, en crachant sa folie, son "amok", cette fureur insensée qui l'a saisi, le transformant soudainement en possédé, hors de lui et capable de n'importe quoi !
Et pourquoi donc, ou plutôt pour qui donc, cette folie ? Une femme, bien sûr, une femme hautaine, méprisante, trop sûre d'elle, qui vient demander un service au médecin, et que le narrateur par orgueil veut soumettre à sa volonté..... le propulsant ainsi dans une fuite en avant inexorable.

Et dans cette fuite, il entraîne le lecteur avec lui.
Car oui, Stefan Zweig possède au plus haut degré le talent d'enchaîner le lecteur.
Un talent tel qu'on ne peut que le suivre dans les méandres de ce récit enfiévré, torturé, comme d'habitude chez lui remarquablement construit, et toujours avec la même économie de moyens, mais une économie qui n'est pas pingrerie, mais plutôt l'aboutissement d'un art consommé du récit fluide où chaque mot paraît scrupuleusement choisi, chaque phrase ardemment composée pour exprimer l'intensité d'une irrésistible passion.

"Alors prends feu ! Seulement si tu t'enflammes,
Tu connaîtras le monde au plus profond de toi !
Car, au lieu seul où agit le secret, commence aussi la vie."
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J'ai lu il y a plusieurs années le fameux et excellent ''Joueur d'échecs'' de cet auteur dont plusieurs font grand cas. J'étais curieux depuis de lire autre chose de lui, et c'est maintenant chose faite. En français, ''Amok'' est à l'origine un recueil de 3 nouvelles : ''Amok'', ''Lettre d'une inconnue'' et ''La ruelle au clair de lune''. (Ce n'est plus toujours vrai avec la flopée d'éditions et de traductions récentes). J'y ai retrouvé l'écriture magnifique de S. Zweig, et ce dès l'introduction de la nouvelle titre, ainsi que son intensité. ''Amok'', dont la signification de ce mot qui m'était inconnue s'est avérée très intéressante, est celle qui a ma préférence. Elle raconte la folie qui s'empare d'un médecin dans une colonie malaise et les désastreuses conséquences d'une rencontre fortuite. Les 2 autres étaient également très bien, les thèmes étant seulement moins palpitants. 3 histoires décidément tragiques qui m'ont confirmé le talent de l'auteur.
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