Livre assez bref (200 pages environ) et de bonne facture, qui se lit agréablement. Même si l'avertissement du prologue "Je ne suis pas un espion. Je suis un ingénieur, prestataire technique, ... j'ai essentiellement travaillé auprès ... et du contre-espionnage, c'est-à-dire pour tenter d'empêcher des ingérences étrangères .... Je me suis donc mis au service d'une posture défensive" méritait d'être mis plus en avant.
C'est un parcours de vie. Qui commence dans un environnement qui n'existe plus, immersion au service d'un état souverain semblant directement inspirée de littérature épique que l'auteur nomme lui-même "âge d'or".
Puis vient le temps de la reprise en main de ses affidés par la maison mère, la "repolarisation" du monde. le président Bush le martèle : «Si vous n'êtes pas avec nous, alors vous êtes contre nous».
C'est celui de la surveillance généralisée, avec quelques grands noms bien connus de ceux qui s'intéressent à l'évolution de notre société, comme "Palantir".
De 2006 et 2020, la doctrine étasunienne post-11-Septembre est de plus en plus suivie et les services de renseignement s'équipent d'outils pour traiter des masses de données… souvent auprès de sociétés.... étasuniennes.
Il côtoie ensuite "Amesys", société connue pour son intercepteur Internet qui capte tous les flux sans distinction, pour ensuite proposer à qui le souhaite une recherche par mots-clés. En résumé, un "Echelon" pour Internet.
Et puis bien sûr le logiciel "Pégasus" de la société israélienne "NSO" qui reste pour l'instant la référence connue de du grand public en terme de surveillance tous azimuts. Une fois installé sur les téléphones, il permet d'en prendre totalement le contrôle : caméra, micro, fichiers, saisies sur le clavier, conversations téléphoniques, mails… plus rien n'a de secret pour celui qui le manipule. Il croise d'ailleurs M. Jamal Khashoggi qui n'y a pas coupé.
Il y a quelques points "mystérieux" que je soupçonne de ne pas être volontairement développés par l'auteur, comme cette livraison de logiciel pare-feu en Inde via Dubaï, mais vu le sujet, cela n'est pas très étonnant.
On arrive en fin d'ouvrage avec la conviction que les temps ont changé et que les outils sont maintenant tellement efficaces en termes de surveillance qu'il n'y aura bientôt plus aucun aspect de notre vie privée qui pourra échapper au regard de ceux qui possèdent ces outils. Qu'on est passé doucement mais sûrement de la recherche post-évènement d'un coupable à celle potentielle d'un éventuel futur problème ou d'une gestion préventive.
On peut être surpris là encore du peu de prise de conscience du grand public et donc du peu de débat démocratique autour de ces sujets pourtant au centre du fonctionnement de nos sociétés.
C'est le sens du message d'alerte délivré par l'auteur.
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La population mondiale quant à elle ne mesure pas la gravité du phénomène. Au fil des années, je ressentais de manière diffuse que les méthodes avaient radicalement changé depuis mon début d’activité, en 1997. Je sentais que ce changement se faisait au détriment du bien-être des citoyens, et que nous devions à tout prix imprimer un point d’inflexion à ce mouvement. J’aperçois maintenant une silhouette se dessiner, celle d’une société qui tend, de manière quasi irrémédiable, à un contrôle de la masse des populations par une minorité de plus en plus étroite.
Ingénieur télécom de formation, Guilhem Giraud est spécialisé dans les écoutes et la surveillance. Il a travaillé à la DST avant de se mettre à son compte. En réalisant une mission de conseil pour une pétromonarchie en 2016, il se retrouve confronté au logiciel Pegasus. Il s'indigne contre cet outil qui permet de surveiller n'importe qui. Et si des États l'ont utilisé, des groupes criminels peuvent aussi le faire. Un mode de fonctionnement qui, selon lui, peut mettre en cause les démocraties.