Citations de Alain Mabanckou (777)
L’écrivain, c’est d’abord un lecteur. […] Un écrivain qui ne lit pas, c’est une plante qui n’est jamais arrosée.
(25e Heure du Livre du Mans, 4 octobre 2014)
… il ose me traiter de capitaliste, je pouvais encore tout accepter d’un diable qui me dit va de retro Satana, mais pas être traité de capitaliste, est-ce que moi j’exploite les pauvres, moi, est-ce que moi j’aime le profit, moi, est-ce que moi je fais l’exploitation de l’homme par l’homme, moi, je suis quand même Zéro Faute, demandez à n’importe qui et on vous dira que moi j’ai fait recouvrer la vue aux aveugles, les jambes aux paralytiques, la voix aux muets, les ovules aux femmes stériles, l’érection aux hommes qui ne bandaient plus même le matin quand le pipi gonfle normalement la chose de tous les mâles, est-ce que vous savez au passage que j’ai aidé le maire de cette ville à se faire réélire à vie, … je ne parle non plus du retour au foyer conjugal de la femme du préfet de cette région, ce n’est pas pour rien qu’on m’appelle Zéro Faute…
Peut-être que lorsqu'on a bu on discute avec des gens invisibles que ceux qui fabriquent l'alcool ont cachés dans la bouteille et que ceux qui ne boivent pas sont incapables de voir.
IMPOSSIBILITE
Je voudrais vous dire des choses si tendres,
Vous murmurez des mots si doux,
Que seules les fleurs mortes peuvent entendre
Car c'est tout ce que j'ai de vous.
Je voudrais vous confier mon rêve de folie
Mon beau rêve si insensé,
Hanté par le spectre de la mélancolie
Où viennent sombrer mes pensées
Je voudrais vous dire pourquoi mon âme pleure
Quand tout aime et refleurit,
Pourquoi elle gémit à la fuite de l'heure
Qui part sans apporter l'oubli.
Je voudrais vous dire comment je vous adore.
Hélas je ne le pourrais pas,
Et c'est en mon rêve qui s'envole à l'aurore
Que je dois le dire tout bas.
Birago Diop
Si je suis devenu écrivain, c'est aussi pour venger ma mère, pour venger le fait qu'elle ne soit pas allée à l'école. Ma mère est la source de tout ce que j'ai écrit.
La mère est toujours la première femme qu'on aime.
(La Grande Libraire, le 8 octobre 2015)
"Nos dirigeants n'ont pas de politique culturelle forte. Ils ont tendance à voir la culture comme une distraction, non comme le point de départ de l'émancipation du peuple, qui permet d'ancrer une nation dans l'histoire du monde".
Interview à L'Express, le 1er mars 2013
Je te construirai une jolie maison en planches
Comme celle de maman Pauline et papa Roger
Un château c'est trop grand
J'ai peur que mes rêves se perdent dedans
Un écrivain qui n’a pas de doutes est un écrivain qui ment.
(25e Heure du Livre du Mans, 4 octobre 2014)
Papa Roger a donc toujours un mot pour que ces blancs rient car, dit-il, avec le froid qu'il y a là-bas en Europe les blancs ne rient pas beaucoup.
Les muscles de leur visage sont congelés.
Gauche ou droite, le monopole du cœur n'aura jamais été d'un côté ou de l'autre, et l'immigration semble être très tôt devenue un argument politique pour s'attirer les voix des électeurs en jouant sur la peur de l'étranger. N'en blâmer que le Front national serait une grande erreur; (p.87-88 / Seuil, coll. points, 2013)
« A QUOI TIENT L'AMOUR « ?
Aux mots, à leur accent, aux choses,
Aux mille questions que l'on pose.
Au lourd silence inopportun,
Aux rêves qui fuient un à un ;
Aux sanglots réduits au silence,
Au lourd silence fait de souffrance,
Aux souffrances faites d'aveux
Qu'on ne dit plus dès qu'on est deux ;
A l'aspect des lieux que l'on hante,
Aux mots qu'on ne dit pas, aux mots
Qu'on a dits peut-être trop tôt,
Aux nerfs sensibles d'une amante
Et à l'énervance de l'air
Un soir trop parfumé, trop clair.
Birago Diop
LASSITUDE
Je traîne à chaque pas un boulet trop lourd
Fait de regrets, d'ennuis, de souvenirs moroses ;
Mais parfois, remembrant mes plus vieilles amours
Je trouve un doux parfum aux plus tristes des choses.
D'autres fois, le plus souvent quand s'abîme le jour,
Je me sens seul, en proie à un cafard sans cause,
Seul et veule et sans joie, invoquant le secours
D'un sourire défunt qui vaincrait ma névrose.
Etreintes et aveux où donc vous trouvez-vous ?
Sans vous je ne veux que pleurer ma peine amère.
Car le temps est parti portant je ne sais où
Tout ce que j'eus en moi de tendre et de sincère ;
Echos d'un murmure et reflets d'un souvenir,
Mes rêves les plus doux, Mes plus fougueux désirs.
Birago Diop
Los Angeles affiche partout le rêve du bien manger et du mieux vivre, comme en témoignent les publicités qui mettent en scène des stars glorifiant tel ou tel régime alimentaire, mais surtout elle a fait des substituts et des compléments alimentaires une des inventions les plus lucratives de notre époque. Ici, c’est l’empire des végétariens, des végétaliens avec graines, algues et champignons à la carte, des lacto-ovo-végétariens qui acceptent œufs et lait, des vegan qui refusent même de porter des chaussures en cuir, et la liste ne fait que croître avec les restaurants spécialisés qui ouvrent à tous les coins de rue. Sur Colorado Boulevard, Organix offre un menu complètement végétarien, vegan et, faut-il le préciser, sans gluten pour les clients souffrant du diabète........Face à cet enthousiasme pour la diététique, Humberto me dit : « Mais pourquoi n’arrêtent-ils pas tout simplement de manger au lieu de nous casser les pieds ? Parce qu’ils croient que les végétaux ne souhaitent pas vivre comme nous et qu’ils n’ont pas une âme ? »
Congo natal
Je ne redoute rien tant que l'exil
Le regret de mon soleil versé sur les vagues
Comme l'huile qui s'exalte dans la poêle
Et chante le cantique du feu
Et ma mère trempée d'angoisses
Devant son foyer aux-trois-pierres
Combien de poètes portent à jamais
Le deuil des Tropiques dans les contrées du Nord
Les douleurs dans leurs écrits se disposent (...)
Jean Baptiste Tati Loutard
Extrait de La Tradition du songe (1985)
- Mon Petit Piment, tous les hommes qui m'ont eue dans leur lit m'ont proposé de vivre avec eux, de quitter leurs femmes, leurs enfants. Ils m'ont promis des châteaux, des Mercedes, et que sais-je encore, mais je sais que le plaisir fait dire des choses qu'on finit par regretter des années plus tard. En cela les hommes ne changeront pas, ils sont capables de n'importe quelle folie une fois qu'ils sont dans vos bras.
[...] j’appartiens plutôt au groupe des doubles nuisibles, nous sommes les plus agités des doubles , les plus redoutables, les moins répandus aussi, et comme tu peux le deviner la transmission d’un tel double est plus compliquée, plus restreinte, elle s’opère au cours de la dixième année du gamin, encore faut-il parvenir à lui faire avaler le breuvage initiatique appelé mayamvumbi, l’initié le boira régulièrement afin de ressentir l’état d’ivresse qui permet de se dédoubler, de libérer son autre lui-même, un clone boulimique sans cesse en train de courir, de cavaler, d’enjamber les rivières, de se terrer dans le feuillage quand il ne ronfle pas dans la case de l’initié, et moi, je me retrouvais au milieu de ces deux êtres, non pas en spectateur puisque, sans moi, l’autre lui-même de mon maître aurait succombé faute d’assouvir sa gloutonnerie, [...]
Vous êtes indépendants depuis bientôt un demi siècle
et tu me dis qu’il n’y a qu’une seule route ?
Qu’est-ce que vous avez foutu pendant tout ce temps ?
Mais rien n’y fait, en Amérique, je suis un Africain. Et je n’ignore pas davantage les nuages qui assombrissent mes rapports avec les Africains-Américains. J’ai entendu ici et là que, parmi ces derniers, certains nous reprochent, à nous autres venus d’Afrique, d’avoir eu des accointances avec les négriers qui avaient déporté leurs ancêtres. Nous serions par conséquent frappés éternellement du sceau de la complicité.
Quand Dieu a déjà fabriqué un être et qu'il l'a envoyé dans notre monde à nous, c'est fini, il ne revient plus sur Sa décision sinon les gens ne vont plus le respecter. En plus, ça voudrait dire que Dieu est capable de Se tromper comme nous autres.