AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Critiques de Mathias Enard (1115)
Classer par:   Titre   Date   Les plus appréciées


Le banquet annuel de la confrérie des fossoye..

C'est un roman divisé en 7 chapitres qui eux même sont entrecoupés de 4 chansons ...mais il ne faut pas croire à cette structuration ( à mon avis établie après l'écriture du livre ! ) car en 426 pages Mathias Enard fait voyager son lecteur dans l'espace : sa région du Poitou/Charentes et , d'autre part dans le temps car il a trouvé un subterfuge audacieux pour ce voyage : en effet, les personnages par l'intermédiaire des réincarnations vont être multiples et, beaucoup sont des célèbrités comme Rabelais, Agrippa d'Aubigné et autres poètes, guerriers...

Mathias Enard fait étalage de sa grande érudition, de son humour pour valoriser sa terre natale ! Il "navigue " entre le présent et le passé au point que le roman est en même temps socioculturel et historique, avec de magnifiques descriptions géographiques/climatiques !

Un roman surchargé, embrouillé voire ennuyeux avec un foisonnement excessif d'anecdotes, de citations, de poèmes ,de chansons !

Bref, c'est l'histoire de David Mazon un jeune anthropologue parisien qui vient faire sa thèse à " la Pierre-Saint-Christophe " : un petit village ( de fiction ) ou il va être obligé d'interroger les habitants , il est logé dans une ferme et commence à fréquenter le Café-Epicerie-Pêche ou tous se réunissent et en particulier les fossoyeurs car le patron et maire en est un aussi !

Passage incontournable du roman : le banquet annuel de la Confrérie des fossoyeurs ou, pour échapper à la Mort qui rode et précipite les individus dans la Roue du Temps : les "frères" vont défier la camarde pendant 3 jours à grand renfort de ripailles, beuveries, chansons et jurons paillards ! Assez indigeste, même si la tradition rabelaisienne est respectée et honorée !

David Mazon va rencontrer l'amour auprès d'une maraichère et opter pour la ruralité !

Au fond, dans cette région : il y a tout pour être heureux, même la transmigration des âmes et, l'auteur lance une ouverture en direction de la nature et de l'écologie !
Commenter  J’apprécie          230
Parle-leur de batailles, de rois et d'éléphants

Je voulais découvrir la plume de l'auteur j'ai donc choisi celui-ci car il est plutôt court et que j'ai aimé la quatrième de couverture et pour moi c'est une réussite, on arrive a être complétement embarqué dans ce récit malgré le fait qu'il soit court.



J'ai aimé suivre Michel-Ange entre l'orient et l'occident, j'ai aimé ces ambiances et ses lieux si bien décrit que se soit autour de l'Arno ou à Istanbul.



Il y est également question d'art et de peinture, j'ai aimé les chapitres courts, les correspondances dans le récit et l'on tourne les pages tellement rapidement



Un bon récit dépaysant mais également très instructif sur cette époque et cet artiste
Commenter  J’apprécie          231
Parle-leur de batailles, de rois et d'éléphants

J’ai d’abord été attirée par ce titre mystérieux et balancé, et par cette magnifique couverture aux tons de bleus craquants. C’est mon premier roman de Mathias Enard (il paraît que Zone est différent et très bien).



De beauté, on pourrait dire qu’il en est forcément question puisque le héros s’appelle Michel-Ange… Mathias Enard s’est inspiré d’un fait historique réel, l’invitation de Michelangelo à la cour du sultan Bayazid à Istanbul, il a ensuite imaginé, senti, brodé, ciselé un court roman qui préserve le mystère de son titre. L’artiste a 30 ans, il a déjà sculpté la Pieta, le David, quand, en froid avec le pape Jules II, il répond à l’appel du sultan pour aller construire un pont sur les rives du Bosphore, un pont nourri de la vie de cette ville, elle-même trait jeté entre Orient et Occident, entre cultures hellénique, juive, ottomane.



Sur place, le sculpteur, le « Franc malodorant », est à la fois fasciné et rebuté par cette civilisation, il ne cesse de se promener, de se faire réciter des vers, de dessiner (« …le dessin, la blessure noire de l’encre, cette caresse crissant sur le grain du papier »). Il connaîtra le frémissement du désir, les tourbillons de la débauche, le souffle cruel de la trahison et de la désillusion…



Plus qu’un pont sur la Corne d’or, le livre nous parle de ponts entre Orient et Occident bien sûr, entre poésie et sculpture, entre un homme écrasé de mille soucis et une femme mystérieuse, entre Rome et Istanbul… D’une écriture ciselée, sensuelle, musicale, Mathias Enard nous entraîne des rives du Bosphore aux quartiers chauds de Constantinople, il nous fait participer à l’acte de création de l’artiste, pont jeté pour sublimer les chagrins, les déceptions, pour inventer son chemin d’artiste, pour laisser de soi une trace, parfois inattendue.
Lien : http://desmotsetdesnotes.wor..
Commenter  J’apprécie          230
Parle-leur de batailles, de rois et d'éléphants

Il y a déjà de nombreuses critiques sur ce livre, avec, je serais plutôt brève. Ce roman raconte la venue de Michel-Ange à Constantinople pour construire un pont et également les tourments du poète Mesihi, nommé par son dirigeant pour accompagner l'artiste. Au fil des pages, nous découvrons la ville, les circonstances du départ précipité d'Italie de Michel-Ange, les nuits chaudes et musicales et cette atmosphère particulière aux saveurs d'Orient. J'ai beaucoup aimé ma lecture, je me suis sentie ailleurs, dans un autre temps. Énard m'a fait voyagé, ses mots m'ont transportés. Mon seul bémol : que ce fut si court.
Commenter  J’apprécie          233
Boussole

J'aurais aimé vous dire que j'ai adoré cette errance intérieur de Franz Ritter, musicologue autrichien trop sage. Inféodé à sa Maman, il a pourtant parcouru l'Orient, d’Istanbul à Damas ou Téhéran, frayé, dans la réalité et dans les livres, avec les orientalistes les plus illustres, passés ou contemporains, à commencer par l'insaisissable Sarah dont la fascination hante cette nuit hallucinée. Tout au long de ces dix heures d'insomnie, menacé par une maladie mortelle à laquelle il oppose un fatalisme plein d'humour, il se vautre dans une jouissance tant érudite que sensuelle de l'érudition et de l'amour, dans un délice noir et torturé qui rappelle celui du fumeur d'opium .



Cette narration débordante, intelligente, obsessionnelle, cache un homme-enfant qui n'a su s'ouvrir à l'amour, et qui voit arriver tout à la fois la fin de sa vie et la fin d'une époque. De Vienne, première porte ouverte sur l'Orient, il assiste, faute de fondations , à l'effondrement d'un rêve : l'Occident fasciné par l'Orient . L'Occident ayant tellement déchu que l'Orient se défend de lui, maintenant, et s'émancipe dans un rejet dont la violence est terrifiante.



Projet séduisant, magnifique, érudit, brillant. Mais c'est trop. Beaucoup trop. Même pour les mélomanes. Même pour les passionnés d'Orient.



Enard s'écoute écrire, écumant, logorrhéique, démesuré. Il se laisser aller au name-dropping ( qui a certes plus de classe avec Liszt et Wagner qu'avec Pujadas et Beigbeder), s'emporte dans des anecdotes dont l'accumulation sature, multiplie les personnages, les entrées, les péripéties, se perd sur des chemins détournés. Il y a de nombreux moments magiques, des atmosphères torrides ou drôles, des épisodes passionnants, de splendides phrases à rallonge, mais cette accumulation devient fatras orgiaque et envahissant, on est totalement submergé, l'indigestion arrive peu à peu (très vite à vrai dire) et l’intérêt se perd pour ce qui se voulait un trésor chatoyant et n'est qu'un capharnaüm irrespirable .



Je regrette , je regrette beaucoup car de nombreux passages m'ont plu voire emportée, que cette nuit d'insomnie comme écrin à ce noir désespoir était une idée assez géniale, mais ces joyaux ont été totalement noyés comme par un tsunami. Je regrette aussi parce que Mathias Enard a écrit avant des romans magnifiques, où il avait su mettre des limites à sa démesure.
Commenter  J’apprécie          233
Zone

J’ai mis trois semaines à lire ce livre ébouriffant d’un peu plus de 500 pages, et j’en ressors lessivée. Tout d’abord car le thème en est difficile. Dans ces 24 chapitres figurent tous les conflits que notre monde a connu et connaît encore, et avec eux les innombrables actes de barbarie et de violence qu’ils ont engendré.

Le héros de cette histoire a été un acteur clé de toutes ces horreurs, et en même temps que nous suivons son trajet en train jusqu’à Rome, nous revivons avec lui cette longue histoire et les actes terribles qu’il a commis. Rome, destination finale pour un nouveau départ. Il doit en effet remettre au Vatican une mallette contenant tous les renseignements collectés par ses soins durant des années, sur tous les hommes qui ont fait ces conflits et commis ces violences. Ensuite, il a prévu de disparaître. D’ailleurs il a déjà endossé une nouvelle identité pour ce voyage.



Lessivée aussi, car ce livre est tellement fouillé et documenté qu’il implique une grande concentration pour ne pas perdre le fil de l’histoire. Certains moments m’ont happée (en particulier les magnifiques passages sur Intissar et Marwan), mais à d’autres je me suis acharnée à poursuivre ma lecture, car il m’arrivait de décrocher.

Enfin, le style exige également une grande concentration, car il y a absence ou presque de ponctuation. Ces plus de 500 pages sont une interminable phrase, ponctuée ça et là de quelques virgules. Mais ne vous en effrayez pas, cela ne pose aucun problème. Simplement ce n’est pas un livre que l’on prend pour quelques minutes de lecture par-ci par-là au gré du temps libre. C’est lui qui vous impose son rythme. Il faut consacrer du temps à ce roman fleuve impétueux très exigeant.



Je n’étais pas certaine d’écrire un billet sur ce livre, tant je craignais de ne pas parvenir à restituer ce que j’ai ressenti en le lisant. Et aussi car je ne savais pas trop si je l’avais aimé ou non finalement. En écrivant ces lignes, je réalise que cette lecture m’a marquée, et que ce roman sera certainement pour moi un des plus marquants de cette rentrée littéraire.
Lien : http://tassedethe.unblog.fr
Commenter  J’apprécie          230
Parle-leur de batailles, de rois et d'éléphants

Voila un livre que j’ai lu d’une traite, et que je crois je vais relire immédiatement, c’est vous dire….

Il est vrai qu’il est court, et c’est là le seul reproche que je lui ferai, il est trop court, beaucoup trop court.

J’en voulais encore moi de cette magnifique histoire, celle de Michel-Ange débarqué le jeudi 13 mai 1506 à Constantinople invité par le sultan qui veut lui faire dessiner un pont devant relier les deux rives du Bosphore.

Et si Michel-Ange a accepté de venir travailler pour ce Mahométan, lui qui est si religieux, c’est par rage contre ce puissant Pape qu’est Jules II qui lui promet toujours de le payer sans pour autant le faire, pour l’œuvre magnifique qu’il a déjà accomplie pour lui.

Mais Michel-Ange a peur, peur d’être dénoncé auprès du Pape qui risque de voir une terrible trahison de la part de l’artiste et de l’excommunier.

Nous allons donc suivre les traces de Michel-Ange à travers la ville, et les odeurs, les couleurs qui lui sont nouvelles qu’il va découvrir jour après jour et qui auront à jamais une forte influence sur son travail.

Mais c’est aussi l’histoire du poète Mesihi chargé par le sultan d’accompagner Michel-Ange qui se consumera d’amour pour l’artiste fantasque, et l’histoire d’une bien mystérieuse danseuse andalouse à laquelle Michel-Ange va succomber.

Quant à moi je suis sous le charme de ce superbe récit.

Commenter  J’apprécie          222
Déserter

C'est le dernier livre d'Enard et sans doute le meilleur d'une rentrée littéraire qui jusqu'ici n'est guère enthousiasmante

Et c'est un beau et un grand livre.

C'est d'abord une histoire quasi-mythique qui le traverse ; elle réunit dans un pays non précisé mais où n'est guère difficile de reconnaître la Bosnie du lendemain de la guerre un soldat déserteur de l'armée victorieuse et une femme du camp des vaincus.Et un âne.

Ils ont toutes les raisons de se craindre et de détester et pourtant leur fuite les unit dans une alliance improbable. Et cette errance, sans rapport à première vue avec le reste du livre, lui donne pourtant sa scansion. Elle rappelle en cela les "chansons", contes et mythes revisités , qui scandent pareillement l'avant dernier livre de l'auteur, le banquet annuel de la confrérie des fossoyeurs " ,(si vous ne l'avez pas lu, lisez le, c'est l'occasion)

Et puis ? Et puis c'est une belle et triste histoire d'amour, celle de Paul et de Maya. Paul et Maya étaient de jeunes allemands Communistes et mathématiciens. Ils se sont rencontrés avant la Guerre, l'ont traversé, ont lutté, ont été séparés, ont souffert, ont (Paul) été déportés, se sont retrouvés, se sont installés dans la nouvelle Allemagne communiste, ont eu une fille,Irina, qui est la gardienne de leur mémoire et la narratrice d'une partie de l'histoire, puis se sont séparés à nouveau sans le vouloir vraiment, ont vécu chacun de leur côté, chacun dans une Allemagne, mais sans jamais cessé de s'aimer. Paul, resté en RDA, toujours communiste malgré la répression des grèves de 53, le Mur, l'écrasement du printemps de Prague, est devenu un grand mathématicien. Maya a vécu à l'ouest et a fait de la politique dans le SPD de Willy Brandt. Malgré la chute du mur, ils n'ont pas revécu ensemble (pourquoi ? Peut-être une piste révélée en fin de livre)mais n'ont pas cessé de s'aimer, les très belles lettres de Paul à Maya en témoigne. C'est une belle et triste histoire d'amour, d'autant plus belle qu'elle est triste.

Et puis ? Et puis il y a aussi le destin de l'Allemagne, de l'Europe du monde, durant le temps de leur vie, avec la ligne de partage qu'est la chute du Mur, qui n'est pas la fin de l'Histoire, mais le début d'une autre histoire ; Fukuyama s'est trompé, c'est Huntington quo avait (partiellement) raison

l'Allemagne réunifiée a poussé à l'éclatement de la Yougoslavie et la guerre a éclaté en Bosnie. l'URSS a éclaté et la Guerre est revenue en Ukraine. C'est de cette année-la qu'Irina nous raconte l'histoire, qui semble bégayer et opposer des fantômes réveillé d'une autre guerre.

De même , en 2001, un congrès en hommage à Paul a eu lieu à Berlin. Il s'est terminé prématurément le 11 septembre, pour les raisons que l'on devine.

Le drame est bien engagé. Espérons seulement que le partisan des guerres bosniaques (nous avons maintenant qu'il est là pour témoigner de ce qu'il y a de pire dans la guerre, et que toutes les guerres sont une seule guerre ), espérons que lui restera où il est, où qu'il soit



Et tel est l'aboutissement des combats et de l'histoire et de Maya et Paul

Voilà pourquoi ils ont vécu et lutté, et se sont sacrifiés. Leur espérance n'aura eu que le mérite d'exister dans l'instant, et de les faire vivre, et de gâcher leur vie

Espérons que nous n'en trouverons pas d'autres. Celles qu'on nous proposent déjà tournent mal

Oui c'est un grand et beau livre et Mathias Enard est l'un de nos deux plus grands écrivains

Ceux qui me font l'honneur de me lire de temps en temps savent qui est l'autre

Allons, la littérature au moins n'est pas perdue. Et d'ailleurs elle se complait dans les temps difficiles



J'ai relu ma chronique, craignant d'avoir quelque peu spoiler, et finalement je n'ai pas fait plus que les autres. Y avait -il moyen de faire autrement ?

Parenthèse totalement incongrue, mais ce sont les petits riens qui nous rassurent, il faut cultiver notre jardin. J'avais à un moment utilisé en place de spoiler le mot quebecois 'divulgacher ". Je l'abandonne parce qu'il est artificiel et disgracieux (comme le québécois en général) parce que spoiler est un verbe français du premier groupe : il se conjugue, on peut même l'employer à l'imparfait du subjonctif : il eût été fâcheux que je vous spoilasse. le vocabulaire s'emprunte sans cesse, l'important est que la structure de la langue soit respectée
Commenter  J’apprécie          223
Parle-leur de batailles, de rois et d'éléphants

Mathias Enard imagine le séjour de Michel-Ange à Constantinople, invité par le sultan Bajazet à construire un pont reliant les quartiers Nord d’Istanbul au centre-ville. Si cette invitation a vraiment été envoyée, le récit proposé est fictif.



Au-delà d’une vérité historique, l’importance du texte est de permettre la rencontre entre deux mondes, deux empires. Celui d’Orient avec Byzance, lieu de séjour de Michel-Ange, et celui de l’Occident avec Rome d’où s’est « enfui » l’artiste pour contrarier le pape Jules II. C’est aussi, quand on lit la biographie de Mathias Enard, écrivain français pétri de culture orientale et parlant l’arabe, une forme imagée de ce que qu’est l’auteur, un occidental amoureux de l’Orient. Du moins j'y trouve une projection personnelle.



Mais cette rencontre, c’est aussi celle d’une fin. L’Espagne vient d’achever la Reconquista et se lance avec le Portugal sur les rives atlantiques pour conquérir facilement de nouveaux territoires. Par ailleurs, c’est la fin du Quattrocento, c’est-à-dire la Renaissance italienne. La péninsule étant soumise à l’assaut d’autres puissances comme la France .



La Méditerranée n’intéresse plus. Ce n’est pas la route de la soie qu’il faut conserver, c’est celle des Indes occidentales, ou bien c’est passer par Bonne Espérance pour s’affranchir de la traversée des territoires orientaux et musulmans.



Alors quand l’auteur imagine Michel-Ange réfléchissant à un pont qui sera l’œuvre, le bouquet final de cette période, il rêve de la paix et de la pleine

compréhension des peuples à travers l’amour, l’amitié mais aussi l’échange culturel. Pour cela Mathias Enard met en scène cette histoire fictive avec des mots que j’ai trouvés incisifs, concis et suffisants pour traduire l’esprit imprimé par l’auteur.



Malheureusement, dans ce récit, la jalousie et l’aveuglement idéologique d’une poignée de personnes amènera finalement la violence, la mort et la rupture des liens tissés, tel ce pont que Michel-Ange devait jeter entre deux rives opposées mais qui ne verra jamais le jour.
Commenter  J’apprécie          220
Le banquet annuel de la confrérie des fossoye..

Avec son personnage principal, David Mazon, étudiant parisien venu enrichir une thèse pour lancer sa carrière universitaire, Mathias Enard nous plonge dans la France profonde, La Pierre-Saint-Christophe, village des Deux-Sèvres de 649 habitants.

Confiant, David s’installe à La pensée sauvage, pièce louée par Mathilde et Gary, un couple d’agriculteurs. Mathilde sera la première personne interviewée pour les besoins de sa thèse « ce que signifie vivre à la campagne aujourd’hui. »

Et cela, David va vite s’en rendre compte. Confort sommaire, besoin d’un moyen de locomotion pour aller faire les courses, comprendre le patois local, fréquenter locaux étranges et exilés farfelus.

En côtoyant le café-pêche de Thomas où l’étudiant se laisse vite enivrer par le blanc-cassis local, la vie sociale du jeune homme avance plus vite que sa thèse. Il faut bien se divertir, se réchauffer hors de la chambre où escargots et vers rouges pullulent, où ses seuls divertissements sont la lecture de Victor Hugo, de Malinovski, le Tetris, les deux chats de la maison et les visios coquines avec sa copine Lara, restée à Paris pour bûcher sur ses concours administratifs.

Après des débuts difficiles, l’apprenti ethnologue se plonge de plus en plus dans son milieu d’étude. En lisant son journal, nous suivons son attachement pour les habitants de ce lieu baigné d’une nature généreuse.

Après le soutien de ses logeurs, David s’attache particulièrement à Arnaud, un benêt trentenaire capable de citer tous les grands évènements historiques quand on lui donne une date, à son grand-père lubrique et incompréhensible et surtout à sa cousine Lucie, une divorcée impliquée dans la défense de l’environnement. Mais il ne faut pas oublier Martial, le maire et fossoyeur du village qui nous fera participer au banquet annuel de la confrérie des fossoyeurs, deux jours où la mort s’arrête pour céder la place à une table pantagruélique où nos papilles se réveillent sous le flot des mets et des vins de la région et nos esprits se réjouissent à l’évocation des histoires racontées par les convives.

David nous entraîne dans l’histoire mouvementée des familles du village et celle des parents du grand-père de Lucie est particulièrement tragique. Mais il nous parle aussi des étrangers au village comme Max, un ancien professeur des Beaux-arts installé depuis une dizaine d’années pour développer son art pornographique ou un couple d’anglais, représentant cette nouvelle population venue réveiller un lieu déserté par les enfants des paysans locaux.

Ce roman imposant, foisonnant, tout à fait dans l’esprit de Mathias Enard, nous plonge dans une multitude d’histoires sous une multiplicité de formes. L’auteur sait particulièrement bien enchâsser les trames narratives ( je constate toujours un rapprochement fort entre Mathias Enard et Jaume Cabré en lisant chacun de ces deux auteurs).

Le fil conducteur utilisé ici est une réflexion sur la mort, mais de façon assez burlesque. Dans ce pays rural, on croit facilement aux réincarnations des âmes en toute espèce vivante selon le chemin parcouru. « La Roue » fait son travail, projetant les âmes dès la mort du corps dans le passé ou le futur.

« On ne sort pas facilement des plus horribles réincarnations, quand on y a été conduit par des vies entières de crimes et de bassesses. »

Ces réincarnations sont aussi un moyen de nous plonger dans l’Histoire de la région en convoquant Clovis, Agrippa d’Aubigné, Napoléon où François Villon.

« Cette région regorge vraiment de grands hommes oubliés.»

Avec ce roman rural, Mathias Enard nous rappelle aussi la beauté de la nature en nous emmenant sur les canaux des marais, à la chasse ou sur les terres agricoles. En écrivain engagé, il sait nous alerter sur les incohérences des décisions politiques comme la PAC ou la guerre des bassines. « La réélection, le grand drame de la démocratie. »

« L’idée complètement délirante au XXIe siècle de l’absence de conséquence des activités humaines sur la nature est tout à fait frappante. »

Sous une langue imagée, travaillée, Mathias Enard livre une fois de plus un roman d’une grande richesse. Hommage à Rabelais, Hugo et Villon, cette lecture est drôle, enrichissante, gourmande . Partant d’une vision ironique largement partagée du monde rural, l’auteur sait nous faire entrevoir toute sa richesse, son engagement, son passé, sa présence dans les chansons du patrimoine.


Lien : https://surlaroutedejostein...
Commenter  J’apprécie          222
Parle-leur de batailles, de rois et d'éléphants

Ne vous fiez pas au titre sauf pour y sentir le conte oriental.

Mathias Enard parle davantage d'art entre sculpture, musique et poésie ; de la création, des influences, des contrats à honorer pour aider sa famille; de sa rivalité avec Leonard De Vinci et de l'amour, sous toute ses formes.



Tout ceci, dans un environnement oriental, au milieu de Constantinople en pleine mutation, où le sultan profite de tous les talents florentins pour faire de sa ville un exemple de beauté.



On saluera non seulement l'écriture poétique que Mathias Enard mais également tout son travail d'archives pour être au plus près de la vérité et de vivre le temps de ses quelques pages dans la tête de l'immense Michel-Ange.
Commenter  J’apprécie          222
Rue des voleurs

Rue des voleurs, voici une histoire que je conseille à tous.



Je parle d’histoire, car je n’ai pas lu le roman, mais écouté le livre audio. Neuf heures d’écoute dont je n’ai raté aucun mot.



Parlons d’abord de la voix d’Othmane Moumen qui est parfait dans cette lecture, car certes, il maîtrise la langue arabe, mais aussi parce qu’il a le don de jouer plusieurs personnages sans que cela paraisse artificiel. Aussi, lorsqu’il endosse le rôle d’un personnage féminin, son naturel rend la lecture fluide et agréable à l’oreille.



Ensuite, le texte en lui-même qui a du être précédé par un travail de recherche assez pointu. C’est là, le point fort de Mathias Enard, écrire de belles histoires qui se basent sur des faits réels.



Ici, le printemps arabe, vu par Lakhdar, un jeune marocain, chassé de la maison familiale, après avoir été surpris nu avec sa cousine Meryem. Une vie d’errance débute pour lui, SDF, il tente de survivre et c’est par chance qu’il retrouve son ami de toujours, Bassam. Ce dernier le présente au chef d’un groupe islamiste. Accueilli, il occupera la fonction de libraire le jour, la nuit, en compagnie de son fidèle ami, il écumera les bars et admirera les filles qui passent dans la rue. C’est ainsi qu’il rencontrera Judith, étudiante d’origine espagnole dont il tombera amoureux.



Difficile quand on a pas de visa de se rendre en Espagne, pays qui peuple ses rêves. Alors, il regarde sa bien-aimée s’en aller et tente de trouver un moyen de traverser. Mais, l’Europe est-elle réellement un eldorado pour un jeune sans papier ?



Je n’en dis pas plus, sachez juste que Lakhdar a vécu 10 000 vies en une seule, instruit, il a une vue très claire sur ce qui l’entoure et sur les conséquences que pourraient avoir certains de ses actes.



Rue des voleurs, c’est un roman sur l’espoir d’une vie plus simple que nourrissent beaucoup de jeunes magrébins, mais aussi sur la déchéance de l’Europe en pleine crise économique. C’est également une histoire d’amour ou plutôt devrais-je dire « d’amours », car Meryem ne quittera jamais ses pensées et bien sûr, une ode à l’amitié et un vrai périple initiatique.



Ce roman, ainsi que son auteur, rejoignent ma catégorie coup de cœur !


Lien : http://que-lire.over-blog.co..
Commenter  J’apprécie          221
Parle-leur de batailles, de rois et d'éléphants

Ce court roman a obtenu le prix Goncourt des lycéens

On comprend facilement pourquoi

Il est court , facile à lire , foisonne d'aventures, de fêtes , d'amours diverses

Il nous parle aussi d'une ville magnifique Istambul ou plutôt Constantinople,ses parfums, sa vitalité, ses zones d'ombre où s'égare un vrai génie Michel Ange

Il vient construire un pont súr le Bosphore alors que l'architecture n'est pas sa spécialité

Il veut faire mieux que Léonard de Vinci qu'il déteste mais va se laisser happer par cette ville magique

Il en oublie presque sa mission ,goûte à des amours troublantes,fréquente des endroits louches où se perdent tous les paumés ou les poètes de la ville

C'est un épisode bien réel peu connu de la vie de Michel Ange

On pourra reprocher la brièveté du roman mais c'est le choix de l'auteur

Le livre nous amène ailleurs de façon légère et agréable avec un vrai personnage de la Renaissance ,loin de la biographie habituelle

C'est foisonnant, troublant ,poétique

Que demander de plus?
Commenter  J’apprécie          220
Boussole

Ecrire un livre sur l’Orientalisme, au moment où le Proche Orient sombre dans la barbarie et où notre vision de ces pays proches géographiquement mais éloignés culturellement est distordue par l’avalanche d’horreurs balancées par les médias, est un acte de résistance éminemment salutaire. Au cours d’une insomnie, le narrateur, universitaire, spécialiste en musicologie, évoque son histoire d’amour avec Sarah, brillante orientaliste, qui ne cesse de lui échapper. De Vienne à Téhéran, en passant par Istanbul et Damas, celui-ci n’aura de cesse de rejoindre son aimée dans sa quête d’absolu.

Cette histoire d’amour aux multiples facettes, ponctuée de savantes digressions, est prétexte à nous rappeler que l’Occident a toujours été fasciné par l’Orient, son exotisme et son mysticisme. Enfermé dans un rationalisme déshumanisant, l’Occident a cherché dans ces pays lointains un supplément d’âme, projetant parfois sur l’Orient ses propres fantasmes. Certains y ont trouvé la lumière de l’âme, d’autres la folie ou un impossible amour. Tout l’art du 19ème siècle porte les traces de cette fascination qui tend à l’Orient une image parfois déformée de sa grandeur. Avec une immense érudition, qui parfois réduit les personnages à des archétypes, Mathias Enard nous rappelle que l’Orient est une source de richesse culturelle et que face à la violence, la recherche de la beauté en l’Autre, celui qui nous est étranger, est source de dialogue fécond.

Commenter  J’apprécie          214
Zone

Je me souviens des injonctions répétées de mon professeur de Français: "prenez garde à la ponctuation, bon sang!» Et moi de faire mine de n'en rien entendre. Le souvenir de ce professeur m'est revenu dès l'entame de la lecture de ce volumineux roman de Mathias Enard. Aucun point ne sépare les phrases, jamais. Je n'imaginais pas à quel point la ponctuation m'était indispensable pour m'installer confortablement dans un livre. Lire une page de littérature sans ponctuation vous force à relire chaque fragment de texte plusieurs fois pour tenter d'en comprendre le sens. J'ai poursuivi jusqu'à la page 50 en espérant pouvoir y glisser mes propres repères, sans succès. Jamais le plaisir habituel d'une lecture n'a surgi. Après tout, la lecture n’est pas une torture. Dommage ce roman de plus de 500 pages a l'air passionnant. S'il vous prend également le tournis, n'abandonnez pas l'auteur pour autant. Je vous recommande son roman "Parle-leur de batailles, de rois et d'éléphants".



Février 2015
Commenter  J’apprécie          211
Rue des voleurs

Lakhdar est un adolescent tangérois qui aime traîner avec son copain Bassam, reluquer sa belle cousine Meryem et lire des romans policiers. Avec cette littérature sans prétention, il apprend le français et un peu d'espagnol. Le jour où ses parents le surprennent nu avec Meryem, sa vie éclate. « C'est une drôle de chose que la vie, un mystérieux arrangement, une logique sans merci pour un destin futile. » (p. 219) Désormais sans famille et écrasé du poids d'une honte dont il ne mesure pas encore l'ampleur, il fuit. Il trouve refuge dans la petite librairie du Groupe de la Diffusion de la Pensée Coranique et rencontre Cheikh Nouredine, personnage au charisme indéniable et aux desseins impénétrables. Il rencontre aussi Judit, une étudiante espagnole qui lui offre le troublant espoir de l'amour. Lakhdar est prêt à tout pour vivre autre chose que l'existence qui se dessine devant lui. « Parler franchement avec M. Bourrelier m'avait fait réaliser qui j'étais : un jeune Marocain de Tanger de vingt ans qui ne désirait que la liberté. » (p. 121) Il passe de la saisie kilométrique de textes à un bateau cargo pour finir dans une entreprise de pompes funèbres, chaque nouveau boulot étant plus déplaisant que le précédent. « Il n'y avait rien à faire, rien, on ne se libérait jamais, on se heurtait toujours aux choses, aux murs. » (p. 147) De Tanger à Barcelone, jusque dans la rue des Voleurs, Lakhdar court après sa vie alors que le Printemps arabe n'en finit pas de faire éclore des fleurs aux parfums d'espoir menteur. « Toutes ces Révolutions arabes sont des machinations américaines pour nous péter un peu plus les couilles. » (p. 193)



Mêlée de contes arabes et nourrie d'une profonde connaissance de la littérature orientale, l'histoire de Lakhdar est celle d'un Aladin malchanceux. Pas de princesse, pas de royaume pour lui. Condamné à être un voleur, Lakhdar devient peu à peu un criminel qui s'ignore. Voleur d'honneur, voleur d'argent, voleur de vie, le jeune Tangérois dérobe même son propre temps puisqu'il est sans cesse à courir après sa vie, cherchant à la justifier. « La vraie vie n'avait pas toujours pas commencé, sans cesse remise à plus tard. » (p. 218) L'existence de Lakhdar est un mauvais polar, sans les filles faciles, sans l'alcool robuste et sans les butins mirifiques. Pourtant, bien que découragé, le jeune homme emprunte la voie du crime, s'enfonçant inexorablement dans les bas-fonds d'une existence maudite par les tendres caresses d'un adolescent amoureux. « Après tout, n'étais-je pas enfermé dans un roman noir, très noir, il était logique que ce soient ces lectures qui me suggèrent une façon d'en sortir. » (p. 158)



Rue des voleurs m'a rappelé le très beau Partir de Tahar Ben Jelloun, mais en plus désespéré. Mathias Enard parle avec passion d'un Maroc ancestral, inscrit dans les lettres par les grands auteurs arabes, mais cette terre de légende s'effrite au contact du Maroc moderne, des rêves avortés de ses enfants et des menaces d'un terrorisme sournois. Rue des voleurs est un superbe roman, porté par un parfaitement maîtrisé qui chante comme un nouveau conte des milles et une nuits.
Commenter  J’apprécie          216
Déserter

Mathias ESNARD. Déserter.



J’ai découvert Mathias ESNARD en 2015, lorsqu’il a reçu le prix Goncourt pour son splendide roman, « Boussole ». Dans cette dernière rédaction, il nous fait partager la vision de deux êtres, diamétralement opposés mais luttant, chacun selon leurs moyens , l’un à fuir les combats, et l’autre à respecter ses engagements. Quelle belle dualité. Le parcours du soldat déserteur, alterne avec celui du mathématicien allemand, antifasciste, communiste, suivant la politique extrême mise en place en Russie. L’un et l’autre tâtonne, ne sachant plus quel est le droit chemin.



Dans un pays méditerranéen, jamais cité, notre militaire fuit le combat, emportant son arme, ses munitions, encore en tenue. Il s’enfonce dans l’arrière pays, loin de la guerre. Il veut franchir la frontière, demander l’asile politique, mener une existence toute simple, semblable à celle de son enfance. Mais il va rencontrer une femme tondue, errant, accompagnée de son âne borgne. Quelle va être sa réaction : la tuer afin de ne pas alerter les rares habitants de cette zone militarisée, proche du front ?



Le 11 septembre 2001, lors d’un colloque scientifique se déroulant sur un paquebot de croisière près de Berlin, un hommage est rendu au mathématicien, poète, survivant de Buchenwald. Ce mathématicien était un grand chercheur, il a vécu une folle passion avec Maja et ils ont eu une fille Irina. Nous suivons cet homme, engagé politique , communiste et qui, de ce fait a connu la déportation. Rentré en avril 1945, il a vécu à Berlin, suivant les préceptes de la grande URSS. Ce n’est qu’en fin de vie, il disparaît, mort noyé en 1995, qu’il se pose des questions sur son engagement. Suicide, Accident?



L’alternance de ces deux destinées nous montre, les hésitations de ces deux hommes. Quelle va donc être la conduite du soldat déserteur face à cette femme ? Vont-ils pactiser, unir le peu de forces qui leur restent afin de franchir ensemble cette frontière, leur planche de salut ? Que restera-t-il de notre brillant mathématicien, fidèle à ses croyances politiques, vivant à Berlin Est, oubliant même l’amour de sa compagne, une femme engagée politiquement, participant au gouvernement de l’Allemagne de l’ouest ?



Mathias ESNARD est un brillant auteur. Un grand érudit, qui nous transmet ses connaissances. Son écriture poétique est très riche. Je vous recommande la lecture de ce récit très actuel. Les récentes agressions de la Russie sont évoquées, les luttes diverse sur tous les continents ne nous sont pas épargnées. Une tragédie pour l’humanité. Bonne journée et bonne lecture à tous.

( 03/12/2023).
Lien : https://lucette.dutour@orang..
Commenter  J’apprécie          202
Désir pour désir

DÉSIR POUR DÉSIR de MATHIAS ENARD

Venise 1750. Le long du canal Amerigo et Camilla cheminent vers l’atelier du graveur. Absent, c’est son aide qui les reçoit, Antonio. Il prend la petite huile sur bois qui va servir de support à la gravure. C’est Amerigo qui parle, Camilla ne dit rien, juste au revoir en partant, mais c’est suffisant pour qu’Antonio soit boulversé, elle est si belle et on lui avait toujours dit qu’à l’hospice il n’y avait que des laiderons. Le graveur, le Maestro, passera plus tard donner ses consignes à Antonio puis repartira en gondole pour aller vider des flasques et jouer aux tables les plus fermées, c’est un vrai vénitien. Au retour à l’hospice de la Piéta où il a grandi, Amerigo, qui est aveugle, se met à jouer, luth, guitare ou épinette, Camilla, elle, joue de la viole d’amour et chante. Amerigo aime Camilla passionnément mais elle n’a qu’une affection fraternelle pour lui. Antonio rêve de la voir jouer et chanter, son cœur palpite…

Toute la mythologie de Venise la sérénissime dans ce tout petit livre plein d’amour et de sensualité. Enard nous transporte sur les canaux vénitiens on imagine hommes et femmes derrière leur masque se faufilant vers des rendez vous amoureux. L’écriture est incroyablement évocatrice et pour celui qui a eu la chance de flâner dans ces ruelles en ces saisons où la brume envahit tout et rend Venise encore plus mystérieuse, alors ce roman, cette nouvelle, le ravira.
Commenter  J’apprécie          200
Parle-leur de batailles, de rois et d'éléphants

En 1506, pour échapper au pape Jules II et à des concurrents prêts à tout pour lui nuire, Michel-Angelo Buonarrotti embarque pour Constantinople. Là-bas l'attend Bajazet : le monarque est déçu des travaux de Léonard de Vinci et il veut confier au Florentin la réalisation des plans du pont qui traversera la Corne d'Or. « Servir le sultan de Constantinople, voilà une belle revanche sur le pontife belliqueux qui l'a fait jeter dehors comme un indigent. » (p. 14) Dans ce pays où tout lui est inconnu, le sculpteur craint d'être dépassé par la tâche que l'on attend de lui, d'autant plus qu'il est obsédé par une danseuse andalouse. « Michel-Ange ne dessine pas de ponts. Il dessine des chevaux, des hommes et des astragales. » (p. 20) Guidé par Mesihi, poète turc et ami, il découvre les intrigues d'une autre cour et les caprices finalement toujours ineptes des puissants. L'artiste doit dessiner le pont et ne veut que rentrer en Italie où ses frères l'attendent et où il doit se défendre contre une cabale qui menace sa réputation à Rome. « Tu es capable de rendre une passerelle de pierre, mais tu ne sais pas te laisser aux bras qui t'attendent. » (p. 131)



Dès le premier chapitre qui pose le décor historique, ce roman m'a emporté de l'autre côté de la Méditerranée. Que sais-je de Michel-Ange, si ce n'est le nom de quelques-unes de ses œuvres ? Rien, pour être honnête. Cet épisode de la vie de l'artiste est un enchantement, une merveille de prose délicate et puissante. « Cet ouvrage ressemble au David ; on y lit la force, le calme et la possibilité de la tempête. Solennel et gracile à la fois. » (p. 102) J'ai retrouvé la plume si forte de Mathias Enard, déjà appréciée dans Rue des voleurs.
Commenter  J’apprécie          201
Prendre refuge

Déception ! Il y avait pourtant tous les ingrédients pour aller vers le coup de coeur…



En couverture, le site de Bâmiyân en Afghanistan où des Bouddhas épargnés durant quinze siècles ont été détruits en 2001 par les talibans.



Au dessin, Zeina Abirached dont le dessin en noir et blanc, souvent à base de formes géométriques, a beaucoup pris en maturité sur les dernières années.



Un scénario partagé entre cette illustratrice et Mathias Enard qui est tout de même un très bon conteur.



Une histoire croisée sur deux époques, 1939 et nos jours, procédé qui donne souvent une profondeur et un rythme au livre.



L'histoire actuelle raconte la vie d'une Syrienne, Professeure d'astronomie dans son pays, qui a du mal à s'adapter à Berlin. L'histoire passée est celle de la rencontre entre deux écrivaines et un couple d'archéologues sur le site de Bâmiyân, quelques jours avant d'apprendre, en 1939, la déclaration de guerre en Europe.



Mais… Parce que oui, malheureusement, il y a un « mais » …



Pourquoi avoir survolé l'histoire du site de Bâmiyân ?

Pourquoi avoir fait le choix de ne pas plus lier les deux histoires actuelle et passée ?

Pourquoi avoir limité les textes au strict minimum ?



Ceci n'est cependant qu'un avis très personnel et certains apprécieront sans doute les différentes pistes de réflexions qui se dégagent de ce roman graphique. Ce livre fait partie des six sélectionnés en 2021 dans les « Incontournables du roman graphique » de Casterman BD, opération intéressante, car elle permet de découvrir ce genre à petit budget et peut-être votre lecture pour vous forger votre propre opinion !

Commenter  J’apprécie          200




Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Mathias Enard Voir plus

Quiz Voir plus

Quiz Harry Potter (difficile:1-7)

De quoi la famille Dursley a-t'elle le plus peur?

des voisins curieux
des hiboux
de Harry
de tout ce qui peut les faire paraître étranges

20 questions
8158 lecteurs ont répondu
Créer un quiz sur cet auteur

{* *}