Citations de Antonin Varenne (267)
La Chance, il est pas enterré en Creuse, c’est un des morts qui arrêtent pas de revenir maintenant. Un mulo, une histoire sans fin. Faut pas croire non plus, parce qu’on est des gens qui vivent bien avec nos morts, qu’on est mieux armés que les autres contre le chagrin. C’est seulement qu’on n’en parle pas.
Des poupées russes. Le temps recouvrait étape par étape des morceaux de lui-même qu’il ne serait plus. Plus on remonte dans le temps, moins on est de personnes à la fois, mélangées les unes aux autres. Ce soir-là, c’était l’adolescence, l’âge du discernement entre enfants et adultes, amis et connaissances, imbécillité et intelligence.
J'ai emprunté le nom de l'homme que je cherchais, le temps de comprendre que j'étais encore vivant. Ce miracle est d'une tristesse que je ne mesure pas encore. Je le dois à un jeune homme qui aimait galoper avec les chevaux sauvages et à sa jeune épouse qui se moquait de comment je m'appelais.
......Quand ils avaient tué des officiers anglais, les condamnés avaient droit à une corde courte .
Comme ils ne tombaient pas d'assez haut, la chute ne leur cassait pas le cou et ils mouraient lentement en agitant les jambes .
Les pendaisons que tout le monde préférait . (p83-84)
Vous croyez qu’une femme vous sauvera de votre condition, monsieur Bowman ? Que c’est notre travail de fermer les yeux sur qui vous êtes ? Je ne parle pas d’un amour de cette sorte, servile et archaïque. Il y en a des plus grands. Ce ne sont pas des espoirs que vous avez, ce sont des fantasmes minables.
Quelle force peut-on opposer à Bowman, qui soit capable d'arrêter sa course ? Si ce monstre est encore un homme, alors quelque chose l’arrêtera. Je suis cette force. Il faudra que je le sois. Parce que la mort n'y pourra rien, Bowman est éternel, il n'a jamais eu peur d'elle.
Le chômage, mon frère, est père de tous les vices.
Nous croyons connaître les papillons de nuit parce qu'ils viennent tourner autour des lampes, alors qu'ils vivent dans l'obscurité. Quand ils sont attirés par la lumière, ils ne sont plus eux-mêmes et deviennent fous. Peut-être que cette communauté est une de ces lumières, un éclairage trompeur, et que la vérité est dans l'obscurité, là où ne pouvons pas voir.
La nature n’est pas un point de vue à envisager selon différentes perspectives, c’est un bien commun et ce qui se passe chez un privé affecte autant ceux qui vivent autour et qui n’ont rien demandé.
.....Comment vous comporteriez-vous, Bowman, dans un monde qui a détruit le vôtre ?
(p372)
Le terrorisme est une guerre de nulle part qui frappe les esprits où qu'ils soient.
Le sud, c'est là que tu rencontreras le moins de monde.
Pete tira sur les rênes, retenant le mustang impatient.
-Vers l'équateur ?
McRae sourit.
-C'est ça.
-Là où tout change ?
-On a droit à nos rêves tous autant qu'on est. Même si au bout d'un moment ils deviennent des regrets.
-C'est la leçon du sage au jeune égaré ?
-Sans doute la seule que tu peux apprendre de types comme nous.
- Dors. La fatigue est le monde des esprits trompeurs.
Les sous-officiers, sur un vaisseau de guerre à la veille d'une attaque, n'avaient pas plus le droit qu'un simple soldat de voir les cartes militaires. Jeter un œil dessus, même par inadvertance, pouvait mener au bout d'une corde ou dans la mer avec les requins.
Avant même de discerner les tatouages sur le crâne rasé, le visage couvert de lignes tribales et percé d'anneaux, John avait reconnu Alan, aussi déplacé dans ce décor naturel qu'un ukulélé sur la banquise. A mesure qu'il s'était approché il l'avait entendu adresser des insultes aux arbres, aux chemins de terre qui dégueulassaient les chaussures et aux connards qui vivaient dans la forêt. Alan Mustgrave avait balancé un coup de pied dans une bassine, où trempaient les slips et les chaussettes de John.
"Je suis arrivé sur les rives du lac Tahoe, dans la Sierra Nevada. Si vous aviez continué à voyager dans ce pays et vous aviez vu cet endroit, c’est ici que vous vous seriez arrêtée, j’en suis sûr. Moi, je viens d’y enterrer un autre rêve. Celui d’une jeune femme, de son mari et de leur enfant qui ne sera jamais né."
Celui qui refuse de se battre est parfois celui qui emporte la guerre.
Le ventre de la femme émit des sons grotesques. Son corps de se vida d'une substance liquide qui n'avait rien des effluves éternels de l'âme.
Le légiste, dégoûté, s'écarta pour le laisser sortir.
Page 26, Points, 2015.
Les Blancs ont inventé en Amérique un pays sans passé pour avoir une vie nouvelle. Mais cette terre a une mémoire. C'est pour ça qu'ils nous (les indiens) tuent, pour l'effacer.
"Ils avaient passé la nuit sur le quai. Une foule d’hommes, de femmes et d’enfants, de vieux et de vieilles. Des couvertures jetées sur leur épaules, silencieux, des nourrissons cachés sous les manteaux, ils s’étaient levés dans l’aube grise, grelottant de froid sous des flocons de neige fondue. Les yeux pleins de sommeil, ils s’étaient rangés en files devant l’entrée des bureaux de la Cunard réservée aux troisièmes classes. Trois ou quatre cents personnes serrées les unes contre les autres, valise à la main. Ils avançaient en piétinant, centimètre par centimètre, nerveux et fatigués, soufflant des nuages de vapeur."