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EAN : 9782809813777
280 pages
L'Archipel (08/01/2014)
4.25/5   2 notes
Résumé :

Partout dans le monde musulman, l'ordre islamiste menace ou triomphe, qu'il s'impose par les urnes (Tunisie, Égypte), la terreur (Irak), la fraude (Iran), ou qu'il cherche à s'imposer par les armes (Mali, Syrie, Pakistan).

Cet ordre qui se dit « voie » (charia) et voix d'Allah viole pourtant sans état d'âme les droits humains, la liberté de mouvement, de parole, de pensée. Dans certains cas, les êtres qui lui sont soumis ne disposent plus que ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Martine Gozlan grand reporter, spécialiste reconnue du Maghreb et du Moyen-Orient.
Dans ce monde islamique, que la plupart d'entre nous connaissent mal ; il n'est qu'à demander au premier quidam français venu ce que sont le chiisme, le sunnisme, le salafisme, le soufisme, le wahhabisme... quels pays se revendiquent de l'un ou de l'autre de ces courants religieux pour s'assurer que rares seront ceux qui sauront répondre avec aisance et clarté à ces questions pourtant essentielles à la compréhension de ce qui se passe en Syrie, en Iran, au Pakistan, en Afghanistan, en Tunisie, au Qatar ou encore en Arabie Saoudite.
Beaucoup ont entendu le mot "charia" ou le (la) tristement célèbre "fatwa" sans connaître les ressorts, les mécanismes qui les agitent.
Il en est de même pour un imam, un uléma, un mollah, un ayatollah.
Reste l'islamisme, à l'origine "Ensemble des pays, des régions où l'Islam est la religion dominante, de même que la chrétienté est l'ensemble des pays où le christianisme domine.", devenu dans beaucoup de pays et pour beaucoup de croyants radicaux "un courant de pensée musulman, essentiellement politique, apparu au xxe siècle. L'usage du terme depuis sa réapparition dans la langue française à la fin des années 1970 a beaucoup évolué.
Il peut s'agir, par exemple, du « choix conscient de la doctrine musulmane comme guide pour l'action politique » – dans une acception que ne récusent pas certains islamistes –, ou encore, selon d'autres, d'une « idéologie manipulant l'islam en vue d'un projet politique : transformer le système politique et social d'un État en faisant de la charia, dont l'interprétation univoque est imposée à l'ensemble de la société, l'unique source du droit »
Cet islamisme, nous, contemporains, l'avons croisé le 11 septembre 2001 aux États-Unis, ou en France le 7 janvier 2015 lors de l'attentat contre Charlie Hebdo ou encore le 13 novembre de la même année lors des attentats qui ont ensanglanté la capitale, à Nice le 14 juillet 2016.
Islamisme, de par le monde, est lié à terrorisme, prises d'otages, attentats, tortures, exécutions.
Il est aussi le mot qui porte en lui l'obscurantisme le plus abject, un mot liberticide - d'abord pour les musulmans -, un mot que je qualifierais de "féminicide".
Le voile, le hijab, le niqab, le burkini, ont fait depuis quelques années leur entrée dans notre vocabulaire courant.
Si l'islam et sa perversion qu'est l'islamisme "radical" sont devenus des phénomènes (géo)-politiques, sociologiques, religieux, culturels et historiques, c'est par l'importance et la place intrusive qu'ils occupent en ce premier quart du XXIème siècle, par les enjeux qu'ils véhiculent, enjeux démultipliés par l'interaction d'un monde globalisé, numérisé, instantané.
Un monde dont la redéfinition en cours de son ordre par des puissances belliqueuses, se fait par des alliances dans lesquelles le monde musulman ( terme générique ) prend avec ou malgré lui une place de tout premier plan.
Les antagonismes ( j'y reviens ) sunnisme versus chiisme ou wahhabisme servant ou desservant selon les circonstances les intérêts des puissances en action dans cette recomposition.
Dans bien de ces pays, sévissent des régimes "d'un autre âge".
Dans bien de ces pays le peuple est grégaire, le plus souvent par ignorance et par imprégnation d'une foi sans "alternative(s)".
Dans bien de ces pays des individualités se lèvent... souvent au prix de leur liberté, quelquefois à celui de leur vie.
Martine Gozlan nous fait faire connaissance ( pour ceux pour lesquels ce n'était pas encore fait ) avec sept de ces "héros", sept de ces voix.
Ce sont celles d'Amina Sboui*, cette jeune fille tunisienne qui a, dans un premier temps, embrassé la cause féministe des Femen, posant seins nus, cigarette entre les doigts, un livre à ses pieds et écrit sur son torse " mon corps m'appartient, il n'est l'honneur de personne " et publiant la photo d'une grande esthétique du photographe Zied Ben Taleb sur sa page Facebook... La photo fait le tour du monde et provoque un séisme en Tunisie.
Séisme que va traverser Amina à travers la "pression" familiale, la prison, les menaces, les procès et...
Le second "héros" est turc. C'est un musicien, l'un des plus célèbres au monde.
Son nom: Fasil Say.
Son pays est de plus en plus sous l'étau, sous le joug islamiste d'un certain Recep Tayyip Erdogan...
Il aurait pu fuir à l'étranger ; il reste et résiste...
Les épreuves vont être au rendez-vous du courage de l'artiste rebelle...
La troisième figure de la liberté se levant contre la tyrannie politico-religieuse a les traits d'un doyen universitaire du nom d'Habib Kazdaghili.
Comme Amina Sboui, lui aussi est tunisien.
Cet historien exerçant à la faculté des lettres, des arts et des humanités de la Manouba près de Tunis, va tenir tête aux salafistes, aux militants et aux chefs d'Ennahda ( parti islamiste arrivé au pouvoir par le biais des élections post-Ben Ali )... au risque de sa vie...
Quatrième personnalité, quatrième insoumis : Waleed Al-Husseini*, universitaire palestinien athée... le seul athée déclaré de Palestine... Waleed va le payer cher... lui aussi au risque de sa vie...
La cinquième héroïne nous est plus familière.
Si je vous dis Malala Yousafzai... vous pensez aussitôt à cette gamine pakistanaise, défendant sur son blog le droit à l'éducation pour tous, dont les talibans avaient mis sa tête à prix, tête qu'ils ont transpercée de deux balles le 9 octobre 2012.
Miraculeusement, Malala a survécu, a trouvé refuge en Angleterre et continue à porter le même message à travers le monde : le droit pour les filles de recevoir la même éducation que les garçons.
Les Talibans affirment ne pas avoir dit leur dernier mot et jurent sur Allah qu'ils ne la rateront pas "la prochaine fois"...
Avant-dernière héroïne, l'avocate iranienne Nasrin Sotoudeh*.
Avocate, combattante inlassable pour la défense du droit dans un régime totalitaire, cette jeune femme admirable, cette épouse et mère de trois enfants a passé trois ans en prison... uniquement parce qu'elle "contrariait" le Régime... trois ans de souffrances, d'humiliations, de privations ponctuées par plusieurs grèves de la faim...
Libérée après ces trois longues années durant lesquelles l'Iran était entre les mains folles et criminelles d'un certain Mahmoud Ahmadinejad ( un pote de Chavez, lequel était un pote d'un "insoumis" français... mais je préfère ne pas en dire davantage ), elle pourra, grâce à l'accession d'Hassan Rohani, un "réformateur", reprendre son métier d'avocate et poursuivre son combat...
La dernière figure est celle d'un jeune homme saoudien, journaliste et blogueur qui, le jour de Moled ( célébration organisée en l'honneur de la naissance du prophète Mahomet ) a posté un petit poème expliquant qu'il ne participerait pas et pourquoi à cette célébration.
Cette "innocente" publication lui a valu la prison assortie du fouet... "heureux" le malheureux qui a échappé à la décapitation pour crime d'apostasie.
Des circonstances liées à l'environnement international et à la soudaine vulnérabilité de l'Arabie sunnite face à son ennemi juré l'Iran chiite favoriseront sa libération...
À travers ces sept incarnations de la rébellion contre la théocratie tyrannique et sanguinaire, Martine Gozlan nous permet non seulement de rendre hommage à la libre-pensée, à la dignité et au courage mais également de revisisiter ces années où fleurirent ce qu'on a appelé les Printemps Arabes... avec les résultats et les conséquences que l'on sait.
Hélas, le livre a été écrit en 2013... ce qu'il contient d'espérance en un futur meilleur a été hélas, pour l'essentiel, démenti.
Un seul reproche à l'auteur : le suremploi ( plus d'une vingtaine de fois en 184 pages ) du verbe embastiller ou de son substantif... Mais peut-être est-ce un choix dé-libéré...
Quelques extraits parlants :
-Le fouet.
"Le condamné est face au mur. On le fouette des épaules jusqu'aux jambes, en quatre temps, à raison de cent cinquante coups chaque fois. Ensuite on le transporte à l'hôpital."
Arabie Saoudite.
Le cheikh Saleh al-Luhaidan, membre du Conseil des ulémas :
"Conduire nuit aux ovaires : la pression pousse le bassin vers le haut... D'ailleurs les enfants des conductrices présentent des troubles cliniques !"
Pour finir, ce quatrain d'Omar Khayyam, poète persan du XIème siècle, redevenu très "à la mode" de nos jours... un homme très sceptique à l'égard des religions.
-"Vous dites que des rivières de vin coulent au paradis. le paradis serait-il une taverne pour vous ?
Vous dites que des vierges y attendent les croyants. le paradis serait-il un bordel ?"
Un livre enrichissant que je recommande.
* Je m'honore d'avoir participé à la campagne des Femen pour exiger la libération d'Amina. Je n'ai pas hésité, "jeune" soixantenaire à l'époque de publier un selfie de votre serviteur, le torse nu feutré de "FREE AMINA"... j'ai encore la photo qui a été intégrée à toutes celles que les Femen ont collecté, qui a circulé et m'a valu quelques menaces et quolibets...
* Je m'honore également de compter dans mes contacts Facebook Waleed a Husseini dont je continue à suivre l'actualité et les publications.
*Celle pour laquelle mon coeur saigne... Nasrin Sotoudeh.
"Elle est arrêtée par les autorités iraniennes le 13 juin 201819,20, au nom d'une condamnation à 5 ans de prison dont ni elle ni son mari ne disent avoir eu connaissance. Nasrin Sotoudeh est condamnée le 11 mars 2019 à 33 ans de prison supplémentaires et à 148 coups de fouet pour « collusion en vue de nuire à la sécurité nationale », « acte de propagande contre l'Etat », « appartenance à un groupe illégal », diffusion de fausses informations, trouble à l'ordre public et pour être apparue sans voile en public et avoir encouragé la « corruption » et la « dépravation ». Elle est détenue à Evin, la prison des prisonniers politiques, où elle partagerait sa cellule avec une quarantaine d'autres femmes, dont l'anthropologue franco iranienne Fariba Adelkhah.
La communauté internationale demande sa libération. le 12 mars 2019, le Conseil national des barreaux lance une pétition à Emmanuel Macron qui recueille plus de 400 000 signatures et déploie une bâche de soutien à l'avocate, réclamant sa libération.
Elle est arrivée plusieurs fois à faire sortir des lettres de prison, par l'intermédiaire de son mari, Reza Khandan, lui-même condamné en janvier 2019 à six années de prison mais toujours libre. Elle y défend la cause des « bi-hedjab », les femmes qui refusent le voile.
Le 11 août 2020, après deux ans d'emprisonnement, elle commence une grève de la faim pour obtenir la libération des prisonniers politiques dans son pays. Elle obtient une permission de sortie provisoire le 7 novembre. Après moins d'un mois de "liberté" provisoire, Nasrin Sotoudeh est de nouveau emprisonnée le 2 décembre 2020, malgré son état de santé précaire. Elle retourne à la prison de Qarchak, après avoir été des années dans celle d'Evin.
Son mari annonce qu'elle obtient de nouveau une sortie provisoire le 8 janvier 2021en raison de complications cardiaques. Elle est de nouveau emprisonnée quelques jours plus tard, le 20 janvier 2021."




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Citations et extraits (1) Ajouter une citation
Vous êtes libres. Vous êtes libres d'aller au temple, vous êtes libres d'aller à la mosquée ou à n'importe quel autre lieu de culte de cet Etat qu'est le Pakistan. Vous pouvez être de n'importe quelle religion, caste ou croyance, ce n'est pas l'affaire de l'Etat. Nous sommes tous des citoyens et les citoyens égaux d'un même Etat. Nous devrions conserver cet idéal en ligne de mire, et vous verrez qu'avec le temps les hindous cesseront d'être des hindous, et les musulmans des musulmans, non au sens religieux, parce qu'à cet égard c'est une affaire de foi personnelle propre à chaque individu, mais au sens politique comme citoyens de l'Etat.
Mohamed Ali Jinnah, fondateur du Pakistan
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Vidéo de Martine Gozlan
Jean-Claude Lescure : "La question sécuritaire est extrêmement importante pour les Israéliens." ."Israël-Palestine : un conflit sans limites ?"Le débat du Grain à Moudre du mardi 15 mai 2018 avec Martine Gozlan, grand reporter et rédactrice en chef à l?hebdomadaire Marianne, Alain Gresh, journaliste, ancien rédacteur en chef du Monde diplomatique et fondateur du journal en ligne Orient XXI, et Jean-Claude Lescure, professeur des universités en histoire contemporaine à l?université de Cergy-Pontoise. https://www.franceculture.fr/emissions/du-grain-a-moudre/israelpalestine-un-conflit-sans-limites
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