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Son seul tort est d'être née fille.
Son destin est fait d'ennui, de soumission, de solitude et de claustration.

Terrible chant d'une jeune femme prisonnière, enfermée au sens propre comme au figuré, recluse, séquestrée, otage des traditions ultra-religieuses.

Nous sommes en Algérie, en plein coeur des absurdités de la religion musulmane qui bride au maximum la liberté des femmes et les empreint de la honte de leurs corps, de la souillure que représentent leurs seules existences.
Mais ne nous y trompons pas, il ne s'agit pas ici de décrier une religion déjà trop sujet de polémiques en nos temps troublés. Ce serait oublier que toutes les religions sont disposées à de tels fanatismes, que les moeurs patriarcales de nombreuses civilisations non monothéistes font également de même. La liberté de la femme est un danger pour l'homme semble-t-il, c'est à se demander quel est vraiment le sexe fort.

Dans ce court roman, il ne se passe rien, le temps n'existe plus. La vie est absurde et vaine. C'est cela qui rend ce récit percutant et oppressant.

Nous avons là le premier roman de Nina Bouraoui, son meilleur selon moi, le plus puissant et le plus lyrique.
Il entre en résonance avec d'autres textes que je vous recommande vivement :
"Au commencement était la mer" de Maïssa Bey
"Syngué Sabour" d'Atiq Rahimi
"Mille soleils splendides" de Khaled Hosseini
"Bilqiss" de Saphia Azzeddine
"La Muette" de Chahdortt Djavann
"Le palanquin des larmes" de Chow Ching Lie
"La servante écarlate" de Margaret Atwood



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A Alger, en 1970, Fikria est une jeune musulmane solitaire car cloîtrée, sur décision du père dictateur qui ne lui adresse plus la parole depuis qu'elle est devenue « impure » à la puberté.
Ce court roman très dense est un cri de révolte.
de longues phrases pour cracher la colère, la haine, pour le père, pour la religion.
Vaine rébellion ! Entre rêve et folie, les journées s'écoulent alimentées par le seul spectacle de la rue.
Immense et effroyable solitude.
Une superbe écriture pleine de métaphores. On rit et souffre avec Fikria.
Un superbe plaidoyer contre l'absurdité de la religion poussée à ses excès.
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Nous sommes à Alger. Fikria, une adolescente d'environ 14 ou 15 ans, se cache derrière les rideaux pour observer les passants dans la rue, les enfants qui jouent, les femmes qui dissimulent leur corps sous les tissus de leur djellaba. Elle souffre du silence de son père qui se tient à l'écart d'elle et qui ne lui parle plus depuis 2 ans. Sa mère désespérée de n'avoir eu que des filles... Pour elle, tout ça c'est une honte, et cette honte rejaillit sur Fikria, qui souffre du manque d'affection de ses parents, et qui se dit « une souillure », depuis le jour où elle est devenue une femme. Elle est entourée de ses soeurs et d'Ourdhia, « voyageuse sans valise » venant du désert, un refuge pour Fikria.

J'ai eu le coeur serré durant cette lecture en pensant au cas de cette jeune fille, atteinte dans son identité de femme, un drame terrible. le texte de Nina Bouraoui est vibrant, splendide, onirique, lyrique. Un livre à lire.
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« le corps est le pire des traitres, sans demander l'avis de l'intéressé, il livre bêtement à des yeux étrangers des indices irréfutables : âge, sexe, féconde pas féconde ? Pubère, il m »a rendue inapprochable, dans le royaume des hommes je suis la souillure, sur l'échiquier des dames, le pion en attente caché derrière une reine hautaine qui choisira seule le bon moment de se déplacer. »
« Nous, filles, étions sa douleur, nos visages, nos corps lui rappelaient sa faiblesse, notre sexe, son sexe amputé, et si elle avait toujours l'air triste c'est parce qu'elle savait l'absurdité de notre existence à part qui nous éloignait un peu plus des hommes et de nos semblables »
Elle est enfermée, n'a que pour horizon la rue, juste devant sa fenêtre. Elle est pubère depuis peu de temps, doit garder intact son trésor pour celui que son père lui aura choisi. Nous sommes à Alger, début des années 70…
Quelle plume, quelle force, quelle rage, quelle violence …..
Une langue imagée, incisive, colorée, expressive, charnelle
J'ai été saisie , emportée, par cette écriture hachée, saccadée, irrégulière, rythmée par les pensées de cette jeune fille que j'aurais voulu pouvoir empoigner fermement et la tirer de cette sordide baraque où personne ne considère personne. le père viole la mère, la rabaisse faute d'avoir eu le mâle tant désiré, et qui vaut tout, alors que les filles ne valent rien. La mère violente la fille. Comment respecter sa fille quand on est soi-même considérée comme un tas de chair ?
Un père qui n'adresse plus la parole à dans fille depuis qu'elle est « mariable ».
L'enfermement, le rejet, le désespoir, l'implacable destin des filles….tout cela explose dans ce livre court mais lourd de révolte.
La révolte hurlée tout au long de ses pages.
La révolte étouffée
La femme engrillagée, emmurée
La femme prisonnière des siens, prisonnière de sa culture, de ses coutumes….
Et aujourd'hui ? Ouvrons les yeux…..
Par décence pour cette jeune fille qui aurait pu être moi, si j'avais eu la malchance de naître sous d'autres cieux, c'est un coup de coeur qui ne dira pas son nom.
Un livre coup de gueule qui donne envie de l'ouvrir encore plus grande quoi qu'il puisse en coûter.
« Il roulait, il rebondissait, se cognait contre les formes qu'il avait lui-même rendues inhumaines, sa tête enfouie sous une aisselle où pendait une dentelle rousse, s'inventait un corps plus désirable et moins fatigant. Plein d'envies inassouvies, il se vengeait sur le ventre de ma mère en lui administrant des coups violents et réguliers avec une arme cachée dont il était le seul détenteur. »


Lien : http://leblogdemimipinson.bl..
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N°77 – Septembre 1991.
LA VOYEUSE INTERDITE- Nina Bouraoui - Gallimard.

Être une femme dans les pays du Maghreb est une malédiction. Elle porte en elle tous les maux (« Fille, foutre, femme, fornication, faiblesse, flétrissure commencent par la même lettre »fait-elle dire à son père. Ainsi, si l'enfant est un garçon, sera-t-il choyé (et ses parents honorés), si c'est une fille, elle sera rejetée de la cellule familiale, ses parents deviendront ses bourreaux, ses gardiens et sa vie sera celle d'une recluse avec seulement le droit de voir le monde extérieur à travers une fenêtre voilée comme le visage d'une femme musulmane. Elle n'échappe pas aux mutilations sexuelles, aux frustrations qui font naître des fantasmes et de la haine parce que c'est ainsi depuis des millénaires, que cela se passe avec la complicité de la mère puisqu'elle perpétue, presque malgré elle, une tradition au point de lui enlever tout sentiment maternel.

Sur la femme repose le travail domestique, l'abnégation, les maternités répétées qui lui déforment le corps, avec l'obligation morale d'enfanter des mâles. Une jeune file est le désespoir d'une famille, elle se doit de se voiler le visage surtout quand elle devient une tentation pour les autres hommes, épouse, elle reste soumise à son mari , elle est sa chose, l'objet de son plaisir sous peine de manquer gravement aux usages.  de cette jeunesse recluse, la femme arabe s'accommode comme elle peut avec des souvenirs absents qu'elle se fabrique (« On arrange son passé comme on peut surtout quand on est une femme en pays musulman ») et les mots remplacent les sensations interdites, redessinent le bonheur qu'elle n'a pas connu. La seule échappatoire c'est le mariage sans qu'elle sache vraiment qui sera son époux (« Une femme musulmane quitte sa maison deux fois, pour son mariage et pour son enterrement »). Pour les femmes de sa parentèle, ses noces sont une fête, pour son père c'est l'occasion d'une transaction lucrative, pour elle c'est un deuil, un de plus après celui de son enfance. Il débouchera sur une nouvelle forme de solitude. A lire Nina Bouraoui, il plane sur son roman, l'ombre constante de la mort comme un refus de sa condition, comme une délivrance aussi.

Le style du livre est à la mesure de cette violence tant extérieure qu'intérieure. Elle est le quotidien de cette jeune fille musulmane dont elle porte ici le témoignage. Les mots ont une intensité poétique extrême quand elle évoque les paysages grandioses et solitaires du désert, il prend des accents surréalistes qui confinent au délire pour évoquer ses souffrance que seule la mort peut interrompre. Cet ouvrage se termine par une nouvelle vie de la jeune file quI après l'épreuve sans joie de la défloration va devenir une femme puis une mère sans qu'on sache vraiment si elle brisera le cercle infernal de cette tradition ou s'en fera la complice et infligera à se filles les souffrances qu'elle a elle-même subies de la part de ses parents.

Il est des livres qui, une fois refermés laissent à leur lecteur un sentiment indéfinissable. Celui-ci veut porter un témoignage actuel sur la condition de la Jeune fille et de la femme en pays d'Islam. Il est à ce titre intéressant tant par le style que par son aspect documentaire. Pour le lecteur français, il est cependant un peu déroutant face à la perception qu'il peut avoir des pays arabes et de leur évolution face à l'influence occidentale et aux manifestations de libéralisations de la société maghrébine.


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L'intégrisme religieux est incompatible avec le droit des femmes. Dans toutes les religions, sous toutes les latitudes.
Dans le regard de ces hommes, les femmes incarnent le pêché, la souillure, la fornication, l'impureté.
Elles possèdent ce qu'ils ne pourront jamais posséder, la capacité à donner la vie. Et ce qu'ils ne peuvent posséder, il faut qu'ils le soumettent, l'assujetissent.
" Affublé d'un penis, il doit prouver" dit la jeune fille à propos de son père. Prouver qu'il domine. Et pour cela, il n'adresse plus la parole à sa fille depuis qu'elle est souillée par le sang de la puberté. Il la maintient cloîtrée pour empêcher que sa sensualité ne s'éveille sous le regard des hommes. Il est son maître jusqu'à ce qu'il puisse la donner à un mari qui l'enfermera à son tour pour qu'elle ne connaisse que la domination.
Et la mère est complice, toutes complices ces mères meurtrières à qui on a répété que c'est la tradition. Elles se soumettent à la parole des hommes, qui leur assènent jour après jour que c'est Dieu qui l'exige. Elles jalousent leurs filles qui pourraient connaître un sort plus enviable et répètent, générations après générations, le sacrifice de leur vie.
Avec lyrisme et colère, Nina Bouraoui évoque la violence contenue de ces jeunes filles condamnées dès la naissance à un regard passif sur le monde.
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La voyeuse c'est Fikria, une adolescence algéroise vivant dans une famille traditionnelle au début des années soixante dix. L'atmosphère de la maison est austère et bien que la jeune fille ait deux soeurs aucun rire ni babillage ne raisonnent entre les murs. le père est un tyran et la mère, amère de n'avoir su enfanter que des filles ne leur porte aucun amour. L'aînée, une plante maladive, est anorexique et la petite dernière souffre d'un handicap psychomoteur, seule Fikria est " normale" et promise à un avenir tout aussi "normal". En attendant cet avenir, elle vit cloîtrée dans sa chambre ayant pour seul contact avec l'extérieur ce qu'elle voit de sa fenêtre. Elle ne peut pas sortir car les femmes qui vont dans la rue sont des **** et les hommes " chacals citadins, violeurs de conscience" sont à l'affût. Ses visions sont surtout intérieures: au travers de rêves et de fantasmes emprunts de lyrisme, elle dénonce le rôle des femmes " mères meurtrières", victimes humiliées et recluses mais aussi coupables de perpétuer la tradition.
La langue âpre et crue Nina Bouraoui nous livre un récit dérangeant où la mort et le sexe sont omniprésents. Certains passages sont violents, j'ai serré les jambes et grincé des dents. Je ne sais pas dire si j'ai aimé ou non ce roman mais j'ai apprécié l'écriture et surtout la férocité que l'auteur emploie pour décrire les femmes de sa famille.
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Un roman qui avait laissé des traces dans mon imaginaire à sa sortie. Depuis la condition féminine ne s'est pas améliorée partout dans le monde, et des ouvrages sur des réalités pas toujours faciles à appréhender de notre côté de la méditerranée( si elles ne sont pas vécues de l'intérieur) sont là pour nous rappeler combien la liberté est toujours à conquérir, surtout pour les femmes...
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Alger.
Derrière les murs de sa maison, de sa prison, une adolescente. Cachée, claustrée, bridée. Parce que la religion. Et pas que.
C'est un livre d'une violence terrible. Dans les mots. Dans les émotions. Sur la haine de soi, de la femme, ce corps qui porte la vie et rien que ça. Les métaphores autour du vagin, les termes employés sont percutants, tranchants, font mal. Parce que je suis une femme peut-être... J'espère que non, j'espère que les hommes qui ont lu ce livre l'ont ressenti aussi.
Dans ce recit, le temps est aboli. Les liens aussi, la père est bourreau, la mère criminelle, la soeur piégée, en prison elle aussi. Puisque la prison c'est leur corps.
Au-delà de l'aspect religieux, féministe, la question se pose de la transmission. Ce qu'on laisse à nos enfants de traditions, de convictions. C'est quelque chose de très fort dans ce livre.
Très fort.
Rien d'autre à ajouter.
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Il faut, comme Nina Bouraoui, être née en France d'une mère française, avec dans ses gènes la mémoire d'une Constitution qui prône la liberté, l'égalité et la fraternité, et que la laïcité est dans la loi depuis si longtemps, puis avoir vécu dans un pays du Maghreb, vu de l'intérieur les us et coutumes d'un pays dont la Constitution dit que la religion du pays est la religion musulmane, pour comprendre, la dualité, et la révolte intérieure d'une jeune fille, qui se rend compte qu'on va lui renier toute féminité, lui enlever tout droit d'exister en tant que femme, et fière de l'être.
Un beau roman, puissant et violent, parfois, comme ce sentiment de violence faite aux femmes sous ces cieux qui vivent encore au Moyen-âge !
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