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Annie Morvan (Traducteur)
EAN : 9782253116837
571 pages
Le Livre de Poche (03/04/2006)
3.95/5   174 notes
Résumé :
" La vie n'est pas ce que l'on a vécu, mais ce dont on se souvient et comment on s'en souvient ", écrit Gabriel Garcia Marquez en exergue à ce livre de mémoires d'enfance et de jeunesse.
Dans ce roman d'une vie, l'auteur évoque à chaque page, les personnages et les histoires qui ont peuplé son oeuvre, du monde magique d'Aracataca à sa formation au métier de journaliste, des tribulations de sa famille à sa découverte de la littérature et aux ressorts de sa pr... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (22) Voir plus Ajouter une critique
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"En fait, la mort ne lui importait guère, mais plutôt la vie : aussi bien, quand fut prononcée la sentence, n'éprouva-t-il aucun sentiment de frayeur, mais seulement de la nostalgie."
("Cent ans de solitude")

Autobiographie ou autofiction ? Qu'importe...
Je fais partie des inconditionnels de l'auteur colombien, et même les détracteurs de ce pavé qui le qualifient de "monument bâti à sa propre gloire" n'y changeront rien. Certes, on peut voir ces mémoires de Márquez comme un épigone ultime de lui-même, mais en ouvrant le livre, je n'en attendais pas moins.
Le portrait du bébé Gabito sur la couverture aurait probablement attendri même le biblique roi Hérode, et le contenu du livre m'a sincèrement enchantée.

Dans ses romans, García Márquez a développé avec beaucoup de succès un procédé qui fait voir les événements réels à travers le brouillard exotico-onirique. le terme "réalisme magique" pourrait sans doute déjà convenir à la bonne vieille Shéhérazade, mais ce n'est que la génération des écrivains latino-américains des années 60, Marquez en tête, qui en a fait sa "marque déposée". Ses personnages, suspendus dans les hamacs qui se balancent à l'ombre des bananiers dans une sorte de hors-du-temps mythique, ses périples baroques et ses localités fantasmagoriques comme Macondo étaient à l'époque une rafraîchissante nouveauté littéraire. Au fur et à mesure que sa position sur le marché littéraire se confirmait, ces facéties commençaient à perdre leur caractère unique, et le rêve magique devenait un tour de passe-passe éventé qu'on ne peut pas répéter à l'infini. Chaque livre a pourtant confirmé la fidélité de ses lecteurs, mais aussi les craintes des critiques que Márquez n'aura bientôt plus rien à dire. Est-ce vrai ? Comme d'habitude, c'est au lecteur de trancher...

Márquez commence ce projet monumental (qui devait, dans sa version définitive, consister en trois tomes) par le retour aux sources. le voyage à Aracataca en compagnie de sa mère est une occasion rêvée pour l'informer de son désir d'abandonner ses études de droit et devenir écrivain. Et déjà, lors de cet épisode-clé, le récit glisse en douceur dans l'hypnotisant balancement du hamac márquezien, et les spectres de ses romans se superposent aux personnages réels, un peu comme sur ces cartes holographiques qui changent d'image selon l'angle de vue. L'histoire de ses parents, celle du vieux colonel Márquez, son grand-père, celles de ses cousins, de ses incroyables tantes, de sa soeur Margot qui mangeait la terre...
L'auteur, qui selon ses propres mots "ne crée, comme chaque écrivain, qu'un seul et unique livre, même s'il paraît en nombreux volumes est sous des titres différents", reste fidèle à ce credo même dans ses mémoires. Les profondes introspections du petit Gabito qui salit encore ses couches, et ses étranges prémonitions quant à sa future inévitable carrière ne font que le confirmer.
La même autostylisation accompagne aussi son adolescence ; comme si Márquez puisait dans la mémoire collective des images d'un lycéen-poète nul en maths, vêtu de chemises à fleurs et de sandales de prophète, qui cherche l'inspiration dans les bordels et n'a pas un centavo en poche.
Peu à peu, ce dévoreur de livres se rend compte qu'il veut vraiment écrire, et fait ses premiers pas dans le journalisme. Les bleds caribéens Cartagena ou Barranquilla ne sont pas un tremplin idéal malgré leurs attraits, alors il va tenter la chance à la capitale.
Bogota est balayée par le vent froid qui souffle aux pieds des Andes, et malgré toute sa bonne volonté, Gabo n'a pas réussi à tasser les hamacs magiques dans ses valises. le récit change un peu, et nous propose plein d'intéressants détails sur le travail pour El Espectador, sur l'histoire de la Colombie, la politique, les racines de la guérilla, et sur les événements littéraires marquants de l'époque. Les rencontres et les noms de ceux qui ont contribué à L Histoire défilent à toute vitesse ; il est impossible de tout retenir, mais cela fait cristalliser une certaine image politique et culturelle qui est loin d'être sans intérêt.

Márquez, qui a passé des années à créer son mythe latino-américain, nous propose ici son mythe personnel. Il y devient tout ce qu'il pouvait devenir : bébé aux rêves prophétiques, élève miraculeux, poète maudit, chanteur de boléros, joueur de guitare à cinq cordes, Don Juan invétéré, journaliste engagé et enfin... un écrivain célèbre.
Dans les jungles urbaines que sont aujourd'hui Lima, Mexico City ou Santiago de Chile, une nouvelle génération a pris la plume. Sous les néons blafards des McDonald's, ils ont adopté le nom ironique de la "Génération McOndo", et ont transformé le paradis imaginaire des hamacs et des bananiers en enfer réel du béton, plein de violence, drogues, corruption et folie. Bayly, Fuguet ou Volpi ont les yeux grands ouverts et leur humour corrosif ronge le vieux mythe sans pitié. le rêve exotique est devenu cauchemar.
Mais cela n'enlève rien au charme singulier et abracadabrant du vieux barde Márquez, et ses fidèles se laisseront à nouveau envoûter avec bonheur par le son de son pipeau magique. 5/5, et vive le hamac !
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Quand on lit les mémoires du jeune âge de Gabriel Garcia Marquez, on pense lire un roman. En fait, on y retrouve tout ce qui a construit et nourri son oeuvre. Sa famille excentrique, ses débuts de journaliste, les femmes, l'alcool, la politique, les guérillas colombiennes sont des éléments importants de son inspiration. On y découvre aussi, et c'est passionnant, Gabriel Garcia Marquez racontant son travail acharné pour devenir un véritable écrivain. L'exigence tenace de chaque instant qui l'a hissé au plus haut niveau.

Vivre pour la raconter est un vrai plaisir de lecture à la découverte d'un merveilleux conteur, un auteur essentiel à la plume remarquable de simplicité, de clarté et de puissance.
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"Vivre pour la raconter" , une autobiographie écrite dans le style propre à l'auteur, un livre bien nommé. Une fois n'est pas coutume, j'ai dû fractionner ma lecture ; la quasi-absence de chapitres, coutumière à Gabriel Garcia Márquez, et les nombreuses références politiques, elles font parties de son histoire il ne peut les gommer, m'ont parfois rendu le récit assez long mais je me suis accrochée, son écriture en vaut bien la peine !
Si à certains moments j'étais lassée, j'interrompais la lecture et c'est avec d'autant plus de plaisir que j'y revenais car Gabriel Garcia Marquez a cette faculté d'entraîner son lecteur à sa suite, de lui faire vivre intensément ses aventures. Dans ce roman d'une vie on découvre au fil des pages des faits qui ont donné naissance à ses livres, des noms que l'on retrouve dans "Cent ans de solitude" ; ce pourrait être amusant de reprendre ses écrits, d'en relever les noms communs, de pouvoir remonter parfois leurs origines mais cela n'enlèverait-il pas à la magie de ses récits ?
Arrivée à la dernière ligne, j'éprouve le sentiment étrange d'attendre une suite, j'aimerais savoir ce qui est arrivé après le point final, je ne peux qu'en deviner des bribes.
Merci Monsieur Gabriel Garcia Marquez pour l'oeuvre accomplie sur cette terre.
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Gabriel Garcia Marquez prend la plume pour nous parler d'un personnage fascinant : lui-même. Il raconte ses souvenirs de famille, l'histoire de ses parents et la genèse de sa vocation d'écrivain.

Que de belles découvertes dans ces mémoires ! Deux d'entre elles m'ont particulièrement marquée, puisqu'elles sont en rapport direct avec Cent ans de solitude, mon roman préféré de García Márquez.

Tout d'abord, l'origine du nom de Macondo, ce village fondé par la famille Buendia dans Cent ans de solitude. García Márquez nous révèle, dans les premières pages de son autobiographie, que ce nom était celui d'une ferme qu'il a plusieurs fois remarquée lors de ses voyages en train vers son village natal, Aracataca. Ce nom est resté gravé dans sa mémoire car il en aimait la sonorité.

Ensuite, le propre grand-père de Gabriel García Márquez fabriquait des bijoux en forme de petits poissons, comme l'un des nombreux Aureliano Buendia de Cent ans de solitude.

Rien qu'en lisant ce genre d'anecdote (ainsi que l'histoire de la rencontre entre ses parents), on comprend pourquoi García Márquez est devenu l'un des plus grands écrivains latino-américain du XXème siècle : une famille haute en couleur et une vie riche en événements lui ont forcément laissé des souvenirs étonnants à exploiter au fil de ses écrits.

De ce fait, les fans de l'écrivain ne seront pas déçus par cette autobiographie, qui garde le ton des romans de García Márquez. Ce dernier mêle, dans ses mémoires, des souvenirs de sa propre existence avec diverses observations sur la situation politique et économique de la Colombie de sa jeunesse. On se retrouve donc, au final, avec une belle analyse de l'existence de l'auteur dans son intégralité, puisque loin de nous parler que de lui, il nous raconte aussi, en quelque sorte, « l'ambiance » socio-économique dans laquelle il a évolué comme jeune romancier.

Mais le thème principal reste quand même Gabriel García Márquez lui-même et l'on peut lire plus d'une fois de belles descriptions des événements qu'il a vécus et qui l'ont marqué. Tous ne sont pas heureux. le jeune Gabito a connu la pauvreté, la solitude, la honte due à certains événements familiaux ayant eu lieu bien avant sa naissance. Car le jeune Gabriel, apparemment très sensible aux sentiments des adultes qui l'entouraient, a rapidement compris qu'un secret ayant trait à la vie de son grand-père, était ressenti par tout le clan comme une grande honte. Et lui-même en a été influencé. Je ne vous dirai pas de quel secret il s'agit mais, là encore, j'y ai vu un lien avec Cent ans de solitude et avec la raison ayant poussé le patriarche de la famille Buendia à fonder Macondo.

Jamais ennuyant malgré sa longueur, le récit de la jeunesse de Gabriel García Márquez se lit d'une traite. Mon seul regret est qu'il ne nous parle que de ses jeunes années, justement, puisque le récit prend fin lorsque l'écrivain a trente ans à peine. Et, vu son récent décès, Gabito ne pourra jamais nous raconter la suite…Peut-être quelqu'un, un jour, prendra-t-il le relais. Mais il manquera, à cette suite, la « magie » de la plume de García Márquez, ce style unique, reconnaissable entre tous, qui a transformé ce jeune homme ayant abandonné des études de droit qu'il n'aimait pas pour suivre son rêve d'écriture et devenir l'un des plus grands auteurs de sa génération.
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Une autobiographie du prix Nobel de littérature consacrée à sa jeunesse et qui s'arrête à son départ pour l'Europe, à 28 ans, après le récit de ses années de formation.
Pour les admirateurs de l'écrivain colombien, dont je fais partie, c'est un bonheur de voir se mettre en place lieux et personnages, années d'enfance dans une "famille de fous" et de rêveurs, et surtout la genèse d'une vocation, à la fois de poète - ce que Garcia Marquez ne sera pas, contrairement à son ami Alvaro Mutis - de journaliste et d'écrivain.

C'est aussi la possibilité d'ouvrir les yeux sur le cadre historique et géographique de la Colombie des années d'après-guerre et du début de la guerre froide, avec les luttes impitoyables entre libéraux et conservateurs, l'apparition des guérillas, les massacres effroyables, la répression militaire, les événements du 9 avril 1948, journée qui voit un assassinat politique révolutionner et détruire la capitale, Bogota, sous les yeux effarés et incrédules des intellectuels, témoins de la catastrophe.

Mais c'est surtout la peinture sensible et modeste d'un jeune homme timide, pauvre et mal habillé, passionné de littérature, qui passe ses nuits à fumer, boire et discuter interminablement avec ses amis poètes et journalistes du groupe de Baranquillas, quand ils ne finissent pas la nuit avec des "putains tristes" ou joyeuses... C'est la genèse d'une carrière consacrée à l'écriture, où l'on voit que Garcia Marquez n'est pas devenu un très grand écrivain en suivant un cours de "creative writing", mais en lisant sans relâche les plus grands auteurs et les autres, en accumulant brouillons, ratures, remords, et corrections, en tâtonnant à la recherche d'une voix authentique, la sienne. C'est l'aveu qu'en littérature, comme ailleurs rien n'est donné, mais tout est le fruit de la passion et du travail.

Garcia Marquez livre au passage des pistes pour mieux faire comprendre ce qui l'a rellement inspiré dans la création de ses chefs-d'oeuvre, que nous pouvons resituer dans le temps et l'espace. Il croque aussi une galerie de portraits d'autres passionnés comme lui, journalistes, poètes, écrivains, sans compter l'évocation émouvante de sa propre famille, inspiratrice d'une partie de son oeuvre.
Une lecture passionnante, même si l'on peut préférer le "réalisme magique" des romans, et des nouvelles, véritables créations, ô combien originales, de l'imaginaire foisonnant de Garcia Marquez.
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critiques presse (1)
Telerama
18 avril 2024
Un récit d’une foisonnante richesse.
Lire la critique sur le site : Telerama
Citations et extraits (39) Voir plus Ajouter une citation
Citaciones, Gabriel Garcia Marquez escribe de una manera que gusta muchissimo a mi oreja.

«Desde muy niño tuve que interrumpir mi educación para ir a la escuela ».

—Es algo que se trae dentro desde que se nace y contrariarla es lo peor para la salud —dijo él.

«La sangre me golpeaba tan fuerte por dentro del cuerpo que ya no supe si era de rabia o de susto »,

En todo caso, pienso que mi intimidad con la servidumbre pudo ser el origen de un hilo de comunicación secreta que creo tener con las mujeres, y que a lo largo de la vida me ha permitido sentirme más cómodo y seguro entre ellas que entre hombres.

Pues era un forastero que llegó no se sabía de dónde ni cómo, con una buena hoja de vida, pero sin recursos conocidos.

Sin embargo, cuando el abuelo me regaló el diccionario me despertó tal curiosidad por las palabras que lo leía como una novela, en orden alfabético y sin entenderlo apenas.

No creo que haya método mejor que el montessoriano para sensibilizar a los niños en las bellezas del mundo y para despertarles la curiosidad por los secretos de la vida.

Años después, Zalamea publicó el testimonio de su aventura en Cuatro años a bordo de mí mismo, una novela que abrió horizontes insospechables en nuestra generación.

no muestre nunca a nadie el borrador de algo que esté escribiendo.

Barranquilla era entonces una adelantada del progreso civil, el liberalismo manso y la convivencia política. Factores decisivos de su crecimiento y su prosperidad fueron el término de más de un siglo de guerras civiles que asolaron el país desde la independencia de España, y más tarde el derrumbe de la zona bananera malherida por la represión feroz que se ensañó contra ella después de la huelga grande.

El vicio de leer lo que me cayera en las manos ocupaba mi tiempo libre y casi todo el de las clases.

El tedio de mis horas libres encontró remedio por una razón del corazón: el que no canta no puede imaginarse lo que es el placer de cantar.

No sé qué aprendí en realidad durante el cautiverio del Liceo Nacional, pero los cuatro años de convivencia bien avenida con todos me infundieron una visión unitaria de la nación, descubrí cuán diversos éramos y para qué servíamos, y aprendí para no olvidarlo nunca que en la suma de cada uno de nosotros estaba todo el país.

Aún hoy, con diecisiete libros publicados , los correctores de mis pruebas de imprenta me honran con la galantería de corregir mis horrores de ortografía como simples erratas.

Los internos costeños, con nuestro prestigio merecido de gritones y malcriados, teníamos la buena educación de bailar como artistas la música de moda y el buen gusto de enamorarnos a muerte.

La verdad sin adornos era que me faltaban ya la voluntad, la vocación, el orden, la plata y la ortografía para embarcarme en una carrera académica.

Sin embargo, la protección episcopal no lo puso a salvo de la dura prueba de la vida cotidiana en la cárcel, que en vez de pervertirlo enriqueció su carácter y su buen sentido del humor.

No hacía falta, además, porque siempre me interesó más el fenómeno social que la vida privada de las víctimas .

Yo había escrito: «Así como ustedes viven ahora, no sólo están en una situación insegura sino que constituyen un mal ejemplo para el pueblo». La transcripción del editor español me erizó la piel: «Así como vivís ahora, no sólo estáis en una situación insegura, sino que constituís un mal ejemplo para el pueblo».

—No hay en este mundo dos hombres más parecidos que él y tú —me dijo—. Y eso es lo peor para conversar.

Era otra vez la realidad histórica del siglo XIX, en el que no tuvimos paz sino treguas efímeras entre ocho guerras civiles generales y catorce locales, tres golpes de cuartel y por último la guerra de los Mil Días, que dejó unos ochenta mil muertos de ambos bandos en una población de cuatro millones escasos . Así de simple: era todo un programa común para retroceder cien años.

«Si la poesía no sirve para apresurarme la sangre, para abrirme de repente ventanas sobre lo misterioso, para ayudarme a descubrir el mundo, para acompañar a este desolado corazón en la soledad y en el amor, en la fiesta y en el desamor, ¿para qué me sirve la poesía?».

La práctica terminó por convencerme de que los adverbios de modo terminados en mente son un vicio empobrecedor. Así que empecé a castigarlos donde me salían al paso, y cada vez me convencía más de que aquella obsesión me obligaba a encontrar formas más ricas y expresivas.

Dictaba su clase sin mirar a nadie, con ese aire celestial de los miopes inteligentes que siempre parecen andar a través de los sueños ajenos.

El derecho lo entendía menos y me interesaba mucho menos que cualquiera de las materias del liceo, y ya me sentía bastante adulto como para tomar mis propias decisiones.

La noche se había vuelto diáfana y fresca bajo la luna llena, y el silencio parecía una sustancia invisible que podía respirarse como el aire.

En mi caso, además, estoy convencido de que contar la historia verdadera es de mala suerte. Me consuela, sin embargo, que alguna vez la historia oral podría ser mejor que la escrita , y sin saberlo estemos inventando un nuevo género que ya le hace falta a la literatura: la ficción de la ficción.

Siempre fue divertida y amable conmigo, pero tenía un talento de ilusionista para escabullirse de preguntas y respuestas y no dejarse concretar sobre nada.

Por desgracia , ni el ingenio, ni la resistencia, ni el amor fueron suficientes para derrotar la pobreza. Todo parecía a favor de ella.

De modo que la vida misma me enseñó que uno de los secretos más útiles para escribir es aprender a leer los jeroglíficos de la realidad sin tocar una puerta para preguntar nada.

Como muchas catástrofes grandes del país, el 9 de abril había trabajado más para el olvido que para la historia.

Algo puse yo que hoy no recuerdo, pero la historia me pareció divertida y con la dosis suficiente de locura para que pareciera nuestra.

Pero también, como todos los hombres, me equivoqué de tiempo y lugar.

Aún hoy sabemos que las grabadoras son muy útiles para recordar , pero no hay que descuidar nunca la cara del entrevistado, que puede decir mucho más que su voz, y a veces todo lo contrario. Tuve que conformarme con el método rutinario de las notas en cuadernos de escuela, pero gracias a eso creo no haber perdido una palabra ni un matiz de la conversación, y pude profundizar mejor a cada paso.

Al final de un intercambio atropellado, porque su autobús llegaba y el mío se iba, me dijo con un fervor que me dio en el alma: —Lo que no entiendo, don Gabriel, es por qué no me dijo nunca quién era usted. —Ay, mi querido Lácides —le contesté, más adolorido que él—, no podía decírselo porque todavía hoy ni yo mismo sé quién soy yo.

No pude eludir el frémito de que iba a perderla para siempre un jueves de julio a una hora tan temprana, y por un instante pensé en parar el taxi para despedirme, pero preferí no desafiar una vez más a un destino tan incierto y persistente como el mío.
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Nous étions attablés à la seule cantine du village, buvant une bière glacée, quand un homme qui avait l'air d'un arbre, avec des jambières et un pistolet de l'armée à la ceinture, s'approcha de nous. Rafael Escalona fit les présentations, et il me fixa du regard en retenant ma main dans la sienne.
"Vous êtes parent avec le colonel Nicolás Márquez ? me demanda t-il.
- Je suis son petit-fils.
- Alors, votre grand-père a tué le mien."
C'était le petit-fils de Medardo Pacheco, l'homme que mon grand-père avait tué en combat singulier. Je n'eus pas le temps d'avoir peur, car il avait prononcé ces mots sur un ton chaleureux, comme s'il voulait me dire que d'une certaine façon nous étions parents. Pendant trois jours et trois nuits nous fîmes la nouba dans son camion à double compartiment, mangeant du ragoût de chèvre et buvant du brandy à la mémoire de nos grands-pères.
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C'est ainsi que se déroula la "marche silencieuse", la plus émouvante de toutes celles qu'a connues la Colombie. De l'avis de tous, partisans comme adversaires, au terme de cette journée historique l'élection de Gaitán était inévitable. Les conservateurs le savaient aussi, à cause de la violence qui avait contaminé tout le pays, de la férocité de la police contre le libéralisme désarmé et de la politique de terre brûlée. Le spectateurs de la corrida qui eut lieu cette même fin de semaine dans les arènes de Bogota assistèrent à l'expression la plus ténébreuse de l'état d'esprit du pays, quand la foule descendit des gradins, indignée par le flegme du taureau et l'incapacité du torero à l'achever. La populace déchaînée dépeça le taureau vivant. Les nombreux journalistes et écrivains qui avaient assisté à cet acte de barbarie ou l'avaient entendu raconter l'interprétèrent comme le plus épouvantable symptôme de l'épidémie de rage qui s'était propagée dans toute la Colombie.
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Car Mina voyait les fauteuils à bascule osciller tout seuls, croyait que le spectre de la fièvre puerpérale se faufilait dans les chambres des femmes en couches, que l'odeur des jasmins du jardin était un esprit invisible, qu'une ficelle tombée par terre dessinait les numéros du gros lot de la loterie, qu'un oiseau sans yeux s'était égaré dans la salle à manger et qu'on n'avait pu l'en chasser qu'en chantant "La Magnífica". Elle croyait reconnaître grâce à des codes secrets les lieux et l'identité des personnages des chansons qui arrivaient de la Province. Les malheurs qu'elle avait imaginés se produisaient tôt ou tard, et elle devinait qui allait arriver de Riohacha coiffé d'un chapeau blanc, ou de Manaure avec une colique qu'on ne pourrait guérir qu'avec du fiel de charognard. Car, prophétesse de métier, elle était aussi une guérisseuse occasionnelle.
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... je retournai au collège, obnubilé par l'extravagance géniale de José Manuel Marroquin, un poète de Bogotá qui déchaînait l'auditoire dès cette première strophe :

Maintenant que les aboiements chiennent, maintenant que les chants coquent,
maintenant qu’au lever du jour les grands sons clochent ;
que les braiments ânonnent et les roucoulements oisellent,
que les sifflements gardiennent et les grognons cochonnent,
que la rose aurorée campagne les vastes dorés,
tu perles de liquides verses comme je larme des pleurs
et froidant de frissons bien que l’embrase s’âme,
je viens soupirer des pousses fenêtré à tes dessous.

Bien entendu, je semais le désordre partout où je passais en récitant les interminables strophes de son poème, mais en même temps j’apprenais à déclamer avec le naturel d’un autochtone sorti d’on ne savait où.
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Vidéo de Gabriel Garcia Marquez
Troisième épisode de Dans les pages avec la romancière américaine Joyce Maynard. Elle est venue nous parler des livres qu'elle aime, de Gabriel Garcia Marquez, du Petit Prince et de musique.
Bon épisode !
"L'hôtel des oiseaux" est publié aux éditions Philippe Rey, Arthur Scanu à la réalisation
#librairie #joycemaynard #danslespages #millepages #books @editionsphilipperey1918
>Littérature (Belles-lettres)>Littérature espagnole et portugaise>Romans, contes, nouvelles (822)
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