AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Critiques de Mathias Enard (1115)
Classer par:   Titre   Date   Les plus appréciées


Boussole

De Mathias Enard

Boussole ou l'Orientalisme as t il influencé profondément l'occident ?

Telle est la belle ambition de ce livre , mais ,

Page 107 , c'est là que j'ai coincé comme un marathonien au 36ème km, il faut de l'adhésion et surtout de la compréhension pour franchir ces quelques lignes :



"Kafka apparaît dans sa thèse pour deux de ses nouvelles, Dans la Colonie Pénitentiaire et Chacals et Arabes; pour Sarah, le déplacement kafkaïen est intimement lié à son identité-frontière à la critique de l'Empire autrichien finissant et, au-delà, à la nécessité de l'acceptation de l'altérité comme partie intégrante du soi, comme contradiction féconde, d'autre part."  P 107



Est ce du Grec , et que dirait Descartes ?

Quand je perd le nord , je décroche !



La colonie pénitentiaire avec sa machine de torture diabolique , est ce pour nous dire sans le dire que l'occident n'a rien à envier à Daech ? et pourquoi kafka est il cité  ?





Tous mes indicateurs étaient pourtant au vert , passionné de peintures orientalistes , j'en possède plusieurs , dont un diptyque d'une casbah d'Orient , j'ai travaillé au Liban et au sultanat d'Oman , j'ai foulé les grès Jordaniens , mon beau père qui parle arabe m'avait donné un pensum pour me faire accepter dans les souks …

L'entraînement , l'avoir sans doute , du moins je le pensais la condition physique aussi pour parcourir allègrement les 378 pages du Mathias Enard sur l'Orientalisme .



De plus les critiques étaient enthousiastes , les milles et une nuits , s'offraient à moi ( je lis la nuit !) .

Stupeur ,je tombe sur une soutenance de thèse passionnante mais ingrate, indigeste pour mon niveau d'allemand , mais surtout , les nuits de Palmyre sont frustrantes , le pauvre Franz n'ira pas au septième ciel , il est amoureux mais n'osera pas  !



Et pourtant le passage sur l'opium m'avait laissé des espoirs , beaucoup d'espoirs à imaginer tous ces grands noms du répertoire Litz ,Berlioz ad-dicts aux fumées d'opium , et puis , Franz est trop sérieux 4 ou 5 pipes pas plus et son ami Faugier devra se droguer seul, seul aussi sera Franz face aux médecins qui lui refuseront cette drogue dont il aurait eu tant besoin .



Franz est à Vienne toujours amoureux toujours à revivre les événements récents ,la destruction d'Alep , à s'interroger sur sa maladie , la pire peut être la maladie de Charcot , mon ami en est mort voilà 3 ans , à réinventer une autre relation d'amour avec Sarah mais il est seul , malade , frustré , aigri ...



Comment partager L'Orientalisme de Mathias Enard avec Franz Ritter ,son érudition oui ,mais pourquoi alors survoler l'Orientalisme de Proust en une demi page et les folies de Bilger en plus de 20 pages et y revenant sans cesse ,cet inventaire n' est plus qu' une accumulation sans vie d'artistes façon ARMAN ,avec la peur de ne rien oublier , alors qu'une réflexion patiente à travers 5 ou 6 personnages marquants hauts en couleurs , pouvait nous faire vibrer peut être à la beauté de l'écriture ?



La page 107 me revient alors en mémoire comme un boomerang :

« je n'ai donc pas insisté, même si, pour lui faire plaisir,

j'aurais été prêt à me geler les choses dans le vent de cette noble

banlieue, que je soupçonnais tout à fait glacial. 

Ce n 'est pas du sang, il n'y a pas de sang, c'est de la sueur. »P107



Vienne où le 15 avril 1996 je me suis avec quelques milliers de marathoniens «  gelé les choses dans un vent glacé  » il faisait entre -1 et 2 degrés ; pas de refuge dans cette noble banlieue , pas d'abris pour ces invités mains et pieds gelés par la sueur , nos amis(es) nous changeaient dans la rue incapables nous étions , de nous déshabiller seuls .

Vienne , où dans l'après midi un Gruber anonyme «  se gelant les choses » nous insultait car les enfants étaient bruyants .

Ces images se brouillent avec celles de mes 16 ans où à Salzbourg j' ai chanté du Mozart .



Dans les livres comme dans la vie il faut rencontrer l'âme de l'auteur sinon on ne peut trouver le repos .Où se cache l'âme de Mathias Enard ?

Une assemblée d'artistes ne construit pas une âme ,Marga d'Andurain avec sa folie aurait-elle pu irradier ce livre ?



Mais trop de fous hantent ce livre Bilger , Frangier , Marga et puis Kafka , n'est ce pas l'Occident malade le coeur du livre !!!



N'est ce pas Franz Ritter qui symbolise lui même cet Occident:un Occident qui à peur d'affronter la vérité ,la nature de la maladie qui le ronge , un Occident prêt à se shooter à l'opium pour oublier , fuir devant ses responsabilités ou celles qu'on lui colle sur le dos (Palmyre et même le djihad ...)  ?



Vienne n'est plus la flamboyante cité décrite au début du livre , mais celle d'un pauvre Herr Gruber avec son Cabot ( un revenant Gruber est un commandant SS chez Romain Gary, tout un symbole ) , une cité incapable d'accueillir dignement des sportifs , une cité où l'on refuse des soins à Franz Ritter …



La boussole avec le personnage de Sarah prend avec sa part biblique une signification plus prophétique et plus universelle , elle n'est plus seulement la femme orientaliste mais la messagère , C'est Franz le scribe et entre eux l'amour est impossible car lui représente l' Occident elle est l'Orient , la femme d'Abraham , la mère d'Isaac ; on relira le très beau livre de Marek Halter à ce sujet.le nom de Sarah n'est pas fortuit , elle qui a vaincu la stérilité .

La fable est belle

C'est elle qui dévoile des livres oubliés , explore des textes , enquête sur le terrain, inspire et illumine Franz -l'Occident- elle est l'étoile …



Et là , est le livre que pose Mathis Enard sur l'altérité Orient Occident .

Livre sans aucun doute fondateur de toute la pensée de Enard , du traducteur il veut devenir le passeur d'un occident qui regarde vers l'est là où le soleil se lève .



J'ai besoin de recul pour comprendre les intentions vrais de Mathias Enard dans le tumulte de l'histoire actuelle , Arabisant fou comme Sarah de cette culture orientale ,et puis ces mots d'un poème persan de Roumi (1207-1273) , « moi qui n'est pas de coeur qu'est ce que je peux faire ? »



J'attendrai les beaux jours pour me réchauffer le coeur et les choses et reprendre à la page 108 cette saga de milliers d'artistes orientalistes qui ornent les frontons du dictionnaire des orientalistes Français .

Je veux croire p378 à ses derniers mot « au tiède soleil de l'espérance »





Commenter  J’apprécie          270
Parle-leur de batailles, de rois et d'éléphants

La force de ce livre, peut-être plus que l'histoire qu'il décrit, c'est cette écriture époustouflante. C'est un texte plutôt court mais d'une force poétique incroyable, un récit d'une beauté lumineuse et puissante où les mots trouvent leur place et s'ajustent pour créer cette musicalité d'une fluidité joyeuse qui court à travers les lignes.



L'histoire nous emmène sur les traces de Michel-Ange qui pendant quelques semaines partira à la rencontre de ce monde Ottoman si riche et si surprenant. Mandaté pour créer un pont sur la Corne d'Or, c'est son cheminement créatif, ses doutes et ses questionnements que l'auteur nous dévoile à travers ces quelques pages. Un texte qui sait allier le charme suranné de ce monde troublant et mystérieux à la modernité de cette réflexion sur la création. Un texte magnifique qui nous laisse un petit goût d'inachevé car on aurait aimé plonger dans cette langue superbe un peu plus longtemps.
Commenter  J’apprécie          270
Parle-leur de batailles, de rois et d'éléphants

Constantinople 1506, Michel-Ange se voit confier l’élaboration d’un pont sur la Corne d’Or pour le sultan Bajazet. Animé d’une froide colère envers le pape Jules II et son nouveau protégé, Raphaël, Michel-Ange saisit l’occasion pour s’éloigner de la cour papale.

Il espère ainsi gagner de l’argent pour combler ses dettes.

A Constantinople, Michel-Ange découvre la ville, ses beautés et ses plaisirs.

C’est bien un regard d’artiste qu'il pose tour à tour sur son nouvel environnement.

Pierres, végétaux, femmes et hommes, tout est source d’inspiration pour Michel-Ange.

Il se lie d’amitié avec le poète Mesihi, lequel voit en l’artiste bien plus qu’un simple compagnon d’arts. Mesihi lui dévoile les richesses culturelles de son pays et les deux hommes ont beaucoup d’échanges sur la beauté.

Michel-Ange s’adapte, étudie, mémorise et se met au travail ignorant que sur sa tête plane les ombres et le ressentiment de Rome.

Mathias Enard met en scène le court passage de Michel-Ange à Constantinople. Il imagine les sensations de l’artiste lors de ses diverses découvertes. Le récit est centré sur les arts et le processus de création.

Il trouve des éléments pour justifier l’inspiration de l’auteur sur ses œuvres conçues au retour de son séjour.

Le récit est très poétique et j’ai passé un excellent moment de lecture.
Commenter  J’apprécie          260
Boussole

A Vienne, Franz Ritter, tout seul chez lui et inquiet des résultats à venir des analyses médicales effectuées en journée, passe une nuit blanche à se remémorer sa relation avec Sarah et ses voyages en Orient...



Abécédaire appréciatif de Boussole sans phrase ou presque :



Affecté

Babillard

Culte féminin (osef)

Digressif

Erudit abusif

Fastidieux

Goncourt (pourquoi)

Horripilant

Invariable (auteur)

J-en-peux-plus (S.O.S)

K.-O.

Lourd

Musicalité (insuivable)

Non merci

Orientalisme (prétexte)

Pompeux

Quatre-vingt-une pages (suffisant)

Ronflant (2 sens)

Soporifique

Traînant

Usant

Vain

Week-ends (à épargner)

XXX (tout mais pas ça)

Y en a tellement d'autres.

Zappez.
Lien : http://livriotheque.free.fr/..
Commenter  J’apprécie          265
Rue des voleurs

J'avais déjà tenté de lire Rue des Voleurs lorsque j'ai acheté le livre, peu de temps après sa sortie en poche. Mais voilà, la sauce n'avait alors pas pris et je m'étais très vite arrêtée. Ce n'était sans doute pas le bon moment car malgré tout, je sentais que ce que j'avais sous les yeux était très bon. J'ai donc remisé le volume dans un coin pour une hypothétique tentative. Comme quoi ça fonctionne parfois. Je l'ai repris ce 15 août et cette fois-ci, la connexion s'est établie sans anicroche.



J'ai admiré la puissance du récit de Lakhdar, jeune Marocain de Tanger à qui la vie, Dieu, le Destin, qui sait?, réserve nombre d'épreuves. Rien que la première phrase du roman offre un condensé de la force rageuse qui parcourt l'ouvrage. Si Lakhdar n'est pas un violent, on sent en lui une envie de changement, d'une autre vie, d'une autre donne. Le monde, lui, est violent avec les bastonnades qu'organisent les islamistes, avec les soulèvements du Printemps arabe, avec les débuts d'une révolte en Syrie qui continue d'être écrasée dans le sang et la répression, avec la crise économique dans nombre de pays méditerranéens, sur les deux rives comme on le verra en Espagne.



Pourtant le récit n'est pas que colère. On y trouve l'amitié et même l'amour au-delà des frontières, géographiques et autres. Et les livres. C'est, m'a-t-il semblé, le fil rouge qui permet à Lakhdar de faire face, de s'instruire aussi bien sûr, et de s'évader d'une réalité parfois trop lourde à contempler.



Je découvre l'écriture de Mathias Enard avec Rue des Voleurs et suis conquise. L'histoire étant en quelque sorte un long monologue de Lakhdar, il y mêle habilement langage cru et envolées d'une grande beauté. Son personnage est très attachant et se veut représentatif d'une certaine jeunesse du Maghreb qui ne se retrouve nulle part, coincée comme il l'explique, entre des islamistes qui ne parlent que d'interdits et de répression et une gauche arabe toujours en retard d'une grève. Lui souhaite une vie où l'on puisse prier ou non, où l'on puisse sortir boire une bière avec sa copine sans être vilipendé par les lois et les traditions.



Je suis heureuse d'avoir repris ce livre ou plutôt qu'il m'ait donné une seconde chance de rencontre. A lire pour le fond comme pour la forme tant tout est magistral et réussi.
Commenter  J’apprécie          263
Boussole

Passées les injonctions médiatiques des prix et de la rentrée littéraire, et après avoir lu le très beau "Parle-leur de batailles, de rois et d'éléphants", j'ai voulu découvrir un peu plus de l'écriture de Mathias Enard. Je me décidais pour "Boussole ".



Franz Ritter vit à Vienne, il est musicologue et passionné par l'Orient musical. Une nuit dans sa chambre, se sachant atteint d'une maladie grave et en proie à l'angoisse, il va passer une nuit d'insomnie. Les heures passant, son esprit va se délester de souvenirs épars, réminiscences de lectures, de voyages, de destins de femmes et d'hommes partis à la découverte de l'Orient et au travers de celui-ci, d'une grande part d'eux-mêmes.

Et puis, il y a la belle Sarah, éprise elle aussi d'Orient, compagne érudite de ses voyages, de ses rêves...



Difficile de rendre tout à fait compte de ce livre de Mathias Enard.

"Boussole" est un roman dense, plein d'une érudition remarquable, imprégné de l'orientalisme, ce courant littéraire et artistique né en occident à la fin du XIXème siècle.

De là, les lieux aussi réels qu'imaginés : Istanbul, Damas, Téhéran, Palmyre, Alep,... Les très nombreux personnages, fictifs et réels, attirés, avec des fortunes diverses, par cet ailleurs, par cet orient idéalisé, empli de promesses et plus tard de désillusions : le diplomate autrichien Joseph Von Hammer-Purgstall, Franz Liszt, Eugène Fromentin, Margar d'Andurain, Anne-Marie Schwarzenbach,...

Si la lecture de "Boussole" est par moments quelque peu ardue (les arguments suppléent parfois le rythme et l'intrigue souvent se perd dans le propos), elle n'en demeure pas moins foisonnante, vraiment passionnante.

Cette lecture agit comme un opium doux, des saveurs et un climat dans lequel l'esprit aime se retrouver.

"Boussole" est un roman ambitieux, un roman d'amour, humaniste, qui réaffirme, dans notre époque heurtée où les civilisations d'Orient et d'Occident sont tentées par le repli identitaire et religieux, que l'altérité, est le plus sûr chemin vers soi-même.

Une belle lecture .
Commenter  J’apprécie          260
Boussole

Confronté à une longue nuit d'insomnie, Franz Ritter musicologue autrichien, qui vient d'apprendre sa maladie, dont on ne saura rien, essaye en vain de trouver le sommeil. Très vite ses souvenirs se télescopent et ils nous transportent d'heures en heures - elles constituent les chapitres du livre - vers cet Orient qui le fascine....Orient qui fascine aussi l'homme Mathias Enard, maitrisant l'arabe et le persan

Souvenirs qui arrivent en vrac, un souvenir en fait remonter un autre, un auteur est évoqué...il a écrit sur l'Orient...mais un autre arrive, puis un musicien...on passe d'une époque à l'autre en quelque lignes d'une référence à l'autre....On part de Vienne pour aller en Chine après avoir traversé l'Iran, la Syrie, l'Afghanistan, l'Egypte, le désert ...multiples retours en arrière, allers retours dans l'espace et le temps.... pas toujours facile à suivre....

Souvenirs qui ont pour fil conducteur l'amour de Franz pour Sarah, qui vient de présenter sa thèse, au début du livre, Sarah avec laquelle il a connu le désert Syrien, au cours d'une nuit : "Sarah s’était roulée en boule contre moi, le dos près de mon ventre...;" Sarah....qu'il a connue, aimée, qui l'a quitté, avec laquelle il communique toujours, qu'il souhaite retrouver, à laquelle il pense toujours...n'est-elle pas, un peu,la figure de cet Orient qui le fascine

Impossible de mémoriser toutes les références littéraires, musicales, historiques ou géographiques évoquées par Franz Ritter, par Mathias Enard au cours de cette insomnie... Admiration pour cette somme de connaissances, de références de toute nature

Roman...oui par certains cotés....les voyages, l'amour pour Sarah...la présence de personnages imaginaires confronté à des situations ou des personnages historiques avérés. Mais n'y cherchez pas une chronologie...à vous de la reconstituer

Thèse littéraire... certainement pas, elle serait rejetée par les examinateurs "Votre travail ne comporte pas de plan...".

Un livre original dans sa construction, dans sa structure et sa trame, riche en informations et en références...c'est sans doute ce que le jury du Goncourt a souhaité reconnaitre

Il m'a accompagné dans mes insomnies matinales...celles au cours desquelles on se lève, parce que tout se mélange dans la tête...

L'Orient nous a donné "les Milles et une Nuits, Mathias Enard nous donne une nuit sur l'Orient. N'est-ce pas un clin d'oeil de Mathias Enard dans la construction de Boussole?

On ne peut qu'admirer son érudition, même si indubitablement il a été aidé dans cette recherche - Cf.remerciements en fin d'ouvrage.

Il a su nous transporter, à partir d'une trame originale, une nuit d'insomnie, grâce à son écriture ses longues phrases, ses mots recherchés. Dictionnaire indispensable.

Il a su aussi aujourd'hui où, Orient et Occident s'opposent dans des conflits religieux et culturels, montrer que ces deux cultures sont étroitement liées et interdépendantes.

Plusieurs boussoles nous guident au cours de cette lecture, dont celle de Beethowen; celle que je préfère c'est celle de Sarah : "Je me suis réfugiée ici, dans le Bouddha, dans le dharma, dans la sangha. Je vais suivre la direction que marquent ces trois boussoles. Je me sens un peu consolée je découvre en moi et autour de moi une énergie nouvelle, une force qui ne demande en rien que j'abdique ma raison, bien au contraire. Ce qui compte c'est l'expérience....c'est difficile à partager. Imagine que je me lève à l'aube avec plaisir, que j'écoute et étudie des textes très anciens et très sages qui me dévoilent le monde bien plus naturellement que ce que j'ai pu lire ou entendre jusqu'à présent. Leur vérité s'impose très rationnellement. il n'ya rien à croire. Il n'est pas question de "foi". Il n'y a plus que les êtres perdus dans la souffrance, il n'y a plus que la conscience très simple et très complexe d'un monde où tout est lié, un monde sans substance.J'aimerais te faire découvrir tout cela, mais je sais que chacun fait son chemin pour lui-même, ou pas."(P. 356-7)

J'ai eu parfois envie de le jeter, de le refermer et de dire comme Sarah...:"Franz tu me soûles. C'est incroyable. Tu parles sans interruption depuis deux kilomètres. Mon dieu, ce que tu peux être bavard.!" et puis une petite voix m'a dit de persévérer...et je ne le regrette pas. Je viens de faire un beau voyage.

D'autres y verront de l'ennui...mais chacun fera sa propre lecture


Lien : http://mesbelleslectures.com..
Commenter  J’apprécie          260
Parle-leur de batailles, de rois et d'éléphants

Attirée par la magnifique photo de Sainte-Sophie dans les brumes matinales en couverture et alléchée par un titre on ne peut plus prometteur, j’ai refermé ce livre dans un long soupir d’ennui et avec une sensation de soif inassouvie.

On suit Michel Angel à Constantinople, au printemps 1506, où il est convoqué par le Sultan Bajaret pour construire un pont sur la Corne d’Or, pont qui unirait deux quartiers emblématiques de la ville et en ferait une mégapole orientale grandiose.

Malheureusement l’histoire est assez linéaire et attendue, et l’écriture convenue. Tout semble aseptisé, comme retenu, froid, alors qu’on se trouve aux portes de l’Orient, l’envoutant Orient qui par ses parfums, ses couleurs, ses musiques, tout son exotisme et sa sensualité, ne pouvait pas laisser de marbre le grand Michel Angel ... Or on trouve un Michel Angel insensible, distant, presque même éteint. Comme si Enard n’avait pas osé se laisser aller, peut-être trop impressionné par l’homme de génie. Le personnage du poéte Mesihi, plus modeste, est plus véridique, et donc plus réussi.

Commenter  J’apprécie          261
Parle-leur de batailles, de rois et d'éléphants

Voilà un ouvrage concernant Michel-Ange qui manquait à ma culture.

Après « Puissant et solitaire » et «Pietra viva » , celui-ci est un excellent complément.

Il relate le séjour de Michel-Ange à Constantinople où le sultan lui a confié la conception d’un pont sur la Corne d’Or. Une période peu connue de la vie de l’artiste.

On retrouve l’ambiance de l’époque, les intrigues, le rôle des artistes auprès des puissants, leurs difficultés financières, les désaccords, le mépris pour Léonard de Vinci…..

Michel-Ange n’apparaît pas sous un jour particulièrement sympathique dans ce texte, mais que l’écriture est belle et profonde !

Commenter  J’apprécie          260
Déserter

***COUP DE COeUR RENTRÉE LITTÉRAIRE 2023***



On a tous dans le coeur un déserteur enfoui…



Déserter, traversée du désert, fuir la violence.



Mathias Enard commence son Déserter avec un soldat pétri de culpabilité. Nous le suivons quelque part en Méditerranée, à travers la montagne, non loin de la mer. Il rejoint une cabane où il a vécu. Sa route va croiser une victime de la guerre, une jeune femme tondue.



En parallèle, nous sommes sur le paquebot Beethoven, face à l'ile aux Paons, dans les berges de l'Havel du quartier Wannsee, au sud-ouest de Berlin, pour rendre hommage à Paul Heudeber, un imminent mathématicien. Pour comble de l'ironie, ce sommet mathématicien se tient le 11 septembre 2001.



La première histoire nous est contée par un narrateur impersonnel qui s'adresse régulièrement, en le tutoyant au soldat. La femme tondue, elle, s'exprime, de temps en temps, directement en « je ».

La vie du mathématicien nous est relatée par sa fille Irina qui intercale des poèmes et courriers qui témoignent du grand amour à distance entre ses parents. Lors de l'irruption du mur de Berlin en 1961, Paul est resté en RDA par idéal, tandis que Maja a choisi les honneurs en RFA.



Mathias Enard réussit le tour de force d'harmoniser toutes ces acrobaties narratives.



Les Babéliotes se plaignent des références mathématiques, et moi je ris de bon coeur parce que je suis nulle en maths et que je savoure la poésie matematico lyrique de Déserter.



« Maja mon amour nous vaincrons, nous avons la force du cercle, celle du triangle rectangle sans lequel il n'y a pas de cercle, solides comme deux anneaux l'un dans l'autre, l'invariance du domaine de la passion… » p. 150



Faire des maths c'est Déserter, une sorte de politique de l'autruche.



Les maths, la guerre, tout est sublimé par ce poème de Paul à Maja (p. 90).



« J'ai rêvé de toi ce matin c'est la guerre

Je t'ai rêvée tout autour de moi

Vibrante

Une douce explosion mon coeur de ta présence

C'est la guerre ce matin je t'ai rêvée

Parfaite comme les équations qui font voler les obus

Parfaite comme l'évidence des équations

Parfaite comme la violence

Entière

Tu étais là en moi

J'étais seul

Tous n'avaient que la guerre à la bouche

Je n'avais plus que toi

Et la tristesse de ta disparition »



Mathias Enard ne nous enseigne pas les maths mais il nous renseigne sur certains pans de l'histoire des mathématiques. Quelques exemples :



- Nasir al-Din Tusi (1201, à Tus en Iran - 1274), philosophe, mathématicien, astronome et théologien perse musulman.

"Pensé à Papa. Comment ne pas le décevoir. Qui va s'intéresser, ici, à Nasir al-Din Tusi, aux mathématiques au moment des invasions mongoles ? À ce vieux chiite reclus dans les montagnes des Assassins ? À sa vision des nombres irrationnels ? À ses cercles, ses ellipses, ses orbites ? Quelle solitude." (p.74)



- Nicolas Bourbaki (mathématicien imaginaire), à l'origine du « bourbakisme », mouvement né en 1935.



Ces échanges de haut vol entre éminences mathématiques, avec en toile de fond l'effondrement des tours jumelles, nous semblent stériles et sans âme. C'est avec plaisir que nous basculons dans le monde sauvage du soldat et la femme tondue, dont on ne connaitra pas les noms, on saura juste qu'ils habitaient des villages proches et se connaissaient de vue.



Dans une typographie atypique, Mathias nous offre des passages d'une rare beauté et puissance, comme la description de l'orage (début page 91). La violence imprévisible de l'orage est comparée à la guerre.



Comme Georges Perec, Mathias Enard revisite les codes romanesques. Il nous confie ses réflexions, ses interrogations sur le passé, le présent et l'avenir sous forme de fiction. Comme Gustave Flaubert qui disait « Emma Bovary c'est moi », Mathias Enard pourrait dire « Irina, c'est moi ».



« L'enfermement, les évènements qui ont pesé sur l'année 2021, la guerre, si proche, si présente et si soudaine : autant de vagues qui me poussent vers les récifs. J'ai passé ma vie d'adulte à écrire, à parler et à écrire, et aujourd'hui que je viens de fêter mes soixante-dix ans, pour la première fois c'est ma propre vie que je raconte » (p. 35).



Le présent c'est 2021 avec la guerre d'Ukraine, le passé c'est la guerre, le mur de Berlin… et le futur ? il faut le décrypter entre les lignes.



Quel chef d'oeuvre ! Une thématique foisonnante sous le signe de « déserter » : guerre / amour, réalité / fiction, théorie / pratique, vie sauvage / vie civilisée, relations hommes / femmes…, le tout étayé par une riche documentation.



Et pourtant, jamais je n'aurais eu le bonheur de Déserter, sans cette lecture imposée par notre groupe de travail.



Et pourtant, je l'ai abordé à reculons car l'incipit n'est guère engageant :



« Il a posé son arme et se débarrasse avec peine de ses galoches dont l'odeur (excréments, sueur moisie) ajoute encore à la fatigue. »



J'ai cru que j'allais m'enliser, mais avant d'abandonner la partie, j'ai lu quelques critiques qui m'ont guidée.



J'espère vous avoir transmis mon enthousiasme et avoir le plaisir de lire vos billets, vos interprétations de Déserter.



Je vous invite à vous laisser séduire par ce style savoureux, et à découvrir le devenir du soldat, de la femme tondue et de la sphère mathématicienne.

Commenter  J’apprécie          2514
Parle-leur de batailles, de rois et d'éléphants

Sur fond de romance, Mathias Enard, écrivain français né en 1972, revisite l’histoire en imaginant ce qu’aurait pu être la visite de Michel-Ange à Constantinople s’il avait entrepris la construction d’un pont au-dessus de la Corne d’Or pour lequel l’avait sollicité le sultan Bayezid II en 1506.



Au-delà de l’histoire romanesque, c’est toute la personnalité de Michel-Ange qui est mise en valeur au fil des pages : sa curiosité insatiable, son talent artistique, sa capacité importante de travail et sa nature colérique légendaire. Un jeune artiste de génie mais peu à l’aise avec ses congénères. L’auteur ira jusqu’à relever sa nature ambivalente quant à ses amours avec une omniprésence importante de sa croyance en Dieu. Mathias Enard nous fait découvrir avec élégance cet artiste d’exception dont l’œuvre marquera à jamais l’histoire.



En toile de fond, Mathias Enard met en valeur un environnement très artistique que ce soit avec son style d’écriture très poétique ou ses personnages très attachants. A l’art qui permettrait de faire tomber les frontières y compris religieuses s’oppose l’univers plus terre à terre des luttes politiques et de pouvoir.



C’est avec beaucoup de plaisir que j’ai découvert ce roman dont la poésie atténue la dureté de cette époque de lutte de pouvoir. Très belle découverte !

Commenter  J’apprécie          250
Parle-leur de batailles, de rois et d'éléphants

Voilà un livre qui trainait dans ma liste des pense-bêtes, le titre m'avait attirée, et l'histoire encore plus. De Monsieur Enard, je n'avais encore rien lu, pas attiré sans doute par les commentaires ici et là sauf bien sûr ce livre.

J'apprécie beaucoup l'art en général et cette plongée immédiat dans ce monde qui plus est auprès du grand maître Michel-Ange, et encore plus à Istanbul , la partie était gagnée d'avance. Je ne connaissais pas cette partie de l'histoire de l'artiste, ce qui donne vraiment un intérêt certain au récit, et la plume magistrale de Monsieur Enard finit de nous combler, nous lecteurs tellement friands de petites pépites.



Je vais sans doute tenter un autre titre mais lequel ?



Beau voyage aux pays des vizirs, de l'art, une lecture intéressante tout autant que poétique.

Commenter  J’apprécie          250
Parle-leur de batailles, de rois et d'éléphants

1506, Michel-Ange travaille sur le futur tombeau du pape Jules II. Mais n'étant pas payé, il répond à l'invitation du sultan Bazajet à Constantinople qui lui demande de dessiner un pont. L'artiste s'y rend, expérimente de nouvelles choses, cherche l'inspiration, rencontre du monde. Mais il se laisse aussi distraire, et Rome n'est jamais bien loin dans sa tête...



Ce livre m'est complètement passé au-dessus de la tête, d'une force que j'aurais pas crue possible. Certes il est bien écrit, bien que le style soit parfois un brin ampoulé. Mais où est réellement l'intérêt ? Derrière l'histoire de la création d'un pont dans un contexte de guéguerre territoriale et religieuse se cache une impossible histoire entre deux êtres qui se termine mal, entrecoupée de micro-découvertes du monde, d'interrogations personnelles et de requêtes de gages. On perçoit très peu le génie de l'artiste, à défaut on comprend que ce qu'il fait est grandiose et basta, on s'en contentera. Mais rien n'est fait dans le récit pour réellement plonger le lecteur dans "l'intrigue" ou apprécier les personnages qui pour nombre d'entre eux ont pourtant réellement existé.

On sent que c'est bien documenté, mais cela reste la biographie totalement fictive d'un homme à un instant T et dans une certaine région du monde.

La construction en chapitres ultra-courts a de quoi surprendre également, tout comme l'insertion de chapitres à la deuxième personne du singulier qui interrompent le cours de l'histoire et ne sont pas d'une clarté phénoménale au premier abord sur qui peut bien être le "je" derrière ces apartés.

Bref, un roman français contemporain comme Actes Sud semble les aimer (j'ai eu la même sensation avec La Confrérie des chasseurs de livres de Raphaël Jerusalmy : un titre et une couverture un peu traitres, un récit ancré dans l'Histoire qui se veut plus ou moins recréateur de ce que l'on ne sait pas officiellement, l'absence totale d'envie voire d'impatience de retrouver le livre le soir en rentrant du boulot, une belle écriture mais un récit un peu vain qui ne sait trop où aller ni pourquoi il y va...) mais qui ne détient pas tous les atouts pour faire passer un agréable moment.
Lien : http://livriotheque.free.fr/..
Commenter  J’apprécie          252
Boussole

Hé bé, pauvre sot, quelle lecture t'es-tu infligée là… Que ce fut éprouvant ! Une sorte de « L'Orient pour les nuls »… pour leur faire bien comprendre qu'ils resteront profanes à jamais. Que j'ai pourtant aimé les volutes d'opium des premières lignes ! - pensant qu'elles me feraient franchir les portes d'un pays de merveilles. Ah envoûtant Orient, extase magnifique, les plus grands t'ont raconté, chanté, loué ! Ils m'attendent ! J'ai donc tenu à aller au bout des rêveries d'insomniaque de ce Franz Ritter, en m'auto-suggérant à chaque page, même la plus pédante et indigeste parmi des dizaines d'autres, également indigestes et pédantes, que ce voyage oriental et savant pouvait apporter une belle surprise, à n'importe quel moment, y compris celui où l'on désespère vraiment de pouvoir rêver ne serait-ce qu'un chouïa. De fait, la patience a parfois payé : il y eut de belles découvertes, un peu magiques même, dans cet immense fatras des mille et une cuistreries.

Page 27, la lassitude est déjà bien installée, et on sent que la traversée du désert va être longue-longue-longuette, qu'il soit saharien, arabique ou gobique. Franz, plongé dans ses souvenirs, énumère encore et toujours des connaissances – qui sont les siennes autant que celles de l'auteur -, précises, cliniques. Le ton docte est celui d'un professeur d'université, pas d'un paumé amoureux d'art à la lisière de la mort. Lui nous aurait intéressé. On décroche souvent. On suit des yeux des noms de livres, de thèses, d'oeuvres d'art, d'artistes… dispersion… Où est le nord ? Heureux les érudits qui peuvent pisser de la ligne rien qu'avec leurs références culturelles. L'inventaire « costaud » et foutraque concerne la musique, l'histoire, l'architecture, la peinture, et Dieu sait que tout ça pourrait [devrait] captiver, mais l'auteur se regarde écrire des choses intelligentes vite inintelligibles. Un amas confus, abscons. Cher monsieur, autant ne rien nous dire si vous ne voulez pas partager…

Certes, on trouve çà et là des réflexions pertinentes, mais le fil hésite entre romance avec la sublime intellectuelle Sarah et des extraits de revues spécialisées dans la musicologie ou l'art baroque. L'étalage en devient puéril. On se dit alors que cette bête de Goncourt est à l'opposé des romans du génial Umberto Eco chez qui l'érudition est gourmande et généreuse.

Cette « Boussole » m'est apparue comme une entreprise littéraire 'totalisante', dont l'objectif serait d'englober tout le savoir et tout l'imaginaire sur l'Orient, sa magie, son essence. Lawrence d'Arabie, Liszt, les combattants marocains en 14-18, les poètes persans, les maîtresses de Flaubert... rien ne doit échapper à l'auteur ! Celui-ci a choisi, dans une obsession peut-être très occidentale, de chosifier ainsi, d'opter pour la complétude. Le bouquin pourrait dès lors au moins présenter une commodité encyclopédique et offrir, comme certains ouvrages d'Alberto Manguel, une ouverture vers d'autres lectures. Mais ce pavé bourratif ressemble à une gigantesque bibliothèque pas ou mal rangée dont on souhaiterait lire chaque ouvrage, et on maudit le bibliothécaire qui semble avoir pris plaisir à ne pas classer et ne transmet rien. Ceux qui comprennent en savent autant que lui et le félicite de refléter leur égo magnifique. Les autres sont laissés à leur insuffisance. Voilà tout ce que vous ne saurez jamais. Merci. De toute façon, « il n'y a que des insomniaques pour écouter Die Ö 1 Klassikracht dans leur cuisine. Schumann ». Et bing.

Bref, ce livre-contenant contient bien tout le contenu. L'Orient est saisi, empaqueté. Mais le nigaud pauvre mortel que je suis se dit in petto que pour humer de son mystère - car nom d'un djinn et bon sang de bois il y a forcément un mystère de l'Orient ! -, l'évocation d'un poème de Nerval ou quelques phrases de Loti picorées dans Aziyadé auraient peut-être suffi.



Bon, soyons honnête : l'auteur montre un peu d'humilité lorsqu'il concède qu' « il y aurait une apostille à rajouter à mon ouvrage, une coda, voire un codicille ». Faites donc, monsieur.

Il faut d'autant moins accabler ce livre-fleuve qu'il laisse des traces (une traversée de désert, ça laisse forcément des traces). L'écriture se fait parfois belle, agrémentée de vraies idées d'auteur, telle la lumière bleutée de l'ordinateur dans la nuit, comparée à une œuvre de Paul Klee ; ce sont ces petits miracles qu'on aimerait savourer, ces idées simples, assez magiques et pas moins profondes que le savoir universitaire étalé de page en page. Des passages captent l'attention, des récits dans le récit qui se seraient suffi tant ils peuvent être lus comme des ouvrages quasi-indépendants. J'ai ainsi apprécié la confession avinée – enfin, pas vraiment avinée puisque arrosée précisément de vodka arménienne – de l'orientaliste Gilbert de Morgan, éconduit spirituellement par la superbe Azra, dans l'Iran révolutionnaire. Une mise en abîme du narrateur qui relit de vieux écrits ; une nouvelle à part entière ; une oasis salvatrice dans l'étendue du roman . La justesse du propos sur l'Iran s'y révèle digne d'intérêt, avant de s'éparpiller de nouveau et de se noyer dans des considérations savantes.

Voilà, c'était l'aveu d'un ignare déboussolé... mais pas découragé devant ses rêves d'Orient.

Commenter  J’apprécie          257
Boussole

Boussole est un texte érudit, passionnant, épuisant.



La surabondance de noms propres et de références musicales, littéraires, politiques, nous laisse à peine reprendre notre souffle. On ne peut qualifier ce texte de roman, mais plutôt de plongée abrupte dans les connaissances de l'auteur. Et même si on y glane des anecdotes parfois amusantes (tel ce vieil iranien gardien de musée resté fidèle à Hitler), parfois glaçantes, le plaisir de lecture se trouve considérablement amoindri de cette avalanche d'informations.



On regrette que les caractères du narrateur et de Sarah, la femme qui vient hanter sa nuit d'insomnie au cours de laquelle tous ses souvenirs reviennent à la surface, ne soient qu'effleurés, révélés en creux à travers leurs conversations de haute volée.



Ce texte mérite d'être lu, mais attention, une bonne dose de calme et de concentration est nécessaire pour se plonger dans l'atmosphère orientaliste de Boussole. Cet effort sera néanmoins récompensé par une sensation d'ailleurs et par une percée dans le mystère oriental qui a fasciné tant d'artistes européens.
Commenter  J’apprécie          251
Parle-leur de batailles, de rois et d'éléphants

Michel-Ange qui fuit la colère du Pape Jules II, pape guerrier et mauvais payeur, débarque à Constantinople le 13 mai 1506. Il répond à l’invitation du sultan Bajazet et à son projet de construction d’un pont sur la Corne d’Or. Les plans de Léonard de Vinci ayant été refusé, Michel-Ange relève le défi. L’auteur raconte un Michelagnolo ignorant des intrigues dont il est l’objet. C’est cette tranche de vie du grand artiste que raconte Mathias Enard.

La qualité de l’écriture, le style fluide, font de ce livre un vrai bijou, un réel coup de cœur. A lire !
Commenter  J’apprécie          250
Parle-leur de batailles, de rois et d'éléphants

Je suis sous le charme de ce récit historico-poétique. Que c'est bien écrit et fluide!

Des petits chapitres d'une page parfois deux qui se dévorent.

Michelangelo, sculpteur et architecte de génie quitte Rome pour dessiner les plans d'un pont à Constantinople. Rome reste fort présente dans ce bouquin car il a tout de même tourné le dos au Pape pour vivre son périple Ottoman et c'est la tête remplie de doutes qu'il entame son travail.



Gros travail documentaire sur les œuvres qui se trouvent au Vatican, sur Léonard de Vinci, Raphaël,... et la fin juste sublime quand dans ses notes, Mathias Enard énumère tout ce qui est vrai que ce soit objets, œuvres d'art ou évènements et termine son bouquin par...Pour le reste, on n'en sait rien.



J'ai beaucoup aimé, la douceur et la beauté qui ressort de ce roman.

Commenter  J’apprécie          240
Remonter l'Orénoque

Une «Remontée de l’Orénoque» dérangeante et éprouvante qui baigne dans une atmosphère chaude, humide comme un corps de femme qui s’ouvre. 


«Quand tu aimes il faut partir» ce vers d’un poème de Cendrars revient à deux reprises au cours de ce récit et Blaise Cendrars est bien présent et accompagne cette remontée de l’Orénoque qu’il a lui-même parcourue en compagnie de Moravagine : «Nous étions entourés de fougères arborescentes, de fleurs velues, de parfums charnus, d'humus glauque. Écoulement. Devenir. Compénétration. Tumescence. Boursouflure d'un bourgeon, éclosion d'une feuille, écorce poisseuse, fruit baveux, racine qui suce, graine qui distille. Germination. Champignonnage. Phosphorescence. Pourriture. Vie. Vie, vie, vie, vie, vie, vie, vie, vie.» 
Cet extrait de Moravagine est proche de l’atmosphère qui se dégage du livre de Mathias Enard livre violent de passion, de folie et de mort , empreint d’une grande poésie.

Youri et Ignacio sont chirurgiens et travaillent en équipe avec Joana, infirmière. Durant la canicule de 2003, la salle d’opération est le seul lieu respirable, frais et il y réside, en dépit de la proximité de la mort, une certaine pureté, la pureté, l’efficacité, la précision du geste qui incise les corps au scalpel à l’opposé du tumulte de la passion qui unit Joana à Youri ; passion mortifère, perverse car Youri, en dehors de la salle d’opération où il reprend son calme et sa maîtrise, vit sous l’emprise de l’alcool, en équilibre instable au bord du gouffre de la folie. 
«Il (Youri)croyait se guérir en fuyant, s’enfoncer dans les plaies, y disparaître, percer les mystères, toucher la vérité.»p 88

Ignacio marié à Aude est désespérément amoureux de Joana qui fait appel à lui quand elle se trouve en détresse face à Youri qu’elle pense sauver de la destruction alors qu’il s’y refuse. Et comme l’annonce Aude l’épouse d’Ignacio «... ce genre d’homme emmène toujours quelqu’un avec lui vers le fond, ne serait-ce que pour avoir un spectateur.» p59

Situer le déroulement de ce récit lors de la canicule de 2003 qui entraîna la mort de milliers de personnes, les hôpitaux et les morgues débordés, n’est pas un hasard. Ce roman est celui de l’exploration des corps et des âmes, de la décomposition, mort et vie entrelacées. Remonter l’Orénoque ouvre sur une même béance et la pénétration d’une chaleur étouffante et humide est aussi celle d’un retour à l’enfance et à la naissance.

La fin de ce roman est un coup de poing qui vous laisse groggy.
Commenter  J’apprécie          241
Déserter

Deux récits imbriqués. Qui ont bien un point commun, mais ténu.

Une langue se voulant riche et travaillée.

L'Europe et ses crises, passées mais encore présentes dans nos esprits, proportionnellement à l'influence des récits officiels qui en sont faits.

L'histoire du mathématicien Est-allemand m'a laissé de marbre (il aurait dû choisir un italien), celle de sa femme et de leurs relations également. Je ne parlerai même pas de la petite communauté des mathématiciens qui le célèbrent et dressent son portrait. Quant à sa fille...

A la lumière des évènements actuels, je trouve assez, comment dire?, amusant? convenu? tellement prévisible? de mettre en parallèle 2001 et la mémoire de la seconde guerre mondiale. Qu'en tirer? Que les états-unis sont le refuge des démocrates? Sérieusement? zéro sur cinq pour moi à cette demi-histoire au ton appliqué voire docte et politiquement correcte.

La seconde trajectoire est temporellement plus proche, humainement aussi puisque c'est l'histoire de l'embrigadement dans une guerre qu'on peut qualifier de civile puisqu'il s'agit de peuples qui vivaient ensemble et qui souhaitent se séparer. Aucune analyse politique cette fois (Disparue de l'histoire officielle), que de l'exploration psychologique, à deux voix, celle de la victime et celle du bourreau. Enfin, bourreau, c'est beaucoup dire, car l'auteur, sans s'appesantir, interroge ces notions autour du bien et du mal...

Cette partie m'est apparue bien meilleure, par le ton moins professoral et le fait que nos oligarques sont susceptibles à tout instant de nous mobiliser de force pour une cause semblable. N'oublions pas qu'il faut réarmer démographiquement la France.

Donc cinq sur cinq pour moi qui reste, pour l'exemple, en dehors des sentiers de la gloire.

Bilan mitigé donc.



Commenter  J’apprécie          230
Parle-leur de batailles, de rois et d'éléphants

1506, Michel-Ange (celui de la chapelle Sixtine) quitte Rome où il est en délicatesse avec le pape Jules II au sujet de la construction du tombeau de ce dernier,

et arrive à Constantinople sur l'invitation du sultan Bayazid qui veut faire construire un pont reliant la ville à Pétra un faubourg du nord.



C'est mon premier Mathias Enard et ce livre court d'environ 150 pages se prête bien à la découverte.

Avec des chapitres qui font rarement plus de 2 pages, c'est une invitation au voyage, toute douce et pleine de poésie.



La plume de l'auteur est à la fois simple et riche.

Elle nous fait partager la vie de l'artiste, son oeil, son cheminement créatif, elle met en évidence quelques différences de culte entre l'Islam et le Christianisme au détour de la visite de Sainte Sophie.



Généreuse en vocabulaire spécifique à l'Orient et à l'architecture, c'est une belle promenade pleine de langueur et de parfums.
Commenter  J’apprécie          232




Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Mathias Enard Voir plus

Quiz Voir plus

La fantasy pour les nuls

Tolkien, le seigneur des ....

anneaux
agneaux
mouches

9 questions
2493 lecteurs ont répondu
Thèmes : fantasy , sfff , heroic fantasyCréer un quiz sur cet auteur

{* *}