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EAN : 9782864325680
56 pages
Verdier (12/02/2009)
3.69/5   26 notes
Résumé :
L'acte de naissance du sujet de la connaissance a été dressé par un Français. C'est le Discours de la méthode. Mais c'est en Allemagne que Descartes l'a conçu, en rêve, et aux Pays-Bas qu'il l'a rédigé. Si le monde se ramène depuis lors, à deux substances, l'étendue et la pensée, leurs rapports ne vont pas sans complications ni sautes. La vie même de Descartes en est l'illustration.
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Ce livre m'a entraine en une chevauchee fantastique. En peu de pages il m'a fait traverser l'Europe et son histoire pas trop recente. Et j'ai pu assister, essoufle, a la naissance de la pensee moderne. Il m'a procure un intense plaisir (quelle ecriture! Quel style!) tout en me forcant a cogiter (et cette culture! cette science l'air de rien!). J'ai peu lu jusque la de son auteur (Miette est une pure merveille, j'en avais fait un compte-rendu et j'ai comme une envie de le relire pour en poster un nouveau) et j'ai bien fait de sortir de mes sentiers balises. Pierre Bergounioux est un orfevre (en fait il est aussi sculpteur, il travaille le fer).


Le livre peut etre divise en deux parties pas trop distinctes. La premiere est, en un travelling vertigineux, une vue a vol d'oiseau des origines et de la formation – politiques et intellectuelles - de l'Europe. Delirant! Etourdissant! Pied de nez aux historiens de métier. La deuxieme est une audacieuse biographie de Descartes, presque irrespectueuse! Et ce, malgre un certain respect des faits historiques averes.


Rene Descartes est considere un des peres de la philosophie moderne pour avoir donne l'importance au moi, au sujet, face au monde, a la nature (le celebre "je pense donc je suis"). Il a ecrit et publie son oeuvre revolutionnaire aux Pays-Bas. Pourquoi? Comment cela se fait? C'est un hobereau francais. Longtemps un soldat. Qui a voyage un peu partout en Europe a la suite d'armees diverses. Pourquoi il fuyait la France, son berceau natal et intellectuel? Pourquoi, passant par l'Italie, il ignore l'art et la beaute de ce pays? Et l'Allemagne, n'a-t-elle ete qu'un champ de bataille pour lui? A-t-il eu besoin de s'enfermer, laissant de cote la societe, le paysage, la culture, pour tirer au clair sa pensee? Pour Bergounioux, Descartes a concu en songes et en terres allemandes les premisses de son argument, mais c'est seulement en Hollande qu'il pourra le fixer definitivement sur le papier. Comme si l'exil et la claustration, la solitude d'une retraite, etaient des conditions indispensables a l'ecriture. Les liens sociaux que l'hobereau a etabli a Paris l'empechent de travailler. Pour se concentrer sur son oeuvre il doit s'eloigner, s'expatrier. Et pourquoi justement les Pays Bas? Bergounioux esquisse trois raisons principales: la paix relative qui regnait en ces moments en Hollande, l'aisance calme de la vie materielle, le climat froid. Comme s'il avait besoin du froid pour clarifier ses pensees, et du lit, ou il restait jusque tard dans la matinee (et ou il ecrivait peut-etre aussi, Proust avant la lettre?). Dans une chambre monacale, en une petite ville provinciale eloignee des bruits de la capitale.


Axer les virees europeennes de Descartes sur la poursuite du froid, d'un climat etouffeur de bruits, belle trouvaille! Originale et audacieuse! Mais c'est plus qu'une trouvaille. Bergounioux insinue que pour revolutionner la pensee, pour redessiner le monde, il est peut-etre necessaire de s'eloigner des habitudes, des certitudes des paysages connus.


Est-ce que j'ai donne l'impression que ce livre est un ouvrage de philosophie? Non, c'est un roman. Ou du moins il se lit comme un roman. Bergounioux a une ecriture merveilleusement fluide, il sait eveiller notre interet et le maintenir jusqu'au point final. Une soixantaine de pages. On parcourt ca en un tournemain. Et on reste bouche bee devant la prouesse. Moi j'ai ete epoustoufle.
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56 pages assez époustouflantes, il faut bien le dire !

Dans un style à la maîtrise impeccable, Pierre Bergounioux entreprend de nous expliquer pourquoi René Descartes, tourangeau d'origine, s'est attelé à la rédaction de son fameux Discours de la méthode depuis les Provinces-Unies, Pays-Bas de son époque. Ce faisant, l'auteur balaie plusieurs siècles d'Histoire en remontant depuis les temps gallo-romains jusqu'au XVIIème siècle donc, avec une virtuosité, une érudition et une hauteur de vue remarquables.

Il retrace le parcours de Descartes et ses errements à travers une Europe belliqueuse (dans laquelle il prit sa part) avant de se fixer en Hollande (qui apparaît alors comme une terre de désolation... empêchant tout distraction de l'esprit) pour se consacrer exclusivement à l'étude (mathématiques, philosophie...) et y apporter le fruit de son génie polyvalent.

Tout ceci est expliqué avec beaucoup d'intelligence et éclairé par les apports de ses prédécesseurs et successeurs (notamment Francis Bacon et Baruch Spinoza). Les références, nombreuses, ne se limitent pas au champ de la philosophie, on fera au passage un petit tour par la littérature (citons, entre autres, Montaigne et Cervantès) et L Histoire (Braudel, of course...). Une fresque talentueuse de la pensée condensée en moins de 100 pages, un petit livre magistral !
Lien : https://leschroniquesdepetit..
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Biographie restreinte mais biographie du philosophe Descartes, limitée à une période courte, celle où René Descartes souhaite faire imprimer ses écrits et pour cela choisit la Hollande.

L'auteur prend le lecteur par la main et brosse à grands traits fulgurants l'histoire de l'Europe, des cohortes De César à nos jours. C'est érudit, savant, et formidablement écrit. Comme devant les écrits brillants, sitôt lu l'envie vous assaille de reprendre du début, cette ahurissante contraction des faits m'a laissée abasourdie et admirative.
Quelque part dans cette épopée apparaît René Descartes, Pierre Bergounioux nous le peint se promenant, son Discours de la méthode sous le bras, il convoque Bacon, Montaigne et Shakespeare. Il imagine René croisant Spinoza enfant dans les rues de Leyde.
Pourquoi Descartes homme d'épée qui a traîné ses guêtres dans toute l'Europe au service des princes et rois du moment, se retire ainsi du monde et pourquoi en Hollande.
Peu à peu se dessine Descartes, ses exigences philosophiques, ses errances géographiques jusqu'à cette chambre où il écrit une nuit la Première Méditation.
La situation politique de la France d'alors interdisant au philosophe d'écrire en toute quiétude, en toute liberté dans son pays, il a fait le choix de la Hollande de sa tolérance religieuse et de l'accalmie des batailles.
Cet exil, ce retrait, vont permettre à la pensée de Descartes de s'épanouir et de donner des textes parmi les plus importants de la philosophie.

Lire Pierre Bergounioux est un plaisir exigeant et ce dernier livre ne déroge pas à la règle.

Lien : http://asautsetagambades.hau..
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de la nécessité d'une chambre sans trop de sollicitation extérieure pour qu'accouche la découverte de la puissance de la pensée, de sa nécessité pour qui s'y révèle apte, et donc parler de tout ce qui entoure cette chambre (ou ces, l'allemande amenant à la ou les chambres en Hollande).
Fulgurance de la dizaine de pages qui vont de la Gaulle à la fin de la renaissance, en phrases denses, incisives et harmonieuses, à la simplicité apparente, traçant le jeu des forces (la France carrefour et lieu de rencontre), des climats, des régimes - contestant et reprenant l'idée de l'influence du milieu extérieur sur le fonctionnement de l'intelligence et sa manifestation. Avec une clarté séduisante qui emporte mes timides réticences, parfois, d'inculte méditerranéenne (me justifiant un peu d'être inapte à la philosophie), avec quelques malices.
Et, en bas de la page 29 on en arrive à "Au seuil du dix-septième siècle, ils sont quelques-uns en Europe, donc dans le monde, à porter sur toute chose un regard différent, dessillé. Et ces hommes inévitablement, sont les ressortissants des trois puissances majeures de ce temps, la France, l'Angleterre et l'Espagne de Philippe II, laquelle inclut, pour le coup, les provinces hollandaises..." : Bacon encore trop prisonnier de son rôle officiel, Baruch Spinoza et, entre eux, René Descartes. Qui a eu besoin de s'éloigner de la trop grande douceur de vivre de la France (jolies lignes où fait irruption le grand Meaulnes) et de l'absolutisme qui asservit les esprits, de ne pas se tourner vers la splendeur italienne pour se rencogner dans l'hiver des campagnes allemandes ou hollandaises.
Et le texte se focalisant un peu sur lui, le rapide récit le roman qui fut sa vie (me fascine toujours un peu), la vie avec les reîtres mêlée au commerce avec les savants, (et je réalise : commerce comme on disait alors et non négoce - il eut toujours l'aisance suffisante pour que ne compte pas le besoin d'assurer sa survie, et ça fait partie, la naissance, à cette époque, de cette classe, de ce qui a été nécessaire à cette arrivée de la philosophie) avant qu'il se range à son amour de l'étude obstinée, et à la nécessité des chambres - chambres pour s'isoler - et les pages sont pleines de cette étude; son ouverture, l'épanouissement tranquillement consciente de cette pensée. Et puis, dans les dernières pages, Bergounioux élargit de nouveau le champ à ce qui les entoure, ces chambres en Hollande et leur occupant.
Cinquante sept pages prodigieuses et une envie de lire les Méditations et de relire les quelques pages lues en belle découverte il y a tant et tant d'années que je ne saurais plus les chiffrer

Lien : http://brigetoun.blogspot.com
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Citations et extraits (4) Ajouter une citation
L'important, ce n'est pas ce qu'on raconte . C'est ce qu'on fait .Les expérimentateurs téméraires de ce temps ne se sont pas souciés de savoir quels ils étaient, de démêler le tour d'esprit, l'attitude existentielle qu'ils partageaient et qui, par-delà les frontières, les langues, les tempéraments nationaux, les conflits de puissance, les rassemblaient dans une même famille dont ils ne se surent même pas les membres dispersés , unis par les liens de l'esprit, et non plus de la chair . Ce qui nous meut n'a pas besoin d'être énoncé, pour commander nos décisions,diriger nos vies . mais lorsqu'une résolution collective tend à donner la préférence au "jugement calme", au "calcul des conséquences", en toute circonstance, celui qui applique pareil procédé à toute chose ne saurait s'y soustraire lui-même . La lumière dont il est le foyer, il lui faut y entrer . En l'absence de l'Allemand auquel incombe , traditionnellement, en Europe, l'activité métaphysique, un Français, que son goût portait naturellement vers la poésie, se pose la question de savoir quel il est . Elle conditionne la valeur logique de ce qu'il sait . Mais la France, outre qu'elle ne brille pas plus alors qu'à aucun autre moment de son histoire dans le domaine philosophique, lui est hostile à plusieurs égards . Ses institutions, sa religion sont ennemies du libre examen sans lequel bien des choses , importantes, resteront hors d'atteinte de l'esprit .
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Au seuil du dix-septième siècle, ils sont quelques-uns en Europe, donc dans le monde, à porter sur toute chose un regard différent, dessillé. Et ces hommes inévitablement, sont les ressortissants des trois puissances majeures de ce temps, la France, l'Angleterre et l'Espagne de Philippe II, laquelle inclut, pour le coup, les provinces hollandaises
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« On s'explique assez mal qu'un Français confie un manuscrit à un imprimeur hollandais, encore moins qu'il se soit établi aux Pays‑Bas depuis huit ans quand sa seule occupation ne consiste qu'à penser. Parce que rien n'est plus indifférent à celle-ci que l'endroit où l'on s'y adonne. »
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Le français, c'est-à-dire la langue de l'Ile-de-France, n'est guère parlé au-delà que dans les villes. La campagne est encore patoisante. Des voyageurs rapportent que, juqu'au début du vingtième siècle, il était impossible de se faire comprendre dans certaines vallées du Massif central et d'ailleurs.
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Videos de Pierre Bergounioux (18) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Pierre Bergounioux
Cette semaine, Augustin Trapenard est allé à la rencontre de Pierre Bergounioux à l'occasion de la sortie en poche de son livre "Le Matin des origines" aux éditions Verdier. Ce merveilleux ouvrage célèbre l'ancrage profond dans ses racines, dans les terres du Quercy entre Lot et Corrèze, où l'auteur a grandi, dans la chaleur de la maison rose et au sein des paysages qui ont façonné son être. Ces souvenirs, imprégnés dans sa mémoire, représentent une part essentielle de son identité qui demeure là-bas. À travers ces pages, Pierre Bergounioux évoque avec justesse le lien puissant que la terre tisse avec nos souvenirs et nos émotions, révélant ainsi le pouvoir des lieux familiers pour donner du sens à notre passé et à nos moments les plus heureux. Il était donc évident qu'Augustin Trapenard se déplace au coeur de cette histoire, sur les contreforts du plateau des Millevaches, dans sa maison de Corrèze pour un retour aux origines de la vie et de l'écriture.
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