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Citations de Jorge Luis Borges (1107)


Descartes rapporte que les singes pourraient parler s'ils le voulaient mais qu'ils ont décidé de garder le silence pour qu'on ne les oblige pas à travailler.
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Le monde est, pour l'Européen, un cosmos, à l'intérieur duquel chacun est en accord intime avec la fonction qu'il exerce ; pour l'Argentin, le monde est un chaos. L'Européen et l'Américain du Nord jugent qu'un livre doit être bon, dès lors qu'il a mérité un prix quelconque ; l'Argentin admet qu'il puisse ne pas être mauvais, malgré le prix.
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Simplicité

La grille du jardin s'ouvre
avec la docilité d'une page
qu'interroge une fréquente dévotion.
J'entre dans la maison, et mes regards
n'ont pas besoin d'observer des objets
qui sont déjà totalement dans la mémoire.
Je connais bien les habitudes et les âmes
et ce dialecte d'allusions
qui va tissant tout groupement humain.
Je n'ai pas besoin de parler
ni de feindre des privilèges ;
ils me connaissent ceux qui m'entourent,
ils savent bien mon angoisse et ma faiblesse.
C'est là toucher à ce qu'il y a de plus haut,
à ce que peut-être nous donnera le ciel :
non le prestige ni les victoires
mais seulement d'être admis
comme une partie de la Réalité indéniable,
comme les pierres et les arbres.

A Haydée Lange

(Extrait de Ferveur de Buenos Aires p. 22)
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Est-elle un empire
la lumière qui s'éteint
ou une luciole ?

Haïku 14
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J'ai toujours imaginé le paradis comme une sorte de bibliothèque.
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“Quand nous accable le malheur
L'espace d'une seconde nous sauvent
les infimes aventures
De l'attention ou de la mémoire :
La saveur d'un fruit, la saveur de l'eau,
ce visage qu'un rêve nous ramène,
les premiers jasmins de novembre,
le désir infini de la boussole,
un livre que nous croyions perdu, le battement d'un hexamètre,
la clé brève qui nous ouvre la maison,
l’odeur d'une bibliothèque ou du santal,
l'ancien nom d'une rue,
les couleurs d'une carte,
une étymologie imprévue,
le poli d'un ongle limé,
la date que nous cherchions,
compter les douze coups obscurs,
une brusque douleur physique.
Huit millions sont les divinités du Shinto
qui, secrètes, voyagent sur la terre.
Ces modestes divinité nous frôlent,
nous frôlent et puis nous laissent.”
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Que sont devenus les gouvernements ? demandais-je.
-La tradition veut qu'ils soient tombés petit à petit en désuétude. Ils procédaient à des élections, ils déclaraient des guerres, ils établissaient des impôts, ils confisquaient des fortunes, ils ordonnaient des arrestations et prétendaient imposer la censure mais personne au monde ne s'en souciait. La presse cessa de publier leurs discours et leurs photographies.
Les hommes politiques durent se mettre à exercer des métiers honnêtes.
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On entrevoit déjà le sujet général: l'insatiable recherche d'une âme à travers les reflets délicats qu'elle a laissés sur d'autres âmes : d'abord la trace ténue d'un sourire ou d'un mot ; vers la fin, les splendeurs diverses et croissantes de la raison, de l’imagination et du bien. A mesure que les hommes interrogés ont connu de plus près Almotasim, leur portion de divinité est plus grande ; il est entendu cependant qu’ils ne sont que des miroirs.
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La mort et la boussole

Une lueur le guida à une fenêtre. Il l'ouvrit : une lune jaune et circulaire définissait dans le jardin triste deux fontaines obstruées.Lönrot explora la maison. Par des offices et des galeries, il sortit dans des cours semblables et à plusieurs reprises dans la même cour. Il montapar des escaliers poussiéreux à des antichambres circulaires ; il se multipia à l'infini dans des miroirs opposés; il se fatigua à ouvrir et à entrouvrir des fenêtres qui lui révélaient, au-dehors, le même jardin désolé, vu de différentes hauteurs et sous différents angles ; à l'intérieur, des meubles couverts de housses jaunes et des lustres emballés dans de la tarlatane. Une chambre à coucher l'arrêta ; dans cette chambre , une seule fleur et une coupe de porcelaine : au premier frôlement, les vieux pétales s'effritèrent. Au second étage, le dernier, la maison lui parut infinie et croissante : « la maison n'est pas si grande , pensa-t-il. Elle est agrandie par la pénombre, la symétrie, les miroirs, l'âge, mon dépaysement, la solitude. »
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Gunnar Thorgilsson
(1816-1879)

La mémoire du temps
Est pleine d'épées et de navires
Et de poudre d'empires
Et de rumeur d'hexamètres
Et de hauts coursiers de guerre
Et de clameurs et de Shakespeare.
Je veux me souvenir du baiser
Que tu me donnais en Islande.

(Traduit par Silvia Baron Supervielle)

La memoria del tiempo
Está llena de espadas y de naves
Y de polvo de imperios
Y de rumor de hexámetros
Y de altos caballos de guerra
Y de clamores y de Shakespeare.
Yo quiero recordar aquel beso
Con el que me besabas en Islandia.
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Être immortel est insignifiant; à part l'homme, il n'est rien qui ne le soit, puisque tout ignore la mort. Le divin, le terrible, l'incompréhensible, c'est de se savoir immortel. J'ai noté que malgré les religions, pareille conviction est extrêmement rare. Juifs, chrétiens, musulmans confessent l'immortalité, mais la vénération qu'ils portent au premier âge prouve qu'ils n'ont fois qu'en lui, puisqu'ils destinent tous les autres, en nombre infini, à le récompenser ou à le punir. J'estime plus raisonnable la roue de certaines religions de l'Inde, qui n'a ni commencement ni fin, chaque vie est la conséquence d'une vie antérieure et elle engendre la suivante, sans qu'aucune ne détermine l'ensemble...
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Les fleuves

Nous sommes temps. Nous sommes la fameuse
parabole d’Héraclite l’Obscur,
nous sommes l’eau, non pas le diamant dur,
l’eau qui se perd et non pas l’eau dormeuse.

Nous sommes fleuve et nous sommes les yeux
du grec qui vient dans le fleuve se voir.
Son reflet change en ce changeant miroir,
dans le cristal changeant comme le feu.

Nous sommes le vain fleuve tout tracé,
droit vers sa mer. L’ombre l’a enlacé.
Tout nous a dit adieu et tout s’enfuit

La mémoire ne trace aucun sillon.
Et cependant quelque chose tient bon.
Et cependant quelque chose gémit.
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Jorge Luis Borges
Je crois que l’on sent la poésie comme la musique, comme l’amour, ou comme l’amitié, ou toutes les choses du monde.
L’explication vient après.

(Entretiens, Littérature)
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Dans la hall de la gare, il s'aperçut qu'il était en avance d'une demi-heure. Il se souvint brusquement que, dans le café de la rue Brasil, tout près de la maison d'Yrigoyen, il y avait un énorme chat qui, telle une divinité dédaigneuse, se laissait caresser par les clients. Il entra, le chat était là, endormi. Dahlmann demanda une tasse de café, la sucra lentement, la goûta (dans la clinique, ce plaisir lui avait été interdit) et il pensa, pendant qu'il lissait le noir pelage, que ce contact était illusoire et que le chat et lui étaient comme séparés par une plaque de verre, parce que l'homme vit dans le temps, dans la succession, et le magique animal dans l'actuel, dans l'éternité de l'instant.
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Le miracle secret

Un bibliothécaire aux lunettes noires lui demanda : « Que cherchez-vous ? » Hladik répliqua : «Je cherche Dieu. » Le bibliothécaire lui dit : «Dieu est dans l'une des lettres de l'une des pages de l'un des quatre cent mille tomes du Clementinum. Mes parents et les parents de mes parents ont cherché cette lettre ; je suis devenu aveugle à force de la chercher. »
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Cette année-là, mon père m'avait emmené passer l'été à Fray Bentos. Je revenais de l'estancia de San Francisco avec mon cousin Bernardo Haedo. Nous rentrions en chantant, à cheval; et cette promenade n'était pas la seule raison de mon bonheur. Après une journée étouffante, des nuages énormes couleur d'ardoise avaient caché le ciel. Le vent du sud excitait l'orage; déjà les arbres s'affolaient; je craignais (j'espérais) que l'eau élémentaire nous surprît en rase campagne. Nous fîmes une sorte de course avec l'orage. Nous entrâmes dans une rue qui s'enfonçait entre deux très hauts trottoirs en brique. Le temps s'était obscurci brusquement; j'entendis des pas rapides et presque secrets au-dessus de ma tête; je levai les yeux et vis un jeune garçon qui courait sur le trottoir étroit et défoncé comme sur un mur étroit et défoncé. Je me rappelle son pantalon bouffant, ses espadrilles; je me rappelle sa cigarette dans un visage dur, pointant vers le gros nuage déjà illimité. Bernard lui cria imprévisiblement : Quelle heure est-il Irénée ? Sans consulter le ciel, sans s’arrêter, l’autre répondit : Dans quatre minutes, il sera huit heures, monsieur Bernado Juan Francisco. Sa voix était aiguë, moqueuse.
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À Alexandrie, il fut avancé que seul est incapable d'une faute, qui déjà l'a commise et déjà s'en est repenti. Ajoutons que, pour s'affranchir d'une erreur, il est bon de l'avoir professée.
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Jorge Luis Borges
Car la vie, j’en suis convaincu, est faite de poésie. La poésie n’est pas étrangère à la vie - la poésie (…) nous attend au coin de la rue. Elle peut nous sauter dessus n’importe quand.

L’art de la poésie, 1967
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Pendant toute mon adolescence j'ai pensé que c'était une injustice que l'on m'aimât. Je ne méritais pas que l'on m'aimât, d'aucune façon, et je me souviens que le jour de mon anniversaire me remplissait de confusion, parce que tout le monde me comblait de cadeaux et que je pensais n'avoir rien fait pour les mériter et être une sorte d'imposteur. Ce n'est qu'à trente ans passés que j'ai surmonté cette impression.
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Ireneo commença par énumérer, en latin et en espagnol, les cas de mémoires prodigieuses consignés par la « Naturalis Historia ». Cyrus, le roi des Perses, qui pouvait appeler par leur nom tous les soldats de son armée ; Mithridate Eupator qui rendait la justice dans les vingt-deux langues de son empire ; Simonide, l’inventeur de la mnémotechnie ; Métrodore qui professait l’art de répéter fidèlement ce qu’on avait entendu une seule fois. Il s’étonna avec une bonne foi évidente que de tels cas pussent surprendre.
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