AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Critiques de Raymond Carver (211)
Classer par:   Titre   Date   Les plus appréciées


Les Vitamines du bonheur

Un grand merci à GeraldineB qui m'a conseillé ce livre. C'est une très belle découverte.

12 nouvelles ayant pour cadre l'Amérique profonde, celle du quotidien, la vie de tous les jours avec ses peines et ses joies (plus souvent ses peines), ses imprévus. Il suffit de presque rien pour se retrouver sur le fil du rasoir. Tout est fonction des aléas de la vie, et la manière de s'y adapter. La vie de ces personnages, pas tout à fait déclassés ou alors de petite classe moyenne, est décrite avec beaucoup de compassion mais sans misérabilisme. Difficulté des relations, supporter l'autre comme il est. Certaines nouvelles sont vraiment bouleversantes, comme celle de cet homme qui se prépare à rencontrer son fils en France, après plusieurs années de brouille. L'auteur sait maintenir le suspens pour décrire des situations insolites, incongrues, parfois allant jusqu'à l'absurde. Pas forcement de chute surprenante, mais un juste équilibre qui nous ramène à nous-même, à la fragilité de l'existence. Et la vie continue malgré tout...

Sachant que Carver s'est battu quasiment toute sa vie contre son addiction à l'alcool, certaines nouvelles paraissent assez autobiographiques.

A découvrir.
Commenter  J’apprécie          342
Débutants

J'ai tenté de découvrir, il y a plus de vingt ans, Raymond Carver. J'avais apprécié, sans plus. Avec ce nouveau plongeon, certaines nouvelles me sont revenues. Et je réalise surtout que c'était vraiment un grand écrivain. Il sait aller à l'essentiel de la difficulté de vivre, d'aimer, de combattre les addictions, de cohabiter, donnant l'impression que ses personnages on les connaît, on les côtoie. Il nous présente des vies tel quel, sans jugement. C'est profond et réel. Un livre de nouvelles a l'avantage de nous accompagner longtemps puisqu'on peut y en piocher quelques-unes entre deux autres bouquins. Un genre à rehausser et bien sûr Carver aussi.

Commenter  J’apprécie          332
Neuf Histoires et un Poème

Une épigraphe est une citation placée en tête d'un écrit, en particulier un livre ou une partie d'un livre, pour en suggérer le contenu ou l'esprit, et donner ainsi une idée des intentions de l'auteur. Celle de l’excellent recueil de nouvelles de Gilles Dienst « Le sens de la vie » était signée Raymond Carver. J’ai pu constater la puissance de la force transmise, émergeant de l’œuvre de Gilles Diens. Il devenait impératif pour moi d’aller voir qui était cet auteur.



Voici tout d’abord cette formidable citation de cet écrivain américain considéré comme le maître de la nouvelle :



« Il y a d’abord cette vision fugace. Ensuite la vision

fugace s’anime, se mue en quelque chose qui va

illuminer l’instant et va, peut-être, laisser une

empreinte indélébile dans l’esprit du lecteur, qui

l’intègrera à son expérience personnelle de la vie, pour

reprendre la belle formule d’Hemingway. Pour de bon.

Et à jamais. C’est là tout l’espoir de l’écrivain. »



Le style, dans Neuf histoires et un poème, est la première chose qui m’a frappé ! Une force rare, dans la concision... Comment l’auteur parvient-il à nous happer dans son histoire aussi vite, aussi totalement ? Certaines histoires sont des chefs-d’œuvre. Oui, des chefs-d’œuvre qui ont souvent été adaptés au théâtre, au cinéma... Robert Altman s’est, par exemple, inspiré des récits de ce recueil pour son film Shortcuts, lauréat du Lion d’Or de Venise en 1993.



J’ai trouvé une belle cohérence dans le choix et le traitement des sujets. L’auteur s’intéresse aux gens du peuple, à leurs difficultés d’accès au travail – un travail inintéressant la plupart du temps, des personnages en manque d’argent et de perspectives pour le futur. Il aime mettre en scène un couple ou des couples qui se rencontrent – en crise bien souvent. Autres thèmes communs à ces récits, l’incompréhension et la violence entre hommes et femmes, l’incommunicabilité entre tous et toujours une dose de mystère. Il plonge d’emblée le lecteur dans la situation, découvrant très vite le point de bascule et le glissement vers une suite indécise.



Les hommes sont volages, attirés par l’alcool. La violence n’est jamais loin. Rarement les mœurs de l’Amérique étasunienne n’ont été aussi bien relatées.



Voici une petite présentation de chacune des nouvelles, sans en dévoiler plus qu’il ne faut... Et un astérisque pour celles qui m’ont le plus marqué.



Voisins de palier * : deux couples sont voisins et amis. Enfin amis, c’est vite dit... Un des couples part en vacances. Le couple « ami » accepte bien entendu d’aller nourrir le chat, arroser les plantes. Situation banale sauf que la différence de statut social, la jalousie va faire du dégât...



Ils t’ont pas épousée : Earl regarde sa femme différemment depuis qu’il a capté certaines réflexions de clients à la cafétéria où elle est serveuse. Il devient exigeant avec elle, très exigeant et veut la changer...



Les vitamines du bonheur * : le travail est très présent dans ces nouvelles. Ici il consiste à vendre des vitamines. « J’avais un travail et Patti n’en avait pas ». Lui a « un job minable », elle, Patti, doit sonner aux portes des gens pour vendre ses vitamines. Une scène est particulièrement marquante, celle du bar où le narrateur accompagné de Donna, l’amie de Patti, qu’il doit raccompagner chez elle, rencontre Nelson, un gars tout juste rentré du Viêt Nam – en pleine guerre et il est sérieusement perturbé.



« Nelson a levé sa bouteille et a bu une rasade au goulot. Il a revissé le bouchon, posé la bouteille sur la table et mis son chapeau par-dessus. « Vraiment bons amis », il a dit. »



Tais-toi je t’en prie : Ralph raconte comment il a fait avouer à sa femme Marian une infidélité datant de plusieurs années. La précision de l’écriture permet de visualiser les scènes d’une façon incroyable, vraiment impressionnante. L’errance de Ralph suit la révélation, pourtant il a promis de ne pas se fâcher. Les mains, les yeux sont au centre de l’écriture dans cette nouvelle.



Toute cette eau si près de la maison * : Claire raconte ce qui est arrivé à son mari lors d’une partie de pêche avec des copains. Un cadavre découvert dans le lac... Angoisse de la femme, rejet de toute culpabilité de l’homme dans une affaire qui ne semble pas le concerner vraiment.



Une petite douceur * : un enfant victime d’un chauffard. Un gâteau d’anniversaire commandé et jamais récupéré. S’il y avait un seul récit à lire sur la peine de la disparition d’un être cher ce serait celui-là. Le talent de Raymond Carver à peindre la condition humaine éclate ici en plus d’un art du récit court tout à fait stupéfiant. Une de mes nouvelles préférées de ce recueil qui risque bien de me laisser une empreint indélébile, me marquer à jamais.



Jerry et Molly et Sam : recevoir un chien en cadeau peut perturber l’équilibre d’une famille, surtout si cet équilibre est précaire au départ. Al, qui craint de perdre son travail, en voit sa vie bouleversée. Déjà que tout va mal... Pourquoi ne pas se débarrasser du chien à l’insu de sa femme et des enfants ?



L’aspiration : une autre histoire avec de la vente à domicile. Un mystérieux représentant en aspirateur fait irruption dans la vie d’un homme sans travail. Une nouvelle décalée et délicieusement absurde.



Je dis aux femmes qu’on va faire un tour : Bill et Jerry sont des amis de longue date et le reste quand ils ont une vie de couple avec maison, enfants... Mais un jour Jerry emmène Bill faire un tour, croisant sur la route deux filles à vélos...



Citronnade : Raymond Carver a aussi écrit de la poésie. Le texte présenté ici s’apparente plus à une courte nouvelle, selon moi...



Il y a du génie dans l’écriture de ces nouvelles. Raymond Carver y a aussi mis beaucoup de lui-même, on peut y lire une partie de ce qu’a été sa courte vie – il disparaissait en 1988 à l’âge de cinquante ans.



Les vitamines du bonheur est le titre d’un autre recueil célèbre et, vraiment, j’en reprendrais bien quelques doses. Pas vous ?

******

Visitez Bibliofeel ou la Page Facebook Clesbibliofeel pour chroniques avec illustrations. Lien ci-dessous ou dans la bio....


Lien : https://clesbibliofeel.blog
Commenter  J’apprécie          331
Les Feux

Brûle-tout (poèmes, nouvelles, réflexions, …) que ces feux qui jettent un éclairage sur les intentions de cet auteur emblématique des USA, qui pensait que « la lucidité, ça n’a jamais fait de bien à personne. Ça rend la vie encore plus difficile. » J’ai trouvé cette lecture très instructive, mais je dois avouer que je n’y connaissais rien à propos de Carver.



Dans la partie «réflexions », l’auteur nous parle de l’importance des lectures qui sont très structurantes pour l’expérience d’écrivain, insiste sur l’importance d’une ponctuation exacte, du choix du mot et de l’ordre. Il écrit : « dans l’écriture le désordre et le débraillé me font horreur ». Je me suis étonnée d’une telle rigueur car je trouve que ses nouvelles sont écrites avec beaucoup de naturel, sans qu’on y perçoive un quelconque effort. Mais c’est probablement là la marque des plus grands. Réflexion qui aurait probablement déplu à Carver (pardon) car pour lui un écrivain, aussi grand soit-il, qu’il s’appelle Flaubert ou Balzac, reste un homme comme les autres.



Dans ses poèmes et ses nouvelles, il parle de nos petites vies ordinaires, de ces vies anonymes et qui passent inaperçues, ces vies où «tout était bon pour meubler ces interminables silences » et pour lesquelles pourtant il déborde d’amour et d’empathie.



Oui, l’univers de Carver est très particulier. D’ailleurs, il est très attaché à cette notion d’univers qui est « l’un des éléments qui permettent de distinguer un écrivain d’un autre. Pas le talent. Le talent, ça court les rues. Mais un écrivain qui a une façon spéciale de voir les choses et qui donne une forme artistique à cette manière de voir est un écrivain qui a des chances de durer. »



Voir les choses … Pas étonnant que ce livre m’ait été conseillé par mon amie photographe. D’ailleurs les histoires de Carver me font penser aux photos de Peter Mitchell.



Lire Carver est une expérience étrange, qui exige patience et lâcher-prise. Il faut se laisser embarquer dans son univers et s’autoriser à se laisser surprendre au détour d’une phrase, d’une situation qui tout à coup fera écho, titillera notre sensibilité et nous touchera dans notre humanité, parfois jusqu’aux larmes.



Carver, un auteur avec lequel je n’en ai pas fini.

Commenter  J’apprécie          320
Neuf Histoires et un Poème

Le style dépouillé de Carver renforce son propos.

Des gens simples, bien comme il faut, avec « l'encéphalo qu'il faut » dirait Bashung, pètent les plombs, se vengent sur autrui de l'aliénation qu'ils subissent chaque jour, trouvent dans l'oppression la solution pour échapper à la veulerie dans laquelle ils se vautrent chaque jour.

Un homme force son épouse vieillissante à suivre un régime en la harcelant au comptoir du bar où elle est serveuse, prenant à témoin d'autres clients.

Un père de famille décide d'abandonner le chien de ses enfants pour réduire les dépenses de la famille alors que lui-même s'autorise une double vie avec une autre femme.

Jaloux de la réussite de leurs voisins, un couple accepte d'arroser leurs plantes et de nourrir le chien lorsqu'ils sont en vacances et s'envoient en l'air en vivant chez eux.

Un homme alcoolique a retrouvé son équilibre auprès d'une femme qu'il aime, mais la harcèle pour qu'elle raconte comment, un soir de beuverie du passé, elle l'a trompé avec un ami. Poussée à bout, elle avoue. Il replonge.

Dévastés par la mort de leur enfant tué dans un accident de la route, le jour de son anniversaire, un couple trouve chez le pâtissier auprès duquel ils avaient commandé un gâteau, l'empathie et le réconfort qu'ils n'ont pas trouvé ailleurs.

Des histoires courtes, sans esbroufe, qui mettent l'humanité à nu et nous interpelle.

Pour apporter ma contribution au débat Altman, Short Cuts et Carver, 9 histoires, je dirai que le film Short Cuts n'a rien à voir avec les nouvelles de Carver.

En voulant faire plus fort que Carver, Altman en rajoute, les célébrités choisies pour incarner les personnages sur jouent (Tom Waits, Andie Mac Dowell, Jack Lemon ne convainquent pas). de plus l'idée géniale de créer un lien entre les personnages est hors sujet et n'apporte rien au propos de Carver.

Carver est un auteur de la solitude. Ses personnages sont face à eux même. Ils voient l‘autre comme une réplique de leur personnalité. Leur dérive vient du fait qu'ils imaginent le monde à leur image.

Lisons Carver sans penser à Altman. Et tout sera pour le mieux dans le meilleur des mondes.


Lien : https://camalonga.wordpress...
Commenter  J’apprécie          320
Les Vitamines du bonheur

C'est mon 4ème livre de Raymond Carver et je reste globalement assez déçu, je trouve les nouvelles sans réelles consistances.



Le style d'écriture est très pur, très précis. Ce sont des descriptions plutôt sinistres de l'Amérique profonde mais je peine vraiment à y trouver un réel intérêt de lecture.
Commenter  J’apprécie          323
Parlez-moi d'amour

Trois auteurs de nouvelles trônent dans mon panthéon : Stefan Zweig, Guy de Maupassant et Raymond Carver.

Aussi est-ce un bonheur de retrouver ce dernier autour d'une série de tranches de vie, toutes parfaites dans ce recueil, et qui toutes savent planter en quelques pages tout un univers, l'évocation d'une vie et d'autres encore évoquées en perspective de celle-ci, et donner à ressentir quelques petits tableaux d'Amérique tous plus criants de réalité et d'humanité les uns que les autres.



Couples qui se soutiennent dans l'adversité, qui se déchirent et se séparent, parents dont la vie bascule, amants esseulés et vieillissants évoquant leurs souvenir : on parle beaucoup d'amour dans "Parlez-moi d'amour", et de la plus belle manière, toute en subtilité et maturité.

Un auteur à connaître absolument!
Commenter  J’apprécie          313
Les Feux

Dans ce volume, Carver nous offre quatre nouvelles et, surprise, des poèmes, mais aussi une longue réflexion sur le métier de nouvelliste.

A l'âge de 20 ans, il est déjà marié et père de deux enfants. Il enfile les petits boulots comme les déménagements. Il n'a pas le temps pour se consacrer à l'écriture comme il le voudrait. Il n'a pas le temps de s'étendre. Alors la nouvelle est le format qui lui convient.

« Ma capacité d'attention m'avait fui ; je n'avais plus assez de patience pour m'essayer au roman... A l'orée de la trentaine, j'ai renoncé à tous mes rêves de grandeur."



Un métier qu'il a choisi et qu'il défend. Un format court mais précis, aux mots choisis porteurs de sens. Des mots qu'il retravaille sans cesse pour les épurer.

" Les mots, c'est finalement tout ce que nous avons, alors il vaut mieux que ce soit ceux qu'il faut et que la ponctuation soit là où il faut pour qu'ils puissent dire le mieux possible ce qu'on veut leur faire dire. "

Des mots pour exprimer son amour, l'amour pour le père et pour les autres, le sens de la vie et sa vacuité, le goût et le pouvoir de l'alcool et de la cigarette, la douleur de vivre des petites gens et leur manque d'espoir...



Le regard qu'il porte sur le monde, le sien et celui des autres, est empli d'une infinie tristesse. Mais qu'on ne s'y trompe pas, son empathie pour ces personnages est immense et sincère. C'est dans les fêlures humaines qu'il plonge sa plume pour en tirer la magnificence de ses écrits. Il est le peintre des petites gens, des exclus de l'american way of life.

Commenter  J’apprécie          312
Qu'est-ce que vous voulez voir ?

Suite à la belle critique de Nastasia, j'ai ajouté cette référence dans mes pense-bêtes et j'ai fini par trouver le livre en bibliothèque. J'aime en général les nouvelles qui favorisent un style vif où par quelques traits seulement le climat et les personnages doivent être installés. Les nouvelles recèlent aussi de grands espaces de liberté à combler par le lecteur. Et c'est ce qui m'a plu, ici aussi. Oui, c'est bien écrit.



Mais que cet univers est sombre et que ces vies sont tristes qui se délitent dans un vide quotidien dont on ne voit pas le fond ! A croire que le lot de chacun est de sombrer pour ensuite déployer de grands efforts (débiter huit stères de bois) pour se reconstruire. Alcoolos sur le retour, mariages ratés, rêves partis en fumée. Pour le coup, il est brisé le rêve américain.



Et la dernière nouvelle, n'arrangera rien. D'une criante authenticité dans laquelle l'hypocrisie hypertrophiée propre à ce peuple atteint son paroxysme au cours d'un repas d'adieu rempli par des formidables, des gentils tout pleins, des nous ne vous oublierons jamais, pour le lendemain, alors que les hôtes ont perdu gros pendant la nuit et sont en pleine débâcle, voir les invités les quitter sur un très révélateur "- Ah bon ? dit-elle. Quel dommage. Je suis désolée pour lui. Tu leur as rendu les clés, hein? On a dit au revoir à tout le monde. On peut y aller, maintenant."



A conseiller donc seulement si vous aimez le noir de noir, prenez aussi une ou plusieurs barres de chocolat de même nature, ça remonte le moral, paraît-il.
Commenter  J’apprécie          314
Débutants

Gros coup de cœur pour Raymond Carver, que je ne connaissais pas. Amputées par l’éditeur de l’époque (1981), ces nouvelles sont aujourd’hui présentées dans leurs versions originales. Qu’elles se déroulent dans le confort - ou l’inconfort ? - du foyer ou chez le coiffeur, les personnages qui y sont dépeints sont la plupart du temps à un point de rupture de leur vie, si ce n’est pas carrément en crise: alcoolisme, difficultés conjugales, infidélités, déceptions, violence... Cela pourrait les rendre difficiles à lire, et il est vrai que je n’en ai lu qu’une ou deux à la fois, mais le grand humanisme de l’auteur nous permet d’accéder à leur vérité essentielle, la difficulté de vivre lorsque la vie est pleine d’embûches et se révèle décevante.
Commenter  J’apprécie          290
Parlez-moi d'amour

Bien difficile pour moi de dégager une réaction tranchée à l’issue de la lecture de Parlez-moi d’amour, recueil de 17 nouvelles de Raymond Carver traduit par Gabrielle Rollin.



Car en bon lecteur français que je suis, je ne suis a priori pas fan de nouvelles, bien que mes progressions en culture littéraire américaine me fassent – très doucement - évoluer.



Mais j’ai particulièrement apprécié ici l’écriture de Carver et cette incroyable capacité à poser un décor, une atmosphère et une histoire dans une épure de mots, que seuls les grands peuvent oser.



Dans ses dix-sept instantanés de vie (où il ne se passe souvent pas grand-chose), Carver explore le sentiment amoureux à 360° : l’amour absolu, l’amour habitude, la passion, l’amour qui s’en va, l’amour violent, l’amour filial, l’amour injuste, l’amour soupçon, l’amour amitié… Le tout dans un contexte où l’alcool et la désillusion qui l’accompagne ne sont jamais bien loin.



C’est bien entendu l’ensemble qui fait sens, mais ces nouvelles restent inégales… Ce qui ne fait qu’aiguiser mon intérêt de poursuivre la découverte de l’œuvre de Carver !

Commenter  J’apprécie          284
Le monde de Raymond Carver

Books under the table



Il y a les livres de chevets et les livres de sous la table, ceux que tu laisses traîner sous celle de ton salon pour pouvoir les garder sous la main et les feuilleter de temps à autre pour tenter d’y retrouver le plaisir de ta première lecture.



Le Monde de Raymond Carver, fait chez moi partie de ceux-là. Compilation de textes et de lettres de l’auteur augmentés de sublimes photos noir et blanc de Bob Adelman, c’est Tess Gallagher sa 2e épouse qui en prit l’initiative à la mort de Carver et en signe la postface.



Cette forme hybride permet de tenter une approche d’un univers complexe qui a nourri l’œuvre du poète et novelliste américain, tout comme une plongée dans l’Amérique des années 80.



« Tout ce que j’écris est autobiographique. »



Retours sur l’enfance dans l’Oregon puis sur les jours heureux et innocents à Yakima dans l’état de Washington ; importance de la figure du père ; alcool et désintoxication ; dèche financière ; vie de ruptures, entre Chico, Sacramento, San Francisco, San Jose, Palo Alto, Cupertino, Sunny Vale, Syracuse ou Port Angeles.



Un monde dur et cash, comme Carver l’explique à sa fille, que la seule éventualité d’une partie de pêche avec les copains Ford ou Sandmeyer (et même avec Olivier Cohen) suffit à illuminer.



Et puis au-dessus de tout cela, il y a l’amour sans limite pour Tess, que Carver ne cesse d’écrire. Et là, par le truchement des mots simples, la magie opère, la sincérité éclate et l’émotion surgit.



« Comme j’étais allongé là les yeux clos, essayant de m’imaginer à quoi ça ressemblerait si vraiment je ne me relevais jamais, j’ai pensé à toi. J’ai rouvert les yeux et je me suis dressé d’un bond et j’ai recommencé à être heureux. Je t’en suis reconnaissant. Je voulais te le dire. »



Et vous, quel est votre Book under the table ?
Commenter  J’apprécie          273
Tais-toi, je t'en prie

Je crois que Mile Davis disait un truc du genre « La véritable musique est le silence, les notes ne font qu'encadrer ce silence »

Carver c’est la musique de Miles dans le texte, avec ses mots il encadre les silences d’une vie..... "Tais-toi, je t'en prie"
Commenter  J’apprécie          273
Neuf Histoires et un Poème

Ce recueil de nouvelles au titre sans prétention est à l'origine du film Short Cuts, de Robert Altman. Je ne sais pas si vous vous en souvenez, mais dans ce très beau film, plusieurs histoires s'entremêlaient, dont deux plus tragiques que les autres. Quelques potes pêcheurs décidaient de ne pas ramener le cadavre noyée d'une femme pour ne pas gâcher leur weekend de pêche, et un enfant se faisait renverser par une voiture le jour de son anniversaire.



Ici, les nouvelles se suivent et sont totalement indépendantes. On pourrait les nommer "histoires de vie". Dans chacune, le quotidien est subtilement déséquilibré par un fait parfois minime. Ce déséquilibre est tout aussi physique que psychique, la folie n'est jamais loin, et le récit est entièrement tendu vers deux dénouements possibles. De quel côté le personnage va-t-il basculer? Va-t-il s'élancer vers l'inconnu ou revenir lentement comme une boule de flipper à sa situation d'origine, plus confortable?



Ces neuf nouvelles sont toutes aussi imprévisibles les unes que les autres et nous emmènent à chaque fois au coeur d'une intimité dérangeante et terriblement humaine. Du grand art.
Commenter  J’apprécie          250
Les Trois Roses jaunes

Sept nouvelles de Raymond Carver. Elles ont toutes en commun d’être racontées par un des protagonistes, (sauf la dernière ou le narrateur est extérieur) sans autres précisions, comme si l’on suivait sa pensée.

Toutes sont des moments du quotidien. Les premières ont suscité chez moi une sensation assez nauséeuse, l’impression d’être englué dans un quotidien fastidieux, bien qu’il y ait par instant des références à la nature, plutôt poétiques. C’est dire si elles ont un pouvoir évocateur. J’ai même à plusieurs reprises été incommodée par la fumée des cigarettes. Bien sûr il n’y a pas de chute, ce qui aurait pu leur donner un sens différent, moins plombant.

Pourtant au fil des nouvelles le charme a opéré. Je les ai trouvées moins pesantes.

Relirai-je du Carver avec lequel c’était je pense ma première rencontre ? Je ne sais pas encore.

Je n’ai aucun doute sur ses qualités d’écrivain, j’en ai sur mes capacités à l’apprécier. Peut-être que je ne les ai pas lues à un moment adéquat.



Commenter  J’apprécie          250
Parlez-moi d'amour

Avec l'un de mes doigts vernis de rouge, j'ai caressé la petite ampoule blafarde de la première de couverture et j'ai pensé que les âmes solitaires et tourmentées, habitantes de ce recueil de nouvelles, nous renvoyaient le côté brut , âpre et mélancolique de nos propres vies.

J'ai trouvé ça terriblement beau. Et puis tout de suite après m'est revenue une citation de Michel Audiard:



" Heureux soient les fêlés car ils laisseront passer la lumière"

Commenter  J’apprécie          250
Les Trois Roses jaunes

Difficile de chroniquer ce recueil, de tenter d'en dire quelque chose d'intelligent qui ne vient pas... Et pourtant j'ai beaucoup aimé picorer chacune de ces nouvelles distillées une à une pendant quinze jours entre deux autres lectures, avec un faible particulier pour l'éléphant.



Juste dire que Carver (ici traduit par François Lasquin), c'est un univers, celui du quotidien, celui de M. et Mme Nobody, celui de vous ou de moi, en ce moment ou un jour prochain, celui de ces incidents de la vie et de l'amour, de ce qui ne vaut pas un livre, mais qui pour Carver vaut bien une nouvelle.



Juste dire que Carver écrit des textes tellement simples, des nouvelles tellement accessibles, qu'elles ne peuvent pas ne pas avoir été énormément travaillées. Là où une telle épure de mots et d'effets de style passerait chez d'autres pour un manque d'ambition, cela devient fluide avec Carver. Et nul besoin de twist final ou de chute humoristique, chaque fin devient chez Carver une ouverture. Qui appelle donc d'autres prochaines lectures...



Commenter  J’apprécie          230
Les Vitamines du bonheur

On est bien loin de l'American Dream avec ce recueil de Carver. Au contraire, l'auteur brosse au fil de douze nouvelles le tableau de la réalité sociale de l'américain moyen, à la fin des années soixante-dix. Il dessine de nombreux portraits d'hommes et de femmes enlisés dans des existences râtées et pathétiques, des gens ordinaires qui vivent tant bien que mal avec leurs galères.

Dans Les vitamines du bonheur, les couples se déchirent, le chomâge sévit, l'alcool détruit, pendant que le poste de télévision envoie ses images du matin au soir. De futilités en bassesses, d'égoïsme en désespoir, chacun transporte sur son dos sa petite vie médiocre parsemée de minuscule moment de bonheur dans une grande tristesse.

Les personnages de Carver n'ont aucune aspiration, aucune attente particulière. Leur vie est plate, sans désir et sans issue. L'atmosphère créée par l'auteur met souvent mal à l'aise, ses phrases sont simples et souvent percutantes. Il manie l'absurde avec habileté, oscillant entre la dérision et l'ironie. Il parvient pourtant à émouvoir le lecteur en distillant dans certaines nouvelles de la compassion pour ses personnages.



Quelques mots sur les douzes histoires, douze points de vue différents de la condition humaine selon Carver :



Plumes

Un dîner chez un couple nanti d'un affreux bébé, d'un paon et d'un étrange moulage de dents...



La maison du chef

Un ancien alcoolique est contraint de quitter la maison dans laquelle il avait retrouvé la sérénité avec sa femme...



Conservation

Un type vient de perdre son boulot quand son frigidaire tombe en panne...



Le compartiment

Un homme divorcé décide finalement de ne pas revoir son fils qui l'attend sur un quai de gare...



C'est pas grand chose mais ça fait du bien

Un petit garçon vient de mourir, ses parents se consolent auprès d'un pâtissier...



Les vitamines du bonheur

Une jeune femme tente de gagner sa vie en vendant des vitamines à domicile...



Attention

Un homme a quitté le foyer conjugal, sa femme lui rend visite dans son nouvel appartement, alors qu'il a une oreille bouchée...



Là d'où je t'appelle

Un groupe d'alcooliques dans un centre de désintoxication...



Le train

Une femme attend son train dans une salle d'attente, un révolver dans son sac...



Fièvre

Un père de famille abandonné par sa femme s'occupe de ses enfants jusqu'au jour où une nourrice vient les garder...



La bride

Ruinée, une famille vit quelques semaines dans un motel, l'homme dépense son argent dans les courses de chevaux...



Cathédale

Un couple pris dans la routine reçoit la visite d'un aveugle – ami de la femme – quand ce dernier dessine une cathédrale...


Lien : http://lesmotsdelafin.wordpr..
Commenter  J’apprécie          230
Les Vitamines du bonheur

« - Qu’est-ce que vous diriez ? Elle soupire et se renverse dans le fauteuil. Elle me laisse sa main. « Les rêves, vous savez, ça ne dure pas. Il y a toujours un moment où on se réveille. Voilà ce que je dirais » Elle lisse sa jupe sur ses genoux. « Si quelqu’un me demandait, voilà ce que je dirai. Mais on ne me demandera pas », citation p.218.

Ce recueil est fait de douze nouvelles, douze tranches de vie, douze histoires d’américain.e.s ordinaires, douze récits existentialistes. D’où émerge la précarité de l’américain moyen, ces « abimés » de la vie, l’ennui et l’effarement du quotidien, à la marge ... sombre. La mélancolie et le désespoir de gens simples qui ont des espoirs. L’universalité des rapports humains : la recherche du bonheur, de l’amour, ou plus simplement d’un sens à la vie, d’un équilibre …

p. 178 « … mais elle affirmait qu’elle était heureuse. Heureuse. Comme si, pensa Carlyle, le bonheur était tout dans la vie ».

Des phrases courtes, un style épuré, sec et précis. Une écriture efficace ; efficace dans le sens : simple, juste et compréhensible. Une langue où les ellipses tiennent lieu de suspens.

p. 128 « De toute façon, il faut tenter quelque chose. On va d’abord essayer ça. Si ça ne marche pas, on essayera autre chose. C’est ça la vie, non ? ».

Raymond Carver excelle dans ce genre-là, peut-être parce qu’une grande partie de sa vie, il a vécu précisément dans ce milieu ; il est donc également légitime, en plus d’avoir du talent, c’est important aussi, la légitimité. Allez, salut.

Commenter  J’apprécie          221
Parlez-moi d'amour

Dans « Ardoise », Philippe Djian, à qui je voue une admiration sans condition, écrivait de Carver les lignes suivantes :

Raymond Carver écrit comme un dieu et toute espèce de discussion à ce propos n'attire que les crétins de la pire espèce et les besogneux." (p. 121)

"Ma fille, le jour où Raymond Carver aura droit aux mêmes honneurs que Nabokov, tu verras ton père se retourner dans sa tombe." (p. 123)

"Raymond Carver avait tellement de choses à dire et il s'accordait si peu de mots pour les exprimer. On dirait de l'ivoire. Pour bien comprendre, il faut être en colère, ou profondément amoureux ou malheureux, enfin excité ou électrisé d'une manière ou d'une autre." (p. 125)

"En tout cas, j'aurais terminé cet exercice avant qu'il puisse m'arriver quoi que ce soit, et donc, il n'y aura plus rien après Raymond Carver.Je ne dis pas rien au-dessus, je dis rien après." (p. 127)

J’ai refermé « Parlez-moi d’amour » en étant éclairée ! J’ai trouvé ce qui, depuis plus de 25 ans inspire l’écriture de Djian.

Cet « essentiel », cette musique, cette justesse.

Dans un style où les mots semblent occuper exactement la « bonne » place, Carver réussit, en une succession de nouvelles, à nous parler de l’essentiel.

…. de notre dépendance au cœur et….du vide ressenti en l’absence de battements, et du besoin de chacun, du coup, de se « remplir »…..de fumée, de boissons, de nourriture, de travail…..de se remplir, pour limiter la souffrance que procure ce « vide »…

Commenter  J’apprécie          224




Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Raymond Carver (1687)Voir plus

Quiz Voir plus

Les titres des œuvres de Raymond Carver

Quel est le titre correct ?

Les Pilules du bonheur
Les Gélules du bonheur
Les Molécules du bonheur
Les Vitamines du bonheur

11 questions
48 lecteurs ont répondu
Thème : Raymond CarverCréer un quiz sur cet auteur

{* *}