Territoire de fièvre

Je continue à explorer la bibliographie de Brussolo avec intérêt et méthode, une vingtaine de titres à ce jour soit, 10 à 15% de ses publications, je suis donc loin d'en avoir fait le tour.
Ici, une fois de plus, l'auteur fait preuve d'une imagination débordante avec un contexte franchement délirant, essayez donc d'imaginer une créature vivante de la taille d'une petite planète dérivant dans le cosmos en état d'hibernation, ensuite, imaginez une armada de scientifiques débarquant avec tout le matériel nécessaire pour découvrir les secrets de cet incroyable phénomène.
Liza est la scientifique qui est envoyée un an après le début de l'expérience pour prendre connaissance des résultats et en faire le compte-rendu à ses supérieurs, car les spécificités de la "bête" brouillent les émissions radio et rendent toutes communications impossibles.
La mission de Liza, qui paraît simple en théorie, va lui procurer beaucoup de surprises, se promener sur le dos d'une planète vivante qui transpire et dont les poils ont la taille de troncs d'arbres n'est que le prélude du cauchemar qu'elle va découvrir...
Voilà, je ne vais pas en dire beaucoup plus, côté inventivité du scénario, Brussolo est égal à lui-même, on est dans le délire absolu avec ce périple improbable, dans le délire avec ce peuple de scientifiques et ses dérives, car il s'est passé bien des choses depuis un an.
Pour ma part, ce ne sera pas mon préféré des titres de l'auteur, en partie à cause de certaines incohérences relevées, bien que ce terme puisse être discutable s'agissant de l'univers délirant de Brussolo. Il reste que du point de vue de l'inventivité, l'auteur assure une fois de plus, même si, me concernant, la magie n'a pas opéré.

Ma première déception concernant ce roman est due à l'éditeur qui présente "Territoire de fièvre" comme le tome 3 de la série DESTROY alors que... pas du tout. Ecrit des années auparavant, en 1983, ce roman n'a rien à voir avec le schmilblick ; le coupable : Serge Brussolo ou son éditeur a donné le même titre à deux romans.

Donc, ici pas question d'espionnage ou de services secrets, nulle trace des héroïnes auxquels le lecteur a eu le temps de s'intéresser voire de s'attacher. Dans un tout autre genre - l'anticipation - il est question d'une mission spatiale, rien de moins. Bienvenue sur une planète "animale" constituée en réalité d'une bête gigantesque endormie en hibernation et qui vogue dans l'infini espace. Liza Angsthron, zoologue, est dépêchée sur place pour récupérer des échantillons et des analyses qu'une équipe de scientifiques était censée effectuer. Sauf que, arrivée sur la "planète" fétide, couverte de suint organique, la jeune femme déchante et s'aperçoit que l'Université a perdu le contrôle de son staff devenu autonome et rebelle.

Je n'ai pas grand chose à reprocher à ce roman mais je ne trouve pas grand chose à louer non plus. le scénario tient la route mais ne m'a pas du tout captée. J'ai plutôt rapidement été écoeurée par l'environnement très organique et par les descriptions qui en découlent : pus, glaires, pustules, cellules graisseuses, odeurs corporelles fétides, sucs destructeurs, poils arborescents... il faut avoir le coeur bien accrocher pour ne pas l'avoir au bord des lèvres dès la première moitié du roman, ce qui m'a rendu la seconde particulièrement désagréable. Serge Brussolo peut se vanter de titiller les cinq sens de ses lecteurs, pour le pire et... le pire.


Challenge XXème siècle 2020
Challenge RIQUIQUI 2020
Challenge MULTI-DÉFIS 200

Une idée assez géniale de Serge Brussolo, comme il en a l'habitude, avec une planète vivante, un animal gigantesque qui navigue dans l'espace, sa masse et sa composition développent une atmosphère respirable à sa surface, bien que puante et dégueulasse.
Liza est envoyée par l'université pour rendre compte de l'expédition scientifique envoyée plusieurs mois avant, on va vite se rendre compte que tout a dégénéré.
J'étais très enthousiasmé au départ par la mise en place et les idées originales qui y sont développées, dans la lignée de ce qu'affectionne Serge Brussolo, fantaisiste et délirant et pourtant basé sur une logique implacable, une histoire de fous dans le même état d'esprit que la trilogie “Remparts des naufrageurs”. Mais je dois reconnaître que mon plaisir c'est assez vite estompé. Pourtant je n'ai rien à redire sur l'histoire, passionnante, des personnage attachants, un déroulement du récit efficace... mais
Serge Brussolo n'évite pas la surenchère au crade et à l'immonde et cela finit par être lourd et pesant aussi pour le lecteur, c'est un peu trop, on arrive vite à l'écoeurement, c'est le but recherché par l'auteur, mais cela finit par atteindre le plaisir de lecture. 192 pages de maladies de peau, de sueur, de graisse, de pustules, de nécroses... je ne suis certainement pas un passionné de dermatologie de l'extrême et la qualité indéniable de ce roman ne comble pas tout à fait l'aspect répugnant de son thème. J'ai trouvé que c'était un bon roman, mettant en avant l'imagination débordante de son auteur, mais le plaisir de lecture a été un peu gâché par cette surenchère fangeuse.

Je découvre ce roman de SF français grâce au site litteratureaudio.com. Je me suis offert ce petit plaisir littéraire en faisant du sport, au casque. L'intrigue est simple : une scientifique se voit confier une mission, aller inspecter une mission posée sur une planète vivante. Une planète animale. Une fois sur place le roman bascule dans un délire très construit où tout ce qui est terrestre est également humain. Au programme, rencontres, défrichage, mutations, sectes, conflits politico-scientifiques, orgies, cannibalisme. La course poursuite pour atteindre la navette de sortie est lancée. C'est intense, renversant, très très bien construit, malgré le propos complètement farfelu. Des phrases très fortes ressortent ici ou là. le virus de cette planète, ce sont les hommes. le pire des virus, c'est l'échec. À la fin, ils laissent à la dérive un monument dédié à la bêtise humaine. Furieusement actuel ! Merci au site pour cette belle découverte. Je repars pour un autre Brussolo !

Imaginez un animal gigantesque, en hibernation, à la dérive dans l'espace. Un animal-planète que l'on explore tel un astre inconnu. Une bête en boule sécrétant sa propre atmosphère et sa propre pesanteur. Son épine dorsale dessinant une chaîne de montagnes d'un millier de kilomètres, des verrues géantes formant des collines, les poils constituant des plaines d'herbe folle, la toison une véritable jungle. Un animal qui dort d'un sommeil millénaire en vivant sur sa graisse. Pour la jeune Liza, impossible d'ignorer qu'elle a posé les pieds sur un être vivant. le sol rose est souple et gras. L'atmosphère est lourde comme dans une serre. L'air sent l'animal, les effluves de transpiration. Contrôleur pour le ministère de la Recherche, Liza doit récolter les travaux d'une équipe composée de deux cents scientifiques dépêchés sur place pour étudier le spécimen. Mais, la quasi-totalité de ses membres est atteinte de mutations aussi étonnantes qu'horribles. Par exemple, certains de ces scientifiques bardés de diplômes se prennent pour des globules blancs et dévorent tout ce qui passe, prenant autrui pour des microbes à éliminer ! Divisés en clans, les scientifiques mènent une guerre permanente. Certains en symbiose avec l'animal ont perdu leur individualité et sont devenus des serviteurs de la bête. D'autres, veulent sa mort en lui infligeant un maximum de blessures. Il y a aussi les adeptes de l'écartèlement (amputation d'un organe pour continuer à vivre dessus à la dérive dans l'espace), les tenants de l'expansion etc. D'ailleurs, la bête-monde n'est-elle pas entrain de tomber malade… de mourir ?

Avec une précision toute scientifique, l'auteur dresse une carte anatomique à la fois délirante et répugnante. On retrouve les obsessions habituelles chez lui comme la claustrophobie, avec ici, une variante mémorable de « La Grande évasion » où la graisse aurait remplacé la terre. Les déplacements sur le corps démesuré de l'animal, ses manifestations physiques (une goutte de sueur provoque une avalanche liquide etc.), les rencontres avec les scientifiques dégénérés plus ou moins hostiles et leurs croyances fantaisistes rendent l'aventure palpitante. Mais surtout, Brussolo fidèle à lui-même va de plus en plus loin dans sa logique et termine son roman en apothéose.